Suisse. Financement hospitalier: la mécanique qui étouffe les hôpitaux… et dégage la voie pour les cliniques privées

Bloc opératoire Prevost aux HUG, février 2025.

Par Jean-François Marquis

« Le statu quo n’est pas une option », clame le 27 novembre l’association des hôpitaux H+; « Planification hospitalière: Les directrices et directeurs de la santé décident d’une approche fondamentalement nouvelle », annonce le 1er décembre la Conférence des directrices et directeurs cantonaux de la santé (CDS) : les choses bougent dans le monde hospitalier.

Et pour cause : le nouveau financement uniforme des soins ambulatoires et stationnaires (EFAS) va rentrer en vigueur en 2028. Les acteurs concernés cherchent à se préparer au choc qui va en découler. [Voir sur ce site les articles publiés les 11 et 27 novembre 2024 et le 7 avril 2025.]

Pour comprendre les perspectives envisagées, ce qui sera fait dans une prochaine contribution, il faut commencer par prendre la mesure de la situation actuelle des hôpitaux, en particulier de la manière dont fonctionne le nouveau financement hospitalier, entré en vigueur en 2012 et qui a conduit au fait que, treize ans plus tard, « le statu quo n’est plus une option ».

Un sous-financement chronique

Le 25 novembre dernier, l’Office fédéral de la statistique (OFS) annonce que les hôpitaux ont enregistré en 2024 une perte cumulée de 350 millions de francs. Les hôpitaux publics sont deux fois plus souvent déficitaires que les hôpitaux privés (62% contre 37%). L’année précédente, la perte cumulée se montait à 777 millions de francs. En 2022, il atteignait presque 290 millions.

Le même communiqué de l’OFS donnait un indice pour comprendre cette situation. En effet, on y apprend qu’en 2024 le prix moyen versé aux hôpitaux pour un accouchement par voie basse était de 7149 francs, un montant inférieur de 1216 francs aux coûts effectifs. En cas d’accouchement par césarienne, la perte s’élevait en moyenne à 1965 francs. Ces pertes correspondent à la situation lorsque la parturiente n’est couverte que par l’assurance maladie obligatoire de base. Si la femme qui accouche dispose d’une assurance privée, l’hôpital réalise par contre un gain, de 845 francs en moyenne en cas d’accouchement par voie basse et de 2065 francs en cas de césarienne.

Deux « évidences » ressortent de ces quelques chiffres. Premièrement, le sous-financement des hôpitaux est chronique et se loge au cœur même de leur fonctionnement, puisque dans une activité de base, comme les accouchements, ils « travaillent à perte ». Deuxièmement, ce sous-financement ne touche pas tous les hôpitaux de la même manière : les hôpitaux privés, qui sont aussi ceux qui captent une bonne part de la patientèle avec une assurance privée, s’en sortent nettement mieux. Comment en est-on arrivé là ?

Détour par une comparaison

Si l’on veut comprendre le financement des hôpitaux, il peut être utile de commencer par le financement… de l’école obligatoire.

De manière très simplifiée, on peut résumer ainsi les principes à la base de son financement. La société, par l’intermédiaire de ses diverses représentations politiques, a défini une mission : l’éducation et la formation de la jeunesse, qui passe notamment par une école obligatoire. Elle a confié cette mission à une institution : l’école publique. Elle a aussi défini des objectifs – par exemple onze années d’école obligatoire suivant un plan d’études – ainsi que les critères permettant de mesurer les moyens nécessaires pour atteindre ces objectifs, comme le nombre d’élèves par classe. Les pouvoirs publics ont également déterminé les conditions de travail des enseignants (nombre de périodes d’enseignement, grille salariale, etc.). Sur la base de ces paramètres, ainsi que de l’évolution démographique connue des jeunes en âge scolaire, un budget global a priori est alors établi pour l’école publique obligatoire et son financement est assuré. C’est la logique générale du financement d’un service public.

Bien sûr, un tel mode de financement n’empêche pas un gouvernement de droite de prendre des mesures d’austérité. Il peut, par exemple, augmenter le nombre de périodes d’enseignement ou le nombre d’élèves par classe, couper dans les mesures d’accompagnement (logopédie, etc.), ou encore diminuer les salaires. Mais, d’une part, cela prend la forme de décisions politiques, pouvant être contestées, et pas de mécanismes aveugles. D’autre part, les écoles ne sont pas mises en permanence sous pression pour réduire « leurs coûts », ni mises en compétition entre elles pour conserver leurs élèves et leur financement.

