Nicaragua. Le «Nica Act» et le cycle politique du pouvoir autoritaire

Daniel Ortega

Par Oscar René Vargas

En 2017, les Etats-Unis ont réduit l’aide annuelle au Nicaragua de 10 millions de dollars à 200’000 par an. Puis, en fin décembre 2017, ils ont suspendu le TPS (Statut temporaire de personne protégée – Temporary Protected Status, statut lié à des situations exceptionnelles : guerre, tremblement de terre) pour les Nicaraguayens. La Chambre des députés a approuvé le «Nica Act» [qui implique une opposition des Etats-Unis aux sollicitations de prêts internationaux effectuées par le Nicaragua]. Washington a appliqué la loi Global Magnitsky [qui implique des interdictions de visas et d’autres sanctions] au président du Conseil électoral suprême du Nicaragua [Roberto José Rivas]. Enfin, en décembre 2017, a été introduit au Sénat le «Nica Act» qui sera éventuellement approuvé lors du premier trimestre de 2018 [avec une échéance d’application en début 2019].

Sisyphe, fondateur mythique de Corinthe, pour avoir osé défier les dieux, fut condamné dans «l’enfer» [le Tartare de la mythologie grecque] à faire rouler éternellement jusqu’en haut d’une colline un rocher qui en redescendait chaque fois avant de parvenir au sommet

Le mythe de Sisyphe illustre l’irrationalité de la politique traditionnelle nicaraguayenne, qui se heurte invariablement à devoir pousser la même pierre. De manière analogue, les crises politiques récurrentes du Nicaragua, bien qu’elles aient une origine humaine, semblent certifier que le désir des dirigeants de se perpétuer au pouvoir souffre de la même destinée imposée à Sisyphe.

Quand tout semble indiquer que la volonté d’éliminer les gouvernements autoritaires et /ou les dictatures relève d’une réalité politique, le désir des politiciens traditionnels de rester indéfiniment au pouvoir explose, se propage et provoque des cataclysmes politiques dans la société nicaraguayenne.

Les crises politiques récurrentes suivent, généralement, les voies initiales d’un processus démocratique: élections, espoir de dépasser le cycle autoritaire et/ou dictatorial, arrivée au pouvoir d’un dirigeant politique messianique. Ici réside le malentendu nécessaire pour le redémarrage du cheminement au sommet du cycle autoritaire et, finalement, se produit une nouvelle rechute, comme pour Sisyphe.

Avec l’approbation possible du Nica Act, cela implique que: (1) Le Nicaragua est devenu un élément censé mettre en danger la sécurité nationale des Etats-Unis. Ces derniers vont donc «examiner» la relation avec la Russie et le Venezuela. L’histoire des années 1980 se répète. (2) La corruption est mentionnée comme une question de nature gouvernementale, mais aussi propre aux entreprises privées, donc les mécanismes du lobbying utilisés par le grand capital ne fonctionnent plus. (3) L’exclusion de l’OEA (Organisation des Etats américains) invalide le rôle de chaînon intermédiaire. Autrement dit, il appartiendra directement au Département d’Etat d’évaluer le comportement du gouvernement nicaraguayen.

Pour le gouvernement du Nicaragua, il est temps de démanteler le système autoritaire et d’entamer la restauration démocratique. Il est temps de définir un calendrier, des délais, des dates précises pour éviter les effets négatifs du «Nica Act».

L’analogie avec le mythe de Sisyphe relève de la métaphore. La crise politique à venir n’était pas inévitable. Bien que ce soit le fruit de la culture politique traditionnelle qui fonctionne depuis plusieurs décennies au sein du système politique du Nicaragua. La mémoire de la classe politique traditionnelle est vraiment très courte! (Article envoyé par l’auteur, 23 décembre 2017, traduction A l’Encontre)

Oscar René Vargas est un économiste vivant au Nicaragua et auteur de nombreux ouvrages sur le Nicaragua et l’Amérique centrale.

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