L’Ukraine et la gauche: fatalisme géopolitique et historicisme moral

Par Santiago Alba Rico

Les déclarations de María Jamardo, une journaliste radicale, lors d’une émission de Telecinco, ont scandalisé à juste titre: «Ni ceux qui ont bombardé n’étaient si mauvais, ni ceux qui ont été bombardés n’étaient si bons», en référence au bombardement de Guernica par les nazis [Légion Condor] en 1937, un crime invoqué par le président ukrainien lors de son intervention devant le Congrès des députés [de l’Etat espagnol] le 5 avril 2022. Zelensky, mal informé, pensait avoir trouvé un symbole universel capable de remuer en sa faveur l’imagination indignée de tous les Espagnols; il ignorait que notre bataillon Azov [la Phalange franquiste et ses supporters actuels], beaucoup plus nombreux que le bataillon ukrainien, justifie encore le coup d’Etat de Franco et est reconnaissant de l’aide allemande contre les méchants communistes et les séparatistes basques pervers.

Mais ce que Volodymyr Zelensky ne savait pas non plus, c’est que ses propos allaient également contrarier une partie de la gauche – que j’appelle «estalibán» [contraction entre stalinien et taliban] – qui a considéré que les propos de María Jamardo, monstrueux dans le cas de l’Espagne, s’appliquent à la Russie et à l’Ukraine: les bombardiers russes ne sont pas si mauvais et les bombardiers ukrainiens ne sont pas si bons. De plus, les Russes sont en quelque sorte les gentils, car ils bombardent les nazis ukrainiens. Une partie de la droite et une partie de la gauche sont d’accord pour dire qu’il est acceptable de bombarder des civils dans un autre pays, à condition que les personnes bombardées soient mauvaises. Ils partagent la même vision nihiliste du droit international et de la légalité; ils ne sont pas d’accord sur le contenu du mal à extirper.

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Cet argument estaliban – multiplié en tweets ces derniers jours – fait partie des procédés protéiformes, certains plus intelligents, d’autres plus grossiers, employés par la gauche pour cloner sans vergogne la propagande de l’agresseur russe. Ce n’est pas qu’ils ne savent pas qu’il ne faut pas croire la propagande d’une puissance envahissante; lorsque l’envahisseur était les Etats-Unis ou l’OTAN, ils l’ont toujours fait, et à juste titre. Vous ne pouvez pas accorder de crédibilité, nous le savons, à ce que dit un meurtrier; si je veux croire ses paroles, je dois donc le disculper ou atténuer sa participation au crime. Pour faire confiance à la propagande russe, il faut finalement, comme cela s’est produit dans le passé avec la propagande des Etats-Unis, inverser la relation victime/meurtrier et attribuer l’entière responsabilité de ce qui se passe à celui qui est bombardé. Si nous prouvons que les Ukrainiens, marionnettes de l’OTAN et des Etats-Unis, sont à blâmer, alors nous pouvons croire et répéter ce que dit le Kremlin.

Cette inversion des rôles, d’une infamie éthique remarquable, est la norme propagandiste des agressions impériales et nous l’avons critiquée en Irak et en Afghanistan. Aujourd’hui, de nombreux «gauchistes» succombent à cette norme et, entre déni et contextualisation, n’ont aucun scrupule à opposer la pensée mainstream pro-ukrainienne à la propagande dominante pro-invasion. Les meurtres de Boutcha ont déclenché de véritables délires. Les journalistes sur le terrain – des personnes comme Alberto Sicilia [HuffPost espagnol], Hibai Arbide [Revista 5W] ou Mikel Ayestaran [EITB, télévision basque] – ont été réprimandés pour avoir pris au sérieux les témoignages des survivants et ne pas avoir parlé de «crimes de guerre présumés», une caractérisation juridique que, en réalité, certains voudraient étendre à la guerre elle-même: invasion russe «présumée», bombardements «présumés» de l’Ukraine, siège «présumé» de Marioupol. La Russie ne peut pas faire ce qu’on lui attribue parce qu’elle est la victime; et elle est donc aussi la victime de la propagande ennemie.

