Etat espagnol. Ça commence le 20 décembre! Changer pour vivre sans crainte

Albert Rivera (Ciudadanos), Pedro Sanchez (PSOE), Pablo Iglesias (Podemos): quel «changement» en débat, le 1er décembre?
Albert Rivera (Ciudadanos), Pedro Sanchez (PSOE), Pablo Iglesias (Podemos): quel «changement» en débat, le 1er décembre?

Par Manuel Garí

Les forces du changement dans l’Etat espagnol se trouvent devant la même situation que Daniel Lefebvre, le directeur de l’école enfantine d’un quartier à la marge d’une localité française dévastée par la crise, la rapine capitaliste ainsi que la routine inefficace des vieux syndicats comme des partis politiques ou encore la négligence dédaigneuse d’institutions politiques conçues pour contenir le conflit social et non pour résoudre les problèmes qui assaillent les gens.

L’enseignant est le personnage principal, héros ordinaire, d’un film excellent de Bertrand Tavernier dont le titre – Ça commence aujourd’hui [1999] – paraphrasé partiellement dans le titre de l’article auquel s’est ajouté le sous-titre qui résume les objectifs du changement que nécessitent, à mon avis, les classes subalternes et les peuples de l’Etat espagnol pour 2016: «vivre sans crainte.»

Vivre sans crainte: du chômage, de perdre sa maison ou l’accès aux soins, de la guerre, de la terreur et de la violence (qu’elle soit de genre ou institutionnelle), de ne pas parvenir à boucler la fin de mois. La crainte: de gouvernants qui décident de nos existences sans nous demander notre opinion, de lois muselières et de droits qui se réduisent comme peau de chagrin suite aux décisions d’un Etat toujours plus autoritaire, de tribunaux qui empêchent l’autodétermination des peuples, d’une Union européenne (UE) conçue à la mesure des banques, d’un changement climatique qui, si le réchauffement climatique n’est pas stoppé, conduira aux famines, à la souffrance et aux conflits.

Ce n’est pas demander beaucoup, ce ne sont que des choses simples qui forment ce «vivre sans la crainte», dans «l’inquiétude quotidienne» qui pèse aujourd’hui sur des millions de personnes dans notre société. Des choses simples qui affectent les personnes et qu’elles comprennent, des choses éloignées des jeux de mots vides qui remplissent tant de pages et occupent tant de débats propres aux élites «éclairées» et politisées, mais bien loin des gens.

La période que nous vivons

Depuis plusieurs années nous vivons une crise de régime limitée mais réelle. Elle s’exprime par la perte de crédibilité et de légitimité des partis (PP et PSOE) qui ont soutenu en commandite la voûte de la Constitution post-franquiste (adoptée en octobre 1978) et des politiques néolibérales de l’Union européenne. Le 15M [15 mai 2011: Mouvement des Indignés] a ouvert un cycle de mobilisations sociales sans lequel il n’est pas possible de comprendre ni la contestation des partis du système (PP et PSOE), ni l’apparition de nouvelles forces politiques. En parallèle, la mobilisation de masse en faveur de l’indépendance en Catalogne a crû suite aux divers obstacles dressés par les appareils du régime devant la revendication du droit à décider.

Mouvement social, octobre 2011
Mouvement social, octobre 2011

Une situation de mobilisation sociale qui, dans les deux cas, a cédé la voie à l’illusion et à l’espoir en l’action institutionnelle qui a crû lors du cycle électoral qui, dans l’ensemble, s’achève le 20 décembre 2015 [date des élections générales]. Des mobilisations qui présumaient d’un processus de politisation massif ayant donné du souffle à un cycle politique qui ne culminera pas le 20 décembre et qui probablement se poursuivra autant en vue des prochaines échéances électorales au Pays basque et en Galice que lors des très probables nouvelles élections en Catalogne [1], ainsi que lors de la législature post-20 décembre 2015 avec des Cortes (assemblée législative) aux équilibres instables.

Bien sûr, les mobilisations sociales retrouveront à nouveau les rues si le mouvement social parvient à retrouver son autonomie et sa voix propre, quittant son attitude attentiste face à ce qui se passe dans la sphère électorale et par délégation de son action à des seuls élus. Depuis 2011, s’est ouvert et refermé un cycle de mobilisation social et un autre, électoral. Toutefois, le cycle politique général demeure ouvert. Podemos, les candidatures d’unité populaire et les gouvernements municipaux pour le changement sont les agents politiques qui peuvent encourager au changement avec un C majuscule.

