Par William Hartung
[Introduction de Tom Dispatch]. La guerre d’Afghanistan a-t-elle été un désastre?
Eh bien, ne le demandez pas aux Afghans, y compris aux sept enfants qui sont morts dans la dernière frappe de drone étatsunienne de cette guerre, comment ils vont, ni à ceux qui sont sur le point d’avoir faim alors que ce pays souffre d’une sécheresse dévastatrice et que les prix des denrées alimentaires montent en flèche, ni au million d’entre eux qui pourraient même mourir de faim avant la fin de 2021, dans le chaos de la prise de pouvoir par les talibans, la pauvreté et le chômage. Et ne demandez pas aux nombreux vétérans [militaires] de cette guerre, qui sont rentrés chez eux avec des «blessures morales» ou bien pire, comment ils se portent. Vous connaissez la réponse à cette question aussi.
Mais qu’en est-il des généraux qui ont supervisé les 20 ans de guerre désastreuse des Etats-Unis là-bas (et qui ont régulièrement menti sur son déroulement)? Eh bien, c’est une autre histoire. Comme l’a récemment rapporté Isaac Stanley-Becker du Washington Post, «les huit généraux qui ont commandé les forces américaines en Afghanistan entre 2008 et 2018 ont ensuite siégé dans plus de 20 conseils d’administration d’entreprises».
Depuis qu’il a pris sa retraite, le général Stanley McChrystal, qui a supervisé le renforcement des troupes dans ce pays de l’ère Obama, a été membre du conseil d’administration ou conseiller d’au moins 10 entreprises, gagnant des millions de dollars grâce à elles. L’année dernière, de manière assez typique, le général Joseph F.Dunford Jr., commandant pour l’Afghanistan en 2013 et 2014, a rejoint le conseil d’administration de Lockheed Martin, le plus grand fournisseur du Pentagone. Et n’oublions pas le secrétaire à la Défense, Lloyd Austin, qui, lors de sa carrière militaire, fut à la tête du U.S. Central Command (Commandement central des Etats-Unis), supervisait les guerres d’Afghanistan et d’Irak. Il a ensuite rejoint le conseil d’administration du géant de l’armement Raytheon, gagnant au passage jusqu’à 1,7 million de dollars.
Et pourtant, comme le note aujourd’hui William Hartung, spécialiste du Pentagone, rien de tout cela n’est comparable à la façon dont le secteur industriel du complexe militaro-industriel et du Congès a profité des guerres éternelles désastreuses de ce pays. Aujourd’hui, sur la base d’un rapport qu’il a rédigé sur le sujet pour le Center for International Policy et le Costs of War Project de l’Université Brown, il propose une vision du «succès» en temps de guerre qui pourrait être une catastrophe sans précédent dans le contexte des guerres sans fin perdues par ce pays. Qui l’aurait cru?]
*****
Les coûts et les conséquences des guerres étatsuniennes du XXIe siècle sont désormais bien documentés: 8000 milliards de dollars de dépenses et plus de 380 000 morts civiles, selon les calculs du projet Costs of War de l’Université Brown. La question de savoir qui a le plus bénéficié d’une telle orgie de dépenses militaires a, malheureusement, reçu beaucoup moins d’attention.
Les entreprises, grandes et petites, ont quitté le festin financier de la flambée des dépenses militaires de l’après-11 septembre 2001 avec, dans leurs poches, des sommes véritablement stupéfiantes. Après tout, les dépenses du Pentagone ont totalisé la somme presque inimaginable de plus de 14 000 milliards de dollars depuis le début de la guerre d’Afghanistan en 2001, dont la moitié (reprenez votre souffle) est allée directement aux entrepreneurs de la défense.
«Le porte-monnaie est maintenant ouvert»: l’avalanche de contrats militaires après le 11 septembre 2001
Le climat politique créé par la guerre mondiale contre le terrorisme, ou GWOT (Global War on Terror), comme l’ont rapidement baptisée les responsables de l’administration Bush, a ouvert la voie à des augmentations considérables du budget du Pentagone. Au cours de la première année qui a suivi les attentats du 11 septembre et l’invasion de l’Afghanistan, les dépenses de «défense» ont augmenté de plus de 10%. Et ce n’était que le début. Elles allaient en fait augmenter chaque année pendant la décennie suivante, ce qui était sans précédent dans l’histoire des Etats-Unis. Le budget du Pentagone a atteint en 2010 son niveau le plus élevé depuis la Seconde Guerre mondiale – plus de 800 milliards de dollars, soit nettement plus que ce que le pays a dépensé pour ses forces au plus fort des guerres de Corée et du Vietnam ou pendant le tant vanté renforcement militaire du président Ronald Reagan dans les années 1980.
