Brésil 2016. Spoliation brutale et sortie de capital conduisent à une impasse historique

Ils inaugurent 2016: Dilma Rousseff (Présidente) et Nelson Barbosa (Finances), un sourire dévalué... pas «real»
Ils inaugurent 2016: Dilma Rousseff (Présidente) et Nelson Barbosa (Finances), un sourire dévalué… pas «real»

Entretien avec Ruy Barga Gabriel Brito et Valéria Nader

Ruy Barga, sociologue du travail, est professeur à l’USP (Universidade de São Paulo). Il est affilié à l’organisation CSP-Conlutas. Il a été rédacteur de la revue Outubro de l’Institut d’études socialistes. Il a présenté sa thèse sur le thème: La politique du précariat: du populisme et l’hégémonie luliste. Il a publié de nombreux ouvrages, parmi lesquels, en 2015, aux éditions Alameida, São Paulo: A pulsão plebeia: trabalho, precariedade e rebeliões sociais.

Cet entretien publié le 6 janvier 2016 dans Correio da Cidadania s’inscrit au sein d’un débat généralisé, entre autres dans la gauche «classiste», sur la situation sociale, économique et politique du Brésil. Et cela dans un contexte de perte de crédibilité énorme du néo-PT de Dilma Rousseff et d’un Lula qui s’affirme «un libéral», de manière décomplexée, comme le disent et l’écrivent les «acteurs» (dans tous les sens du terme) des médias français, toujours à la recherche de termes euphémisants pour Nicola Sarkozy ou Laurent Wauquiez, et d’autres Emmanuel Macron.

Nous avons publié un nombre important de traductions d’articles sur le Brésil, – certainement parmi les plus nombreux sur un site en langue française – qui permettent aux lecteurs et lectrices de saisir les débats qui traversent la gauche dite radicale dans une phase nouvelle après celle qui fut, apparemment, «aux mains du PT», de 2003 à 2015.

Le nombre de visites portant sur ces articles confirme leur intérêt. Le terme BRICS… ne commence-t-il pas par B? Même si la valeur de cet acronyme est avant tout médiatique et a peu à voir avec les dynamiques spécifiques de ces formations sociales, malgré des interconnexions nombreuses. (Rédaction A l’Encontre)

Correio da Cidadamia . Après une année qui semble ne pas avoir existé dans la vie «utile» du pays, 2016 commence dans le même climat de pessimisme que 2015, notamment en ce qui concerne la dépression économique. Qu’attendez-vous de cette année qui commence à peine ?

Ruy Braga : Malgré les actions de changement menées dans la politique économique depuis la nomination de Nelson Barbosa au Ministère des Finances [en remplaçement de Joaquim Lévy de la Bradesco, démissionaire; Barbosa a été membre du Conseil de la Banque Régionale du Brésil et a exercé de nombreuses fonctions dans le cadre du ministère des Finances], on peut s’attendre à la continuation de l’orientation générale du second gouvernement de Dilma Rousseff %en fonction depuis janvier 2011]. Cette orientation consiste à garantir la transition d’un régime d’accumulation appuyé fondamentalement sur la surexploitation du travail salarié pour ce que nous pouvons appeler un régime d’accumulation appuyé centralement sur des stratégies de spoliation sociale.

En somme, cela signifie un recul des droits du travail et des droits sociaux. On parle de nouvelle «tournée» de réformes de la prévoyance sociale, d’élévation de l’âge de la retraite, de diminution de certains droits constitutionnels, spécialement ceux liés à l’obligation de faire des investissements publics dans des domaines sociaux, et d’approfondissement de l’orientation rentière [tirant bénéfice de la dette interne en passant, celle externe, les taux de change, les exportations de commodities ou le pétrole et ses retombées], structurée surtout dans le monde des finances et de ses chantages etc.

fora todos eles_sitebDu point de vue de la structure sociale, je ne vois pas jusqu’à maintenant, à l’intérieur de ce gouvernement, se dessiner une alternative progressiste qui privilégie les intérêts des travailleurs. Le plus probable, c’est l’approfondissement de cette stratégie de spoliation sociale à fin de garantie des bénéfices des capitalistes.

D’un autre côté, la crise politique entre dans un moment de stand by, mais avec une évidente détente, en prenant en compte le fait que le grand chantage qui a marqué l’année 2015, à savoir la menace de l’ «impeachment», est tombée avec le début du processus mis en route à la Chambre des députés. A mes yeux, cela place le gouvernement dans une position un peu meilleure, puisque celui-ci va pouvoir se réorganiser autour d’une cause politiquement légitime, à savoir la réaction à une tentative de coup d’état parlementaire «à la paraguayenne» initiée par un président de Chambre [Eduadro Cunha du PMDB] qui est, et c’est de notoriété publique, un politicien corrompu.

Cela signifie qu’il y aura, à mon sens, une réorganisation des forces «gouvernistes» autour du pouvoir de la présidence de la République en défense de son mandat. Cela tend à attirer des secteurs qui étaient en train de se détacher du gouvernement ou qui étaient en crise ouverte avec celui-ci. Beaucoup de militants de gauche seront à nouveau attirés par le pôle de la légalité. Ainsi, la position «gouverniste» sortira renforcée du processus d’«impeachment».

