Rapport d’impact du GIEC. «Une exigence: impliquer tout le monde dans une planification équitable et juste»

Par Climate & Capitalism

Le changement climatique induit par l’homme provoque des perturbations dangereuses et généralisées dans la nature et affecte la vie de milliards de personnes dans le monde, malgré les efforts déployés pour réduire les risques. Les personnes et les écosystèmes les moins aptes à faire face sont les plus durement touchés, affirment les scientifiques dans le dernier rapport du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC), publié le 28 février [voir aussi l’article de Daniel Tanuro publié sur ce site le 1er mars 2022].

«Ce rapport est un avertissement terrible sur les conséquences de l’inaction», a déclaré Hoesung Lee, président du GIEC. «Il montre que le changement climatique constitue une menace grave et croissante pour notre bien-être et la santé de la planète. Nos actions d’aujourd’hui détermineront la manière dont les gens s’adapteront et dont la nature répondra aux risques climatiques croissants.»

Le monde est confronté à de multiples risques climatiques inévitables au cours des deux prochaines décennies avec un réchauffement de la planète de 1,5°C (2,7°F). Un dépassement, même temporaire, de ce niveau de réchauffement entraînera des conséquences graves supplémentaires, dont certaines seront irréversibles. Les risques pour la société augmenteront, notamment pour les infrastructures et les établissements des zones côtières de faible élévation.

Le résumé à l’intention des décideurs du rapport du groupe de travail II du GIEC, intitulé «Climate Change 2022: Impacts, Adaptation and Vulnerability», a été approuvé le dimanche 27 février 2022 par 195 gouvernements membres du GIEC, lors d’une session d’approbation virtuelle qui s’est déroulée sur deux semaines à partir du 14 février.

Une action urgente est nécessaire pour faire face aux risques croissants

L’augmentation des vagues de chaleur, des sécheresses et des inondations dépasse déjà les seuils de tolérance des plantes et des animaux, entraînant une mortalité massive d’espèces telles que les arbres et les coraux. Ces phénomènes météorologiques extrêmes se produisent simultanément, entraînant des répercussions en cascade de plus en plus difficiles à gérer. Ils ont exposé des millions de personnes à une insécurité alimentaire et hydrique aiguë, notamment en Afrique, en Asie, en Amérique centrale et du Sud, dans les petites îles et dans l’Arctique.

Pour éviter des pertes croissantes en vies humaines, en biodiversité et en infrastructures, il est nécessaire de prendre des mesures ambitieuses et accélérées pour s’adapter au changement climatique, tout en réduisant rapidement et profondément les émissions de gaz à effet de serre. Jusqu’à présent, les progrès en matière d’adaptation sont inégaux et les écarts se creusent entre les mesures prises et ce qui est nécessaire pour faire face aux risques croissants, selon le nouveau rapport. Ces écarts sont les plus importants parmi les populations à faible revenu.

Le rapport du groupe de travail II est le deuxième volet du sixième rapport d’évaluation du GIEC (AR6), qui sera achevé cette année.

«Ce rapport reconnaît l’interdépendance du climat, de la biodiversité et des populations et intègre les sciences naturelles, sociales et économiques plus fortement que les évaluations précédentes du GIEC», a déclaré Hoesung Lee. «Il souligne l’urgence d’une action immédiate et plus ambitieuse pour faire face aux risques climatiques. Les demi-mesures ne sont plus une option.»

La sauvegarde et le renforcement de la nature sont essentiels pour garantir un avenir vivable

Il existe des solutions pour s’adapter au changement climatique. Ce rapport fournit de nouvelles informations sur le potentiel (capacité) de la nature, non seulement pour réduire les risques climatiques, mais aussi pour améliorer la vie des gens.

«Des écosystèmes sains sont plus résistants au changement climatique et fournissent des services vitaux tels que la nourriture et l’eau potable», a déclaré Hans-Otto Pörtner, coprésident du groupe de travail II du GIEC. «En restaurant les écosystèmes dégradés et en conservant efficacement et équitablement 30 à 50 % des habitats terrestres, d’eau douce et océaniques de la Terre, la société peut bénéficier de la capacité de la nature à absorber et à stocker le carbone, et nous pouvons accélérer les progrès vers le développement durable, mais des financements et un soutien politique adéquats sont essentiels.»