Et dans le nouveau climat politique suscité par la réaction aux attentats du 11 septembre 2001, ces augmentations sont allées bien au-delà des dépenses spécifiquement liées à la conduite des guerres en Irak et en Afghanistan. Comme l’a déclaré Harry Stonecipher, alors vice-président de Boeing, au Wall Street Journal, lors d’un entretien datant d’octobre 2001: «Le porte-monnaie est maintenant ouvert… Tout membre du Congrès qui ne votera pas pour les fonds dont nous avons besoin pour défendre ce pays cherchera un nouveau poste après novembre prochain.»
La prophétie d’Harry Stonecipher sur l’augmentation rapide des budgets du Pentagone s’est avérée exacte. Et cela n’a jamais cessé. L’administration Biden est tout sauf une exception. Sa dernière proposition de dépenses pour le Pentagone et les initiatives de défense connexes, comme le développement d’ogives nucléaires au secrétariat de l’Energie, a dépassé 753 milliards de dollars pour l’exercice 2022. Et pour ne pas être en reste, les House and Senate Armed Services Committees (Commissions des forces armées de la Chambre des représentants et du sénat des Etats-Unis) ont déjà voté un ajout d’environ 24 milliards de dollars à cette somme faramineuse.
Qui en a bénéficié?
Les bénéfices de l’augmentation des dépenses du Pentagone après le 11 septembre ont été distribués de manière très concentrée. Plus d’un tiers de tous les contrats sont désormais attribués à seulement cinq grandes entreprises d’armement – Lockheed Martin, Boeing, General Dynamics, Raytheon et Northrop Grumman. Ces cinq entreprises ont reçu plus de 166 milliards de dollars de contrats de ce type pour la seule année fiscale 2020. Pour mettre un tel chiffre en perspective, les 75 milliards de dollars de contrats du Pentagone accordés à Lockheed Martin cette année-là représentaient nettement plus d’une fois et demie l’ensemble du budget 2020 du Département d’Etat et de l’Agence pour le développement international. Il s’élevait, pour les deux entités, à 44 milliards de dollars.
S’il est vrai que les plus grands bénéficiaires financiers de l’augmentation des dépenses militaires après le 11 septembre sont ces cinq entreprises d’armement, elles ne sont pas les seules à en profiter. Les firmes qui ont bénéficié du renforcement des capacités militaires au cours des 20 dernières années comprennent également des sociétés de logistique et de construction comme Kellogg, Brown & Root (KBR) et Bechtel, ainsi que des entreprises de sécurité privée comme Blackwater et Dyncorp. Le Congressional Research Service estime qu’au cours de l’exercice 2020, les dépenses pour les entrepreneurs de toutes sortes ont atteint 420 milliards de dollars, soit bien plus de la moitié du budget total du Pentagone. Les entreprises des trois catégories susmentionnées ont profité de conditions de «temps de guerre» – conditions dans lesquelles la rapidité de livraison et une surveillance moins rigoureuse ont été considérées comme la norme – pour surfacturer au gouvernement, voire pour frauder.
L’entreprise la plus connue en matière de reconstruction et de logistique en Irak et en Afghanistan était Halliburton, par le biais de sa filiale KBR (Kellogg, Brown & Root). Au début des deux guerres d’Afghanistan et d’Irak, Halliburton était le bénéficiaire des contrats du programme de renforcement civil de la logistique du Pentagone. Ces accords à durée indéterminée prévoyaient la coordination des fonctions de soutien aux troupes sur le terrain, notamment la mise en place de bases militaires, l’entretien des équipements et la fourniture de services de restauration et de blanchisserie. En 2008, l’entreprise avait reçu plus de 30 milliards de dollars pour ces travaux.
