Venezuela. «La pauvreté extrême monte en flèche»

Par Encovi

L’Enquête sur les conditions de vie au Venezuela (Encovi), menée par les principales universités du pays et dont les conclusions ont été présentées mercredi 21 février à Caracas, a révélé qu’en quatre ans l’extrême pauvreté est passée de 23,6% à 61,2% et a augmenté de près de dix points entre 2016 et 2017.

Le rapport de l’enquête a été présenté par la sociologue María Gabriela Ponce, de l’Universidad Católica Andrés Bello (UCAB), qui était chargée de l’étude des données sur l’augmentation de la pauvreté.

L’enquête a été menée entre juillet et septembre 2017 auprès de 6168 personnes âgées entre 20 et 65 ans, toutes couches sociales confondues, dans cinq régions du pays. Elle a été réalisée par des professeurs de l’UCAB, de l’Universidad Central de Venezuela (UCV) et de l’Universidad Simón Bolívar (USB).

Maria Gabriela Ponce a présenté un graphique montrant qu’en 2014, l’extrême pauvreté s’élevait à 23,6%, en 2015 à 49,9%, en 2016 à 51,5% et en 2017 à 61,2%.

Le même graphique montre que les ménages «non pauvres» représentaient 51,6% en 2014, 27% en 2015, 18,2% en 2016 et 13% en 2017.

Mme Ponce a expliqué: «Lorsque nous avons lancé l’Encovi en 2014, la pauvreté (entre chronique et extrême) se situait à 48,4% et quatre ans plus tard, en 2017, la pauvreté en tenant compte des revenus (par ménage) était de 87%.»

Cette enquête a été réalisée avec des informations obtenues entre juillet et septembre, les résultats mis en évidence par les chercheurs ne reflètent donc pas l’effet qu’a eu le sur les Vénézuéliens le phénomène hyperinflationniste qui a débuté en octobre et qui a encore aggravé la crise économique au Venezuela.

Madame Ponce a signalé que dans le contexte hyperinflationniste qui affecte le pays, la plupart des ménages vont se situer «au-dessous du seuil de pauvreté, seuil qui finit par être inaccessible» étant donné que les salaires «n’arrivent pas à rattraper l’inflation». Selon elle, il est possible que cette situation aboutisse à «la pulvérisation de la classe moyenne en termes économiques».

La perte de poids

Une autre donnée importante soulignée par Mme Ponce est que les Vénézuéliens ont perdu en moyenne 11,4 kg l’an dernier contre 8 kilos l’année précédente. Les indicateurs de pauvreté «montrent que la disparité entre l’augmentation des prix et celle des salaires de la population est tellement répandue qu’il n’y a pratiquement plus aucun Vénézuélien qui ne soit pas pauvre».

Le taux de pauvreté a été calculé en tenant compte des conditions de logement, de l’accès aux services, du niveau de vie, de l’éducation, du travail et de la protection sociale de chaque personne interrogée.

La nutritionniste Marianela Herrera, une autre spécialiste participant à l’équipe de recherche, a noté qu’en raison du rebond inflationniste, les Vénézuéliens ont changé de régime alimentaire, en mangeant moins ou en sautant des repas. Herrera a expliqué que 61% des personnes consultées ont déclaré qu’ils étaient «allés se coucher en ayant faim» parce qu’ils n’avaient pas assez de nourriture, et 90% ont dit que leur revenu «n’est pas suffisant» pour acheter la nourriture nécessaire.

Les résultats présentés par Marianela Herrera indiquent que 63% des gens ont mis en pratique une «stratégie» pour que les repas cuisinés à la maison «rendent davantage», cela en supprimant des repas ou en réduisant les portions dans les assiettes. «Il y a 20% des gens qui ne prennent pas de petit-déjeuner et les collations ont pratiquement été supprimées. 70% des personnes disent qu’elles n’ont pas les moyens d’acheter des aliments sains et équilibrés.» Marianela Herrera ajoute qu’en dernière analyse,«80% des ménages présentent un certain degré d’insécurité alimentaire» et ont une «alimentation déficiente», ce qui signifie qu’ils ont été identifiés avec trois ou plusieurs des variables précédentes qui ont trait à l’accès, au coût ou à la qualité de la nutrition.

Anitza Freitez, spécialiste en études sociales de l’UCAB, a également indiqué que dans la population la plus pauvre trois enfants sur quatre âgés de 3 à 17 ans abandonnent l’école, souvent faute de nourriture.

L’Encovi a été créé en 2014 en réponse à ce que les chercheurs ont décrit comme un manque de données gouvernementales judicieuses et fiables. Selon les derniers chiffres officiels, publiés il y a deux ans et demi par l’Institut national de la statistique (INE), l’économie s’est contractée de 16,5% en 2016 et le taux de pauvreté était de 33,05% au premier semestre 2015.

La violence

Roberto Briceño León, sociologue de l’UCV, a déclaré que selon cette étude, l’insécurité au Venezuela s’est accrue en 2017, au point qu’un citoyen sur cinq a été victime d’un délit. (Traduction du résumé de l’enquête Encovi effectué par El Pais Uruguay en date du 22 février 2018; traduction A l’Encontre)

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