Histoire URSS. Une grève ouvrière dans la Russie de Staline. Avril 1932: le soulèvement de Vitchouga (II)

Ivanovo, la «Manchester» du textile en Russie, puis en URSS

Par Jeffrey J. Rossman

De mercredi à vendredi

Sous le leadership de Zabelkina et de Tezine, presque tous les travailleurs de l’usine de tissage n°1 de Shagov firent grève, le 6 avril, entre 9h30 et 11 heures et exigèrent la réunion d’une assemblée de toute l’usine pour débattre de la question du ravitaillement. Des travailleurs de la deuxième équipe firent grève entre 13 et 15 heures autour de la même revendication. Bien que l’agitation menée par les fonctionnaires du comité de district et l’arrestation des meneurs mit un terme aux grèves, l’usine de filature n°1 se figea à 16 heures à cause de la colère des travailleurs face à la nouvelle politique et aux réticences de la bureaucratie de permettre aux ouvriers d’agir collectivement.

Le fait que le secrétaire de la cellule du Parti des métiers à tisser de Shagov – Buev, communiste depuis 1924 – fut l’un des «instigateurs» de la grève (et qu’au moins six communistes de base lui apportèrent leur soutien) est une indication de l’ampleur du soutien dont bénéficiait l’idée d’une réponse collective. Ceux qui s’opposèrent à la grève – principalement des membres du Komsomol et du Parti – reçurent immédiatement des menaces de représailles. Entre-temps, une «rumeur persistante» se répandit dans les ateliers de Vitchouga: une grève générale serait organisée pour le 8 avril.

Il n’a été rapporté aucun trouble le 7 avril, qui était un jour férié pour la plupart des travailleurs. Pressé par l’OGPU, le comité de district convoqua finalement une réunion des secrétaires de cellule du Parti et des présidents des comités de fabrique pour discuter de «l’état d’esprit des travailleurs» ainsi que pour arrêter des décisions quant «aux tactiques de lutte contre la grève». Un représentant de l’OGPU rapporta que les grévistes du combinat Shagov étaient disposés à envoyer des délégations auprès d’autres usines, ou même de défiler jusqu’à elles, afin d’étendre leur mouvement. Le comité de district, toutefois, ce qui fut la première d’une série de mauvaises décisions et d’opportunités manquées, conclut qu’il n’était pas nécessaire de prendre des «mesures concrètes» car il était peu probable que les troubles se répandent «en dehors des limites d’entreprises individuelles». Malgré leur connaissance intime des «formes aiguës» du conflit, les responsables de Vitchouga écartèrent les avertissements de l’OGPU comme étant «exagérés», renonçant ainsi à prendre l’initiative.

En dépit de la confiance qu’avait le comité de district en sa capacité à maintenir l’ordre, la grève reprit le 8 avril. A l’entrée de la première équipe, à 5 heures, les travailleuses de l’usine de tissage n°1 et de l’usine de filature n°1 de Shagov refusèrent de mettre en marche leurs machines. En outre, témoignant d’une solidarité entre les sexes, les surveillants – qui, tous, étaient par tradition des hommes – servirent désormais d’exécuteurs de la grève, arrêtant de force les lignes de production et menaçant ceux qui refusaient d’apporter leur soutien. En ce qui concerne les membres du Parti, ceux de l’usine de filature soutinrent la grève, ce que ne firent pas ceux de l’usine de tissage.

En début d’après-midi, les ouvriers de la deuxième équipe se joignirent aux protestataires aux entrées du combinat Shagov. A 13 heures, les ouvrières de l’usine n°3 de Shagov et les deux entreprises Krassine arrêtèrent leurs machines. Les ouvrières des deux usines de Shagov restantes, les n° 2 et 4, firent de même. En outre, ce qui témoignait de leurs relations étroites, les grévistes demandèrent partout la restauration des rations de pain à 16 kg pour les travailleuses et à 8 kg pour les personnes à charge.

A mesure que les bruits des événements du jour se répandirent, la tension grimpa fortement, même dans les usines qui n’avaient pas encore rejoint la grève. Entre-temps, en dépit du fait que plusieurs fonctionnaires du comité de district se rendirent aux usines Shagov et Krassine pour mettre en place des contre-mesures, la réponse des notables de Vitchouga laissa beaucoup à désirer. Bien qu’il sachât que les problèmes couvaient, le président du soviet de la ville, Filippov, n’interrompit pas la préparation de vacances planifiées depuis longtemps et se fit enregistrer dans un sanatorium. Le chef du comité de district du Parti, Vorkuev, fut frappé par hasard d’une amygdalite après avoir participé à une assemblée d’ouvriers en colère de Krassine. Il resta à la maison trois jours. Bien qu’il ait reçu un compte-rendu des troubles rédigé par l’OGPU peu après qu’elles commencèrent, le président du comité exécutif du soviet de district, Aref’ev, rendit néanmoins visite à son épouse à Rybinsk. Finalement, le procureur du district, Krutikov, passa outre aux avertissements que lui adressa la commission de contrôle et «déserta» son poste.