Le rôle de Halliburton allait s’avérer controversé, car il sentait trop l’auto-attribution et la corruption flagrante. L’idée de privatiser les services de soutien militaire a été lancée au début des années 1990 par Dick Cheney, alors qu’il était secrétaire à la Défense dans l’administration de George H.W. Bush, et Halliburton a obtenu le contrat pour déterminer comment procéder. Je pense que vous ne serez pas surpris d’apprendre que Dick Cheney a ensuite été PDG de Halliburton jusqu’à ce qu’il devienne vice-président sous George W. Bush en 2001. Son parcours a été un (sinon le) cas classique de cette «porte-tambour» entre le Pentagone et l’industrie de la défense, utilisée aujourd’hui par tant de responsables gouvernementaux et de généraux ou d’amiraux, avec tous les conflits d’intérêts évidents que cela implique.
Une fois qu’elle a obtenu ses milliards pour le travail en Irak, Halliburton a commencé à surfacturer largement le Pentagone pour des services de base, tout en effectuant un travail de mauvaise qualité qui mettait en danger les troupes des Etats-Unis – et elle s’est avérée être tout sauf seule dans ce genre d’activités.
A partir de 2004, un an après le début de la guerre en Irak, l’Inspecteur général spécial pour la reconstruction de l’Irak, un organisme mandaté par le Congrès pour éliminer les gaspillages, les fraudes et les abus, ainsi que des chiens de garde du Congrès comme le représentant Henry Waxman (démocrate de Californie), ont révélé des dizaines d’exemples de surfacturation, de construction défectueuse et de vol pur et simple par des entrepreneurs engagés dans la «reconstruction» de ce pays. Là encore, vous ne serez sans doute pas surpris d’apprendre que relativement peu d’entreprises ont subi des conséquences financières ou pénales significatives pour ce que l’on ne peut décrire que comme de l’acharnement à profiter de la guerre. La Commission du congrès sur les contrats de guerre en Irak et en Afghanistan (Commission on Wartime Contracting in Iraq and Afghanistan) a estimé qu’en 2011, le gaspillage, la fraude et les abus dans les deux zones de guerre avaient déjà atteint un total de 31 à 60 milliards de dollars.
Un exemple concret est celui de l’International Oil Trading Company, qui a obtenu des contrats d’une valeur de 2,7 milliards de dollars de la part de la Defense Logistics Agency du Pentagone pour fournir du carburant aux opérations étatsuniennes en Irak. Une enquête menée par le député Henry Waxman, président de la Commission de surveillance et de réforme du gouvernement de la Chambre des représentants (House Government Oversight and Reform Committee), a révélé que la société avait régulièrement surfacturé le Pentagone pour le carburant qu’elle expédiait en Irak, réalisant plus de 200 millions de dollars de bénéfices sur des ventes de pétrole se montant à 1,4 milliard de dollars entre 2004 et 2008. Plus d’un tiers de ces fonds sont allés à son propriétaire, Harry Sargeant III, qui présidait les finances du Parti républicain de Floride. Henry Waxman a résumé la situation de la manière suivante: «Les documents montrent que la société de Harry Sargeant III a profité des contribuables des Etats-Unis. Sa société disposait à elle seule de la licence pour transporter du carburant par le biais de la Jordanie, ce qui lui permettait de pratiquer des prix exorbitants. Je n’ai jamais vu une telle situation.»
Un cas particulièrement flagrant de travail bâclé aux conséquences humaines tragiques concerne l’électrocution d’au moins 18 militaires sur plusieurs bases en Irak à partir de 2004. Cela s’est produit à cause d’installations électriques défectueuses, dont certaines ont été réalisées par KBR et ses sous-traitants. Une enquête de l’Inspecteur général du Pentagone a révélé que les commandants sur le terrain n’avaient «pas réussi à s’assurer que les rénovations… aient été effectuées correctement, que l’armée n’a pas fixé de normes pour les travaux ou les entreprises, et KBR n’a pas effectué de mise à la terre des équipements électriques qu’elle a posés dans la base».