Les «subtils» analystes et les pamphlétaires stupides, les politiciens qui se font passer pour des journalistes et les fêlés estalibans partagent cet horizon factuel, matrice de toutes leurs similitudes discursives: si la Russie envahit l’Ukraine, ce sont les Etats-Unis qui envahissent l’Ukraine; si la Russie bombarde l’Ukraine, c’est l’OTAN qui bombarde l’Ukraine. Ce n’est pas ce qui se passe qui se passe, mais le contraire. Non, le négationnisme ne peut pas se limiter aux massacres de Boutcha. Les massacres de Boutcha peuvent être niés dès lors que l’agression de Poutine et donc ses conséquences sont niées à la racine. Si ce n’était pas tragique, ce serait réconfortant de voir tant de personnes adultes, parfois sensées, parfois même sympathiques, emportées par ce besoin enfantin de croire à la bonté ou du moins à la légitimité de «notre» criminel préféré.

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Et pourquoi est-ce «le nôtre»? Ils [les supporters de Poutine] nous assaillent comme les ténèbres de la guerre froide. Certains, même très jeunes, succombent à l’illusion car, malgré l’alliance [de Poutine] avec l’extrême droite mondiale, malgré les déclarations contre Lénine, ils voient une continuité entre Poutine et la révolution bolchevique. Il y a une braise soviétique dans la rébellion anti-système d’une certaine gauche, tout comme il y a une braise de nostalgie franquiste dans la rébellion anti-système de la droite [référence à Vox, à une aile du PP]. La plupart d’entre eux succombent, en tout cas, parce qu’ils continuent, en dernière analyse, à penser, toujours, avec des années de retard – face à la pluralité inquiétante du nouvel ordre mondial – contre l’hégémonie absolue des Etats-Unis et de l’OTAN. Leur position révèle une sorte d’ethnocentrisme négatif et, en fait, très narcissique: ce sont nos institutions occidentales qui apportent tout le mal dans le monde. Contre elles, non seulement tous les moyens sont permis, mais c’est pire: contre elles, nous finissons par revendiquer, comme politiquement et socialement supérieures, des dictatures atroces (pensez, par exemple, à Bachar el-Asad) et des impérialismes alternatifs, comme celui de la Russie, dont nous avons négligé ou défendu l’intervention criminelle en Syrie comme libératrice. Il n’est pas exclu que, si l’Arabie saoudite se rapproche un jour trop de la Chine et que le régime théocratique de Riyad, aujourd’hui ami des Etats-Unis, soit remis en question et fasse l’objet de pressions de la part de la Maison Blanche, Salman (MBS) finisse par nous paraître sympathique et les lapidations révolutionnaires et progressistes.

Cette inversion des rôles (entre victimes et auteurs) fait généralement appel à deux expédients cognitifs. Le premier est le fatalisme géopolitique, c’est-à-dire la géopolitique réduite à la realpolitik. L’autre est l’historicisme moral, c’est-à-dire l’histoire conçue comme une guerre contre le mal. Ce dernier est celui qui, depuis la gauche, reproduit la phrase de Maria Jamardo: en admettant que l’Ukraine soit bombardée (ce qui reste à prouver!), elle le mérite en quelque sorte en raison de son rapprochement avec l’UE, l’OTAN et les Etats-Unis; les Ukrainiens ne sont pas aussi bons qu’ils le paraissent; ils ne sont pas aussi bons que les médias nous le disent. Soudain, la même gauche qui, à juste titre, a temporairement écarté la dictature sanglante de Saddam Hussein pour condamner, à plus forte raison, l’invasion américaine de l’Irak, devient maintenant casuistique et pointilleuse. Il est nécessaire de savoir si et dans quelle mesure l’Ukraine est une démocratie, de parcourir la biographie de Zelensky, de dénoncer chaque groupe nazi et d’être très sensible – tout en justifiant ou en atténuant la tyrannie du Baas en Syrie – à la suspension, par ailleurs injustifiable, des partis politiques en Ukraine. Nous devons être moralement intolérants à l’égard des crimes de guerre impardonnables, mais isolés, de l’armée ukrainienne [sur lesquels le gouvernement dit vouloir enquêter], alors que les meurtres et les bombardements russes et la propre invasion de l’Ukraine par la Russie sont considérés comme «présumés».