Le financement des hôpitaux depuis l’entrée en vigueur en 2012 du financement basé sur les DRG (diagnoses related groups) est complètement différent[1]. Dans ce système, le point de départ n’est pas un budget global fixé a priori, mais un forfait, une sorte de pseudo-prix, remboursé pour chaque type de prise en charge, par exemple un accouchement ou la pose d’une prothèse de hanche. Les hôpitaux réalisent ainsi un chiffre d’affaires correspondant à la multiplication de ces différents forfaits par le nombre d’hospitalisations. Des prestations d’intérêt général (PIG) versées par les cantons peuvent s’additionner à ces recettes pour financer le rôle formateur de l’hôpital ou d’autres missions publiques. Sur cette base, l’hôpital doit « s’arranger » pour adapter ses moyens – à commencer par son personnel – aux recettes, fluctuantes, résultant de son activité. L’équilibre des comptes des hôpitaux n’est donc jamais garanti a priori : il peut y avoir un déficit, mais aussi un bénéfice. Cette logique de financement n’est clairement pas celle d’un service public ; elle ressemble à celle des entreprises privées actives sur un marché.

Pourquoi ce modèle de financement ?

Un « raisonnement » sert de justification à ce système de financement. On peut le résumer ainsi :

  1. Les hôpitaux coûtent trop cher [à noter que le « coût » des hôpitaux – environ 34 milliards de francs en 2022, dont 11 financés par les pouvoirs publics – est inférieur aux dépenses publiques pour la formation, d’environ 43 milliards la même année].
  2. Il est possible de faire d’importantes économies en réduisant leur nombre et en les obligeant à être « plus efficients ».
  3. Pour obtenir cela, il faut abolir le service public et son mode de financement, qui « protège » les hôpitaux et
  4. créer un marché où les hôpitaux sont en concurrence entre eux, y compris avec les cliniques privées, ce qui les obligera à diminuer leurs coûts… ou à fermer.
  5. Pour instituer ce marché, il faut introduire des prix (pas de marché sans prix !) et faire en sorte qu’ils soient fixés à un niveau tel que cela génère une contrainte financière constante sur les hôpitaux, les obligeant à se « rationaliser ». C’est là que nous sommes aujourd’hui.
Comment les « prix » des hospitalisations sont-ils fixés ?

Les « prix » des hospitalisations en soins aigus sont des forfaits, calculés au moyen de deux composantes : le « cost-weight » du DRG, qui est multiplié par le « baserate » appliqué à l’hôpital concerné. Qu’y a-t-il derrière ce jargon ?

Dans ce système, chaque hospitalisation est classée dans un DRG (diagnoses related group). Un DRG est un groupe de prises en charge hospitalières censées être homogènes, au niveau du type d’intervention (on ne regroupe pas un accouchement avec la pose d’une prothèse de hanche) et du coût. En Suisse, il existe un peu plus de 1000 DRG distincts pour les soins somatiques aigus. Il y a par exemple le DRG « O01G Césarienne, durée de la grossesse plus de 33 semaines complètes », correspondant aux césariennes sans complication. Il existe six autres DRG (O01F à O01A) pour des césariennes présentant des degrés croissants de complication.

Un DRG est associé à un cost-weight, un poids qui correspond à la « lourdeur » économique moyenne de ce groupe, comparativement à la lourdeur moyenne de toutes les hospitalisations en soins somatiques aigus, à qui est attribuée la valeur 1. Dans le cas du DRG « O01G Césarienne, durée de la grossesse plus de 33 semaines complètes », le cost-weight est de 0,776.

Un DRG est aussi associé à une durée moyenne de séjour. Dans le cas du DRG « O01G Césarienne, durée de la grossesse plus de 33 semaines complètes », elle est de 3,6 jours. La durée moyenne de séjour est très étroitement corrélée avec le cost-weight.