Pourtant, je dirais que 2016 sera une année différente de 2015. Le gouvernement fédéral devra retrouver une certaine capacité d’initiative sur la scène politique, être un gouvernement plus actif que ce qu’il a été l’année passée. Cependant, du point de vue économique, la tendance est à la consolidation d’un régime d’accumulation (au travers d’une spoliation) qui est tout à fait délétère du point de vue des travailleurs.

Correio da Cidadania: Concernant le processus d’  «impeachment» de Dilma, nous avons vu que le va-et-vient continue, c’est-à-dire qu’il y a une alternance entre fortes tensions et apaisements apparents. Au-delà de cela, la possible chute d’Eduardo Cunha a été repoussée à février, ce qui peut-être créera une dynamique semblable d’alliances et de ruptures entre les groupes politiques dominants. Qu’attendez-vous de tout cet échiquier couvert de pièces en mouvement? Croyez-vous en un grand accord national en faveur de la stabilité, à la manière proposée par le scientifique politique André Singer dans un article publié récemment ?

Ruy Braga : Je dirais la même chose que Florestan Fernandes: le pacte conservateur brésilien est implacable. Dans une conjoncture politique marquée particulièrement par la polarité Dilma-Cunha, nous avons une comparaison grotesque: Eduardo Cunha ne correspond absolument à aucune alternative possible et il est fort probable que nous voyions la présidence sortir renforcée de tout cela.

F.H. Cardoso présidentialise Lula... avec une technique éprouvée
F.H. Cardoso présidentialise Lula… avec une technique éprouvée

Même moi qui ai toujours soutenu une posture d’opposition de gauche à Dilma et qui ai annulé mon vote au second tour des dernières élections présidentielles, je dois admettre qu’il n’y a pas la plus petite comparaison entre les deux figures. Un gouvernement PSDB-PMDB [Parti de la social-démocratie brésilienne – Parti du mouvement démocratique brésilien] serait un immense désastre pour les travailleurs, pire encore que le gouvernement de Dilma. Et comme ce ne serait pas un gouvernement capable de ramener le climat de pacification sociale de l’ère de Lula, il ne serait pas utile non plus aux nombreux secteurs bourgeois qui dépendent des marchés internes. Soyons clairs, avec Cunha il n’y a pas de solution. Pour cela, il me semble que, fondamentalement, le processus d’«impeachment» est condamné à l’échec, et que l’échec d’un tel processus fortifie le pôle vainqueur, qui est celui du gouvernement fédéral.

Dans ce sens, 2016 sera probablement une année marquée par la reprise d’une certaine capacité d’action politique du gouvernement. C’est cela mon principal pronostic. Ce sera une année marquée par la tentative du gouvernement de retrouver une certaine marge d’action politique. Et il est fort probable que Cunha tombera dans les prochains mois, compte-tenu de la situation absolument grotesque consistant dans le fait qu’il y ait à la tête de la Chambre fédérale un corrompu notoire.

Correio da Cidadania: Après un ajustement budgétaire lourd, le ministre Joaquim Levy vient de quitter le gouvernement, remplacé par Nelson Barbosa. Cependant, d’après ce que vous avez dit au début, on ne peut pas attendre une orientation macro-économique clairement distincte pour 2016 ?

Ruy Braga : Non, parce que fondamentalement aucun projet alternatif n’a été construit. Ce que nous avons aujourd’hui, c’est l’épuisement complet du modèle de développement appuyé sur un certain rythme d’accumulation des moteurs traditionnels de l’économie brésilienne, comme la production de commodities, les investissements de la construction lourde, l’expansion de l’agronégoce, les investissements dans le domaine de l’énergie et du pétrole et, principalement, la consommation populaire, avec l’accès d’une masse croissante de la population au crédit, ce qui a provoqué une augmentation exponentielle de l’endettement des familles qui atteint maintenant des taux records dans le pays.

Cette formule ne va pas se répéter dans les prochaines dix années. Sur la scène internationale, il n’y a pas devant nous de perspective de reprise en Chine, en Inde ou même dans les pays d’Europe. Au contraire, la décélération chinoise est encore pire que ce que l’on imaginait l’année passée. La reprise nord-américaine est notable, mais encore très modeste. Au-delà de cela, l’évolution économique des Etats-Unis est fortement liée à la croissance chinoise… Tout cela fait que très probablement, dans la prochaine période, le marché mondial va croître à des taux très modérés, différemment des quatorze dernières années.

ruy-braga1L’économie brésilienne, qui s’est spécialisée dans l’exportation de commodities, reste naturellement dans une situation délicate. D’un autre côté, la structure sociale brésilienne est marquée par une énorme surcapacité productive. Les principaux secteurs de l’économie ont beaucoup de stock et trop de stock «dormant». Les entrepreneurs regardent donc vers leurs entreprises en se demandant: «Pourquoi investirais-je si dans ma propre fabrique j’ai une énorme capacité ‘dormante’ qui n’est pas effectivement absorbée par la demande?» Il s’agit là d’une question classique pour le marxisme : le problème de la contraction cyclique.

