Entretien avec Charles-André Udry par Diego Cruz.
Présentation par Agenda radical
Entre le 3 et le 6 juillet 2008 a eu lieu à Betim (Etat de Minas Gerais, Brésil), le premier Congrès de la Conlutas (Coordination Nationale de Luttes). 2850 délégués et déléguées s’y sont rendus, représentant 175 syndicats, des groupements d’étudiants et d’organisations populaires, ainsi que 320 observateurs et 75 invités provenant du Brésil, d’autres pays d’Amérique Latine, des Etats-Unis, d’Europe et d’Afrique.
Le Congrès a discuté démocratiquement et a approuvé une plateforme programmatique, un plan de lutte «contre le gouvernement néolibéral» de Lula. Il a également ratifié l’appel à l’unité avec l’Intersyndicale [opposition syndicale regroupant des organisations toujours membres de la CUT, la centrale officielle, et d’autres ayant quitté la CUT] pour la construction d’une nouvelle centrale syndicale et populaire. Toutes les thèses présentées et les résolutions adoptées peuvent être consultées, en langue portugaise, sur le site de la Conlutas.
Le processus de réorganisation syndicale et l’expérience de la Conlutas dépassent les frontières brésiliennes, attirant l’attention de beaucoup de ceux qui mènent ailleurs des combats sociaux et politiques sur cette alternative en voie de construction. C’est le cas de Charles-André Udry, économiste, marxiste révolutionnaire provenant de Suisse, militant du Mouvement Pour le Socialisme (MPS), rédacteur de la revue La brèche et animateur des Editions page deux, qui a participé au Congrès en tant qu’invité.
Au cours des sessions du Congrès, il a été interviewé par Diego Cruz d’Opiniao Socialista (www.pstu.org/), organe de presse du Partido Socialista Dos Travalhadores Unificado (PSTU). Nous publions ci-dessous cet entretien. Le camarade y parle de la situation actuelle des luttes en Amérique Latine et de l’importance de l’expérience de la Conlutas dans le cadre de la réorganisation des travailleurs (Rédaction d’Agenda Radical).
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Le siècle a commencé avec une grande explosion sociale dans toute l’Amérique Latine, au cours de laquelle plusieurs présidents ont été renversés. Comment évalues-tu la situation actuelle dans le continent ?
La fin des années 1990 et le début des années 2000 ont été une période de grandes luttes sociales et politiques en Amérique Latine. Le résultat politique a été l’apparition de deux nouveaux éléments. Le premier a été la capacité du mouvement social à renverser des gouvernements «constitutionnels», comme cela s’est passé en Argentine, en Bolivie et en Equateur, ce qui est un fait extraordinaire, un nouvel élément apparu dans l’histoire, depuis les années 1970. Ensuite il y a eu l’avènement de gouvernements qui se disent «progressistes» et qui ont suscité de grandes attentes chez beaucoup de gens. C’est le cas du gouvernement d’Evo Morales en Bolivie par exemple, qui est un produit indirect de la lutte, ou plutôt d’une combinaison entre les luttes des ouvriers, des paysans, des indigènes, des ex-ouvriers – mineurs pour l’essentiel – ainsi que de tous les gens qui n’avaient jamais été respectés par le pouvoir. Le problème est que ce gouvernement n’avait et n’a ni de programme, ni de forces politiques organisées pour diriger une lutte frontale en vue de renverser le pouvoir réel des transnationales. Il avait une vision linéaire d’une étape de transition très longue – théorisée par Alvaro Garcia Linara – plutôt que celle d’un changement radical. Il en va de même avec le gouvernement de Rafael Correa en Equateur, même si chaque cas a des spécificités.
Il y a également eu beaucoup d’attentes par rapport au gouvernement Lula. Néanmoins le bilan de ce gouvernement est qu’il a de fait été incapable de répondre aux besoins et aux espoirs du peuple de travailleurs. Le gouvernement Lula a pris deux types d’options: d’une part, il a fait d’extraordinaires concessions aux capitalistes et aux transnationales impérialistes; d’autre part il a mis en œuvre le programme de la Banque Mondiale, c’est-à-dire d’un système d’assistentialisme social comme celui de la Bolsa Familia [aide donnée aux familles les plus pauvres] qui, comme des plans semblables en Uruguay, en Bolivie et en Argentine se «focalise» sur la pauvreté.