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Cette criminalisation casuistique de la victime est souvent inscrite dans un fatalisme géopolitique résumé dans une pensée qui, même dans les textes les plus raisonnés et les mieux documentés, assume plus ou moins cette formule: «C’est ce qui arrive quand on met son doigt dans l’œil du vieil Ours russe.» La même gauche qui considère qu’il est légitime et même impératif que l’Amérique latine se libère du joug traditionnel des Etats-Unis, qui a dénoncé la baie des Cochons et célébré la victoire cubaine [1961], qui s’indigne à juste titre de chaque changement de gouvernement truqué depuis Washington, accepte comme un diktat de la realpolitik le droit de la Russie à avoir sa propre «arrière-cour». Une sorte de fatalisme mécanique nous oblige à considérer les conséquences de mettre le doigt dans l’œil de l’Ours, c’est-à-dire de ne pouvoir éviter ses coups de griffes. Alors qu’il faut, au contraire, percer révolutionnairement le chapeau du vieil Oncle Sam et plumer l’Aigle américain. Mettre son doigt dans l’œil de l’Ours est répréhensible; arracher une plume de la poitrine de l’Aigle est louable, légitime, nécessaire, festif. En conséquence de la combinaison de ces deux logiques – fatalisme géopolitique et historicisme moral – ce secteur de la gauche ne prend pas en compte les faits parce qu’elle n’attend jamais de l’histoire qu’elle produise des faits. Il sait d’avance quels peuples agissent spontanément et lesquels sont manipulés par l’OTAN et les Etats-Unis; et ce secteur décide, par conséquent, quels peuples ont le droit de se rebeller contre la tyrannie, intérieure ou étrangère, et lesquels doivent se soumettre aux nécessités de la lutte contre l’impérialisme des Etats-Unis. Ainsi, il décrète à l’avance que les faits en Ukraine – le massacre de Boutcha, par exemple – sont de la propagande ukrainienne alors que la propagande russe, en miroir, est un fait incontestable. L’envahisseur est la vraie victime et ne ment pas; et c’est pourquoi nous reproduisons et diffusons ses versions avec la délectation mystique de celui qui, contre les ligues de la «pensée dominante», a un accès direct et privilégié à la vérité.

Parce qu’il y a aussi beaucoup d’élitisme dans cette gauche estaliban qui aime avoir raison contre le bon sens et le commun des mortels, enfermés dans les entrailles du système, aveugle et mièvre. Cet élitisme est, dans l’esprit, le même que celui que, contre le «système», nous avons vu chez les négationnistes et les antivax pendant la pandémie. Et il n’est donc pas étrange qu’ici se mélangent la droite et la gauche, Javier Couso [député européen du groupe Gauche unitaire européenne] et César Vidal [historien ayant participé à la version espagnole du Livre noir du communisme], Iker Jiménez [animateur de télévision mélangeant tous les genres] et Beatriz Talegón [actuellement active dans le mouvement indépendantiste catalan: Junts per Catalunya], ceux qui croient que la terre est plate et les anti-impérialistes. Comme je l’ai déjà écrit, lorsque les cadres institutionnels et médiatiques communs de crédibilité ont été affaiblis, l’incrédulité maximale devient le seuil de crédulité maximale. Lorsque vous ne croyez plus en rien, vous êtes sur le point de croire en tout. Nous n’avons même pas de mensonge commun, donc le mensonge qui est partagé par le moins de personnes est celui que nous trouvons le plus acceptable et donc le plus vrai. Le web offre des milliers de niches pour répondre à ce désir désespéré de «distinction». Dans le cas du «gauchisme», cette attitude est plus douloureuse et moins justifiable, car son élitisme cognitif, résultat de son impuissance d’intervention politique, aggrave cette impuissance en se coupant du grand nombre qu’il voudrait attirer. Ses adeptes s’isolent dans la «raison» face au monde et, de cette façon, en plus d’être déraisonnables, ils deviennent politiquement inutiles. Ou même dangereux.