L’attribution de chaque hospitalisation à un DRG est effectuée par un groupeur. Ce groupeur est un algorithme qui classe les hospitalisations sur la base des diagnostics et des traitements médicaux indiqués par les médecins et enregistrés par les équipes de codage de l’hôpital. La présence, ou l’absence, d’une indication, et donc d’un code, peut modifier la manière dont le groupeur classera l’hospitalisation, et donc la manière dont celle-ci sera « pondérée » et payée. C’est pour cette raison que le codage médical, et tout le travail administratif qu’il implique, a pris une importance décisive dans les hôpitaux.

Pour déterminer la rémunération en francs correspondant à un DRG, il faut ensuite multiplier son cost-weight par le baserate de l’hôpital. Ce « taux de base » fait l’objet de négociations entre les assureurs maladie et les hôpitaux et il doit être validé par le canton concerné. Il peut varier d’un hôpital à un autre, mais aussi d’un assureur à un autre.

Au nom du critère « d’économicité », et soutenus par la jurisprudence, les assureurs ont imposé que la négociation avec les hôpitaux se fonde sur une référence, un « benchmark » pour parler management, correspondant environ aux coûts du 25e percentile des hôpitaux les moins coûteux. Monsieur Prix, Stefan Meierhans, plaide depuis des années pour que ce soit le 20e percentile qui serve de référence. Qu’est-ce que cela signifie ? Premièrement, on calcule pour chaque hôpital, au moyen de la comptabilité analytique, le coût moyen de ses hospitalisations, en tenant compte de la lourdeur relative de ses prises en charges, de son « case-mix » dans le jargon. Deuxièmement, on classe tous les hôpitaux – des hôpitaux universitaires aux cliniques spécialisées, tous ensemble – dans l’ordre croissant de leurs coûts unitaires moyens. Troisièmement, on choisit le coût unitaire de l’hôpital occupant le 25e (ou 30e) rang sur 100 comme la référence « d’efficience » pour tous les hôpitaux : c’est le « benchmark ».

Cela signifie donc que 70% à 75% des hôpitaux ont des coûts plus élevés et travailleront à perte… à moins de réaliser des « gains d’efficience ». C’est cette démarche qu’illustre le graphique ci-dessous (Prix de base calculés), repris du document de tarifsuisse, une structure des assureurs maladie, pour la négociation des baserate 2025.

Cette référence fixée à l’échelle nationale, la négociation a ensuite lieu avec chaque hôpital et elle aboutit à des baserate censés tenir compte de la spécificité des établissements. Par exemple, en 2023, le baserate du CHUV, l’hôpital universitaire du canton de Vaud, était de 10’650 francs, contre 9650 francs pour les hôpitaux régionaux du même canton.

Quels sont les effets de ce système ?

Le principe de base de ce système est qu’il ne rembourse pas les coûts effectifs des hôpitaux, mais un coût théorique moyen. Cela rend possible des pertes comme des bénéfices. Tel qu’il est actuellement calibré, ce financement hospitalier conduit le plus souvent à des pertes, Il représente un double nœud coulant financier passé autour du cou des hôpitaux publics et un soutien aux cliniques privées.

Le premier nœud coulant est constitué par le mécanisme même du DRG. Son poids, ou cost-weight, et donc le niveau de son remboursement, correspond à la moyenne de l’ensemble des hospitalisations classées dans le DRG en question. Pour chaque hôpital, il est donc décisif que les « poids » économiques de ses propres hospitalisations, par exemple les accouchements avec césarienne sans complication, correspondent effectivement à cette moyenne ou lui soit inférieurs. Sinon, ce sont des pertes qui s’accumulent. Comme le « poids » économique d’une hospitalisation est étroitement corrélé à sa durée, il faut donc absolument que la durée des hospitalisations soit en moyenne égale ou inférieure aux valeurs des DRG correspondants. La durée de séjour devient ainsi un indicateur clé au lit du patient, aussi important que les indicateurs classiques décrivant son état de santé.

C’est ce mécanisme qui alimente l’industrialisation des soins qui sévit dans tous les établissements hospitaliers de soins aigus. Le parcours des patients, jusqu’à leur sortie, est planifié dès leur entrée à l’hôpital. Chaque étape doit être réduite à l’indispensable et les « temps morts » supprimés. Il en résulte pour le personnel soignant une densification croissante du travail et l’élimination des espaces de temps permettant un rapport moins « technique » au patient. Pour le patient, cela peut être synonyme de sortie très rapide, avec parfois le sentiment inquiétant d’un état qui n’est pas stabilisé, l’obligation de faire appel aux soins à domicile ou de devoir compter sur ses proches pour se débrouiller.