Les familles sont endettées, elles doivent donc se préoccuper en premier lieu de la réalité très incertaine du marché du travail et de l’augmentation du chômage et du sous-emploi, ce qui signifie fondamentalement la compression de leur revenu. Quand elles sont très endettées, les familles adoptent d’autres stratégies. Elles ne consomment pas, elles paient leurs dettes comme elles le peuvent. C’est-à-dire qu’elles vivent de la main à la bouche et les seuls secteurs qui de fait ont jusqu’à présent été le moins touchés par la chute de consommation sont ceux des biens de subsistance les plus élémentaires. Tout cela fait que le modèle luliste ­– le régime d’accumulation de la dernière période – s’est épuisé. Et il n’y a rien à la place de cela, rien d’ébauché, il n’y a pas d’alternative crédible au collapse du modèle actuel.

Il est important de comprendre que le capitalisme fonctionne comme cela : quand vous avez des moments où l’économe est marquée par une expansion, vous avez une certaine marge de manœuvre en termes de concessions, notamment sur les droits liés au travail et sur les droits sociaux… Normalement, de telles périodes d’expansion sont appuyées, non pas exclusivement mais principalement, sur les secteurs salariés de la classe ouvrière, c’est-à-dire sur l’exploitation du travail salarié. Dans le cas d’une structure sociale semi-périphérique et tardive comme l’est la brésilienne, sur l’exploitation du travail salarié bon marché, ajouterais-je.

Les moments de contraction cyclique, comme ce que nous vivons aujourd’hui, imposent une série de défis qui tendent à faire que les entreprises dépendent chaque jour plus de ce que j’appellerais, sur les traces de Rosa Luxembourg, une « accumulation politique de capital ». C’est-à-dire que les entreprises dépendent de la violence politique des gouvernements. Elles dépendent même du fait que tel ou tel gouvernement déplace ses stratégies d’accumulation vers ce qui constitue très exactement la spoliation des concession faites au moment antérieur, c’est-à-dire durant l’expansion du cycle économique. S’il y a eu dans la période antérieure une augmentation de la masse salariale, alors nous aurons maintenant une attaque contre la masse salariale. Si dans la période antérieure on a pu observer une certaine avancée, même modérée, en termes de droits, alors c’est à ces droits qu’on va s’attaquer dans la période suivante etc.

Dans ces moments de contraction cyclique, la politique et ses décisions tendent à élargir les espaces pour la spoliation sociale : spoliation des droits sociaux, des salaires, du temps de travail des gens, des ressources naturelles, c’est une spoliation de tout ce qui est public et qui se trouvait jusqu’alors à la marge, ou relativement à l’extérieur du modèle d’exploitation antérieur.

Ma prévision est que nous allons assister à un approfondissement de la marchandisation du travail, de l’argent et de l’environnement à une échelle plus grande encore qu’au cours des quatorze dernières années. En somme, nous aurons en face de nous, sous des oripeaux bien différents, une intensification des attaques contre les intérêts des travailleurs. Et cela aussi bien du point de vue des droits que du salaire ou de l’emploi. La tendance est à l’approfondissement de la dégradation des conditions de travail, avec l’augmentation du sous-emploi, la diminution des salaires…

Nous ne pouvons pas oublier que malgré toutes les difficultés, la dernière période a été marquée par une augmentation réelle de la masse salariale. Celle-ci a crû, ce qui signifie qu’il y a plus d’argent à disposition dans les familles ouvrières. Cela est déjà en train d’être attaqué. L’augmentation du chômage est le « truc » le plus typique pour discipliner la classe ouvrière et approfondir ses conditions d’exploitation. Il n’y a aucun doute à cela.

Et il n’y a pas de plan B. Il n’existe pas d’ «embardée» généralisée qui aille dans la direction d’une alternative économique différente, avec un investissement massif dans des secteurs à forte intensité de capitaux, etc. Dans le meilleur des cas, nous allons exporter plus de voitures en raison du nouveau niveau du dollar. Mais il n’y a rien d’innovateur à l’horizon en termes d’alternatives. L’unique chose que l’on voie à l’horizon, c’est l’attaque contre les gains, petits ou modérés, obtenus par la classe ouvrière au cours de la période antérieure, dans le but de tenter un processus plus accentué d’accumulation.

La gauche socialiste doit comprendre que, dans le capitalisme, le développement signifie l’accumulation, c’est-à-dire l’approfondissement de l’exploitation. De nouveau: développement = accumulation. Et l’accumulation implique des bases sociales, implique des pratiques économiques et implique des formes d’intervention dans la vie politique. Pour garantir l’accumulation croissante, il sera nécessaire d’attaquer les travailleurs. Il n’y a pas d’alternative, il n’y a pas de médiation possible dans la situation actuelle. Si les secteurs «gouvernistes» espèrent une réédition de l’arbitrage luliste entre les classes, ils vont devoir attendre longtemps !

Lula et sa femme: le «triomphe de 2003»
Lula et sa femme: le «triomphe de 2003»

Correio da Cidadania : Dans une interview accordée au Correio en mars 2015, vous disiez que le «gangrènement» du modèle économique pourrait parallèlement emporter conjointement ledit «lulisme». Que pensez- vous de ce processus historique récent au regard de ce début d’année?