Le processus de «reconstruction» de l’Afghanistan était également truffé d’exemples de fraude, de gaspillage et de détournements. Ainsi, un groupe de travail économique nommé par les Etats-Unis a dépensé 43 millions de dollars pour la construction d’une station-service (pour le carburant) au milieu de nulle part. Elle ne sera jamais utilisée. S’avéreront tout aussi inutiles 150 millions de dollars supplémentaires pour des logements somptueux destinés aux conseillers économiques des Etats-Unis et 3 millions de dollars pour des bateaux patrouilleurs de la police afghane.
Plus inquiétant encore, une enquête du Congrès a révélé qu’une part importante des contrats de transport d’une valeur de 2 milliards de dollars accordés à des entreprises étatsuniennes et afghanes s’est retrouvée sous forme de pots-de-vin versés à des seigneurs de guerre et à des responsables de la police ou sous forme de paiements aux talibans pour permettre le passage de grands convois de camions dans les zones qu’ils contrôlent, parfois jusqu’à 1500 dollars par camion, ou jusqu’à un demi-million de dollars pour chaque convoi de 300 camions. En 2009, la secrétaire d’Etat Hillary Clinton a déclaré que «l’une des principales sources de financement des talibans est l’argent pour la protection» versé dans le cadre de ces contrats de transport.
Depuis deux décennies, une explosion des profits des firmes privées de «sécurité»
Une deuxième source de revenus pour les sociétés liées à ces guerres est allée aux entreprises de sécurité privées, dont certaines gardaient les installations étatsuniennes ou les infrastructures sensibles comme les oléoducs irakiens.
La plus célèbre d’entre elles était, bien sûr, Blackwater, dont un certain nombre d’employés ont été impliqués, en 2007, dans le massacre de 17 Irakiens sur la place Nisour à Bagdad. Ils ont ouvert le feu sur des civils sur un carrefour bondé alors qu’ils assuraient la sécurité d’ un convoi de l’ambassade des Etats-Unis. L’attaque a entraîné des procédures judiciaires et civiles qui se sont poursuivies sous l’ère Trump, lorsque plusieurs auteurs du massacre ont été graciés par le président.
A la suite de ces massacres, Blackwater a été rebaptisée plusieurs fois, d’abord sous le nom de XE Services, puis sous celui d’Academii, avant de fusionner avec Triple Canopy, une autre société privée. Le fondateur de Blackwater, Erik Prince, s’est ensuite séparé de la société, mais il a depuis recruté des mercenaires privés pour le compte des Emirats arabes unis afin de les déployer dans la guerre civile en Libye, en violation d’un embargo des Nations unies sur les armes. Erik Prince a également proposé sans succès à l’administration Trump de recruter une force de mercenaires privés censée constituer l’épine dorsale de l’effort de guerre des Etats-Unis en Afghanistan.
Les entreprises privées Titan et CACI International se sont également chargées de l’interrogatoire des prisonniers irakiens. Les deux sociétés avaient des agents interrogateurs et des traducteurs dans les murs de la prison d’Abu Ghraib en Irak, un endroit où ces prisonniers étaient brutalement torturés.
Le nombre de personnes déployées et les revenus perçus par les entreprises de «sécurité et de reconstruction» ont augmenté de façon spectaculaire au fil des guerres en Irak et en Afghanistan. Le Congressional Research Service a estimé qu’en mars 2011, il y avait plus d’employés contractuels en Irak et en Afghanistan (155 000) que de personnel militaire étatsuniens en uniforme (145 000). Dans son rapport final d’août 2011, la Commission on Wartime Contracting in Iraq and Afghanistan a avancé un chiffre encore plus élevé, déclarant que «les forces mercenaires représentent plus de la moitié de la présence étatsunienne dans les opérations de secours et d’urgence en Irak et en Afghanistan, employant parfois plus d’un quart de million de personnes».
Alors qu’un mercenaire armé ayant servi dans les Marines pouvait gagner jusqu’à 200 000 dollars par an en Irak, environ trois quarts de la main-d’œuvre engagée sur place était composée de personnes originaires de pays comme le Népal ou les Philippines, ou de citoyens irakiens. Mal payés, ils ne recevaient parfois que 3000 dollars par an. Une analyse réalisée en 2017 par le projet Costs of War a décrit les «conditions de travail abominables» et des violations majeures des droits de l’homme infligées aux ressortissants étrangers travaillant sur des projets financés par les Etats-Unis en Afghanistan, y compris des séquestrations, le vol de salaire, des décès et des accidents survenus dans les zones de conflit.
