Brésil. Les vies noires comptent: l’urgence de la démilitarisation de la Police militaire

Par Gabriel Santos

«Qui fait confiance à la police? Je ne suis pas fou!»
Edivaldo Alves, Edi Rock

L’Institut de sécurité publique (ISP) a annoncé il y a 10 jours qu’en avril, 177 personnes ont été assassinées à Rio de Janeiro par la police militaire carioca. Ce chiffre est le plus élevé pour le mois d’avril en 18 ans. Et cela se produit en plein milieu de la pandémie. Les colonels de la Police militaire (PM) et les voix officielles de l’institution affirment que ces 177 morts étaient des morts de «marginaux». La Police militaire agit alors comme un «tribunal de rue». Il n’y a pas de procès. Elle définit le crime, définit les coupables, fixe la peine et indique qui sont les exclus.

L’utilisation du terme «marginal» est plus qu’un jeu de mots, c’est une construction politique qui cherche à déplacer ces jeunes assassinés vers un lieu qui légitime leur mort. Ceux qui sont considérés comme marginaux dans la logique formulée par l’État brésilien sont des hors-la-loi. Ils sont dangereux; ils représentent une menace pour les bons citoyens; ils doivent donc être «fusillés» pour maintenir l’ordre public. Après tout, personne ne se soucie de la vie des «marginaux» qui sont dangereux. Cette logique qui légitime ces morts fait partie de la manière dont le racisme se développe dans la société.

Ces dernières semaines ont vu une révolte noire aux États-Unis qui a pris des caractéristiques gigantesques et internationales par des manifestations de masse contre le racisme et par la devise «Black lives matter». Les protestations ont commencé après que le policier Derek Chauvin, ainsi que trois autres policiers, ait assassiné George Floyd.

La philosophe américaine Angela Davis souligne dans un de ses livres le risque de militarisation de la police américaine, tant par l’idéologie des initiatives venant du domaine militaire que par l’acquisition d’armes et d’équipements provenant de l’armée états-unienne.

João Paulo Mattos âgé de 14 ans

Au Brésil, nous avons vu, en mai, la PM assassiner des jeunes et des enfants; de nombreux Joãos [référence à João Paulo Mattos âgé de 14 ans et criblé de balles à Rio, le 19 mai, depuis un hélicoptère de la police militaire] sont éliminés. Ce dernier crime a suscité des manifestations et des discussions dans le pays. La Cour suprême fédérale a récemment interdit les actions dans les favelas de Rio pendant la période d’isolement sanitaire.

Dans notre pays, nous avons une force de police militarisée (la PM) qui est très meurtrière pour les jeunes Noirs. Le modèle de sécurité publique est basé sur la construction d’un ennemi interne qui doit être anéanti par des méthodes de guerre. Nous pensons que la discussion de ces deux thèmes est cruciale à l’heure actuelle, où nous constatons une croissance de l’agenda antiraciste.

Dans ce texte, nous cherchons d’abord à présenter, de manière brève et incomplète, le développement de la PM au fil des ans, afin d’aborder le rôle présent de la PM au Brésil ainsi que l’urgence de son programme de démilitarisation.

De l’Empire à la Première République, l’émergence de la police au Brésil

Le développement d’une police interne séparée des forces armées telles que nous les connaissons aujourd’hui est apparu vers le XVIIe siècle en France et, dans les années qui ont suivi, deux modèles, l’anglais et le français, sont apparus comme des pionniers et des exemples à suivre par les autres États-nations qui se sont formés en fonction du rôle que l’État assume pour garantir l’ordre public.

Le Royaume-Uni a développé une force de police unitaire, tandis que la France a développé un système étatique et centralisé, et a créé une force de police double, avec deux structures, qui ont des formations et des rôles distincts: une civile, la Garde nationale, et une militarisée, la Gendarmerie, qui est un modèle de sécurité individuelle des anciens seigneurs féodaux mis à jour pour les «temps nouveaux». Le Brésil, encore à l’époque coloniale, avait comme police une copie du modèle portugais, qui était influencé par le modèle français.