C’est un type de gouvernement qui neutralise l’unification de classe du peuple travailleur et qui n’exige pas de confrontation avec les classes dominantes, tout en cooptant les appareils syndicaux.
Mais je crois que cette période “progressiste” arrive à son terme. L’expectative qui existe à l’égard de ces gouvernements entre dans une phase de tension. Nous voyons cela, y compris dans le cas du Venezuela, avec l’augmentation du mécontentement social et le renforcement des luttes syndicales ouvrières.
En Equateur, cela se manifeste par exemple par le fait que le président de l’Assemblée constituante Alberto Acosta démissionne en disant «je ne veux plus continuer» parce que Correa ne remplit pas sa promesse d’un programme populaire. Cette critique est la même que celle de la CONAIE [Confédération des Nationalités Indigènes de l’Equateur] lorsqu’elle déclare «nous voulons contrôler la terre et le pétrole».
Il faut bien comprendre que dans cette période la politique mise en œuvre par l’impérialisme est différente de celle qu’il impulsait traditionnellement. Actuellement l’impérialisme stimule des initiatives qui mobilisent certains secteurs sociaux afin de créer un maximum de confusion politique parmi les secteurs populaires. En Bolivie, par exemple, l’impérialisme utilise des secteurs de la bourgeoisie – pouvant disposer d’une base populaire – afin de susciter le chantage de la division du pays et pour affaiblir le gouvernement. Il s’agit donc d’une combinaison entre l’incapacité de procéder au changement et une contre-offensive de l’impérialisme qui ne prend pas, dans l’immédiat, des aspects militaires.
Par contre, en Colombie, dans le cadre du Plan Colombie, il y a une répression pure et dure, non seulement contre les FARC, mais aussi contre les syndicalistes et d’autres mouvements sociaux. La seule possibilité de riposte est que les forces politiques et sociales de la gauche radicale deviennent capables de susciter des mobilisations plus importantes, plus radicales, sans faire aucune concession.
Or, si nous faisons le bilan, nous voyons que depuis son accession au gouvernement, Lula a fait des concessions les unes après les autres, avec Meireles dans la Banque Centrale, avec le Ministère de l’agriculture. C’est comme s’il disait à l’impérialisme et à la grande bourgeoisie: «Soyez tranquilles, il n’y aura aucun problème, vous pouvez accumuler de l’argent avec les exportations, avec les dettes intérieure et extérieure», dont vous êtes les propriétaires.
Il est évident que pendant toute la période de Lula les banquiers et le capital financier ont engrangé plus de profits que jamais auparavant, beaucoup plus qu’avec Fernando Henrique Cardoso.
En Bolivie, la situation est différente: il s’agit d’un chantage avec une combinaison entre la pression du sous-impérialisme brésilien avec la Petrobras, et les transnationales, afin de trouver comment tirer plus de profits de l’extraction et de la transformation du pétrole, du gaz, du fer et des mines de manganèse.
Ces gouvernements «progressistes» ne mobilisent pas pour dire «nous voulons disposer de la souveraineté sur notre territoire». Ils se limitent à faire des concessions et encore des concessions pour ne pas se confronter avec les entrepreneurs, les firmes transnationales.
Cela entraîne une contradiction, puisqu’il y a, d’un côté, le capital qui accumule des sommes importantes, un pouvoir de pression croissant et, de l’autre, un secteur populaire qui attendait un meilleur dénouement, mais qui ne l’a pas vu.
Il y a un secteur social qui reçoit des programmes sociaux pour survivre, et qui se transforme ainsi en une base socialo-politique clientéliste, passive, de ce gouvernement. Ces gouvernements ont neutralisé la capacité de certains de secteurs populaires de prendre leur avenir en main, de conquérir le statut de sujet d’un changement possible. C’est ainsi que l’assistentialisme a neutralisé les initiatives de fractions significatives du peuple travailleur, des masses laborieuses.
Quelle a été l’importance de la cooptation des directions syndicales dans ce processus ?
Je crois que nous nous trouvons dans une nouvelle période historique, aussi bien dans les pays impérialistes que dans ceux de la «périphérie». Les transnationales, l’impérialisme, la bourgeoisie et les oligarchies des pays de la «périphérie» ont compris pendant les années 1980, et surtout 1990, qu’il était décisif d’affronter le mouvement syndical, mais pas de manière directe.