Comme tous les hôpitaux cherchent à réduire leurs durées de séjour, il en résulte un glissement de la moyenne vers le bas. Cela finit par être enregistré dans une nouvelle version des DRG (leur actualisation est annuelle), ce qui relance le cycle de réduction des durées de séjour. Le système de rémunération par DRG implante donc au cœur même du financement des hôpitaux un automatisme poussant à des séjours toujours plus courts et à une densification croissante du travail. C’est cela la réalité derrière la notion, rabâchée, de « gains d’efficience ».

Une possibilité d’atténuer cette pression est de sélectionner les hospitalisations ayant le plus de chance d’être « rentables », en privilégiant les prises en charge planifiées (par opposition aux urgences) ou les cas avec une faible probabilité de complications (pas trop âgés, sans maladie chronique ou comorbidité lourdes). Cette option existe pour les cliniques privées spécialisées, mais pas pour les hôpitaux (para)publics avec une obligation de prise en charge, sans même parler des hôpitaux de référence comme le CHUV. Le mécanisme du financement par DRG favorise donc le développement du secteur privé.

Le deuxième nœud coulant est tissé par le baserate, qui est toujours fixé de manière que la majorité des hôpitaux sont en situation de déficit s’ils ne s’imposent pas de nouvelles réductions de coûts. Ce sous-financement chronique est revendiqué par les assureurs et les majorités politiques façonnant la politique de la santé : il s’agit d’imposer des restructurations et des fermetures auxquelles la population a majoritairement tendance à s’opposer. Le « marché » doit « faire le travail » refusé lors du débat démocratique.

Une manière de contourner cet effet est d’augmenter la part des hospitalisations couvertes par une assurance (semi-)privée, qui garantit, comme le montre l’exemple des accouchements, une couverture bénéficiaire. Cela convient aux assureurs maladie, qui font de très bonnes affaires avec les assurances privées, et aux hôpitaux privés, en position de force sur ce marché. Les hôpitaux (para)publics sont aussi perdants sur ce terrain.

Quel est le rôle des prestations d’intérêt général ?

La loi sur l’assurance maladie (LAMal) précise (article 49, al. 3) que le financement par DRG ne couvre pas « les coûts des prestations d’intérêt général [qui] comprennent en particulier le maintien des capacités hospitalières pour des raisons de politique régionale [et] la recherche et la formation universitaire. »

Cette disposition, avec sa formulation ouverte, donne une marge de manœuvre aux autorités cantonales pour renforcer le financement des hôpitaux. Les cantons de Vaud et de Genève ont recouru jusqu’à maintenant de manière importante aux prestations d’intérêt général (PIG), dans le cadre de politiques visant à soutenir des hôpitaux publics forts, en particulier les deux hôpitaux universitaires, le CHUV à Lausanne et les HUG à Genève. Ce n’est pas le cas des cantons de Suisse alémanique.

Le contrat de prestation 2024 signé entre les autorités cantonales vaudoises et la direction du CHUV illustre l’importance prise par les PIG dans le financement de l’hôpital universitaire vaudois. Sur un budget d’un peu plus de 2 milliards de francs, il prévoit environ 141 millions de francs de PIG dits « explicites », liés à des missions spécifiques (par exemple 56 millions pour la formation des médecins assistants), 202 millions de francs de PIG dits « implicites », visant à compenser le sous-financement hospitalier (par exemple 28 millions pour les attentes de placement en EMS ou en réadaptation ou 42 millions pour le financement des indexations salariales) et enfin presque 18 millions de francs de PIG liés aux investissements.

Les PIG sont doublement dans le collimateur des milieux patronaux, particulièrement des cliniques privées, et de leurs relais politiques de droite. Les cliniques privées considèrent que les PIG sont un obstacle à leur conquête de nouvelles parts de marché, en soutenant les établissements (para)publics et en freinant ainsi leur restructuration.