Ruy Braga : A mon avis, le lulisme est fini parce que le consensus est fini. Le lulisme a été fondamentalement une stratégie de politique de pacification sociale, appuyée sur deux types de consentement, distincts mais complémentaires. L’un, plus passif, est celui des masses qui adhèrent au gouvernement parce qu’elle sont séduites par la relative diffusion de la richesse parmi des secteurs du monde du travail, l’augmentation de la formalisation sur le marché du travail, le crédit populaire et les politiques publiques d’sssistance qui ont tiré des millions de travailleurs de la misère (entre autres dans le Nordeste). Il y a en effet eu une petite marge de concession aux travailleurs, et maintenant celle-ci est en train d’être attaquée.

L’autre consentement est un consentement actif de la part des directions des mouvements sociaux du pays qui sont nés depuis la redémocratisation, une époque qui a vu naître deux grands mouvements, l’un syndical, hégémonisé par la CUT (Centrale syndicaled), et le MST (Mouvement socialiste des travailleurs). Les directions des années 1980 et 1990 ont été séduites par les mille charges existant dans l’appareil d’Etat et par les possibilités d’enrichissement offertes par les positions occupées dans les conseils de gestion des fonds de pension.

En somme, les deux, comme d’ailleurs la plus grande partie des mouvements, ont été séduits par le gouvernement fédéral, ce qui signifie une pacification du pôle de résistance à certaines politiques, et même à certaines politiques très antipopulaires, au long des dernières douze années. Le moment actuel signifie que le lulisme en tant que stratégie de pacification sociale est au bout, parce qu’il n’y a pas de consensus capable de garantir la reproduction des bases sociales de cette stratégie de pacification. Du point de vue des masses populaires, on assiste à un détachement progressif de l’orientation générale du gouvernement, et du point de vue des directions des mouvements, il existe un approfondissement de cette crise, puisque les directions ne se sentent pas à l’aise avec les attaques du gouvernement contre les travailleurs.

Dilma Rousseff et Joaquim Levy: «Le pragmatisme de la gouvernabilité a battu en brèche les songes et l'histoire du PT» (Carta Capital, 9 janvier 2015)
Dilma Rousseff et Joaquim Levy: «Le pragmatisme de la gouvernabilité a battu en brèche les songes et l’histoire du PT» (Carta Capital, 9 janvier 2015)

Il y a une crise de représentation appuyée sur l’augmentation des tensions entre les directions des mouvements et le gouvernement. Cela a été visible au cours de la dernière période, avec des critiques de la CUT contre le Ministère de l’économie et les politiques adoptées par Joaquim Levy. C’est normal et cela confirme les caractéristiques du pouvoir syndical, qui à un certain niveau doit offrir des contreparties à ses bases, puisqu’il travaille sans la stabilité de la forme de domination appuyée sur la propriété, quelque chose de typiquement capitaliste. Ainsi, le pouvoir syndical est plus perméable à la pression de ceux d’en bas.

Cependant, comme il n’y a pas de consensus, il n’y a pas de lulisme, pour le dire ainsi. Le lulisme, en tant que mode de régulation du conflit Capital versus Travail, est mort. Et aucune alternative politiquement stable n’est apparue à sa place. Il y a une grande confusion, on ne sait effectivement pas quel sera le nouveau mode de régulation et si de fait il existera un mode de régulation capable de stabiliser le conflit Capital/Travail dans le pays. Je pense que non. Je crois que ce mode de régulation va se nourrir de la destruction du mode antérieur.

Je pense que d’un côté les classes populaires continueront à être assez détachées du gouvernement et que de l’autre, les bases « governistas », principalement le mouvement syndical, continueront à graviter autour du gouvernement et à faire tout type de pression. Sans doute qu’une partie de ces bases sera attirée par toute miette que le gouvernement offrira, n’importe quelle petite concession. Et qu’une autre, principalement dans les secteurs du mouvement social et syndical plus proches de leurs bases, se sentira progressivement plus «pressionnée» par l’activisme sporadique des classes subalternes

Il me semble qu’au jour d’aujourd’hui, il n’est plus possible de parler de régulation dans le pays, parce qu’il n’y a pas les bases sociales capables de garantir la stabilité du modèle de développement et que, fondamentalement, cela passe par des concessions aux masses. Nous vivons dans une immense confusion avec un horizon qui très probablement continuera à être marqué par des attaques directes contre les travailleurs, qui de leur côté tenteront de défendre leurs droits.

Correio da Cidadania: Qu’avez-vous pensé des mouvements apparus en 2015 à gauche du spectre politique et que pourrait-on, ou devrait-on, espérer de ces groupes, mouvements et partis qui prétendent encore porter un autre projet pour le pays?