Lorsque le roi João VI est arrivé au Brésil en 1808, la garde de la police royale de Lisbonne est restée au Portugal. Il était nécessaire de créer une institution similaire dans ce pays. La Division militaire de la Garde royale de la police de Rio de Janeiro a ensuite été créée en 1809, sur le même modèle d’organisation que la Garde portugaise. Cette division militaire avait les mêmes costumes et les mêmes armes que ceux de son inspiration lusitanienne, avec des compagnies d’infanterie et une structure déjà militarisée.

Au fil des ans, des corps de police ont commencé à être créés dans les provinces de l’époque. Le Minas Gerais, en 1811, suivi par le Pará, en 1820, Bahia et Pernambuco, tous deux en 1825, ont créé des modèles de police inspirés de la division militaire de la Garde royale carioca – ainsi tous ces corps de police sont nés d’une manière militarisée.

L’émergence de la police n’a rien à voir avec une augmentation de la criminalité, une raison qui justifie aujourd’hui son action et son existence au fil des siècles. La police sert d’instrument pour le contrôle de la masse sociale, pas pour l’individu qui commet un crime. La masse sociale est précisément le danger qu’il faut contrôler.

La création de la première force de police brésilienne avait un objectif spécifique, celui de garantir la sécurité de la noblesse qui arrivait du Portugal. Sa fonction était de protéger les nobles et leurs biens. Mais pour la protéger, il fallait qu’il y ait quelque chose qui représente un certain danger pour ces nobles et, y compris, pour le propriétaire d’une petite parcelle de terre du propriétaire. Cette menace interne à la «paix et à l’ordre», outre les révoltes, se cristallise dans la chair et dans la figure de l’homme noir. De manière directe, la police est une institution qui naît pour le contrôle des groupes sociaux cibles, au Brésil les Noirs, et pour la protection des biens et de la vie de la noblesse et de l’élite oligarchique et esclavagiste. La crainte d’une révolte noire s’est emparée de l’élite esclavagiste. Ils craignaient que le Brésil ne devienne une nouvelle Haïti (1803).

L’esclavage avait une ses formes cruelles de déshumanisation: l’asservissement. Les Noirs victimes de la traite et soumis au travail forcé étaient réduits par l’élite esclavagiste au statut d’objets. Une inversion des valeurs s’est produite. Ces Noirs qui travaillaient face à la menace du fouet et du rondin sont devenus dangereux. Ils furent considérés comme une menace par ceux qui exerçaient la véritable violence. Le mythe raciste de l’homme noir comme violent, et dangereux apparaît lorsqu’il a seulement cherché à se libérer de la violence coloniale. Ce mythe est un visage du racisme qui s’étend sur plusieurs générations et prend des formes et des nuances nouvelles jusqu’à aujourd’hui.

Après la proclamation de la République en 1889, le nom de «militaire» a été ajouté au corps de police créé. Il est devenu connu sous le nom de Corps de police militaire. En 1891, avec la nouvelle Constitution, les États (anciennes provinces) sont devenus plus autonomes. De cette façon, les corps de police ont des particularités et des formations diverses dans leur organisation. Ces corps de police militaire ont reçu, selon la région, différentes dénominations, comme Bataillon de police, Régiment de sécurité et Brigade militaire. Mais ils ont toujours conservé le caractère militarisé.

L’ère Vargas

Avec le début du gouvernement de Getúlio Vargas (1934-1945 et 1951-1954), il y a eu des changements importants dans le rôle des forces de police, qui ont fini par répondre aux situations et aux luttes politiques à l’échelle nationale. Pour prévenir des révoltes comme celles qui ont eu lieu à São Paulo avec la révolte constitutionnaliste de 1932, des mécanismes ont été créés par l’Union pour freiner et contrôler l’augmentation du nombre de policiers et d’armes dans les États. Le chef de la police est désormais subordonné au ministère de la Justice, sous la supervision de la Présidence de la République. L’érosion de l’autonomie des États, qui s’est produite dans la sphère politique dans son ensemble, s’est également répercutée sur les corps de police

Avec la consolidation du Nouvel État et l’approbation de la Constitution, la Cour de sécurité nationale est créée pour les crimes de nature subversive et une division de la police en deux types: l’un pour l’activité policière (dans le rôle de garant de l’ordre) et l’autre pour l’activité militaire (à convoquer en temps de crise).