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Le fatalisme géopolitique et l’élitisme paranoïaque, qui sont les sources croisées du même syndrome, finissent par nier l’autonomie, la volonté et la capacité d’agir des autres. Eux, qui «savent», ne peuvent rien faire; les autres, qui font quelque chose, ne sont que des pions du mal sur l’échiquier géostratégique. Ils inscrivent ainsi leurs ruminations négatives permanentes dans un contexte d’où le politique est absent. Et ils se résignent à déléguer leur raison impuissante à l’action supplétive de toute puissance suffisamment destructrice pour perturber l’ordre mondial établi. Ainsi, les mêmes «gauchistes» qui défendent, au niveau local, le droit à la souveraineté, le refusent au niveau international aux Ukrainiens, à qui l’on demande, au nom du pacifisme, de se soumettre à la puissance du plus fort, pourvu qu’il ne soit pas américain. L’autocentré anti-occidentalisme se méfie de toute velléité d’émancipation qui ne passe pas par les moules anti-impérialistes de la vieille gauche, qui continue à penser et à penser le monde, comme Marx le disait de Don Quichotte, «à la mesure d’un ordre qui n’existe plus». Cela s’est déjà produit en Syrie, comme l’explique le grand Yassin al-Haj Saleh, l’un de nos plus grands intellectuels, communiste, emprisonné pendant seize ans dans les geôles de la dictature [actuellement exilé en Turquie], dans un article extraordinaire où il critique même la position de l’admiré Chomsky pour son aveuglement ethnocentrique [article publié le 15 mars 2022 sur New Lines Magazine https://newlinesmag.com/review/chomsky-is-no-friend-of-the-syrian-revolution/]. L’obsession des Etats-Unis dans un monde chaotique, où le mal s’est fragmenté, décentralisé et émancipé du monopole étatsunien, souligne à juste titre, par exemple, la puissance de l’OTAN, mais sous-estime comme subordonnés, subsidiaires ou inoffensifs d’autres dangers – pour la démocratie et la liberté des peuples – qui déterminent pourtant le destin individuel et collectif d’une grande partie de la planète. Chomsky, bien sûr, ne se fait aucune illusion sur Poutine, bien au contraire. Mais sa névrose anti-étatsunienne l’a conduit à abandonner ceux qui, en Syrie, ont tout misé sur la lutte et, dans de nombreux cas, perdu la vie en combattant la dictature; et à entretenir la thèse en Ukraine selon laquelle l’invasion russe est en quelque sorte une réponse automatique à l’encerclement de l’OTAN.

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Nous contextualisons et contextualisons et contextualisons; et nous suspectons et suspectons et suspectons et suspectons. Et à force de contextualiser et de soupçonner, nous dissolvons la responsabilité russe en une guerre perpétuelle entre des maux équivalents, un conflit magmatique inter-impérialiste, une crise capitaliste impersonnelle, une conséquence «naturelle» du déclin civilisationnel, etc. Nous sommes tellement préoccupés par l’histoire et les «structures» que nous y intégrons la décision de Poutine d’envahir un pays souverain et de provoquer des milliers de morts et des millions de réfugiés. S’il était logique d’invoquer la légalité internationale contre l’invasion de l’Irak, il est logique de l’invoquer contre l’invasion de l’Ukraine. S’il est encore logique de faire la distinction entre négociations, pressions, sanctions et agression militaire, il est logique de dénoncer la Russie de Poutine comme seule responsable d’une nouvelle situation dans laquelle la paix mondiale et la survie de la planète, ainsi que la vie des Ukrainiens et des Russes, sont tragiquement mises en danger. Toute raison que Poutine aurait pu avoir contre l’OTAN a été abandonnée dès le moment où son armée a franchi la frontière ukrainienne et, avec elle, la ligne entre mouvement géopolitique et agression armée. Il n’y a pas d’automatismes dans l’histoire. L’OTAN est responsable de la mauvaise gestion de la victoire dans la guerre froide, tout comme les puissances européennes ont mal géré la défaite de l’Allemagne pendant la Première Guerre mondiale. Mais les Ukrainiens ne sont pas plus victimes de l’OTAN que les Juifs n’ont été victimes du traité de Versailles. En outre, c’est terrible à dire, mais Poutine a montré qu’il n’y a actuellement aucune alternative à l’OTAN. La gauche européenne devrait réfléchir à des propositions pour l’avenir au lieu de prêcher un pacifisme qui a beaucoup de sens en Russie, contre la décision de son gouvernement de faire la guerre, mais qui en Ukraine est synonyme de soumission et de capitulation. Les Ukrainiens ont décidé de ne pas se rendre et personne, me semble-t-il, ne devrait le leur reprocher.