Un exemple concret: la CUT a son origine dans l’ABC pauliste [quartiers industriels de Sao Paulo], où se concentrent les grandes entreprises transnationales. Volkswagen, de l’Allemagne, par exemple, est une entreprise qui a une expérience de négociation et de cooptation permanente du sommet des directions syndicales, avec des ramifications pouvant «descendre» assez bas. En Allemagne, il existe depuis la Secondre guerre Mondiale un système qu’on appelle la «codécision» destiné à neutraliser le mouvement ouvrier. Ainsi, d’un côté on commence à faire l’expérience de la lutte, et, d’un autre côté, on participe à des négociations avec les directions d’entreprises qui ont de l’expérience dans le domaine de la cooptation et de la corruption.
Or, par exemple, à la fin des années 1980 et début 1990, beaucoup de cadres de la CUT ont participé à des cours de formation à la Fondation de la social-démocratie allemande (la Friedrich Ebert Stiftung), c’est là qu’ils apprenaient à faire un syndicalisme «civilisé», qui fait des propositions, qui est «positif». Qui «dialogue». Aujourd’hui, une grande partie de ces cadres est dans le gouvernement Lula ou dans des structures liées à ce dernier. Ils ont participé à des luttes dans le passé et ont été cooptés en tant que négociateurs professionnels par les grandes entreprises, ce qui les a éloignées de la base.
Ces militants syndicalistes professionnels discutent d’un accord avec les entreprises, et ensuite ils se disent: «comment faire un marketing pour vendre, pour présenter cet accord aux travailleurs?»
C’est ce qu’on appelle un accord «win-win», gagnant-gagnant, comme si le capital et le travail pouvaient conclure un accord dans lequel les deux obtiendraient un résultat favorable, et cela est encore moins crédible dans la période présente. Ces «accords ; se font toujours sous la bannière du «il faut éviter le pire» ; ce qui implique une acceptation systématique du chantage patronal qui devient un mode de gestion entre ce dernier et les appareils syndicaux.
Ce système fonctionne de manière tripartite, c’est ce que j’appelle du «néocorporatisme», puisque ces accords sont conclus entre l’Etat, les transnationales ou les grandes firmes et les directions syndicales. Et cela se décline à tous les niveaux, aussi bien au niveau national (en termes de législation du travail, par exemple) qu’à celui des grandes entreprises. C’est la raison pour laquelle le gouvernement brésilien fait approuver des lois qui rendent plus difficiles la représentation syndicale de la base, puisque la législation syndicale ne donne une représentativité et un pouvoir contractuel qu’aux centrales, à leurs directions.
Il s’agit d’une intégration des directions syndicales dans le pouvoir politique bourgeois et dans le pouvoir économique du capital, une combinaison des deux. C’est ce qui a fait que, dans un intervalle de temps très court de vingt ans, les syndicats indépendants, surgis au cours des luttes des années 1980, se sont transformés d’instruments de lutte en instruments de contrôle des ouvriers pour le compte du capital.
C’est l’éclosion de nouveaux “pelegos” [expression populaire brésilienne pour désigner et insulter les membres des syndicats qui trahissaient leurs camarades en collaborant avec l’État fort], mais avec un visage de négociateurs et non comme représentants directs d’une dictature.
Ce sont des gens qui parlent de démocratie, de citoyenneté, de mouvements sociaux, de société civile et ainsi de suite. La seule chose dont ils ne parlent pas c’est de l’affrontement entre le Capital et le Travail, cette contradiction fondamentale qui possède un rôle moteur dans la société et ses évolutions.
Ils ne disent rien non plus sur la précarisation, sur la sous-traitance en cascade. Et ce n’est pas qu’au Brésil que l’on voit cette cooptation: il s’agit d’une tendance internationale, que l’on peut constater dans tous les pays. A des degrés divers et avec des formes plus ou moins spécifiques.
Le défi consiste donc à construire un nouveau type de syndicalisme qui organise également les travailleurs et travailleuses plus ou moins stables, les précarisé·e·s et, y compris, les étudiants, dont une partie sera les précarisé·e·s de demain.
Il est nécessaire que les salarié·e·s des grandes entreprises comme ceux la General Motors, pour prendre un exemple, fassent bloc avec des secteurs précarisés, avec les étudiants, qui sont la force de travail en formation, et avec les couches sociales les plus pauvres.