En cédant à la panique et en refusant d’accomplir leurs devoirs, Filippov, Vorkuev, Aref’ev et Krutikov révélèrent la forte distance qui les éloignait des ateliers. Ils laissèrent aux grévistes l’initiative. Comme le nota Kaganovitch, il en résulta «que le district était pour ainsi dire sans dirigeants», ce qui paralysa les organes d’autorité et les membres de la base du Parti. Pour ce qui est des fonctionnaires qui restèrent fidèlement au poste, ils se méprirent quant à l’importance de la grève, reportèrent l’appel d’urgence, à la recherche d’aide, au comité régional du Parti et perdirent rapidement le contrôle de la situation.

Curieusement, le chaos au sein de la bureaucratie contrastait fortement avec la cohésion de l’atelier. Bien que la grève de Vitchouga fut la plus importante et la plus étendue géographiquement des grèves d’avril 1932, ceux qui l’organisèrent n’était pas moins habiles que leurs homologues dans d’autres villes industrielles. Peut-être parce qu’il eut tant de meneurs dans les manifestations, les sources contiennent peu d’informations à leur sujet. Néanmoins, un fonctionnaire du comité régional du Parti, Fomenko, s’exprima plus tard avec envie quant à leur habileté à mettre sur pied une «organisation contre-révolutionnaire» qui gagna la loyauté des ouvriers de la ville. «Vous savez», déclara-t-il, «c’est un fait établi qu’ils ont tenu une conférence dans la forêt. Au cours de la grève, les informations circulaient très bien et ils réagirent à nos mesures avec souplesse. Il y a eu des moments où ils se branchèrent aux câbles [de télégraphe], placèrent leurs propres signaleurs de code Morse, etc. En dépit du fait que toutes les préconditions pour démasquer cette organisation étaient réunies, l’organisation du Parti est restée endormie tout du long.» Dans son rapport adressé à Staline, Kaganovitch nota également que les leaders de la grève jouissaient d’une «reconnaissance» excellente et «de communications étroites» avec les autres villes industrielles – y compris, ce qui est significatif, celles qui étaient plongées dans les désordres.

Samedi

Dans la matinée du 9 avril, deux tisserands assurant l’enchaînement automatisé des fils à tisser de l’usine Nogine – Iourkine, un ancien communiste qui quitta le Parti en 1922 en raison de «différences politiques» et Komarov, qui était prétendument issu d’une famille de «paysans prospères» – demandèrent qu’une conférence de toute l’usine soit réunie afin de discuter comment face à la crise. Rapidement, tous leurs collègues du département ainsi que plusieurs ouvrières spécialisées dans le lustrage de tissu arrêtèrent leurs machines et marchèrent vers le comité de fabrique. «Donnez-nous du pain!» exigèrent-elles. «Nous ne travaillerons pas pour 11 kg!»

Entre-temps, à l’usine Krassine et à la Shagov n°1, les tisserandes continuèrent la grève. Au combinat Shago, les grévistes convainquirent bientôt les fileuses de les rejoindre. (Des dommages furent causés et ceux qui s’opposaient à la grève, qu’ils soient membres du Parti ou non, furent attaqués lorsque les ouvrières des usines n°1 et n°3 firent irruption dans l’usine n°2). En début d’après-midi, la plupart des 66’900 fuseaux et des 2’158 métiers à tisser étaient immobilisés.

A 14h30, les grévistes de Shagov décidèrent d’étendre le mouvement et se dirigèrent vers l’usine Nogine. En route, elles invitèrent avec enthousiasme les passants à les rejoindre. Grigori Simov, un chauffagiste âgé de 29 ans de la Krasny Profintern, repéra une connaissance au milieu de la foule: «Comment se fait-il que tu sois ici?» s’enquit-il. «Tu ne veux donc vraiment pas manger?» fut la réponse. «Nous allons chercher les ouvriers de l’usine [Nogine]Il y eut également des tentatives de faire de l’agitation parmi les troupes de l’Armée rouge, l’un des soldats fut menacé alors qu’il essaya d’intervenir: «Il semble donc que tu es communiste? Allons donc, on devrait te rudoyer!» Une bagarre s’ensuivit de même lorsque les grévistes rencontrèrent un groupe de communistes et de membres du Komsomol qui avaient été envoyés pour les intercepter.

Fabrique des premières machines textiles semi-automatiques

Lorsqu’ils atteignirent l’usine Nogine, les grévistes jetèrent des pierres à travers les fenêtres, débordèrent une ligne de membres du Komsomol qui se tenait à l’entrée et pénétrèrent dans les ateliers, où ils exigèrent que tout le monde «cesse de travailler». Laissant éclater leur colère, les intrus, menés par Iourkine, brisèrent également l’équipement, détruisirent les fournitures et frappèrent leurs opposants. Pendant ce temps, à l’extérieur, une foule prit le contrôle de l’entrée de l’usine et interpella les ouvrières qui devaient prendre l’équipe de nuit, parmi eux Pavel Korotkov, âgé de 45 ans, un tisserand assurant l’enchaînement des fils, non membre du Parti, qui vivait en ville avec sa femme et leurs cinq enfants. Après avoir demandé à deux surveillants ce qu’elles faisaient, on lui répondit qu’elles tentaient d’être plus nombreuses ou, pour le moins, d’empêcher les autres de travailler [7].