C’est à partir de cette nouvelle Constitution que nous voyons la police militaire se définir comme une force de réserve de l’Armée agissant pour la sécurité et le maintien de l’ordre interne de la Nation. Dans l’Estado Novo (créé en 1937, jusqu’en 1945), les acteurs des États eux-mêmes ne pouvaient pas prendre de décisions sur les actions de la police militaire, soumises au chef du gouvernement provisoire (Vargas).

Le nom de «Police militaire» n’est devenu officiel et de caractère national qu’en 1946, avec la fin de l’Estado Novo et la mise en place d’une nouvelle Constitution. À l’exception du Rio Grande do Sul, qui conserve jusqu’à aujourd’hui le nom de Brigade militaire pour sa police, tous les États du pays appellent leur force de police: Police militaire. Le texte constitutionnel dit: «Art. 183. La police militaire, instituée pour la sécurité intérieure et le maintien de l’ordre dans les États, les territoires et le District fédéral, est considérée, en tant que forces auxiliaires, comme une réserve de l’armée (…)».

La dictature militaire et la redémocratisation

Avec la dictature militaire (1964), nous assistons à une série de changements dans le fonctionnement des forces de police qui se poursuivent jusqu’à aujourd’hui. Il est à noter que certains chercheurs, comme Carlos Nazareth Cerqueira, affirment que la police militaire a joué un rôle dans le coup d’État dans certains États de la Fédération. En montrant leur participation en tant que force politique et influencée par l’armée.

L’arrivée de l’armée au pouvoir central de l’État brésilien a eu pour conséquence dans le fonctionnement de la police l’extinction des gardes civils, et des organisations similaires qui existaient dans les municipalités, ainsi que la création de l’Inspection générale de la police militaire (IGPM) qui est subordonnée à l’armée, en plus d’une classification hiérarchique unique qui organise maintenant la PM.

Une subordination complète de la PM à l’armée au pouvoir a été effectuée tant sur le plan organisationnel que dans le domaine politico-idéologique. Les bataillons de la Police militaire ont commencé à assimiler les élaborations, les thèses, les lectures politiques et les idéologies qui ont été développées dans les casernes. Une convergence idéologique entre ces deux instruments répressifs était en cours. La police militaire de l’État a commencé à avoir comme commandants des officiers de l’armée. Elle a servi à combattre les opposants au régime militaire. La doctrine de sécurité nationale, telle qu’elle est élaborée par les cadres de l’armée, est devenue une loi au sein de la PM.

Redémocratisation et gouvernements du PT

Après la redémocratisation (1985), nous avons eu le maintien constitutionnel de la PM et des Pompiers militaires comme forces auxiliaires et de réserve de l’armée. Il n’y a eu ni démocratisation ni changement dans la structure hiérarchique ou l’organisation interne de la PM, telles qu’elles avaient été façonnées sous la dictature militaire.

Nous faisons un saut dans l’histoire du Brésil et nous laissons derrière nous les gouvernements qui ont commencé l’application du néolibéralisme au Brésil. Et passons au début du XXIe siècle avec l’administration Lula (dès 2003).

Sous la seconde administration Lula (dès 2007-2001), le PRONASCI – Programme national de sécurité publique de la citoyenneté – est né, ce qui a signifié une grande avancée en matière de politique de sécurité publique au niveau fédéral par rapport aux gouvernements précédents. Cependant, c’est le président lui-même qui, par option politique, n’a pas avancé dans la construction d’un plan de Système unique de sécurité publique. C’est au cours de son second mandat que la loi 11.343/2006 – ou loi sur les drogues – a été instaurée, ce qui a eu pour conséquence néfaste l’augmentation significative de l’incarcération des jeunes noirs et des jeunes femmes noires dans le pays.

Ont été également mises en place des Unités de Police de Pacification (UPP) dans l’État de Rio de Janeiro par le gouvernement de ce dernier et avec le soutien du gouvernement fédéral, d’abord avec Lula et ensuite avec Dilma Rousseff. Cette mesure militarise les favelas de Rio et la vie de leurs habitants. Cette politique n’a servi qu’à renforcer le statut des «sujets noirs» en tant que «sujets marginalisés». Et à rendre nécessaire une action armée par le biais d’une occupation militaire qui criminalise leurs lieux d’habitation.

