Par rédaction A l’Encontre
Bezalel Smotrich est «invité à Paris, le 13 novembre, par l’organisation Israel Is Forever, pour un gala de mobilisation des “forces sionistes francophones au service de la puissance et de l’histoire d’Israël”. Une organisation proche des colons extrémistes israéliens, dirigée par l’avocate franco-israélienne Nili Kupfer-Naouri, laquelle affirme qu’il n’existe pas de population civile innocente à Gaza tout en prônant l’entrave de l’entrée de l’aide humanitaire dans l’enclave palestinienne bombardée et privée de tout.» C’est ainsi que les signataires d’une tribune collective publiée dans le quotidien Le Monde, le 10 novembre, présentent l’invitation faite au ministre des Finances de l’Etat hébreu.
La qualification fondée de Bezalel Smotrich par les signataires de la tribune – «il se veut raciste, arabophobe, suprémaciste, colonialiste, annexionniste, révisionniste» – renvoie à la phase actuelle de l’expansion coloniale du gouvernement de Netanyahou et sa guerre génocidaire.
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Le 11 novembre, OCHA (Bureau de la coordination des affaires humanitaires de l’ONU) déclarait en termes mesurés:
«OCHA s’inquiète du sort des Palestiniens qui restent dans le nord de Gaza, alors que le siège se poursuit, et demande d’urgence à Israël d’ouvrir la zone aux opérations humanitaires à l’échelle nécessaire, compte tenu des besoins massifs.
»Dans un nouveau rapport publié aujourd’hui [11 novembre], les organisations humanitaires ont soumis en octobre 50 demandes d’accès au gouvernorat de Gaza Nord aux autorités israéliennes. Trente-trois de ces demandes ont été rejetées d’emblée, et huit ont été acceptées dans un premier temps, mais se sont heurtées à des obstacles en cours de route.
»Les tentatives de coordination de l’évacuation d’un membre du personnel de l’ONU blessé dans la zone de Jabalia ont également été refusées, les autorités israéliennes suggérant que cette personne pourrait tenter d’être transportée à pied par des proches agitant des drapeaux blancs pour s’identifier.»
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Le Washington Post du 12 novembre écrivait:
«Le ministre israélien des Finances, Bezalel Smotrich, a salué lundi 11 novembre la victoire électorale du président Donald Trump, estimant que “le temps est venu” d’étendre la pleine souveraineté israélienne sur la Cisjordanie occupée.
»“La victoire de Donald Trump offre une occasion importante à l’Etat d’Israël”, a déclaré Bezalel Smotrich à ses partisans lors d’une conférence de son parti, selon des commentaires diffusés par son porte-parole. Pendant le premier mandat de Trump, a-t-il dit, “nous étions sur le point d’appliquer la souveraineté sur les colonies” en Cisjordanie, “et maintenant le temps est venu d’en faire une réalité”.
»Bezalel Smotrich a déclaré qu’il avait demandé à la direction de l’administration des colonies du ministère de la Défense, ainsi qu’à l’administration civile de l’armée israélienne en Cisjordanie (COGAT), de préparer des plans en conséquence, selon un compte rendu transmis par son porte-parole.
»Depuis la fin de l’année 2022, le gouvernement de coalition du Premier ministre Benyamin Netanyahou a considérablement étendu la présence d’Israël en Cisjordanie occupée, où l’on estime que 3 millions de Palestiniens “vivent aux côtés” de plus de 500 000 colons.
»L’administration de Netanyahou a approuvé des saisies stratégiques de terres et d’importantes constructions de colonies. Elle a intensifié les démolitions de propriétés palestiniennes. Elle a augmenté le soutien de l’Etat aux avant-postes de colons construits illégalement. Les violences des colons juifs visant des résidents palestiniens sont devenues monnaie courante et se déroulent souvent en présence de soldats ou de policiers israéliens.
»L’annonce faite lundi semble indiquer qu’Israël s’apprête à consolider les mesures annoncées fin mai, lorsque l’armée a réattribué d’importants pouvoirs de gestion sur la Cisjordanie à un poste nouvellement créé de “chef adjoint” au sein de l’administration civile, l’organe gouvernemental d’Israël dans cette région. Le même jour, ce poste a été confié à Hillel Roth, un proche collaborateur de Smotrich, qui est lui-même un défenseur de longue date des colons.
