Par Solidaires International
Nuovo Trasporto Viaggiatori (NtV) est une société privée italienne, créée pour concurrencer le service public ferroviaire (Trenitalia – créée en 2000 cette entreprise est une filiale à 100% du groupe d’Etat FS – FS: Ferrovie delle Stato Italiane SpA). [Les trains NtV sont connus sous le nom: Italo.it]
La SNCF [Société nationale des chemins de fer français, entreprise ferroviaire publique créée en 1937] est actionnaire de NTV [à hauteur de 20%], ce qui illustre le Monopoly auquel s’adonnent les entreprises ferroviaires historiques, avides de prendre des «parts de marché» dans les autres pays européens [1].
C’est bien entendu au nom de «la libre concurrence», du «marché libre», que NtV s’est implanté dans le ferroviaire italien. Mais confronté à de sérieuses difficultés économiques, les actionnaires privés interpellent l’Etat pour qu’il intervienne contre Trenitalia et FS. Les patrons de NtV n’ont aucune honte à dénoncer Trenitalia qui casse certains prix et FS qui exige de forts péages… ce qui n’est que la mise en œuvre du «libéralisme ferroviaire» dont ils se réclament par ailleurs.
Une fois de plus, le patronat veut privatiser les bénéfices et socialiser les pertes! Le sombre avenir de NtV a des conséquences sur le personnel de l’entreprise ferroviaire. Après avoir contribué comme d’autres directions d’entreprise à affaiblir les droits de tous les travailleurs et travailleuses du rail, les patrons de NtV pourraient bien sous peu abandonner le ferroviaire et aller voir ailleurs pour engranger plus de profits.
Des mobilisations
Mi-septembre, la Coordinamento Autorganizzazato Trasport (CAT) et l’Unione Sindacale di Base (USB), soutenus par la Confederazione Unitaria di Base (CUB) appelaient les cheminot-es à la grève. Les revendications portaient sur trois thèmes: la retraite, les horaires de travail et les modifications réglementaires qui pénalisent la sécurité et détériorent les conditions de travail. La «commission de garantie» (qui garantit surtout les droits des patrons et du gouvernement!) a déclaré ce mouvement illégal parce qu’il concernait plusieurs journées. Le 18 octobre, c’est l’Organizzazione Sindicati Autonomi e di base (OR.S.A.) qui organise une grève contre l’abolition d’un article de loi qui prévoit la possibilité de réintégration des salarié-es abusivement licencié-es. (Extraits du bulletin n°4 du Réseau Rail Sans Frontière, transmis par l’Union syndicale Solidaires)
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[1] En 2013, NTV revendique 2 millions de passagers transportés par Italo. Qui a joué un rôle dans la restructuration coûteuse des gares. Son but: capter quelque 25% du marché. Le rythme de croissance et surtout des profits n’est pas celui qui était prévu. Déjà en février 2013, le quotidien Il Fatto Quotidiano indiquait les pertes de la société NTV: 83 millions d’euros. NTV a été créé par l’ex-patron de Ferrari: Luca Cordero di Montezemolo. En date du 24 avril 2013, la SNCF titrait son message adressé à NTV ainsi: «Bravissimo Italo». Depuis cette date, face à ces pertes et à une dette croissante de la NTV, la NTV cherche de l’argent auprès de ses actionnaires et dilue donc la valeur actionnariale aux mains des actionnaires initiaux. La perte de 83 millions d’euros en 2012 impliquait une diminution de 17 millions d’euros de la valeur nette des investissements de la SNCF (voir son Rapport de 2012, en page 76). En 2013, la perte a été de 156 millions et la dette se monte à 781 millions. Le marquis Montezemolo a quitté le train pour décoller avec Eithad. Par contre, le nouveau conducteur de NtV, Antonnello Perricone, a insisté sur le combat que doit mener NtV. Dans ce combat, faire passer 300 salariés sur 1000 à la cassa intergrazione (chômage technique avec quelque entre 700 et 850 euros par mois d’allocation) est logique, dans cet exemple unique en Europe où sont mises en concurrence, dans un seul pays, deux compagnies de train à grande vitesse. NtV demande, en même temps, une libéralisation plus grande des règles sur le transport ferroviaire en Italie. NtV s’affronte à Frecciarossa (de Trenitalia), la ligne grande vitesse de FS qui est efficace sur les grands axes jusqu’à Naples et même plus au sud. Le reste du réseau «régional» est de plus en plus délaissé, dans tous les domaines (infrastructures, maintenance, matériel…).
Montezemolo de la famille des Agnelli dispose, lui, d’un réseau économico-politique en Italie et d’un réseau international dans les compagnies aériennes, plus spécifiquement avec Etihad Airways, la compagnie très concurrentielle des Emirats arabes unis. Il décolle avec l’accord Alitalia-Etihad, alors qu’Italo risque de mal atterrir tout en ayant reçu de l’aide étatique, sous diverses formes. (Réd. A l’Encontre)
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