La PM et la criminalisation des corps noirs

Les policiers brésiliens sont les plus grands tueurs au monde. Parmi les personnes tuées par la police brésilienne, 79,2 % sont noires et 72,6 % sont jeunes. Les taux élevés de violence causés par la PM, en particulier, montrent clairement qu’il ne s’agit pas seulement de comportements individuels problématiques ou de problèmes occasionnels, mais d’un problème institutionnel qui trouve ses racines dans une culture militarisée et dans les protocoles d’action de combat au Brésil.

La violence, la torture, les mauvais traitements, les meurtres et l’impunité sont devenus des règles dans le système de sécurité publique brésilien, en plus de la sélectivité de la répression policière qui atteint la périphérie en tant qu’espace urbain et la jeunesse noire en tant que sujet social.

Il est courant d’entendre que la PM est l’héritière de la dictature, qu’elle en porte directement les stigmates et qu’elle est donc incompatible avec un État de droit démocratique. Je crois cependant que l’actuelle PM est l’héritière directe de la division militaire de la Garde royale, c’est-à-dire l’héritière de l’époque de l’esclavage et qu’elle apporte avec elle les expressions du racisme qui a façonné le Brésil.

Si au XIXe siècle, les forces de police de l’époque avaient défini des fonctions qui étaient la garantie de la propriété des élites, et voyaient dans les corps des Noirs les sujets qui menaçaient le maintien de l’ordre, peu de choses ont changé pour les forces de police au Brésil au XXIe siècle.

Les corps des Noirs ont toujours été criminalisés, considérés comme dangereux, et leurs expressions culturelles ont subi le même sort. Si auparavant, il incombait directement aux esclavagistes de réprimer les esclaves, au cours des années et avec l’abolition (1888), l’État a commencé à réprimer et à criminaliser les expressions religieuses et culturelles du peuple noir, ainsi qu’à surveiller son corps et à le punir.

L’espace urbain est devenu le centre d’action des forces de police. L’État, après l’abolition, a nié et complètement abandonné la population noire. Les corps noirs qui transitaient dans des espaces qui n’étaient pas considérés comme leur place (lire les bidonvilles et les zones périphériques de la ville) ont souffert de la répression policière. La relation entre l’observation et la punition des corps noirs, avec l’espace urbain, est représentée dans l’un des plus beaux écrits de notre littérature dans les pages écrites par Jorge Amado dans Capitães de Areia (Capitaines des Sables).

Démilitarisation de la PM: pour un modèle de sécurité publique antiraciste

Tout au long de son histoire, la police brésilienne a toujours eu une double assignation. Il s’agit à la fois d’une force de police et d’une force militaire. Tout au long de notre histoire, elle remplit beaucoup plus la seconde. En matière de sécurité publique, cette police a une double fonction, celle de la sécurité intérieure et celle de la sécurité nationale.

Au cours des dernières années, une discussion s’est développée au sein des mouvements sociaux sur le rôle de la police militaire et la nécessité de sa démilitarisation. Certaines propositions de loi ont été présentées à ce sujet.

La première est la défense de l’unification de la police civile et militaire en une seule force de police. La PEC 430 de 2009 (PEC: proposition d’amendement de la Constitution) présentée, aussi incroyable que cela puisse paraître, par Celso Russomano (PP-Parti des Progressistes-São Paulo), prône la démilitarisation du service d’incendie et l’unification des deux forces de police. En ce qui concerne spécifiquement la démilitarisation de la police militaire, nous avons le projet d’amendement à la Constitution 51/2013, rédigé par le sénateur Lindbergh Farias (PT-Rio de Janeiro) qui prône une démilitarisation et une démocratisation de la police militaire.

La défense de la démilitarisation de la police militaire est l’une des règles les plus importantes et les plus immédiates en matière de droits de la population noire au Brésil. Cependant, nous pensons que ce n’est pas une tâche facile, car comme nous l’exposons dans ce texte, depuis leur origine, les forces de police ont vu leur caractère militarisé dans notre pays. Procéder à la démilitarisation reviendrait à mettre en place un type de société qui n’a pas eu sa place dans notre histoire. Mais cela ne suffit pas à résoudre le problème.

Parler sérieusement de la démilitarisation de la PM, c’est essentiellement parler d’un autre modèle de sécurité publique, ces deux questions sont des lignes directrices qui vont de pair et ne peuvent être séparées. Car même une police qui ne s’organise pas de manière militaire exerce des fonctions répressives. Et ces fonctions répressives, sans changement structurel, finissent par se tourner vers ceux qui en ont été historiquement les cibles: les corps noirs et leurs territoires.

