Bas les pattes devant le Call Center CFF Cargo !

Sombres manœuvres en coulisses

En assemblée générale, les travailleuses et travailleurs des Ateliers mécaniques de Bellinzone (Officine) ont décidé, le lundi 7 avril 2008, d’arrêter leur grève avec occupation. Cette décision a été prise après une discussion collective et un bilan de la grève (voir Une première grande victoire). Dans un communiqué, le département du conseiller fédéral «socialiste» Moritz Leuenberger indique que: «Les CFF et les syndicats mèneront des négociations sans parti pris au cours des deux prochains mois dans le but de maintenir durablement le site de Bellinzone et de sauvegarder un maximum d’emplois […]. Les CFF retirent également leurs mesures de restructurations.»

M. Leuenberger a proposé que Marco Solari sonde les parties et envisage les modalités de la table ronde. Marco Solari a été directeur de l’Office du tourisme au Tessin (entre 1972 et 1991). En 1988, il eut la charge de délégué du Conseil fédéral pour la farce coûteuse du 700e anniversaire de la Confédération. Il a été administrateur délégué de la Migros de 1992 à 1997. Il a occupé une place à la direction du puissant groupe de presse Ringier (Blick, l’Hebdo, etc.). Il est président du Festival du film à Locarno. Une carrière à filmer.

«Ne pas baisser la garde»

La force des salarié·e·s des Officine réside dans: les décisions prises collectivement assurant l’unité, évitant que des désaccords se transforment en «bagarres» et rumeurs destructives ; une délégation informant de manière systématique et ne décidant rien sans l’accord des celles et ceux qui l’ont mandatée ; une négociation où le secret – antidémocratique – n’a pas de place.

Le porte-parole du comité de grève des Officine, Gianni Frizzo, a déclaré: «nous avons gagné une bataille, mais pas la guerre [] Nous ne devons pas baisser la garde.» La reprise du travail le mercredi 9 avril sera suivie d’une assemblée le 11 avril à 13h00. Tous et toutes seront informés sur les premiers pas de la négociation.

Le soutien populaire et matériel, à Bellinzone, est lié à la grève avec occupation et à l’ouverture des Ateliers à la population: on pouvait manger dans le grand atelier de peinture, on pouvait connaître les Ateliers grâce à une visite guidée. Les sommes recueillies permettent de n’enregistrer aucune perte de salaire. C’est un élément concret pour assurer l’unité.

A la lumière de la mobilisation du Tessin, on peut comprendre ce que la presse a écrit, le 8 avril, à propos du Call Center de CFF Cargo: «A Fribourg, entre-temps, les employés du Call Center de CFF Cargo se sont dits plus que déçus par les CFF à qui ils reprochent d’être déloyaux.» Le qualificatif de déloyal est bien choisi.

Call Center: chacun·e en ligne

Comme à Bellinzone, les salarié·e·s du Call Center revendiquent le maintien des emplois. Cette manifestation, ce jeudi 10 avril, se place sous le même logo utilisé au Tessin: «Bas les pattes devant le Call Center de Fribourg !»

Pour concrétiser cet objectif, le débat le plus démocratique, avec des opinions contradictoires, se doit d’être organisé. La presse a écrit : «Le secrétaire central du Syndicat du personnel des transports (SEV), Eric Levrat, ne se prononce pas sur une éventuelle grève.» (L’Agefi, 8 avril) En effet, il appartient à tous les salariés du Call Center de se prononcer sur les moyens d’action les plus efficaces pour obtenir satisfaction, pour faire face à la très possible déloyauté de la direction des CFF. Il n’appartient pas à un secrétaire de se prononcer seul. Et c’est bien ainsi.

Que nous cachent les CFF ?

Nous connaissons tous l’histoire de salarié·e·s du Call Center qui ont quitté une ville pour venir s’installer à Fribourg ou qui ont pris cet emploi car on leur promettait des perspectives.

Ce que l’on connaît moins, ce sont les manœuvres, derrière les coulisses, du Conseil fédéral et de la direction des CFF. Il a fallu que, ce dimanche 6 avril, le patron de la SNCF dévoile ses plans dans le fret ferroviaire et la logistique pour que tombent de nouvelles sur l’avenir de CFF Cargo. Expliquons l’affaire en quatre points:

La SNCF a décidé de contrôler totalement la firme de transport de fret et de logistique Geodis. La SNCF contrôle déjà 47% du capital de cette société dirigée par un ancien patron de Moulinex, qui s’y connaît pour faire turbiner les salarié·e·s.

Le patron de la SNCF veut faire de Geodis un des grands opérateurs européens de transport de marchandises et de logistique ; derrière la Deutsche Bahn, la Deutsche Post et Kühne & Nagel (firme suisse). La guerre pour «gagner des marchés», rentabiliser les firmes de transport et distribuer le maximum de dividendes aux actionnaires a été déclarée depuis la fin des années 1990. Elle s’intensifie aujourd’hui.

Pour disposer de plus d’atouts dans cette bataille, la SNCF vient d’acheter ITL (Import Transport Logistic), une firme allemande qui est basée à Dresde. Elle a des filiales aux Pays-Bas, en Pologne et en Tchéquie. Elle se développera – sous le commandement de la SNCF – en Russie et en Ukraine. Ainsi est occupé l’axe est-ouest européen des transports marchandises.

Pour s’assurer un créneau sur l’axe européen nord-sud, Guillaume Pepy, patron de la SNCF, déclare au grand quotidien français Le Figaro: «J’ai indiqué au groupe suisse CFF Cargo, qui est au cœur de l’Europe, que je souhaitais que notre coopération s’intensifie.»

Autrement dit, une collaboration et des discussions existent déjà. Silence a été fait sur ce point très important pour la réorganisation de CFF Cargo. Le quotidien Le Monde, du 8 avril, écrit: «La prochaine acquisition dans le fret ferroviaire pourrait être CFF Cargo, la filiale fret des chemins de fer suisses.»

Ces informations, ont de quoi confirmer le sentiment de déloyauté des CFF envers leurs salarié·e·s.

Le Call Center, les emplois et le développement régional

Face à ce nouveau contexte, il ne peut y avoir de négociations sans que la clarté soit faite sur un point: quels sont les projets déjà discutés entre la SNCF, les CFF, CFF Cargo et le Conseil fédéral. Ce dernier est l’unique propriétaire des CFF et de la filiale CFF Cargo.

Or, les «Objectifs stratégiques assignés par le conseil fédéral pour les années 2007-2010» disent clairement que: «L’entreprise CFF doit: tenir compte des […] répercussions de leurs activités sur le développement territorial et des attentes des régions quant à une répartition des emplois.» (Feuille Fédérale, 20 mars 2007)

Les conclusions sont évidentes:

C’est un choix social et politique qui doit déterminer l’avenir de CFF Cargo, de son Call Center à Fribourg comme de ses Ateliers mécaniques à Bellinzone ou à Yverdon.

Le développement de CFF Cargo est lié à l’énorme dépense pour les transversales alpines qui ont été payées par les salarié·e·s-contribuables. C’est donc une option sociale, écologique et politique qui doit primer. Les emplois de CFF Cargo, tous, doivent être défendus dans cette optique réaliste, en Suisse comme en Europe.

Comme l’a dit Gianni Frizzo: «La bataille continue». Sur son objectif, se rejoignent les besoins de la population suisse et tous les salarié·e·s de CFF Cargo.

Mouvement pour le socialisme, 10 avril 2008

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