Ruy Braga: Du point de vue de telles mobilisations, l’année 2015 a été marquée par deux pôles. D’un côté, il y a eu une augmentation de l’échelle et une intensité de la mobilisation des secteurs moyens traditionnels, ce qui a fait que les secteurs populaires ont vécu en quelque sorte sur la défensive tout au long de l’année. Et une telle attitude a été marquée par une désorientation des directions traditionnelles des mouvements populaires du Brésil, en raison de l’inflexion réactionnaire et conservatrice du gouvernement Dilma, avec à l’avant l’ex-ministre de l’Economie Joaquim Levy. Et dans le dernier trimestre de l’année 2015, nous avons vécu une relative réorganisation des forces de «gauche» autour de la défense de la légalité, en raison du processus d’«impeachment» lancé par le président de la Chambre des députés, ce qui a permis au gouvernement de souffler un peu.

Ainsi ont coexisté dans les rues ceux qui défendaient le gouvernement (étant donné l’absence d’alternatives crédibles capables de résoudre la crise) et les secteurs populaires, mouvements sociaux et syndicats sur la défensive, qui se positionnaient de manière critique contre les mesures d’austérité du gouvernement fédéral et contre l’« impeachment». A la fin de l’année, nous avons vu une «ré-agglutination» des secteurs «gouvernistes» en défense de la légalité, qui a évidemment attiré une partie importante du mouvement critique, y compris de l’opposition de gauche, face à la situation grotesque d’un processus d’»impeachment» lancé de cette manière.

Pour ce qui est des mouvements sociaux, les choses se sont passées de manière plus pendulaire. Jusqu’au mois de septembre, on a assisté à une attitude relativement sur la défensive, avec une intensification de la critique à l’égard du gouvernement, et vers la fin de l’année, il y a eu une augmentation de la mobilisation qui a débouché sur la manifestation du 16 décembre, structurée autour de la légalité, qui a connu un relatif succès.

500'000 emplois détruits dans la construction
500’000 emplois détruits dans la construction

Pourtant, je relève que les conditions socio-économiques plus profondes, c’est-à-dire une déstructuration des piliers de la dernière période et l’augmentation du chômage, ont miné la force que la classe ouvrière avait accumulée jusqu’en 2014. Le système d’accompagnement de grèves du DIEESE [Département intersyndical de statistiques et d’études socio-économiques] vient de publier les données de 2013. Celles-ci sont impressionnantes : il y a eu plus de deux mille grèves, avec une reprise flagrante de l’activité gréviste dans tout le pays, principalement dans les secteurs privés et entrepreneuriaux, également avec une participation des fonctionnaires publics et une forte présence de secteurs-clé de l’économie brésilienne, comme ceux de la métallurgie et du pétrole. Cela a fait que des forces se sont accumulées en termes de masse salariale et de pouvoir politique.

Mais à partir de 2014, avec la détérioration du marché du travail et l’augmentation importante du chômage en 2015, la tendance d’une partie de cette force accumulée est à l’érosion et à l’affaiblissement d’une telle capacité de mobilisation. Il me semble cependant que cette force qui a éclaté à gauche des mouvements, du mouvement syndical en particulier, est relativement dissociée du processus d’érosion de la force sociale de la classe ouvrière.

Le scénario est assez contradictoire. Je pense que nous aurons une période marquée par une attitude plutôt défensive adoptée par les classes ouvrières en raison de l’augmentation du chômage, mais qu’il y aura une reprise de la capacité d’organisation des secteurs « gouvernistes » autour de la présidence de la République. D’un autre côté, je comprends que compte tenu de la détérioration économique, les secteurs plus exploités et plus dominés devront jouer un rôle central dans la lutte politique future, lutte qui sera supérieure au moment antérieur. En somme, je pense que les secteurs de la classe ouvrière syndicalement organisés reculeront, si l’on considère les choses de manière comparative, et que les mouvements sociaux tels que le MTST (Mouvement des travailleurs sans toit) avanceront.

Correio da Cidadania: Est-il possible de concevoir un autre modèle cohabitant avec les secteurs « gouvernistes » ou seule la rupture totale avec le lulisme et le pétisme peut-elle créer une crédibilité suffisante au sein de la population pour cette finalité ?

Ruy Braga : Il n’y a pas de doute que nous avons besoin d’une alternative radicalement différente de ce que l’on a maintenant, cela parce que le lulisme en tant que mode de régulation est terminé et qu’en tant que régime d’accumulation il a collapsé. Il n’y a en effet pas d’espace à l’horizon pour augmenter les concessions en faveur des travailleurs mais il y a l’espace pour lancer des attaques toujours plus profondes contre les travailleurs. Les forces « gouvernistes » sont incapables d’imaginer une alternative parce qu’elles sont enchevêtrées dans l’Etat et qu’elles feront n’importe quoi pour garantir cette position privilégiée, même si elles doivent agir contre les intérêts des travailleurs.

Quant aux secteurs d’opposition, il semble qu’ils soient encore trop fragiles pour présenter une proposition crédible, même si on a assisté à un relatif renforcement de ces secteurs au cours de la dernière période. Quoi qu’il en soit, c’est l’unique alternative possible à moyen terme : parier sur les secteurs de gauche intransigeants à l’égard du gouvernement fédéral et sur la formation d’un pôle alternatif au bipartisme PT-PSDB qui s’est établie dans les vingt-cinq dernières années. C’est le pari que je fais.