L’armée des Etats-Unis en Irak étant réduite à un nombre relativement modeste de «conseillers» armés et aucune force étatsunienne n’étant restée en Afghanistan, ces sociétés de sécurité cherchent maintenant des clients étrangers. Par exemple, une entreprise américaine – Tier 1 Group, fondée par un ancien employé de Blackwater – a formé quatre des agents saoudiens impliqués dans le meurtre du journaliste saoudien et résident américain Jamal Khashoggi, un effort financé par le gouvernement saoudien. Comme l’a noté le New York Times lorsqu’il a révélé cette histoire: «Ces problèmes sont susceptibles de perdurer, car les sociétés militaires privées étatsuniennes se tournent de plus en plus vers des clients étrangers pour consolider leurs affaires, alors que les Etats-Unis réduisent leurs déploiements à l’étranger après deux décennies de guerre.»
Ajoutez un facteur supplémentaire à l’explosion des bénéfices des firmes léiées à l’armement pendant deux décennies de «guerre contre le terrorisme». Les ventes d’armes à l’étranger ont également connu une forte hausse à cette époque. Le marché le plus important et le plus controversé pour les armes étatsunienne ces dernières années a été le Moyen-Orient, en particulier les ventes à des pays comme l’Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, qui ont été impliqués dans une guerre dévastatrice au Yémen, tout en alimentant les conflits ailleurs dans la région.
Donald Trump a fait le plus grand bruit au sujet des ventes d’armes au Moyen-Orient et de leurs avantages pour l’économie des Etats-Unis. Cependant, les géants de l’armement ont en fait vendu plus d’armes à l’Arabie saoudite, en moyenne, pendant l’administration Obama, y compris trois livraisons majeures en 2010 qui ont totalisé plus de 60 milliards de dollars pour des avions de combat, des hélicoptères d’attaque, des véhicules blindés, des bombes, des missiles et des canons – pratiquement tout un arsenal. Nombre de ces systèmes d’armes ont été utilisés par les Saoudiens dans le cadre de leur intervention au Yémen, qui a entraîné la mort de milliers de civils lors de frappes aériennes aveugles et l’imposition d’un blocus qui a largement contribué à la mort de près d’un quart de million de personnes à ce jour.
Pour toujours les profits de guerre?
Pour mettre un frein aux profits «excessifs» des entreprises d’armement et prévenir le gaspillage, la fraude et les abus des entreprises privées dites de sécurité impliquées dans le soutien des opérations militaires des Etats-Unis, il faudra en fin de compte réduire les dépenses consacrées à la guerre et aux préparatifs de guerre. Malheureusement, jusqu’à présent, les budgets du Pentagone ne font qu’augmenter et les cinq grandes firmes d’armement reçoivent toujours plus d’argent.
Pour modifier ce schéma remarquablement constant, une nouvelle stratégie est nécessaire, une stratégie qui accroît le rôle de la diplomatie des Etats-Unis, tout en se concentrant sur les défis propres à la sécurité non militaires émergents et persistants. La «sécurité nationale» doit être redéfinie non pas en termes de nouvelle «guerre froide» avec la Chine, mais pour mettre en avant des questions cruciales comme les pandémies et le changement climatique.
Il est temps de mettre un terme aux interventions militaires étrangères directes et indirectes que les Etats-Unis ont menées en Afghanistan, en Irak, en Syrie, en Somalie, au Yémen et dans tant d’autres endroits au cours de ce siècle. Sinon, nous nous attendons à des décennies de profits de guerre supplémentaires de la part des marchands d’armes qui engrangent des bénéfices massifs en toute impunité. (Article publié sur le site TomDispatch le 21 septembre 2021; traduction par la rédaction de A l’Encontre)
William D. Hartung est le directeur du Arms and Security Program auprès du Center for International Policy. Cet article est adapté d’un nouveau rapport qu’il a rédigé pour le Center for International Policy et le Costs of War Project de l’Université Brown située à Providence dans l’Etat de Rhode Island.
Soyez le premier à commenter