Publié par La Clase, Caracas
Le pays traverse une grave crise politique suite à l’étroite marge avec laquelle Nicolas Maduro, candidat du Parti Socialiste Uni du Venezuela (PSUV) et du Pôle patriotique (alliance proposée en septembre 2012 par Chavez, avant tout avec le Parti communiste) s’est imposé face au candidat de la Mesa de Unidad democratica (MUD), Henrique Capriles Radonski. Lors des élections du 14 avril 2013, selon les chiffres officiels, Maduro a obtenu 7’575’506 votes contre 7’302’641 obtenus par Capriles, gagnant la présidence par une marge de seulement 272’865 suffrages.
Dans ce contexte, le candidat de la MUD et ses partisans ont exigé l’extension de l’audit de 54% à 100% des justificatifs des votes imprimés [le vote est électronique, mais les votant·e·s reçoivent une confirmation écrite de leur vote]. En sachant que la MUD et son candidat ne sont pas un exemple de démocratie et que dans le passé récent ils ont été impliqués dans un coup [en avril 2002] et dans la grève-sabotage pétrolière [durant la même période], nous considérons qu’il est nécessaire de distinguer entre, d’une part, ce que représente la direction pro-impérialiste de la MUD, et, d’autre part, l’exigence légitime de millions de personnes qui réclament l’audit de tous les votes, ce qui est un droit démocratique. Maduro lui-même s’était prononcé initialement en faveur de l’audit de l’ensemble des votes, notamment dans le discours prononcé durant la nuit du 14 avril, lors de l’annonce de son triomphe électoral. Mais le lendemain il y a eu un changement de cap imposé par l’aile dure militaire du gouvernement dirigée par Diosdado Cabello, et il a été décidé de ne pas élargir l’audit. [Finalement un contrôle de 46% des votes électroniques sera effectué, après décision du Conseil national électoral, prise le 18 avril 2013 au soir].
Nous connaissons l’arbitraire et l’utilisation abusive des ressources de l’Etat par le gouvernement lors de ces élections et lors d’autres consultations. Ce sont les mêmes procédés qui sont utilisés dans les syndicats et dans les organisations communautaires pour violer leur autonomie; pour contrer la tenue d’élections démocratiques par la base; pour imposer des décisions depuis les directions des entreprises de l’Etat aux conseils de travailleurs ou pour criminaliser les protestations. L’exploitation des prérogatives et les irrégularités favorisées par le gouvernement rendent légitime la revendication d’élargir l’audit, même si jusqu’à maintenant la MUD n’a présenté aucune preuve irréfutable en faveur de la thèse de la fraude.
Le gouvernement a utilisé cette exigence légitime pour prétendre que la direction pro-impérialiste de la MUD prépare un coup d’Etat. Notre parti considère que jusqu’à maintenant il n’y a aucune évidence d’un prétendu coup d’Etat en développement. Le gouvernement ment à nouveau en utilisant le fantasme d’un coup d’Etat supposé pour unir ses partisans et pour justifier les restrictions imposées aux droits démocratiques, comme par exemple l’interdiction de manifester appliquée à une convocation lancée par la MUD pour le 17 avril à Caracas.
Ceux qui pourraient faire des coups d’Etat sont les militaires, et ceux-ci ainsi que l’État-major ont prononcé publiquement et ouvertement leur soutien au gouvernement. Pour le moment il n’y a ni appel à des grèves patronales, ni actes d’insubordination; il n’y a pas non plus d’appel public aux militaires à l’insubordination comme lors du coup fasciste et la grève pétrolière de 2002. Mais nous devons être clairs sur le fait que si cette éventualité se présentait à l’avenir, notre parti l’affronterait de la même manière qu’il l’a fait en 2002.