Il n’y a pas d’alternative possible à l’intérieur du « gouvernisme ». Il faudra que celle-ci se construise hors du « gouvernisme », dans ce que j’appellerais un troisième camp, capable d’organiser la lutte de classe dans le pays de manière progressiste pour les travailleurs. Je crois que la prochaine période sera marquée par des luttes de classe aiguës : politiquement, économiquement, culturellement et idéologiquement.

Il n’y a donc plus d’espace pour les médiations construites par le lulisme avec leurs champs politiques intermédiaires et leurs hybridismes politiques. Il n’y a plus un tel espace. Ce qui existe en réalité, c’est la nécessité d’une attitude plus radicale. Dans ce sens, les secteurs de la gauche dite « extrême » ont devant eux un vaste champ pour travailler. Reste à savoir s’ils seront capables d’organiser l’indignation qui croît à l’intérieur des classes travailleuses et subalternes dans le pays.

Correio da Cidadania : Scandale du Lava Jato, crise à la Petrobrás, tragédie de la Samarco (deux barrages qui cèdent et inondations massives par boues polluées de métaux divers), chômage au plus haut niveau, crises hydriques et énergétiques en augmentation, attaques contre l’éducation publique, militarisation barbare du quotidien… Vers quoi le Brésil semble-t-il cheminer ?

Ruy Braga : Je mise tous mes atouts et toutes mes espérances sur les secteurs jeunes, sur les fils de la classe ouvrière qui aujourd’hui sont dans les écoles, dans l’enseignement moyen, ces étudiants qui ont inondé le marché du travail durant la dernière période, sur les jeunes qui sont à la recherche d’un premier emploi et sur les secteurs les plus atteints par le sous-emploi. Sur tout ce qui a à voir avec les secteurs de la classe ouvrière qui vivent entre ces deux pôles : d’un côté l’approfondissement de l’exploitation économique et de l’autre la possibilité réelle d’exclusion sociale. Et de tels segments coïncident avec les secteurs jeunes, noirs et féminins de la classe ouvrière brésilienne, qui ont montré une énorme capacité d’auto-mobilisation. Nous avons clairement vu cela en juin 2013, et nous sommes en train de le voir aujourd’hui avec l’augmentation de la mobilisation des étudiants de l’enseignement moyen public et la vague d’occupation d’écoles dans l’Etat de São Paulo, de Goiás etc.

Le grand défi pour une sortie progressiste de la crise brésilienne passe nécessairement par la construction de ponts entre ces secteurs jeunes et auto-mobilisés, qui ont beaucoup de vitalité combative et qui ont également été mieux formés, puisqu’ils ont bénéficié de plus de scolarité que la génération antérieure. Et en même temps, ils se trouvent immergés dans des conditions très mauvaises d’embauche, de revenu et de travail, faisant l’expérience dans leur propre chair des contradictions du modèle de développement brésilien, dont la capacité expansive s’est épuisée. Une issue politiquement progressiste pour la crise brésilienne passe nécessairement par une mobilisation de ce jeune précariat urbain.

Le défi est le suivant : articuler les secteurs combatifs qui incarnent un programme de défense des droits sociaux, de la santé, de l’éducation, du transport public de qualité, des revenus, du marché du travail formel et des droits à la protections sociales. Cette génération est celle qui incarne de telles conditions, aux côtés de secteurs plus désorganisés de la classe ouvrière. Le grand défi consiste à parvenir à politiser la lutte entière (qui évidemment est politique, comme toute lutte sociale l’est), mais également à réussir à construire des projets alternatifs à ce que nous avons vu jusqu’à aujourd’hui. C’est-à-dire un projet alternatif au lulisme.

Dans ce sens, en dépit du fait que 2015 a été une très mauvaise année en termes d’économie, de chômage et de crise hydrique (avec cette énorme tragédie de la Mariana qui montre la signification de l’accumulation par spoliation du milieu ambiant), et qu’elle s’est terminée symboliquement par un incendie au Musée de la langue portugaise, bref qu’elle a été une année horrible pour les classes populaires brésiliennes, nous avons également assisté à l’émergence politique d’une génération qui va faire parler d’elle. Et c’est exactement sur cette nouvelle génération que je parie sur ces cartes, sur mes atouts.

Valéria Nader est économiste et éditrice du Correio da Cidadania ; Gabriel Brito est journaliste.

1 Commentaire

  1. LA CRISIS DE BRASIL Y LA GEOPOLÍTICA SUDAMERICANA

    La crisis actual de Brasil no puede reducirse a un fenómeno puntual de mera
    índole política o económica. Sus orígenes o raíces deben buscarse en su
    pasado histórico próximo y remoto, y enla diagramación espacial y geográfica
    de su expansionismo territorial, de su colonialismo interno, y de su
    malversada representación política y gerenciamiento empresarial.