Quel changement?

Qu’entend-on par ce terme? Quel en est le contenu? Comment nous le déterminons, quels éléments choisissons-nous et plaçons en priorité? Pour répondre à ces questions, je crois que nous devons partir d’un diagnostic [nous renvoyons, pour plus de détails, à l’entretien de l’auteur avec Katarina Sergidou, publié sur ce site] – obligatoirement subjectif – de «l’état de la question». Il peut s’effectuer avec des outils analytiques disponibles et, dès lors, établir des propositions sur: «quel type de changement est nécessaire ?»

Le 25 octobre 2014, dans un article qui portait le titre de Un país por rehacer [Un pays à refaire, traduit en français sur ce site] publié sur ce même quotidien en ligne à la lueur de l’Assemblée citoyenne de Podemos [le 18 octobre 2014] à Vista Alegre, j’affirmais que «nous avons le même dilemme que devant une maison en ruine. Boucher les trous ou reconstruire. Changer la Constitution ou changer de Constitution. Remâcher des formules caduques – néolibérales ou keynésiennes – ou chercher d’urgence des nouvelles alternatives non-capitalistes».

Dans ce contexte, je proposais que «la feuille de route comporte donc quatre éléments: 1° une victoire électorale; 2° la mobilisation et pouvoir populaire; 3° un programme de rupture démocratique et de majorité sociale; 4° et un gouvernement à son service, capable d’engendrer une nouvelle Constitution.»

Quelque chose a-t-il changé depuis lors dans la situation des classes subalternes ou au sein même du régime? Pas du tout. En revanche, il y a eu des modifications sur le plan subjectif. Il s’agissait d’une période au cours de laquelle existait une corrélation parfaite entre proposition et appui électoral à Podemos. Une correspondance entre la radicalité démocratique et sociale du discours anti-néolibéral de Podemos qui réalisait une nouvelle transversalité politique autour des problèmes centraux qui affectaient la majorité sociale et les intentions de vote en faveur de la nouvelle formation. Une adhésion électorale qui s’exprimait dans les sondages qui la situaient en position de première ou de deuxième force dans la perspective des élections législatives.

Ensuite, le secteur populiste de gauche [autour du noyau de direction de Pablo Iglesias, le terme fait référence aux conceptions de feu Ernesto Laclau] a transformé le projet Podemos en une simple machine de guerre électorale. Cela a lancé la direction Podemos dans la recherche de l’El Dorado électoral, le mythique centre politique.

Ce processus impliquait de nombreux virages et dérapages dans les discours et le programme. Ainsi la contradiction qui faisait le plus sens était considérée comme étant celle entre le «vieux et le nouveau». Ou encore était laissée de côté une grande partie des propositions inscrites dans l’ADN de la nouvelle formation. La dérive a conduit vers des propositions régénérationistes (rénovatrices), accompagnées d’une perte de fraîcheur ainsi que par des difficultés importantes pour la participation démocratique et active des personnes engagées au sein des cercles de base.

Le résultat, connu de tout le monde. Face à la réaction des partis du régime [PP et PSOE] et à la création, dans des locaux connus des firmes de l’Ibex 35 [principal indice de la Bourse de Madrid], d’une pièce de rechange jeune, régénérationiste et d’ordre: le parti populiste de droite Ciudadnos [voir l’article sur ce site en date du 3 décembre 2015], Podemos va aborder les élections avec des perspectives étriquées. Elle devra les surmonter dans le cadre de la campagne électorale, et suite au 20 décembre, afin de pouvoir atteindre le but et les fins qu’elle s’est fixés lors de sa naissance: gagner les élections générales. De là, il s’agit de déployer des propositions.