Nous devons réfléchir au rôle de la Conlutas en tant que structure organisatrice de ce bloc social. Cette question m’intéresse depuis longtemps. C’est un moment de reconstruction du nouveau mouvement ouvrier dans un cadre au sein duquel la puissance de l’impérialisme et des transnationales se fonde, pour «gérer la force de travail», pour l’exploiter, sur la mise en concurrence de tous les travailleurs du monde.
J’ai discuté avec des camarades de General Motors de Rio Grande do Sul. Il s’agit d’une entreprise transnationale qui reçu d’importants subsides étatiques, et qui aujourd’hui va invoquer les difficultés de la GM, entre autres aux Etats-Unis. Bien sûr, ils vont dire aux travailleurs: «Nous ne pouvons plus continuer avec ces salaires, avec ce rythme de travail, et nos devons licencier des centaines ouvriers, parce que nous subissons la concurrence des automobiles qui se fabriquent en Indonésie, en Malaisie, ou en Argentine». La politique de l’impérialisme est de mettre en concurrence, en temps réel, la force de travail qui travaille dans la chaîne mondialisée de production.
En effet, General Motors, Volkswagen, Nisan-renault et beaucoup d’autres entreprises, constituent une chaîne mondialisée de production, avec des sous-traitants directs et indirects
Dès lors, l’internationalisme est un problème concret, immédiat. Dans quel sens? Nous savons que dans les pays impérialistes il a fallu trente ans et plus au mouvement ouvrier – syndicale et politique –pour s’organiser à l’échelle nationale. Nous aurons également besoin de quelque 30 à 50 ans pour s’organiser à l’échelle internationale. C’est une bataille à niveau mondial entre le travail et le capital.
Par exemple, je crois que nous avons besoin de faire une campagne internationale qui réunisse toutes les forces pour le droit à un syndicalisme de classe indépendant et démocratique en Chine. Or, toutes les bureaucraties syndicales s’y opposent, avec la bénédiction des investisseurs transnationaux. Ces bureaucraties syndicales, comme tous les gouvernements et les grands médias font plutôt campagne internationale pour le Dalaï-lama à l’occasion des jeux olympiques; nous devrions faire une campagne «pour la flamme olympique d’un syndicalisme indépendant de l’Etat, du Parti et démocratique en Chine» !
Pourquoi ne pourrions-nous pas faire une campagne pour ces travailleurs et travailleuses chinois qui travaillent quinze heures par jour et ne reçoivent qu’un salaire de moins de 60$? Il est décisif de faire une campagne pour le droit de travailler huit heures par jour et de recevoir un salaire digne en Chine. C’est ainsi que l’on crée un rapport de solidarité et non pas une réaction «protectionniste» facilitant la division des salarié·e·s.
Dans cette perspective, quels seraient les principaux défis pour le Congrès de la Conlutas?
L’importance de la Conlutas réside dans le fait qu’elle exprime une expérience qui prend l’initiative de rompre avec l’inertie de la tradition. Je respecte tout le monde, y compris l’Intersyndicale, mais je ne pense pas qu’ils se rendent compte du changement qui est intervenu dans la morphologie de la force de travail. Ce qu’il faut c’est le bloc social dont j’ai parlé tout à l’heure. La Conlutas est aussi plus consciente de la nécessité de combiner les travailleurs des usines, les précarisés, les étudiants, et c’est pour cette raison qu’elle incarne l’expérience d’un nouveau mouvement collectif et démocratique de la force de travail, avec ses différences.
Il y a un autre fait qui me semble décisif: Conlutas est une organisation qui réunit beaucoup de travailleuses et travailleurs noirs ; une sensibilité se manifeste sur cette question d’une grande importance historique et actuelle. Le Brésil est un pays raciste, comme tous les pays, mais avec une histoire esclavagiste très forte, encore très présente, et donc où s’entrelacent, au sein des divers rapports sociaux, souvent de manière brutale, la racisation des rapports de classes et de sexes. Le racisme est donc une question très importante, et pas seulement du point de vue moral et éthique, comme certains le proclament.
Lorsqu’il y a une lutte entre le capital et le travail, la stratégie du capital, de la bureaucratie syndicale et de partis comme le PT, consiste soit à dénoncer un peu le racisme, de manière abstraite, soit à proclamer que cela n’existe pas, en utilisant tous les poncifs d’un «pays arc-en-ciel».
