Depuis des années l’USS (Union syndicale suisse) et le PSS (Parti socialiste suisse) ne cessent de vanter les mérites «sociaux» de l’actuelleUnion européenne (UE). Pour esquiver des ripostes concrètes et effectives au démantèlement accentué de la législation «sociale» en Suisse, les directions de ces deux organisations – qui s’inscrivent dans le cadre de la politique néocorporatiste en vigueur en Suisse – vantent les mérites supposés d’une prétendue UE sociale. Dès lors, il s’agirait de la rejoindre pour assurer une avancée sociale en Suisse. Qui rejoindrait qui? La réponse: l’Etat helvétique et le gouvernement bourgeois représenté par le Conseil fédéral rejoindraient les structures proto-étatiques de l’UE. La question n’est pas posée par le PSS et l’USS, pour qui la nature de classe de ces institutions ne fait plus parie des interrogations qui méritent d’être faites.
Certes, s’insérer dans le dispositif des luttes et organisations socio-politiques qui traduisent une indépendance politique et de classe face aux Etats nationaux et à leurs structures proto-étatiques européennes est une nécessité pour le salariat exploité en Suisse, ce d’autant plus que sa composition est plus européenne que dans l’ensemble des autres pays de l’UE. Toutefois, pour dessiner une telle perspective, il faut informer et «ouvrir les yeux» de toutes et tous sur les politiques anti-sociales, sur les contre-réformes violentes qui deviennent la norme au sein de l’UE.
Pour cela, ne serait-ce qu’au plan de l’information de l’ensemble des travailleuses et travailleurs résidant en Suisse, il faut indiquer l’homogénéité croissante de la contre-révolution néo-conservatrice dans l’ensemble des pays européens, membres ou non de l’UE.
La campagne sur les accords bilatéraux pourrait en fournir l’occasion. Du moins, si lôn n’a pas la naïveté de se faire piéger dans la trappe d’un débat qui évacue tout contenu social et de classe et se limite à spéculer sur les mérites respectifs d’un Oui ou d’un Non. A de fausses questions posées par un bloc interclasssiste (allant du patronat au syndicat), il est toujours possible de donner des réponses simples, mais fausses. La toute récente décision de l’UE sur le temps de travail constitue un élément de plus pour engager un débat sérieux, et donc informé. (réd.)
La Confédération européenne des syndicats (CES) a jugé “inacceptable” l’accord conclu dans la nuit du 9 au 10 juin par les pays de l’Union Européenne qui pérennise la semaine de travail de plus de 48 heures et ouvre la durée du travail à des dérogations, jusqu’à 78 heures ! Or, la CES n’a pas pour caractéristique d’être fort indépendante face aux instances de l’UE. [1]
«L’accord sur le temps de travail est très insatisfaisant et inacceptable pour la CES, pour ce qui concerne les nouvelles dispositions sur le temps de garde et la continuation de l’opt-out du Royaume-Uni», a souligné John Monks le secrétaire général de la Confédération européenne des syndicats.
La clause “opt out”
C’est surtout le Royaume-Uni qui incite massivement les travailleurs à accepter de travailler plus de 48 heures par semaine, en signant individuellement une clause de non participation (“opt out” dans le jargon européen). Certains pays comme l’Allemagne ou la Pologne y recourent pour les professions ayant des temps de garde, notamment dans le secteur médical.
Selon le compromis accepté par les ministres européens de l’Emploi, la semaine hebdomadaire de 48 heures, déjà gravée dans la législation européenne, reste de mise. Mais la durée maximale hebdomadaire de travail pourra atteindre 60 ou 65 heures pour les employés acceptant, à titre individuel, de déroger aux 48 heures. Ces plafonds pourront être dépassés en cas de conventions collectives.
La dérogation offerte aux employés est encadrée plus strictement, mais non limitée dans le temps.
Cette révision introduit en outre pour la première fois la définition de «périodes de garde inactives», qui pourront ne plus être comptabilisées comme du temps de travail.
Deux arrêts de la justice européenne stipulent que le temps de garde doit être intégralement calculé comme du temps de travail. Or, la majorité des Etats européens sont en infraction en la matière, notamment au sein des professions médicales.
1. Voir son ouvrage: Syndicats, lendemain de crise, Folio-Le Monde, 2005
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