La gauche perd non seulement la possibilité de sympathiser, contre Vox et aux côtés d’une majorité raisonnable, avec une cause juste. Elle perd aussi la possibilité de critiquer l’Europe pour ce qu’elle mérite d’être critiquée: sa lente «poutinisation» [des traits autoritaires croissants], dont les institutions sont aussi largement responsables. Je l’ai déjà dit: l’Europe n’a ni gaz ni pétrole et est donc tragiquement dépendante de sources de moins en moins sûres. Elle ne dispose que de «valeurs», de «pratiques», de «modèles d’intervention politique» qu’elle perd rapidement sans jamais les consolider complètement. Elle s’est souvent trahie à l’étranger en soutenant des interventions économiques ou militaires malheureuses, ou en fermant les frontières aux migrant·e·s et aux réfugié·e·s, à tel point que pour une grande partie du monde, plongée dans une crise sans précédent, elle n’est plus un exemple à suivre.

Mais d’un autre côté, il est également arrivé que ce monde méfiant, en pleine dé-démocratisation, pénètre en Europe. Poutine avait déjà furtivement envahi l’UE par le biais des partis d’extrême droite qui, en Hongrie, en France, en Italie et en Espagne, bénéficient d’un soutien bien plus important que leurs homologues ukrainiens. Dans cette situation difficile, notre tâche doit être de «dénazifier» l’Europe de l’intérieur par un approfondissement de la démocratie, c’est-à-dire par des politiques sociales, civiles et économiques qui consolident et renforcent nos droits démocratiques. Si nous ne faisons pas pression pour une UE plus juste, plus démocratique, plus indépendante, plus verte et plus hospitalière, il ne servira à rien que Poutine perde la guerre en Ukraine, car il l’aura gagnée en Europe.

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C’est là le paradoxe: une invasion est devenue une guerre grâce à la résistance ukrainienne. C’est une guerre d’indépendance. Il est prioritaire d’empêcher que cette guerre n’implique l’OTAN; il est prioritaire de soutenir, de défendre et de garantir l’indépendance de l’Ukraine. Notre bellicisme doit être limité par la nécessité d’éviter les conflits internationaux et les affrontements nucléaires; notre pacifisme doit l’être par la nécessité d’affirmer la justice et le droit international. Voilà le dilemme, je pense, sur lequel la gauche devrait débattre, et non pas sur la question de savoir s’il faut ou non applaudir Zelensky intervenant devant le parlement [d’Espagne ou d’ailleurs] ou si le bataillon Azov est composé uniquement de nazis ou comporte également des anarchistes. Ou – pour l’amour de Dieu – si les survivants de Boutcha mentent ou non. Le dilemme est si grand, si plein de dangers et d’incertitudes, si exigeant pour toute notre intelligence et toute notre sérénité, que nous ne devons pas nous rendre coupables de brouiller la seule chose sur laquelle la gauche, comme tout le monde, devrait être claire: qui est l’agressé et qui est l’agresseur. Qui nous devons soutenir – au moins mentalement – et qui nous devons condamner. (Article publié sur le site ctxt-Contexto y Acction, le 8 avril 2021; traduction rédaction A l’Encontre)

Santiago Alba Rico est philosophe et écrivain. Né en 1960 à Madrid, il vit depuis près de deux décennies en Tunisie, où il a développé une grande partie de son œuvre. Ses deux derniers livres sont Ser o no ser (un cuerpo) et España.

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