Rédaction A l’Encontre
Samedi 24 janvier 2009, environ un millier de migrants ont quitté en masse le «Centre d’accueil temporaire et d’aide» (CPTA) de l’île Lampedusa (Italie) pour manifester, avec des habitants de l’île, devant la municipalité. La fuite a commencé spontanément, à 10h, selon les récits de la presse italienne. Aux origines de cette révolte, il y a l’exaspération des migrants (des Maghrébins avant tout) face à la dégradation de leurs conditions de vie, caractérisées par un avenir incertain et des conditions matérielles plus que précaires. Par des slogans tels que «Liberté, aidez-nous», les migrants revendiquent leur transfert dans d’autres «camps de rétention», afin d’échapper à la surpopulation qui caractérise le CPTA de Lampedusa. Ils demandent aussi la possibilité de rejoindre leurs familles dispersées dans toute l’Europe.
Les CPTA sont officiellement destinés à «garantir un premier secours» aux migrants africains (Afrique subsaharienne ou Maghreb) qui débarquent sur l’île, juste le «temps strictement nécessaire» – 48 heures au maximum – à l’identification des personnes et à la prise de décision sur leur sort par l’Etat italien.
Les migrants dénoncent toutefois une réalité bien différente. Un immigré de 29 ans, ayant un père qui réside en France, raconte au quotidien italien Il Manifesto son exaspération après 24 jours de rétention, alors qu’il aurait dû y rester 48 heures: «Nous ne pouvons plus vivre dans cette situation. Nous sommes tous entassés. Les installations sanitaires sont horribles. Dans notre chambre, il y a une telle puanteur qu’il est impossible de respirer». Dans un entretien accordé au quotidien milanais Corriere della Sera, le maire de Lampedusa, Dino De Rubeis, explique qu’en août 2008 1960 personnes se trouvaient dans le CPTA, malgré une capacité d’accueil maximale de 762.
Les habitants de l’île ont manifesté leur solidarité avec les migrants. En effet, ils s’opposent notamment la à décision du ministre de l’intérieur, Roberto Maroni (de la Ligue du Nord), de construire un nouveau centre de rétention. Ce choix de Maroni de «sur-concentrater» ce type de centre à Lampedusa relève évidemment d’une volonté visant à susciter des réactions à l’encontre des migrants. Les habitants affirment à la presse qu’ils «craignent que l’île devienne une prison à ciel ouvert».
Déjà 700 policiers se trouvent à Lampedusa. En installant cette nouvelle structure, le gouvernement italien souhaite accélérer les expulsions des migrants et affirme vouloir ainsi résoudre le problème de «surpeuplement» des structures existantes. Près de 31’700 personnes ont «débarqué» à Lampedusa en 2008 ; et des milliers ont trouvé la mort en mer.
Les camps de rétentions s’inscrivent donc pleinement dans une «gestion flexible et sélective des flux migratoires» entre l’espace Schengen et le reste du monde. Ils se doublent des accords de «sous-traitance» des migrants avec des pays comme la Libye qui reçoit des subventions de l’Etat italien pour construire des camps de rétention, camps dans lesquels les migrants africains noirs subissent les pires des traitements de la part de la police libyenne, sans parler d’un véritable «commerce de migrant·e·s» avec la police corrompue du Soudan. Ces accords sont aussi passés avec la Tunisie de Ben Ali, bien connue pour son respect des droits humains.
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