Les vecteurs du changement

Le changement nécessaire (et possible si un nombre suffisant de soutiens pour modifier l’actuel rapport de forces est obtenu) qui devrait se traduire dans le programme et l’action du gouvernement possède deux vecteurs dans la proposition originelle, initiale, de Podemos:

Un tournant dans les orientations de politique économique qui mette un terme: aux mesures d’austérité, à la discipline budgétaire imposée par la Commission européenne, à l’introduction de la logique du profit privé dans toutes les «niches» du marché au moyen de privatisations décidées par les institutions, à un modèle productif écologiquement insoutenable et qui implique, en outre, du point de vue économique, de graves malformations, métastases et carences.

Il faut mettre un terme aux politiques: qui produisent la souffrance, qui empêchent une véritable création d’emploi en quantité nécessaire et en qualité, qui entraînent une distribution injuste des revenus et des richesses au profit d’un capitalisme confiscatoire et extractiviste, qui favorisent un modèle énergétique fondé sur des sources d’énergie fossile qui, elles, dépendent de l’extérieur et fortement polluantes, qui constituent une menace pour la biosphère et, par conséquent, pour la vie humaine.

Cela suppose de mener une politique publique active directe dans l’économie, laquelle ne pourra pas se réaliser: si est maintenu le pouvoir d’oligopole des entreprises énergétiques/électriques et financières; si l’on poursuit le processus de vider les finances publiques (par exemptions fiscales); si survivent des lois comme celles de «réforme du travail». Le plus tôt possible, le changement requerra une reprise en mains publiques des entreprises qui contrôlent les marchandises stratégiques: énergie et argent; une réforme fiscale qui inverse la logique actuelle; une législation du travail qui assure les droits aux classes laborieuses face à un patronat vorace.

1974-1978: le roi Juan Carlos Ier et Franco
1974-1978: le roi Juan Carlos Ier et Franco
Le roi signe la Constitution de 1978
Le roi signe la Constitution de 1978

L’initiation d’un processus constituant (plus justement, il s’agirait de parler de processus au pluriel eu égard à la diversité plurinationale qui existe au sein de l’Etat espagnol) qui nous dote d’un nouvel accord de et pour les citoyen·nes, de et pour les peuples. L’architecture des Pactes de la Moncloa (1977) et de la Constitution de 1978 a été la réponse des élites post-franquistes – de connivence avec les représentants de la gauche majoritaire du moment (PSOE et PCE) – face aux nécessités et revendications existantes. Elle garantissait un objectif double: donner peu (de substantiel et exigible) pour recevoir beaucoup (un pedigree démocratique), autrement dit concéder pour contenir.

Par conséquent, si le processus entraîna effectivement de nouvelles libertés et des droits, ils ont été limités dès le départ et maintenu «sous contrôle». Ce processus de «transition» est loin de constituer un pacte de cohabitation entre égaux et libres. Le processus a produit un cadre politico-juridique dont la fonctionnalité a été d’éviter que le changement n’acquière l’étendue et l’intensité nécessaires. Mécontentement et démobilisation du côté populaire; hégémonie et impunité pour l’oligarchie économique et la caste politique. Voilà l’argile réelle dont est issue toute l’actuelle poussière.

Le nouvel accord qui peut fonder la cohabitation et un projet commun exige un processus participatif de l’ensemble de la société, une liberté totale de décider et une rupture démocratique qui brise les cadenas de la Constitution de 1978 et conduise à une nouvelle structure institutionnelle. Cela contribuera à l’élaboration d’un nouveau discours face à la mystification de celui qui domine à propos de la Transición. Ce nouvel accord pourra bâtir une nouvelle légitimité, libre des résidus franquistes. Il pourra laisser présager un nouveau cadre qui au lieu d’empêcher le changement social et économique l’encouragera.

La simple réforme constitutionnelle peut fonctionner comme anabolisant pour légitimer à nouveau le régime ou de calmant face à certaines revendications plus conjoncturelles. Mais elle ne pourra pas soigner la maladie et les problèmes qui réapparaîtront sous la forme d’une version malheureuse du jour de la marmotte d’un autre film: Un jour sans fin [dans lequel le protagoniste, joué par Bill Murray, est condamné à revivre la même journée des dizaines de fois].