Au fil des ans, nous avons un modèle de sécurité publique qui se développe non pas par selon l’optique de politiques publiques, mais par celle du maintien de l’ordre. L’idéologie de la sécurité nationale, la logique du fonctionnement de l’ennemi intérieur et la politique de guerre contre la drogue approfondissent cette situation. Selon cette logique, les corps noirs sont des criminels dangereux et potentiels. Les lieux où il y a beaucoup de corps noirs ont besoin d’un contrôle social (lire militarisation) et l’anéantissement de l’ennemi est autorisé, comme dans une guerre. Ainsi, les favelas et les périphéries sont des cibles constantes des opérations. L’État agit dans ces zones non pas pour garantir des droits sociaux, mais pour garantir un contrôle armé, comme le développe Achille Mbembe. Nous avons une guerre contre les corps noirs, la nécropolitique se développe.

Penser une nouvelle politique de sécurité publique qui soit antiraciste, c’est repenser la politique de guerre contre la drogue et, en retour, sa légalisation et sa dépénalisation. C’est comprendre comme plusieurs points forment une même broderie, et qu’il est nécessaire de les défaire pour créer quelque chose de nouveau.

Frantz Fanon, dans l’une de ses œuvres, a développé que la violence en Algérie était enracinée dans la colonisation et la domination française sur le pays. Nous pouvons dire que la violence au Brésil a également ses racines dans le colonialisme et le racisme structurel, ainsi que dans le néolibéralisme. Depuis l’avènement du modèle néolibéral, nous constatons une croissance exponentielle du nombre de morts violentes dans le pays, ainsi que du nombre de personnes emprisonnées pour divers crimes. Penser à un modèle de sécurité publique antiraciste, c’est penser à un modèle qui fait face au néolibéralisme.

Discuter de la sécurité publique, c’est essentiellement qui meurt, pourquoi l’on meurt, et qui a le droit légal de tuer. C’est un guide du droit à la vie pour les jeunes Noirs. Cependant, nous ne pouvons penser à tout cela que si ce nouveau modèle de sécurité publique est réalisé par de nombreuses mains, c’est-à-dire d’une manière démocratique, participative et populaire. Il est difficile de croire que les institutions de l’État brésilien, volontairement forgées par une formation socio-historique raciste, imposeront des changements antiracistes et structurels. C’est précisément en cela que réside le caractère transitoire de la politique de démilitarisation qui doit être défendue maintenant et tout l’effet domino qu’elle déclenche.

Nous savons cependant qu’à l’heure actuelle, la possibilité de démilitarisation de la PM n’est pas à l’ordre du jour. Nous sommes face au gouvernement Bolsonaro, un gouvernement fasciste de suprématie raciale – comme l’a montré la vidéo donnant à voir une réunion ministérielle – qui cherche à cadenasser le régime et bénéficie d’un grand soutien dans les bataillons de police militaire.

Lorsque vous jouez au football, vous ne choisissez pas la pelouse de l’équipe adverse. Et en politique, les conditions de la lutte des classes ne sont pas choisies. Les défis actuels et futurs sont énormes. Mais ils commencent à se manifester et doivent être résolus par les actions en cours. Les mouvements populaires et la gauche brésilienne ont un immense défi à relever, mais ils peuvent et doivent avancer. L’approche de la classe par des actions de solidarité pendant la pandémie, le travail dans les territoires, les cours populaires est une possibilité.

Plusieurs collectifs engageant des actions locales dans les territoires discutent de la sécurité publique, des mesures alternatives et de la promotion d’actions qui ont beaucoup à apprendre à la gauche socialiste. La démilitarisation est urgente, car nos vies ne peuvent pas attendre, c’est pourquoi il est nécessaire d’avoir des débats et des réflexions sur le sujet, ainsi que sur d’autres modèles de sécurité publique. Le moment présent exige une capacité à traiter diverses questions avec deux objectifs centraux: l’accumulation de la force sociale et la formation des cadres. Dans les deux cas, nous devons donner la priorité à l’importance de la vie des Noirs, ce qui implique de discuter de la démilitarisation. (Article publié sur le site Esquerda online, en date du 9 juin 2020; traduction rédaction A l’Encontre)

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