    Este pasado histórico, condicionante de la crisis actual, tampoco se debe
    reducir exclusivamente a las fronteras brasileras pues alcanza también a
    todos sus vecinos de la cuenca chaco-amazónica, y tiene por tanto en su
    matriz histórica una dimensión espacial, que pone en tela de juicio la
    subsistencia de los nacionalismos y chauvinismos sudamericanos, que no
    supieron o no quisieron encarar obras de infraestructura hidráulica que
    conectaran sus cuencas interiores. Sin embargo, estas cuencas fueron
    explotadas por represas hídricas para extraer electricidad que era reenviada
    a los centros del litoral marítimo. En el caso específico del Brasil, esta
    sobreexplotación hídrica fue en perjuicio del medio ambiente y de la
    navegación fluvial, incurriendo sus autoridades en omisiones dolosas que
    deberían ser punibles por la justicia brasilera.

    Ahora bien, es sabido por las discusiones sobre las crisis mundiales
    ocurridas en el pasado histórico moderno, que estas consistieron en grandes
    movimientos bélicos, unas veces anteriores y otras posteriores a tremendas
    convulsiones sociales y políticas, ocurridas en suelo europeo, pero que se
    trasladaban a sus colonias de Asia, África y América como « válvula de escape
    para ordenar su propio espacio interior » (Villacañas Berlanga, 2008, 256).

    Estas conmociones políticas y sociales que provocaron las ordenaciones del
    espacio interior europeoy que impactaron en la periferia mundial fueron
    sucesivamente: a) las guerras de religión y las revoluciones inglesa y
    portuguesa que culminaron en la Paz de Westfalia (1648) y en el nacimiento
    del estado absolutista; b) las guerras napoleónicas y las revoluciones
    emancipadoras latinoamericanas que culminaron con la Paz de Viena (1815) y
    su frustrado intento restaurador del colonialismo español en América; y c)
    las guerras mundiales del siglo XX que terminaron en la Paz de Versalles
    (1918),que acabó con cuatro imperios centenarios (prusiano, zarista,
    austro-húngaro y otomano), y en la Conferencia de Yalta (1945) que liquidó
    el III Reich, la Italia Fascista y el Japón Imperial, pero que no alcanzó a
    licuar o desmembrar el populismo de Brasil (Varguismo), Argentina
    (Peronismo), y Venezuela (Perezjimenismo).

    En cuanto a la América Latina en especial, es también sabido que como
    consecuencia de la invasión napoleónica a España y la prisión de su monarca
    en Bayona, si bien la colonia hispanoamericana se fragmentó en múltiples
    naciones-estados, la colonia lusitana –amenazada por la misma invasión–
    preservó su integridad política merced a la oportuna mudanza de la familia
    real al Brasil, operada por la Armada Británica.

    Pero lo que la historiografía latinoamericana no ha investigado con igual
    pasión ha sido el impacto de la Guerra de los Treinta Años (1609-1640) y de
    la Paz de Westfalia (1648) en la profunda partición del sub-continente
    sudamericano entre las metrópolis Española y Portuguesa. En efecto, como
    resultado de dicha conflagración mundial, Inglaterra entró en una
    prolongada guerra civil (1640-1660) que derivó en la ejecución del monarca
    Carlos I Estuardo en 1649, que repercutió en la rebelión de la nobleza
    portuguesa contra España y la Casa de Austria (dinastía Habsburga) y en
    favor de la naciente Ilustración inglesa y francesa, y que culminó medio
    siglo más tarde en el Tratado de Methuen (acuerdo comercial de 1703 entre
    Portugal e Inglaterra) y en la toma de partido a favor de la Gran Alianza
    anglo-austríaca durante la Guerra de Sucesión de España, que culminó en la
    Paz de Utrecht (1713).

    De resultas de la rebelión portuguesa, la nueva dinastía de la Casa de
    Braganza no sólo reconquistó los territorios nordestinos del Brasil y las
    colonias de África (Angola, Sao Tomé) que habían sido invadidas por los
    holandeses al mando del Conde Maurice de Nassau, sino que bajo el mando del
    Príncipe Regente y luego Rey Pedro II (1668-1706) y bajo el influjo
    ilustrado de Giuseppe de Faria inició una campaña expansionista al interior
    del espacio colonial brasilero que consagró la leyenda de la « Isla Brasil »,
    una metáfora espacial que ilustraba la ambición lusitana por confinar al
    Brasil entre dos grandes ríos, el Amazonas y el Plata (Paraná, Paraguay).
    Estos ríos procedían, según la leyenda, de un gran lago interior hasta
    entonces desconocido, como era en el continente africano (Victoria, Chad),
    que ellos venían colonizando desde hacía un par de siglos (Cortesao, 1958).
    Ese expansionismo territorial se inició en 1669 con la fundación de un
    fuerte en el confín del río Amazonas con el río Negro (luego conocido como
    Manaos), y se coronó una década más tarde (1680) con la fundación de la
    Colonia del Sacramento en la margen oriental del Río de la Plata frente al
    puerto de Buenos Aires.

