Poutine et les 40 oligarques

Vladimir Poutine et Alexei Miller, PDG de Gazprom

Par Isabelle Mandraud

Sous l’immense dôme du palais dit du Sénat, qui abrite, au cœur du Kremlin, ses bureaux présidentiels, Vladimir Poutine a réuni, jeudi 21 septembre, l’élite russe des affaires. Soit un tour de table à 226 milliards de dollars (192 milliards d’euros), comparable, peu ou prou, aux recettes du budget de l’Etat, ou encore au stock d’or de la Banque d’Angleterre. Sur les 40 chefs d’entreprises publiques et privées présents, avaient en effet pris place, ce jour-là, 29 milliardaires répertoriés dans le classement mondial 2017 par Forbes, dont 9 figurent dans le Top 100 des plus grosses fortunes de la planète.

Face au président russe et à ses conseillers, le magnat Alexeï Mordachov (17,5 milliards de dollars, acier et investissements) côtoyait Leonid Michelson (18,4 milliards, gaz et industrie chimique), non loin de Mikhaïl Fridman (15,2 milliards, pétrole, banques et télécoms) tandis que, de l’autre côté de la table, Roman Abramovitch (9,1 milliards, acier et investissements) coudoyait Vagit Alekperov (14,5 milliards, pétrole) et qu’Oleg Deripaska (5,1 milliards, aluminium et services) devisait avec Mikhaïl Goutseriev (6,3 milliards, pétrole et immobilier), pour ne citer que quelques-uns des présents.

Entre eux s’intercalaient une douzaine de «modestes» millionnaires et plusieurs patrons d’entreprises publiques parmi les mieux rémunérés du pays, tels le directeur général de la banque VTB, Andreï Kostine, le PDG du groupe Gazprom, Alexeï Miller, ou encore le redoutable patron de l’entreprise pétrolière Rosneft, Igor Setchine, dont la puissance, en Russie, vaut bien toutes les richesses. Et ce n’est pas Vladimir Evtouchenkov (3,5 milliards, télécoms), assis en bout de table, qui dira le contraire. Fin 2014, ce dernier a passé trois mois en résidence surveillée avant que Bachneft, l’entreprise pétrolière qu’il détenait, ne soit finalement absorbée par Rosneft.

Un cénacle fermé

En tout, 40 oligarques ont ainsi été convoqués à la table du Kremlin. Dans ce cénacle fermé, aucune femme n’était représentée. Seule Elvira Nabioulina, la présidente de la Banque centrale de Russie, se tenait coite sur les bancs des conseillers et ministres.

Une telle réunion, dans ce format, n’avait eu lieu qu’une seule fois auparavant, en 2015. «Nous ne nous rencontrons pas souvent…», a reconnu Vladimir Poutine, en ouvrant la discussion destinée, selon lui, à maintenir «les tendances positives» enregistrées ces derniers mois dans l’économie russe. «La récession a été surmontée», a-t-il fait valoir, évoquant l’inflation retombée à un niveau «historiquement faible». «Etant donné que des restrictions extérieures – les sanctions – existent, et peuvent même être élargies, j’aimerais connaître votre point de vue, vos évaluations et vos propositions», a poursuivi le président russe.

Qui a sans doute ainsi inauguré la première séance publique de mobilisation du monde des affaires pour sa réélection, en mars 2018. (Publié dans Le Monde daté des 1er et 2 octobre 2017)

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