De manière plus générale, les PIG sont pour la droite et le patronat des dépenses publiques à caractère social, qu’il faut réduire, comme toutes les dépenses sociales, afin d’élargir la marge de manœuvre pour de nouvelles baisses fiscales en faveur des plus riches. Les coupes dans les dépenses de santé décidées par la majorité de droite dans le canton de Vaud sont, de ce point de vue, un premier pas vers la réalisation de leur programme de réduction massive des PIG.

Qu’en est-il du financement des prestations ambulatoires ?

Les prestations ambulatoires représentent une part importante, et croissante, des activités hospitalières. Si l’on considère par exemple le CHUV, son budget pour l’année 2024 prévoit quelque 800 millions de francs de recettes générées par les hospitalisations et 470 millions par l’activité ambulatoire.

Depuis des années, la faîtière des hôpitaux H+ dénonce un sous-financement des activités ambulatoires à hauteur de 20% à 30%. Un tout nouveau tarif, tardoc, va entrer en vigueur en 2026. Il est construit sur le principe de la « neutralité des coûts » et il ne va donc pas modifier cette situation.

Une des nouveautés de tardoc est l’introduction de forfaits par cas, sur le modèle des DRG, pour une série de prises en charge considérées comme standardisées. Ces domaines d’activité risquent donc eux aussi d’être pris dans le mécanisme propre aux forfaits. Ce sont les hôpitaux en mesure de réaliser d’importants investissements pour développer des parcours ambulatoires spécifiques, avec de grands volumes d’activité, qui seront les mieux placés pour tirer leur épingle du jeu. Les hôpitaux (para)publics déficitaires partent avec de sérieux handicaps dans cette course. Ce n’est donc pas de ce côté-là que va venir une réponse au sous-financement du système hospitalier.

Quelles perspectives ?

Le financement hospitalier mis en place en 2012 a été conçu pour imposer une «rationalisation» permanente aux hôpitaux (para)publics, pousser les plus mal lotis à la fermeture et favoriser le développement du secteur privé.

Les PIG sont un instrument à disposition des cantons pouvant être utilisé pour freiner ces effets. Mais le recours à grande échelle aux PIG est fragile, contraire à la pratique dominante à l’échelle nationale et dépendant des majorités politiques. Les PIG ne peuvent pas bloquer la dynamique générale du financement hospitalier.

Une double revalorisation du « public » est nécessaire pour rompre la mécanique infernale du financement hospitalier.

D’une part, il est nécessaire de revendiquer un « hôpital public » qui a une mission spécifique en matière de santé, comme l’école publique a une mission spécifique en matière d’éducation. Tant que les institutions (para)publiques sont placées sur le même plan que les entreprises privées, un système de financement qui n’est pas basé sur un mécanisme de concurrence, « récompensant » les plus « efficients », ne pourra pas voir le jour. Et, dans cette compétition, le privé prend toujours l’avantage.

D’autre part, il faut mettre le « public » à la tête du pilotage du système de santé et de son financement. Les caisses maladie privées sont focalisées sur le « moindre coût » dans l’assurance de base obligatoire, socle pour l’expansion de leurs assurances privées fort rentables. Une politique centrée sur l’accès universel à des soins de qualité et sur la garantie de conditions de travail respectueuses du personnel exige un autre type d’institution : une caisse unique publique, financée de manière solidaire en proportion du revenu, et associant à sa direction représentants des patients, du personnel soignant et des autorités. (17 décembre 2025)

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[1] Le financement des hôpitaux est complexe. Le financement par DRG s’applique aux hospitalisations en soins somatiques aigus. Les hospitalisations en psychiatrie sont financées avec le système TARPSY et celles en réadaptation avec le système ST Reha. La logique générale de ces deux systèmes de tarification par forfaits est analogue au financement par DRG. Les prises en charge ambulatoires reposent sur d’autres types de tarification, notamment tarmed jusqu’à la fin 2025 et tardoc dès 2026. Le principe de tarmed est une tarification à l’acte, tardoc y ajoute des forfaits pour une partie des prises en charge. Enfin, l’assurance maladie prévoit un financement public des hôpitaux dans le cadre des prestations d’intérêt général (PIG). Le cœur de l’activité hospitalière demeure pour l’instant les hospitalisations en soins somatiques aigus et c’est donc le financement par DRG qui est central pour leur fonctionnement.

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