Editorial de Esquerda Online
Nous vivons un moment décisif dans l’histoire du pays. Le Brésil s’approche du terrible cap des 500 000 vies perdues par le Covid-19. Le gouvernement Bolsonaro – par ses actions et omissions déjà prouvées par la CPI (Commission d’enquête parlementaire) du Covid, comme suite au retard criminel dans l’achat de vaccins – est directement responsable de cette catastrophe aux proportions bibliques. Mais le génocidaire n’est pas satisfait. Il poursuit son pacte macabre avec la mort, s’attaquant à l’utilisation de masques et prescrivant de la chloroquine. En même temps, chaque fois qu’il le peut, il enflamme sa base néofasciste avec des menaces de coup d’Etat.
Et ça ne s’arrête pas là. Bolsonaro parraine la destruction de l’environnement au service de l’agrobusiness, de l’exploitation minière illégale et de la contrebande de bois. Il promeut une réforme administrative qui attaque les salarié·e·s du public et détruit le service public. En outre, il cherche à faire avancer la privatisation de ce qui reste du patrimoine public, comme Eletrobrás. Le gouvernement encourage également les exécutions policières de Noirs et de pauvres dans les périphéries et les bidonvilles du pays, comme ce fut le cas à Jacarezinho [le 6 mai].
Il n’est pas tolérable de continuer dans cette situation. Il est nécessaire de chasser Bolsonaro du pouvoir le plus rapidement possible. Et cela ne sera possible qu’avec la force de la rue, avec la mobilisation populaire. Attendre les élections d’octobre 2022 est trop risqué, car Bolsonaro tentera de regagner en popularité d’ici là. En outre, le pays ne connaît pas une période de «normalité démocratique». Bolsonaro menace de ne pas accepter les règles du jeu démocratique, ni avant ni après les élections. Le capitaine affirme déjà que les élections de 2022 seront truquées si le vote par bulletin n’est pas adopté [le «vote électronique» est à l’ordre du jour]. Avec cela, il vise à délégitimer les élections en alimentant sa stratégie de coup d’Etat.
Pour toutes ces raisons, pour sauver des vies et des droits sociaux et démocratiques, il est nécessaire de renverser ce gouvernement. En ce sens, il est nécessaire de poursuivre les protestations pour «Dehors Bolsonaro» [Fora Bolsonaro], en organisant samedi prochain, le 19 juin, une manifestation encore plus importante que celle qui a eu lieu le 29 mai.
Le rôle décisif de Lula
Il serait extrêmement important que Lula, le plus grand dirigeant populaire de la gauche, lance un appel aux manifestations. L’ancien président jouit d’une grande influence parmi les travailleurs et travailleuses, notamment parmi les couches les plus pauvres et les plus opprimées de la population. Si Lula utilise sa capacité de dialogue avec le peuple pour expliquer l’importance de la lutte pour Fora Bolsonaro, l’importance d’écarter maintenant du pouvoir le génocidaire, cela renforcera certainement les manifestations populaires.
Le bureau exécutif du Parti des Travailleurs (PT) a publié une déclaration officielle de soutien à la protestation le 19 juin. Mais jusqu’à présent, Lula n’a pas parlé de la manifestation. Lula n’a pas participé à la manifestation du 29 mai et n’y a pas non plus appelé, bien que divers secteurs du PT aient construit la mobilisation. Pourquoi l’ancien président hésite-t-il à appeler à la lutte dans la rue pour la destitution de Bolsonaro, malgré toutes les menaces autoritaires? Nous savons qu’il a travaillé à la formation d’alliances plus larges pour 2022, en cherchant à attirer des secteurs de la bourgeoisie. Ainsi, s’il se lie directement à la lutte populaire pour le renversement du gouvernement, il sera probablement en conflit avec ces secteurs. Nous pensons qu’une telle alliance est une erreur. Ce serait insister sur l’erreur qui a conduit au coup d’Etat [parlementaire] contre Dilma Rousseff [en août 2016]. L’unité que nous prônons pour vaincre Bolsonaro, dans les rues et lors des élections, passe par la construction d’un Front composé de partis de gauche et de mouvements sociaux. Même si l’on prend en compte la stratégie électorale de Lula, se tenir à l’écart des manifestations de rue est une grave erreur de sa part.
Bolsonaro se battra dans les rues et dans les urnes. Il va continuer à se radicaliser, à tester les limites. Si la gauche renonce à la bataille de la rue, elle ouvrira la voie à l’avancée de l’extrême droite néofasciste. C’est pourquoi il est important que Lula s’engage activement en appelant aux manifestations. La force de la rue, construite par le Front unique de la gauche et des mouvements sociaux, est la clé pour vaincre Bolsonaro.
Le temps est venu: Lula doit appeler au 19 juin
Nous avons à ce stade une occasion qu’il ne faut pas manquer. En raison de l’expérience tragique vécue par la population lors de la pandémie, une majorité sociale contre Bolsonaro s’est formée dans le pays, comme le montrent tous les sondages. Cette majorité populaire est encore plus forte dans les grands centres urbains et chez les jeunes. En exprimant et traduisant le sentiment majoritaire du peuple dans les rues, comme cela a été fait le 29 mai, nous accentuons, à gauche, la consolidation et l’expansion de l’érosion de Bolsonaro dans la société, en particulier, dans les masses laborieuses, en visant son renversement. C’est la méthode la plus efficace pour vaincre politiquement Bolsonaro et désamorcer tout risque de coup d’Etat.
Le 19 juin, samedi prochain, nous pourrons organiser la plus grande manifestation de rue depuis l’élection de Bolsonaro, démontrant que ce gouvernement génocidaire est affaibli, ne comptant que sur le soutien d’une minorité de plus en plus isolée. Si Lula entre de plain-pied dans cette lutte pour que Bolsonaro dégage maintenant, comme le fait Guilherme Boulos, du PSOL, la victoire contre le fascisme est plus proche. C’est la responsabilité historique qui incombe à Lula. (Editorial publié sur le site d’Esquerda Online, site de la tendance Resistencia du PSOL, le 14 juin 2021; traduction rédaction A l’Encontre)
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