Faire en sorte que la révolution devienne permanente

Par Ashraf Omar.

Un mois après la chute du dictateur Hosni Moubarak, le mouvement de masse qui a démontré sa force en le renversant fait face à de nouveaux défis alors que la classe dominante et ses alliés impérialistes tentent de sauver le système présidé par Moubarak. L’auteur, Ashraf Omar, est membre des Socialistes révolutionnaires d’Egypte.

C’est en 18 jours que le peuple égyptien a renversé son tyran de longue date. Toutefois, 30 ans de corruption et de despotisme ne peuvent pas être effacés en 18 jours de révolution. La corruption est omniprésente dans le corps même du système, depuis le torse jusqu’aux membres, et la tyrannie est au cœur de toute sa politique. C’est la raison pour laquelle le renversement de Moubarak ne peut être que le prélude au renversement d’un régime qui conserve tous ses symboles et sa pratique politique.

La dictature de Moubarak n’était qu’une partie de la dictature d’un système d’ensemble – système dont Moubarak n’était que la tête. Ce système peut continuer à poursuivre une politique qui appauvrit la masse des gens, une politique de privatisation et une politique qui poursuit l’alliance avec l’entité sioniste et sert les intérêts états-uniens – même sans cette dictature qui abritait les architectes de ces politiques de la colère des masses.

Ainsi, la lutte pour mettre un terme à cette dictature et aux lois d’exception sur laquelle elle se fondait ne peut être menée à terme que par un combat contre les causes qui ont conduit à la répression politique et à la tyrannie.

D’ailleurs, des millions de «révolutionnaires égyptiens» ne sont pas descendus dans les rues et investi leurs places de travail uniquement pour supprimer un tyran ou pour acquérir une poignée de droits démocratiques qui n’ont même pas encore été appliqués. En fin de compte, les millions de personnes qui vivent sous le seuil de pauvreté ne pourront pas, après la révolution, rentrer chez eux et nourrir leurs enfants de «liberté» et de «démocratie». D’autant que les principales raisons qui ont poussé les Egyptiens à cette révolution étaient la pauvreté, l’augmentation et le chômage.

Les médias gouvernementaux – et également des médias indépendants – mettent en avant l’idée erronée que la révolution s’est achevée avec la chute de Moubarak. Avant le renversement du dictateur, ces mêmes médias attaquaient la révolution et appelaient les rebelles à rentrer chez eux. Aujourd’hui, ils jouent le même rôle et demandent aux mêmes travailleurs, aux étudiants et autres de s’abstenir d’organiser des grèves et des sit-in.

Mais si nous ne poursuivons pas la révolution pour obtenir des changements radicaux dans la structure économique et dans la distribution de la richesse sociale – autrement dit si nous n’étendons pas la révolution à des revendications non seulement de droits démocratiques mais également de droits économiques et sociaux – la dictature se réaffirmera sous des formes différentes. C’est comme si nous avions renversé Moubarak uniquement pour nous trouver face à 100’000 Moubarak en train de chanter les louanges de la révolution, de la démocratie et de la réforme, tout en poursuivant une politique de tyrannie et de paupérisation.

Nous ne pouvons pas oublier que la révolution en Egypte ne se déroule pas dans une île isolée, mais fait partie d’une vague de révolutions qui a balayé les régions arabes. Ces révolutions, si elles réussissent et se poursuivent, nous les soutiendront certainement, comme cela s’est passé entre les révolutions tunisienne et égyptienne. La révolution tunisienne a inspiré celle en Egypte. A son tour, la révolution égyptienne a donné aux peuples de Libye, du Yémen, d’Algérie et du Bahrein plus de confiance en eux et en leur capacité à faire leurs propres révolutions pour des changements. Certes, certains se trouvent face à des pouvoirs qui contre-attaquent avec force.

La poursuite de la révolte contre les symboles de la corruption, contre les politiques qui entraînent l’appauvrissement et la dépendance est la seule garantie pour préserver les gains de la révolution qui a été accomplie par la lutte des masses et pour obtenir de nouveaux gains. C’est la perpétuation de la révolution dans les régions arabes contre les régimes dictatoriaux qui protégera la révolution égyptienne et nous poussera en avant.

Que la révolution en Egypte soit permanente ! Que notre révolution dans les régions arabes soit permanente ! Qu’il y ait une révolution qui se poursuive dans les usines et dans les quartiers et dans les universités jusqu’à ce que nous réalisions toutes nos revendications !

* Traduit de l’arabe par Mostafa Omar et de l’anglais par A l’encontre.

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