    Estas fundaciones portuguesas terminaron por dinamitar el Tratado de
    Tordesillas (1493) pues su expansionismo en el Amazonas se extendió hasta
    copar la boca de los ríos Putumayo y Caquetá, al oeste de Manaos, en
    perjuicio del joven Virreinato de Nueva Granada (actual Colombia); y en todo
    el espacio amazónico, chaqueño, sabánico y litoraleño presionó a la
    cancillería española (Consejo de Indias) al extremo de alimentar con el
    correr del siglo XVIII la persecución política contra la Compañía de Jesús
    (ligada al Papado) y contra las etnias indígenas que se resistieron a su
    éxodo forzoso (guerra guaranítica). Este infausto conflicto desencadenó
    finalmente la permuta de la Colonia del Sacramento (que depredaba con el
    contrabando la plata del Potosí) a cambio del espacio interior del
    Chaco-Amazónico, ocupado y recreado por las Misiones Jesuíticas, operación
    de trueque sellada en 1750 con el Tratado de Madrid, pero que se perfeccionó
    recién con la expulsión de los Padres Jesuitas en 1767, con el Tratado de
    San Ildefonso en 1777, y con las consiguientes Comisiones Demarcadoras de
    Limites, que prosiguieron su tarea hasta los mismos inicios del siglo XIX.

    Las consecuencias históricas de esos tratados y de la política de destierro
    jesuítico fueron notoriamente negativas para la integración económica y
    cultural del sub-continente por cuanto desamparó las etnias indígenas y
    decapitó la interconexión fluvial de los espacios amazónicos. En especial,
    desconectó el espacio Neogranadino (actual Colombia) del espacio amazónico
    Peruano (Iquitos); el espacio amazónico de la Audiencia de Charcas (actual
    Bolivia) del litoral de la Gobernación del Paraguay; y los espacios
    paraguayo y litoraleño argentino y brasilero (ríos Paraguay, Paraná,
    Uruguay, Ivaí, Iguazú,Tieté) de las capitanías y estados orientales del
    propio Brasil (Parana, Sao Paulo, Mina Geraes). Posteriormente, ya en el
    siglo XIX, la lucha por la libre navegación de los ríos exigió nuevos
    tratados de límites (Convención Fluvial de 1851 y numerosos acuerdos
    orquestados por el Barón de Rio Branco). Y más tarde, con el boom del
    caucho el expansionismo territorial brasileño se extendió aún más hacia el
    oeste, en perjuicio de las regiones amazónicas de Bolivia (Acre) y del Perú
    (Amuheya).

    Por todo ello, y fundados en el análisis expuesto en el trabajo titulado El
    Hinterland Sudamericano en su Trágico Laberinto Fluvial, se sobreentiende
    que la salida de la actual crisis brasilera no puede estar circunscripta a
    una política coyuntural, corto-placista, economicista, y auto-centrada
    solamente en el colonialismo interno brasileño (estados de Amazonas,
    Rondonia, Acre, Roraima, y estados del nordeste). Por el contrario, el
    gobierno de Brasil debería formular en combinación con los países limítrofes
    una política infraestructural y de largo aliento que suponga una
    reconfiguración espacial que acabe con la vieja partición continental, donde
    lo que debe contar es la internacionalización y la integración de la cuenca
    chaco-amazónica.

    Para unamayor claridad, esta cuenca debe desagregarse en media docena de
    cuencas,comprendiendo las cuencas amazónicas boliviana, peruana,
    ecuatoriana, colombiana, venezolana y brasilera, la sabana colombiana y
    venezolana, y los chacos boliviano, paraguayo, brasilero y argentino. A su
    vez, estas cuencas, sabanas y chacos deben interconectar sus vías y
    afluentes fluviales: la boliviana,los ríos Madre de Dios, Beni, y Mamoré; la
    peruana, los ríos Ucayali, Urubamba, Huallaga, Marañón/Pastaza, Napo, y
    Yavarí; la colombiana, los ríos Putumayo, Caquetá/Apaporis, y
    Guainia/Vaupés; la brasilera, los ríos Negro/Branco, Madeira, Guaporé,
    Cuiabá, y Paraguay; y la paraguayo-argentina, los ríos Paraguay, Paraná,
    Iguazú, Bermejo, Pilcomayo, y Uruguay.Una obra de semejante tenory ambición
    emularía la epopeya encarada por Gran Bretaña al estrenar en 1869 el Canal
    de Suez, o la de USA al terminar en 1914 el Canal de Panamá, o la de
    Alemania al inaugurar en 1994 la hidrovía Rhin-Mainz-Danubio, que une el Mar
    Negro con el Mar del Norte y el Mar Báltico.

    En consecuencia, estas políticasde estado debenenhebrar una salida
    estratégica para todo el hinterland de Sudamérica, y deben
    estarmancomunadascon políticas de naturaleza bio-geográfica, etno-cultural y
    socio-demográfica. Por tanto, proyectos extractivistas como la red
    ferroviaria trans-oceánica impulsada por China solo pueden significar el
    retorno de la política de saqueo como lo fue la era del caucho, y el
    continuismo de la corrupción de la actual clase política. Por el
    contrario,un mega-proyecto fluvial integrador para todo el sub-continente
    otorgaría la esperanza de un mundo mejor y de una nueva clase política y
    empresarial para todos los pueblos que componen el hinterland sudamericano y
    que más pronto que tarde se derramará al litoral marítimo.
    http://www.salta21.com/El-hinterland-sudamericano-en-su.html

    Eduardo R. Saguier
    http://www.er-saguier.org

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