Par MENA Solidarity
Cela fait aujourd’hui deux ans que la guerre contre-révolutionnaire a commencé le 15 avril 2023 entre les deux milices au pouvoir au Soudan: les Forces armées soudanaises (FAS), dirigées par Abdel Fattah Abdelrahman Al-Bourhane, et les Forces de soutien rapide (FSR), dirigées par Mohamed Hamdan Dagalo, alias Hemetti.
Cette guerre n’a pas pour but de protéger le Soudan et sa population. C’est une guerre pour le pouvoir et le profit, une attaque directe contre les revendications de la révolution de 2018, lorsque des millions de personnes se sont soulevées pour réclamer la liberté, la paix et la justice.
Les deux milices, autrefois partenaires dans la répression, déchirent aujourd’hui le pays. Des centaines de milliers de personnes ont été assassinées. Plus de 13 millions de personnes ont été chassées de chez elles. Les systèmes de santé et d’éducation du Soudan se sont effondrés. Les usines et les infrastructures ont été détruites. Le viol est utilisé comme arme de guerre [1]. La nourriture et les médicaments ne parviennent pas à ceux qui en ont besoin. La moitié de la population soudanaise, soit 25 millions de personnes, souffre de la faim. La famine a déjà été confirmée dans 10 régions.
Cette dévastation n’est pas seulement le fait des généraux soudanais. Les puissances régionales et internationales ont travaillé activement pour faire avorter la révolution soudanaise et ont alimenté cette guerre pour servir leurs propres intérêts. L’Egypte, l’Arabie saoudite, la Turquie et l’Iran soutiennent les Forces armées soudanaises (FAS). Les Emirats arabes unis (EAU) et le Kenya soutiennent les Forces de soutien rapide (FSR) et profitent de la contrebande d’or soudanais. La Russie, le Royaume-Uni et les Etats-Unis fournissent des armes aux deux camps, directement ou par l’intermédiaire de leurs mandataires régionaux.
Les gouvernements occidentaux, sous couvert de «pourparlers de paix» [2], offrent des tribunes aux mêmes seigneurs de guerre qui détruisent le pays. Ces pourparlers n’apportent pas la paix, ils apportent une légitimité à la contre-révolution. Tous les acteurs étrangers impliqués aujourd’hui au Soudan sont complices de la prolongation de la guerre.
Nous, membres de MENA Solidarity, soutenons fermement le mouvement révolutionnaire soudanais, les comités de résistance, les syndicalistes, les militantes féministes et les réseaux locaux qui risquent tout pour construire un avenir différent depuis la base.
Nous appelons les syndicalistes, les militants anti-guerre et les activistes du monde entier à s’opposer à toute vente d’armes aux milices soudanaises et aux Etats qui les soutiennent, à exiger des gouvernements qu’ils ouvrent des voies sûres et accordent l’asile aux réfugiés soudanais, et à construire une solidarité active avec les forces révolutionnaires soudanaises qui luttent pour une véritable démocratie, la justice et la fin du régime militaire. (Déclaration publiée par MENA Solidarity Network. Solidarity with Workers in the Middle East, le 15 avril 2025; traduction rédaction A l’Encontre)
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[1] Sur «le viol comme arme de guerre», les lecteurs et lectrices peuvent se reporter à cette récente analyse d’Amnesty International du 10 avril: «Soudan. Le recours atroce et généralisé aux violences sexuelles par les Forces d’appui rapide détruit des vies»
Ce 15 avril, Amnesty International Belgique, dans un article intitulé «Soudan, deux années de conflit et d’indifférence de la communauté internationale», écrit: « Depuis deux ans, les forces armées soudanaises, les Forces d’appui rapide et leurs alliés ont commis des crimes atroces, notamment des violences sexuelles contre des femmes et des filles, ont torturé et affamé des civil·e·s, ont procédé à des arrestations et perpétré des homicides, et ont bombardé des marchés, des camps pour personnes déplacées et des hôpitaux. Ces atrocités constituent des crimes de guerre.» (Réd. A l’Encontre)
[2] Sur le site Middle East Eye, le 15 avril 2025, Imran Mulla et Daniel Hilton écrivent: «Une conférence sur le conflit au Soudan a débuté à Londres alors que des massacres se déroulent dans le nord du Darfour, avec plus d’un million de personnes à El-Fasher [capitale de la province du Darfour du Nord] qui implorent la protection alors que les forces paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR) avancent sur la ville. La Grande-Bretagne co-organise le sommet de mardi aux côtés de l’Union africaine, de l’Union européenne, de la France et de l’Allemagne, et a annoncé une aide de 120 millions de livres sterling au début de la conférence. […] Mardi 15, les travailleurs humanitaires et les analystes ont déclaré que le sommet devait donner la priorité à la protection des civils plutôt que de se limiter à une conférence portant sur des promesses de dons. “La protection des civils ne peut pas être laissée de côté”, a déclaré Kate Ferguson, codirectrice exécutive de l’ONG Protection Approaches, aux journalistes avant la réunion.» (Réd. A l’Encontre)
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