Grèce. La bataille du référendum

greeceeuflags_480_2706Rédaction A l’Encontre

Nous avons publié, sur ce site, le 27 juin, le discours d’Alexis Tsipras annonçant au nom d’une décision unanime du gouvernement grec la tenue d’un référendum portant sur l’acceptation ou non des propositions desdites institutions, soit la BCE, la Commission européenne et le FMI. Ce référendum doit se tenir le 5 juillet.

Les résultats du vote au parlement grec, qui a eu lieu à trois heures du matin (heure grecque), ce dimanche 28 juin, sont les suivants: sur 298 députés présents, 178 ont voté en faveur de la motion pour la tenue d’un référendum à la date choisie du 5 juillet. Les députés de Syriza, d’Anel (Grecs indépendants, membres de la coalition gouvernementale) se sont prononcés en faveur de la tenue du référendum. Les néonazis d’Aube Dorée ont voté de même pour la tenue du référendum. 151 votes étaient nécessaires pour que la motion présentée par le gouvernement soit adoptée.

A l’opposé, les membres du PASOK (Mouvement socialiste panhellénique) et de la Nouvelle Démocratie se sont prononcés contre. Le KKE (PC) a proposé sa propre version d’un référendum: oui ou non aux propositions du gouvernement Tsipras ; oui ou non à celle des institutions; oui ou non à l’UE; oui ou non à l’euro. La KKE poursuit son orientation maximaliste dans ses déclarations et dans la pratique il se situe hors du champ politique où se forgent les rapports de forces avec les représentants politiques de la bourgeoisie grecque comme ceux du capital financier que représentent les «institutions». Cette attitude de sa direction met mal à l’aise une partie croissante de sa base militante.

Ce fut le ministre de l’Intérieur Nikos Voutsis qui présenta l’argumentation en faveur du référendum avec des arguments analogues à ceux développés par Alexis Tsipras dans son discours.

Le porte-parole parlementaire du PASOK Evangelos Venizelos – ex-dirigeant du PASOK et ex-vice-premier ministre du gouvernement d’Antonis Samaras – a attaqué la proposition de référendum un prétendant qu’elle n’était pas conforme aux normes constitutionnelles. Il avait antérieurement déposé auprès de la présidente du parlement, Zoé Konstantopoulou, un texte arguant de l’inconstitutionnalité du référendum. Antonis Samaras s’est aussi engagé sur ce terrain. Les incidents parlementaires se sont multipliés, sous tous les prétextes. Ainsi, Zoé Konstantopoulou, après être intervenue dans le débat, a repris sa charge de présidente trois ou quatre minutes avant le délai réglementaire de 10 minutes, ce qui a été invoqué pour un départ de la salle des députés de la Nouvelle Démocratie. Une expression de désarroi et de hargne face à la proposition du référendum.

Une attitude similaire se retrouve dans la réponse de l’Eurogroupe du 27 juin, suite à l’annonce du référendum. A tel point que, le ridicule ne tuant pas, le «socialiste» Pierre Moscovici, commissaire européen aux Affaires économiques, a déclaré: «Si les ministres des Finances n’ont pas accordé d’extension du plan d’aide à l’Eurogroupe, c’est parce que le gouvernement grec a accompagné l’annonce du référendum d’un appel à voter non.» Le gouvernement grec demandait une extension du «soutien financier» en place au-delà du 30 juin. Ce que l’Eurogroupe a refusé. Les ministres de Finances se sont réunis, le 27 juin, sans la présence de Yanis Varoufakis, pour envisager «l’hypothèse d’un défaut de paiement grec, avec toutes ses conséquences pour la zone euro». Les divers scénarios «techniques» abordés dans la presse du week-end ont pour mérite de mettre entre parenthèses le caractère essentiellement politique des chantages et propositions faites depuis des mois par les «institutions».  Nous laisserons à des économistes – de gauche et de droite – phraser sur les «scénarios» possibles et, ce faisant, apportant peu d’attention aux forces de Syriza qui se battent depuis février, de manière responsable et unitaire, non seulement contre les «institutions» et leurs relais grecs, mais aussi contre les pièges de «propositions acceptables» faites par le gouvernement.

Construire un Front uni du NON

Dans sa déclaration datée du 27 juin, fin d’après midi, le Red Network met l’accent sur les points suivants:

• la décision de faire appel à la volonté populaire et de refuser de signer un nouveau mémorandum change le cadre politique grec;

• cela traduit le fait que les mobilisations sociales qui ont trouvé une expression politique dans le vote du 25 janvier 2015 ont des racines plus profondes que ce qu’avaient anticipé les supporters d’une politique néolibérale d’austérité à l’échelle nationale et internationale;

• un rejet des propositions des institutions le 5 juillet va sortir Syriza du marais des négociations avec les créanciers et des impasses auxquelles a conduit l’accord du 20 février; les espoirs populaires seront revitalisés;

• nous l’avons dit depuis des mois, comme voix «critique» dans Syriza: il est difficile de transformer Syriza en un parti pro-austérité;

• une fois le référendum annoncé, les créanciers feront tout pour étrangler économiquement le gouvernement de gauche ainsi que les forces populaires en Grèce;

• une bataille d’envergure va se produire dans les jours qui viennent, les travailleurs, les travailleuses et les forces populaires ont toutes les raisons d’engager un combat pour une claire majorité et pour une victoire qui affirme: non aux mémorandums; non à l’austérité; non à la dette; non aux chantages des créanciers;

• une victoire va relancer la dynamique populaire et de gauche, elle va démontrer que le rapport des forces en Grèce a changé; elle va indiquer la nécessité urgente d’appliquer de manière unilatérale les promesses faites à Thessalonique (en septembre 2014): arrêt du paiement de la dette; mesures pour améliorer la vie des salarié·e·s et des couches populaires; mettre fin aux privatisations et taxer ceux qui échappent aux impôts, etc. Cela doit se faire en utilisant tous les instruments nécessaires d’ordre social, politique, monétaire, diplomatique;

• deux mondes vont s’affronter dans les jours à venir: d’un côté, celui des gagnants des mémorandums ensemble avec leurs patrons et partenaires internationaux; de l’autre, le monde du travail, des couches populaires et paupérisées; la victoire des uns sera la défaite des autres;

• d’où l’urgence de mettre en place un front uni du NON (non aux propositions des institutions);

• au-delà des fautes politiques commises, personne ne doit sous-estimer les difficultés de la situation. Ce n’est pas le temps pour engager des débats académiques. Une victoire massive peut changer de manière significative la situation en Grèce et au-delà.

C’est dans cet esprit que les forces de gauche s’engagent dans la bataille référendaire. Les réunions qui se tiennent ce dimanche 28 juin ont pour but de constituer et planifier la mobilisation de ce Front pour le vote du 5 juillet. Car, dès son résultat, une nouvelle question se posera: que faire maintenant face à des ennemis déterminés? (Rédaction A l’Encontre)

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