La Constitution dont nous avons besoin est de nature bien différente de celle qui est aujourd’hui en vigueur: libre autodétermination des nations [Catalogne, Euzkadi…]; défense défensive et non offensive, neutralité, déconnexion et dégagement de l’appareil militaire de l’OTAN ainsi qu’un recouvrement de la souveraineté sur les bases militaires [depuis les accords de 1953 entre l’Espagne franquiste et les Etats-Unis, il y a plusieurs bases américaines sur sol espagnol]; un système électoral totalement proportionnel des suffrages et de la population [le système électoral espagnol, basé sur la loi d’Hondt, favorise les deux grands partis au détriment de forces plus petites ou à l’ancrage territorial particulier, en Galice ou au Pays basque, par exemple]; l’initiative législative et un référendum contraignant; des droits garantis et exigibles à un revenu minimum, au travail, au logement, aux soins, à l’éducation, à la sécurité et à la protection sociale. Je souligne les mots «droits exigibles» devant des tribunaux.

Qui et où?

Le changement que j’ai décrit ci-dessus est-il possible avec un gouvernement du PP, ou d’une coalition de ce dernier avec Ciudadanos ou encore une grande coalition avec le PSOE? La réponse évidente est non. Le PSOE, avec ou sans Ciudadanos, pourrait-il se mettre à la tête d’un gouvernement du changement? Je ne le pense pas. Le PSOE a disposé de suffisamment d’occasions pour redresser le cap. Il n’existe pas signes dans son programme et son discours qui nous indique qu’il le puisse [sans mentionner sa sociologie dirigeante et institutionnelle]. Les formules d’alternance connues ne sont déjà plus utiles. J’écarte également une quelconque formule de collaboration entre les forces de changement (Podemos et autres) avec le PSOE au sein d’un gouvernement. Jeter le PP hors du gouvernement est nécessaire mais insuffisant. Il sera tout aussi nécessaire et tout autant légitime, si l’exige et l’autorise le résultat électoral, d’empêcher un gouvernement de droite et de rendre possible, après négociations, l’investiture socialiste, que cela soit d’une manière simple, sur le «modèle portugais» [le Parti communiste et le Bloc de gauche ont négocié un accord pour soutenir de manière conditionnelle, depuis ses positions au sein du parlement, un gouvernement du PS (Antonio Costa), qui s’inscrit son programme dans le cadre contraignant des «règles» de l’UE; la droite vient de soumettre le programme de gouvernement à une motion de censure – le 1er décembre 2015 –, motion rejetée par le Bloque de gauche et le PCP].

Mariano Rajoy. Son credo: «il n'y a rien à changer»
Mariano Rajoy. Son credo: «il n’y a rien à changer»

Pour refaire le pays, il est nécessaire d’avoir à l’esprit qu’il n’y a pas de changement sans un changement de gouvernement. Un gouvernement qui renvoie à un programme et ce dernier est un engagement devant l’électorat auquel est proposé un modèle de société. Son élaboration dépend de la délibération collective de ceux qui encouragent au changement. Les sondages d’opinion [obsession d’Iglesias qui en fait le support du «sens commun»] ne sont pas utiles pour élaborer un projet de société. Ils le sont, au mieux, pour détecter les possibilités et les difficultés de mettre en œuvre le programme. Mais, ne l’oublions pas, le programme est également un catalyseur de l’enthousiasme et de changements de la conscience sociale.

La précondition pour un gouvernement du changement est qu’il y ait une nouvelle corrélation des forces sociales, politiques et électorales au sein de laquelle les forces du changement soient hégémoniques. Car le gouvernement du changement devra être un gouvernement courageux et qui dispose d’une feuille de route claire face aux scénarios différents qui se présenteront, de sorte que ses jambes ne tremblent pas devant la Troïka [allusion à l’attitude d’Alexis Tsipras en Grèce] ou devant ses «alliés» dans le pays même. Il se doit de compter avec un peuple organisé, mobilisé en faveur du changement et qui soit exigeant. Cette mobilisation populaire – et pas diverses astuces politiques – constitue le meilleur atout dans les mains d’un gouvernement du changement.

