Ukraine. «Non à la guerre de Poutine!»

Segueï Lavrov à l’ONU le 24 septembre défend la guerre du Kremlin. (KEYSTONE/TASS/Valery Sharifulin)

Par Denis Paillard

Dès le lendemain de l’intervention brutale de l’armée russe en Ukraine, la guerre a pris une dimension qui excède le lieu du conflit, avec en premier lieu l’implication de plus en plus importante de l’Union européenne, des Etats-Unis sous l’égide de l’OTAN: sanctions économiques et livraison d’armes à l’Ukraine.

Face à la guerre, la gauche au sens large a pris des positions divergentes, divergences largement marquées par des considérations géopolitiques. D’un côté, les divers courants qui mettent en avant le rôle de l’OTAN et se retrouvent derrière le mot d’ordre «la paix maintenant». De l’autre, ceux qui privilégient une solidarité massive avec la résistance du peuple ukrainien face à l’impérialisme russe, dans un rapport entre la Russie et un pays auquel est attribué un statut de semi-colonie.

La mobilisation de 300 000 réservistes décrétée mardi par Poutine (précédée par l’adoption à la Douma d’un nouvel arsenal juridique de répression) et les pseudo-référendums dans les quatre territoires occupés en Ukraine marquent une accélération terrifiante de la catastrophe en cours. Hier la une du journal L’Humanité «l’escalade folle de Poutine» marquait clairement que l’on avait franchi une nouvelle étape. En rattachant à la Fédération de Russie les territoires occupés, Poutine vise à donner une nouvelle dimension à la guerre: c’est désormais la Russie qui serait attaquée sur «son» territoire et donc en position légitime de riposter par tous les moyens. Poutine a insisté sur ce point: rien ne saurait l’arrêter dans son entreprise guerrière.

Dans cette nouvelle situation, où toute idée de “paix” s’éloigne, il est urgent de définir une position internationaliste qui fasse pleinement sens, au présent, dans ce conflit. Mettre en avant «NON A LA GUERRE de POUTINE!» (en aucun cas un synonyme de «la paix maintenant!» qui tend à mettre sur le même plan agresseur et agressé) distingue trois fronts sans les confondre; sur chaque plan, «non à la guerre» a une visibilité propre dont il faut s’emparer. En même temps, il faut insister sur le fait que «Non à la guerre» c’est d’abord et avant tout dénoncer l’agression de l’impérialisme russe contre la nation ukrainienne, les deux autres plans ne font sens qu’en référence étroite avec le premier:

  • avec les Ukrainiens, ceux d’en bas, qui luttent sur deux fronts: contre l’intervention russe, mais aussi pour une Ukraine démocratique où la démocratie est indissociable de la justice sociale et qui ne soit pas en proie aux démons nationalistes; les convois syndicaux sont sur ce plan exemplaires;
  • aux côtés de ceux en Russie qui, malgré la répression, manifestent contre la guerre: depuis l’annonce de la mobilisation de 300 000 réservistes «non à la guerre» prend une dimension concrète – la guerre en Ukraine n’est plus une guerre «lointaine» hors de l’urgence de la survie au quotidien [1]; cela signifie aussi le soutien aux déserteurs qui refusent de servir de chair à canon; ce qui implique de leur accorder un statut de réfugiés au sein de l’UE, entre autres.
  • pour le développement dans tous les pays, à commencer par l’Europe et l’Amérique du Nord, d’un mouvement de masse contre la nouvelle course aux armements, pour la dissolution de l’OTAN et pour un désarmement nucléaire mondialisé. (25 septembre 2022)

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[1] Carine Clément (auteur d’un texte «La société russe dans la guerre», dans un recueil collectif sur la guerre en Ukraine à paraître en 2022) souligne dans Mediapart (22 septembre): «Il n’y a que très peu de soutien enthousiaste à la guerre, contrairement à ce que donnent à croire les médias occidentaux, qui reprennent très largement et de façon exagérée ce que véhicule la propagande du Kremlin.»

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