»“Pour aller de l’avant, j’ai [Smotrich] l’intention de prendre la tête d’une initiative gouvernementale déclarant que le gouvernement israélien travaillera avec la nouvelle administration du président Trump et la communauté internationale pour appliquer la souveraineté [israélienne] et en demander la reconnaissance américaine.” […] Dans ses commentaires de lundi, Smotrich a explicitement établi un lien entre l’élection de Trump et la voie qu’il propose d’emprunter. “Après des années au cours desquelles, malheureusement, l’administration actuelle a choisi d’interférer dans la démocratie israélienne et a personnellement refusé de coopérer avec moi en tant que ministre des Finances d’Israël, la victoire de Trump apporte également une opportunité importante”, a déclaré Smotrich, ajoutant que “2025 est l’année de la souveraineté en Judée et en Samarie”, en utilisant le nom biblique de la Cisjordanie.»
Dans Haaretz du 12 novembre, Noa Shpigel en la complétant donne tout son sens à la citation de Smotrich: «2025 est l’année de la souveraineté en Judée et en Samarie. Les nouveaux nazis [autrement dit les Palestiniens tels que qualifiés par le noyau du gouvernement Netanyahou depuis le 7 octobre 2023] doivent en payer le prix par la confiscation définitive des terres, tant à Gaza qu’en Judée et Samarie.»
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Le 10 novembre, Haaretz dans un nouvel éditorial prolongeait ainsi celui du 29 octobre: «L’armée israélienne mène une opération de nettoyage ethnique dans le nord de la bande de Gaza. Les quelques Palestiniens qui restent dans la région sont évacués de force, les maisons et les infrastructures ont été détruites, et de larges routes sont construites dans la région, achevant de séparer les communautés du nord de la bande de Gaza du centre de la ville de Gaza. “La zone semble avoir été frappée par une catastrophe naturelle”, a conclu le correspondant militaire du Haaretz, Yaniv Kubovich, après une visite organisée par les FDI des forces israéliennes sur place la semaine dernière.
»Ce que Kubovich a vu, cependant, n’était pas une catastrophe naturelle mais plutôt un acte prémédité de destruction humaine. Un officier supérieur des FDI, identifié par le journal londonien The Guardian comme étant le général de brigade Itzik Cohen, commandant de la 162e division, a expliqué aux journalistes: “Il n’est pas question de permettre aux habitants du nord de la bande de Gaza de rentrer chez eux.”
»L’officier a déclaré que la grande majorité des habitants des communautés de la zone de Beit Hanoun, Beit Lahia, Al-Attatra, Jabalia (nord de Gaza) ont déjà été évacués. “Nous avons reçu des ordres très clairs”, a déclaré l’officier. “Ma tâche consiste à créer un espace nettoyé. Nous déplaçons la population pour la protéger, afin de créer une liberté d’action pour nos forces.”
»On a demandé à l’officier si l’armée mettait en œuvre le “plan des généraux” conçu par le général de division (à la retraite) Giora Eiland et quelques-uns de ses collègues commandants à la retraite pour expulser les Palestiniens du nord de la bande de Gaza tout en refusant l’aide humanitaire et en affamant ceux qui restent, qui seraient considérés comme des militants du Hamas et donc comme des cibles militaires légitimes. “Je ne sais pas ce qu’est le plan des généraux, je n’en ai aucune idée”, a répondu le commandant. “Nous agissons selon les instructions du commandement sud et du chef d’état-major de l’armée israélienne.”
»Il a précisé que sa division acheminait l’aide humanitaire “vers le sud”, en dehors de la “zone nettoyée” du nord de la bande de Gaza, où Israël interdit l’acheminement de nourriture, d’eau et de médicaments. “L’armée israélienne est une armée morale et éthique”, a conclu l’officier. “Nous opérons dans cette zone […] pour permettre à la population de se déplacer vers le sud, tout en mettant parfois nos propres vies en danger.”
»Il est important d’appeler les choses par leur nom: Eiland a peut-être vendu ces idées au public, mais le “nettoyage de l’espace” dans le nord de Gaza est effectué par les FDI sous la direction de leurs commandants, à commencer par le chef d’état-major, le lieutenant-général Herzl Halevi, et le chef du commandement sud, le général de division Yaron Finkelman, qui sont subordonnés aux directives de la direction politique: le Premier ministre Benyamin Netanyahou, le ministre de la défense Yoav Gallant, récemment limogé, et son successeur, Israel Katz.
»Au lieu de parler du plan des généraux, nous devrions parler des “ordres de Netanyahou”. C’est lui qui dirige et qui est responsable des crimes de guerre commis par les FDI dans le nord de la bande de Gaza au nom de la “guerre de Renaissance”: l’expulsion des Palestiniens, la destruction de leurs maisons et les préparatifs sur le terrain d’une occupation et d’une colonisation juive prolongées.»
Il serait temps que ceux qui se réclament dans les milieux politiques de l’autoproclamé «cercle de la raison» fassent leur la probité de tels simples reportages, pour ne pas dire de telles analyses.
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