Comment? Le facteur organisation, la stratégie d’unité populaire

Les forces du changement sont plurielles et diverses. La carte politique varie d’après les nationalités et parfois même les villes. A côté de Podemos, de nouveaux acteurs politiques sont apparus, comme les candidatures locales d’unité populaire et les gouvernements municipaux pour le changement [Madrid, Barcelone, Saragosse, Cadix, etc.]. Des partis et organisations politiques de gauche anciennes existent toujours. Leur contribution est nécessaire. Aucun parti ne représente l’ensemble du peuple. Cela n’est ni possible, ni même désirable suite à l’expérience stalinienne [le «parti» qui se dit le seul représentant de la «classe ouvrière», ou le parti unique en URSS et ailleurs, comme à Cuba]. Mais un facteur aussi important que le précédent réside dans l’existence de multiples formes d’organisation sociale que tissent les réseaux des mouvements populaires.

En raison du rapport de forces (électoral selon les sondages, mais également et de manière déterminante, celui qui existe entre les classes sociales), il est possible que le 20 décembre 2015 ne soulève pas la tempête à laquelle nous pouvions nous attendre/rêver, il y a quelques mois. Mais rien ne sera pareil que le jour d’avant.

Et, surtout, le processus de construction d’un bloc politique et social alternatif au dominant sera renforcé, de nouvelles possibilités s’ouvriront. Ce qui est important dans une période qui sera probablement de grande volatilité politique.

Manuel Garí
Manuel Garí

Dans ces conditions, un gouvernement du changement est-il possible? Dans un mois, les urnes le diront. A moyen terme, après le 20 décembre, un tel gouvernement sera possible si débute un processus qui se caractérise par l’encouragement à des politiques d’unité d’action entre les forces de gauche et l’unité populaire au-delà du périmètre des partis avec pour objectif de créer un vaste mouvement contre l’austérité et en faveur d’un processus constituant. L’art de la politique est d’organiser la modification des rapports de forces pour rendre possible le nécessaire.

Dans cette tâche Podemos joue et jouera un rôle central, à condition qu’il effectue un travail à partir du parlement qui soit conséquent avec ce qui a été exposé et qu’il procède, après le 20 décembre, à sa refondation pour passer d’une machine électorale verticale et centraliste à une organisation antinéolibérale inclusive, démocratique et participative. Pour cela, un nouveau Vista Alegre sera nécessaire (Article publié le 30 novembre 2015 dans l’Espacio público du quotidien en ligne Público.es. Manolo Gari est membre de la direction d’Anticapitalistas et de Podemos; Traduction A l’Encontre).

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[1] Suite aux élections du 27 septembre 2015, deux listes électorales (dites indépendantistes) disposent, ensemble, d’une majorité au sein du parlement. La première, Junts pel Sí (Ensemble pour le oui, sous-entendu à l’indépendance), formé de Esquerra Republicana de Catalunya (Gauche républicaine catalane, ERC), un parti social-libéral Convergència Democràtica de Catalunya (CDC). Elle dispose aussi du soutien de puissantes organisations indépendantistes telles que l’ANC (Assemblée nationale catalane) et Omnium ; et, en outre de personnalités connues. Elle a remporté un peu moins de 39% des suffrages et 62 sièges. La seconde liste, Candidatura d’Unitat Popular (CUP), une organisation de la gauche radicale indépendantiste, a obtenu 10 sièges avec 8,2% des suffrages. La majorité absolue étant à 68 sièges, Junts pel Sí a donc besoin des suffrages de la CUP pour que son candidat, Artur Mas, le président sortant de la Generalitat, membre de CDC, soit élu à la tête de l’exécutif. La CUP refuse, jusqu’ici, de soutenir une personnalité empêtrée dans des affaires de corruption et qui a réalisé une politique budgétaire parmi les plus brutales dans une composante de l’Etat espagnol. Orientation qui – sous le gouvernement du PP – a reçu les éloges du Financial Times et des institutions européennes. Il en découle un débat complexe sur la primauté du processus vers l’indépendance (auquel s’oppose frontalement l’Etat central, entre autres par la voix de son Tribunal constitutionnel) et sur la défense d’une politique sociale ou, au contraire, l’articulation de ses deux dimensions. Les négociations sont compliquées. Si, au plus tard, le 10 janvier 2016, aucun gouvernement n’est formé en Catalogne, de nouvelles élections seront convoquées. Le 2 décembre, la CUP a annoncé qu’elle organisait une assemblée de ses militants pour le 27 décembre, soit une semaine après les élections générales, afin de décider qu’elle serait son orientation sur ces questions. (Réd. A L’Encontre)

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