Or, un fait m’a frappé: Conlutas est capable d’intégrer les Noirs, y compris au plan culturel, et de montrer qu’ils sont des sujets aussi bien au niveau culturel qu’à celui du travail et des luttes. Enfin, la Conlutas est une organisation qui ne se limite pas à discuter d’aspects économiques, mais qui aborde également la politique et la situation internationale.
Il est évident que nous ne pouvons pas confronter le capital mondialisé et continuer à maintenir la séparation traditionnelle entre le syndical et le politique. Tous les travailleurs et travailleuses ayant un certain niveau de conscience se posent des questions: Quelle est la politique de Lula? Quelle est la politique de Kirschner? Et celle d’Evo Morales? Et quel est le résultat concret [de ces politiques] pour les travailleurs et travailleuses de ces pays? Ce sont des choses qui doivent être discutées. On ne peut pas avoir une position élitiste où seulement les intellectuels de gauche discutent de la politique internationale.
Et la Conlutas commence à faire cela.
Tous les groupes politiques, tous les syndicalistes doivent apprendre de cette expérience. Ils peuvent émettre des critiques, avoir des désaccords. C’est normal. Mais, il s’agit d’une expérience qui n’est pas minuscule. Elle n’est pas massive, mais elle a une taille suffisante pour permettre de mener une réflexion collective, qui ne concerne pas juste quinze ou cent personnes, mais des dizaines de milliers. Si nous sommes matérialistes, nous pouvons voir que ceci représente un changement de l’expression combative de cette nouvelle morphologie du travail. Conlutas exprime la conscience la plus avancée de ce processus qui consiste à commencer à agir dans cette nouvelle période historique, avec un bloc social et politique visant à être internationalisé.
Au milieu du processus de construction de la Conlutas et de la préparation du Congrès, les courants MES et MTL [1] ont annoncé leur rupture avec ce projet. Quelle est ton opinion à ce sujet ?
J’ai lu leur déclaration. Pour utiliser un euphémisme, je crois qu’il est un peu irresponsable de casser un processus unificateur à deux semaines du Congrès. Je trouve que la réponse de la direction de Conlutas à l’intervention de la camarade Janira Rocha [2] – réponse favorable sur l’unification dans la Conlutas, l’Intersyndicale et le MTL – était très responsable. En résumé, le message était : «Oui, nous devons nous unifier, mais pour cela nous devons discuter, en acceptant le fonctionnement démocratique, en acceptant d’être une minorité dans un cadre où existe une majorité».
On ne peut pas expliquer les divergences face à un processus comme Conlutas par le fait que le PSTU y est majoritaire. Le PSTU est un parti qui a un rôle décisif dans le processus de la Conlutas, qui prend des initiatives. Et il est évident que si une force politique a ce rôle dans la construction de la Conlutas, il est naturel qu’il ait une influence majoritaire.
Mais c’est justement pour cette raison que la responsabilité du PSTU est très importante. Il doit respecter vraiment les autres courants. Il est de la responsabilité de tous de permettre à cette expérience de Conlutas de se développer.
A mon avis cette expérience est dix fois plus importante que n’importe quelle expérience électorale. Actuellement la question principale pour le Brésil ce ne sont pas les prochaines élections étatiques ou municipales, ni même les élections présidentielles, qui certes ont leur importance conjoncturelle. C’est la création d’une organisation comme la Conlutas, combinée avec les développements positifs du MST et d’autres mouvements sociaux-politiques ; cela peut modifier les rapports de force à la base, dans les entreprises, dans les lieux de travail, avec des gens actifs, qui deviendront, peut-être, les sujets d’un changement à la racine.
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Notes d’Agenda Radical
1. Udry se réfère au Movimiento de Esquerda Socialista (MES – Mouvement de Gauche Socialiste) et au Movimiento Terra Trabalho e Libertade (MTL – Mouvement Terre, Travail et Liberté), qui sont des tendances majoritaires dans la direction du Partido Socialismo e Libertade (PSOL).
2. Cette syndicaliste de Rio de janeiro fait partie de la direction du MTL et elle a été chargée d’intervenir dans la session d’ouverture du Congrès de la Conlutas pour représenter la direction du PSOL.
(23 juillet 2008)
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