Nous soulignons l’importance de condamner les responsables de la violence qui a coûté la vie à sept personnes et laissé 60 blessés, suite à des attaques perpétrés par des groupes ayant des traits fascisants. Nous répudions énergiquement les actes de violence accomplis par les partisans de Capriles et de la MUD contre les sièges de Pdval [Productora y Distribuidora de Alimentos S.A], Mercal [Missions de distribution d’aliments], CDI [Centros Médicos de Diagnóstico Integral] et d’autres services publics, actes qui ont affecté des travailleurs et travailleuses et le peuple.
Tout comme nous refusons les actions violentes menées par des militants motorisés du PSUV et des partisans du gouvernement, dont les actions s’assimilent à ceux des partisans de l’Action démocratique [parti de Carlos-Andres Perez, membre de l’Internationale social-démocrate; ce parti, créé en 1941, a occupé une place importante dans les années 1960-1990] de jadis. Nous lançons un appel énergique au peuple pour qu’il resserre ses rangs contre les expressions de violence fasciste de ceux qui voudraient pêcher en eaux troubles.
Pour nous, il est fondamental de comprendre la signification de la chute abrupte des suffrages en faveur du candidat du gouvernement, ce qui a produit la crise politique que nous traversons. Il n’y a aucun doute que cette chute est la conséquence du refus et de la fatigue d’un secteur important de la population face aux innombrables problèmes qui se sont accumulés tout au long de ces dernières années, y compris dans des secteurs populaires dans lesquels le chavisme était traditionnellement soutenu par une large majorité.
L’échec électoral du PSUV et de Nicolas Maduro est dans la continuité du déclin que vit le gouvernement depuis quelques années. Le mécontentement qui s’est accéléré au cours de ces derniers mois est une conséquence directe de la dévaluation du bolivar de 46,5% orchestrée par ce gouvernement en mars dernier. Ce qui d’un trait de plume a réduit le salaire réel des travailleurs et travailleuses. C’est une expression de la fatigue de la population face aux continuelles coupures de courant, aux bas salaires, à la détérioration des services publics et des programmes sociaux, y compris les Missions, à l’emploi précaire, à la non-discussion des contrats collectifs, à la criminalisation de la protestation. Et pendant ce temps, sous un gouvernement prétendument «socialiste», les profits des patrons et des banquiers continuent de croître. Ce sont là les véritables causes de la crise politique qui s’ouvre actuellement dans le pays.
Face à cette situation, nous appelons le peuple à ne faire aucune confiance aux directions politiques de la MUD et du PSUV, qui veut nous utiliser comme chair à canon dans un sourd conflit qui n’a rien à voir avec nos vrais intérêts.
Dans ce sens il nous faut imposer un calendrier de lutte pour l’augmentation des salaires et pour tous les droits des travailleurs et du peuple. Nous devons suivre l’exemple des universitaires qui ont manifesté le 4 avril – professeurs, employés et ouvriers, chavistes et non-chavistes ou indépendants, tous unis – pour exiger une augmentation salariale et d’autres revendications liées au travail. Cette marche a été le résultat d’un processus d’unité d’action qui est en train de se construire entre le Front autonome de défense de l’emploi, du salaire et du syndicat (FADESS) et l’Equipe national du travail (UNETE), processus qu’il faut encourager en vue d’un premier mai unitaire, classiste, autonome et combatif, dans lequel les travailleurs en tant que classe sociale puissions nous adresser au pays pour présenter notre proposition, qui n’est autre que celle d’un véritable gouvernement des travailleurs et du peuple.
Les récents événements politiques mettent sur le tapis le défi de construire une option politique réellement révolutionnaire et socialiste, depuis en bas. Au cours de la campagne électorale d’octobre 2012 et celle d’avril 2013, nous avons dit qu’aucun des deux candidats majoritaires ne résoudrait les problèmes des travailleurs et du peuple, d’où l’importance de construire une alternative socialiste et révolutionnaire qui devienne un outil de lutte pour les travailleurs et le peuple.
Pour le comité exécutif: Orlando Chirino, Miguel Angel Fernandez, José Bodas, Armando Guerra, Simon Rodriguez Porras. (17 avril 2013) (Traduction A l’Encontre)
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