Les scientifiques soulignent que le changement climatique interagit avec des tendances mondiales telles que l’utilisation non durable des ressources naturelles, l’urbanisation croissante, les inégalités sociales, les pertes et dommages causés par des événements extrêmes et une pandémie, mettant ainsi en péril le développement futur.

«Notre évaluation montre clairement que pour relever tous ces différents défis, il faut que tout le monde – gouvernements, secteur privé, société civile – travaille ensemble pour donner la priorité à la réduction des risques, ainsi qu’à l’équité et à la justice, dans la prise de décisions et les investissements», a déclaré Debra Roberts, coprésidente du groupe de travail II du GIEC.

«De cette manière, il est possible de concilier des intérêts, des valeurs et des visions du monde différents. En réunissant le savoir-faire scientifique et technologique ainsi que les connaissances indigènes et locales, les solutions seront plus efficaces. Si l’on ne parvient pas à mettre en place un développement durable et résilient au changement climatique, il en résultera un avenir sous-optimal pour les populations et la nature.»

Les villes: points chauds des impacts et des risques, mais aussi une partie cruciale de la solution

Ce rapport fournit une évaluation détaillée des impacts, des risques et de l’adaptation au changement climatique dans les villes, où vit plus de la moitié de la population mondiale. La santé, la vie et les moyens de subsistance des personnes, ainsi que les biens et les infrastructures essentielles, notamment les systèmes d’énergie et de transport, sont de plus en plus affectés par les risques liés aux vagues de chaleur, aux tempêtes, aux sécheresses et aux inondations, ainsi que par les changements à évolution lente, notamment l’élévation du niveau de la mer.

«Ensemble, l’urbanisation croissante et le changement climatique créent des risques complexes, en particulier pour les villes qui connaissent déjà une croissance urbaine mal planifiée, des niveaux élevés de pauvreté et de chômage, et un manque de services de base», a déclaré Debra Roberts.

«Mais les villes offrent également des possibilités d’action en faveur du climat – des bâtiments écologiques, un approvisionnement fiable en eau propre et en énergie renouvelable, et des systèmes de transport durables qui relient les zones urbaines et rurales peuvent tous conduire à une société plus inclusive et plus juste.»

Il est de plus en plus évident que l’adaptation transformationnelle a eu des conséquences inattendues, par exemple en détruisant la nature, en mettant la vie des gens en danger ou en augmentant les émissions de gaz à effet de serre. Ces conséquences peuvent être évitées en impliquant tout le monde dans la planification, en prêtant attention à l’équité et à la justice, et en s’appuyant sur les connaissances autochtones et locales.

Une fenêtre d’action qui se rétrécit

Le changement climatique est un défi mondial qui nécessite des solutions locales. C’est pourquoi la contribution du groupe de travail II au sixième rapport d’évaluation du GIEC (AR6) fournit des informations régionales détaillées pour permettre un développement résilient au changement climatique.

Le rapport indique clairement que le développement résilient au changement climatique est déjà un défi aux niveaux de réchauffement actuels. Il deviendra plus limité si le réchauffement de la planète dépasse 1,5°C (2,7°F). Dans certaines régions, il sera impossible si le réchauffement de la planète dépasse 2°C (3,6°F). Ce résultat clé souligne l’urgence d’une action climatique axée sur l’équité et la justice. Un financement adéquat, le transfert de technologies, l’engagement politique et le partenariat permettent une adaptation au changement climatique et une réduction des émissions plus efficace.

«Les preuves scientifiques sont sans équivoque: le changement climatique est une menace pour le bien-être humain et la santé de la planète. Tout nouveau retard dans l’action mondiale concertée fera passer à côté d’une fenêtre brève et qui se referme rapidement pour assurer un avenir vivable», a déclaré Hans-Otto Pörtner. (Artice publié par Climate & Capitalism, le 28 février 2022; traduction rédaction A l’Encontre)

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