La plupart des ouvrières de Nogine sympathisaient avec les revendications des grévistes de Shagov; en effet, environ 1500 d’entre elles (plus de la moitié de celles qui travaillaient) se joignirent ce jour-là à la protestation. Bien que la plupart de celles qui étaient en désaccord avec la grève gardaient un profil bas, une poignée d’entre elles s’exprima. «Camarades travailleurs de l’usine Shagov», cria un membre du Parti. «Vous ne pouvez rien faire ici! Nous ne vous rejoindrons pas, nous vous couvrons de honte!» Alors même qu’il parlait, toutefois, un grand nombre d’ouvrières sortirent de l’usine affichant leur soutien à la manifestation. Au cours de cinq jours suivants, la plupart des lignes de production de Nogine restèrent à l’arrêt.

Aussitôt que la popularité de la revendication du rétablissement des rations fut évidente et que la plupart des ouvrières qui n’appartenaient pas au Parti soutenaient la grève, certaines femmes exigèrent, du cœur de la foule, que la protestation s’étende: «Camarades!» tonnèrent-elles. «Allons à l’usine Tezinskaïa!» Sous la direction de Iourkine, de Komarov et de plusieurs ouvrières, la foule composée d’environ 3000 grévistes continua la manifestation en direction de la Krasnyi Profintern, où Iourkine lança un appel poignant à la solidarité: «Camarades, nous allons mourir de faim en cette quinzième année de la révolution, nos enfants mourront et qu’allons-nous faire? Rester silencieux? Si Staline devait subsister avec des rations de 11 kg, il quitterait sans aucun doute le Parti. 11 kg ne sont pas 16 et 4 kg ne sont pas 8. Ils lubrifient les machines avec de l’huile, mais avec quoi nous lubrifient-ils? Les camarades vont-elles rester passives et ne pas nous soutenir?»

D’une manière générale, les travailleuses répondirent en abandonnant leurs machines. Même un petit groupe parmi les communistes de l’usine Krasnyi Profintern – 29 sur 500, pour être exact – prit le parti des grévistes. (Après avoir été assuré que leur paie ne serait pas retenue, un candidat à l’adhésion du Parti, Varentsov, mena ses collègues hors de l’usine; un autre, Zakharov, mobilisa le soutien à la grève en concédant que tous «les communistes sont des gens qui s’encensent eux-mêmes» qui «ont oublié les intérêts de la classe ouvrière».) Quant à ceux qui résistèrent – généralement soit des communistes, soit des membres du Komsomol –, ils furent battus avec des navettes et leurs machines sabotées. Progressivement, le nombre de manifestants à l’extérieur dépassa les 5000.

S’exprimant devant la foule, Iourkine expliqua pourquoi il avait rejoint la grève: «Camarades, je gagne 200 roubles, on est deux en famille et je n’ai pas d’enfants. Je reçois assez de pain, mais je m’exprime pour les ouvriers et les paysans, pas pour les porteurs de serviettes et les imposteurs qui conduisent les ouvriers à la tombe.» Son message était clair: ceux qui avaient assez à manger, comme lui, avaient l’obligation morale de prendre le parti de ceux pour qui ce n’était pas le cas. Conscients des dangers de s’exprimer ouvertement, Iourkine gagna la sympathie des présentes en refusant d’être intimidé par l’OGPU: «Je sais qu’ils vont m’arrêter, mais j’espère que vous m’apporterez votre soutien.» Inspirées par son courage, d’autres prirent la parole en jurant que la grève continuerait jusqu’à ce que les rations alimentaires soient rétablies. Ceux qui osèrent condamner la manifestation furent insultés et malmenés.

A la fin de la journée, presque chaque entreprise de Vitchouga était en grève. Enhardis par ce succès, plusieurs milliers de grévistes portèrent la manifestation vers le seul avant-poste de l’industrie lourde du district: l’usine de construction de machines n°6 («l’usine métallurgique»), dont les 425 personnes qui y étaient employées fabriquaient des composants pour l’industrie textile. Témoignant des frontières de genre et de secteur [industriel] de la solidarité de classe, les ouvriers (masculins) de l’usine rejetèrent toutefois toutes les tentatives visant à gagner leur soutien [8].

Korotkov, quant à lui, resta à l’usine Nogine avec 200 grévistes, y compris son compagnon Golubev. Les manifestantes applaudirent aux discours d’une ouvrière et d’un monteur en machines employé à la Krasnyi Profintern, Kostkine, qui exigèrent tous deux que la direction sorte et négocie. La foule interpella également les ouvrières de l’équipe de nuit et nombre de ceux qui tentèrent d’entrer dans l’usine furent frappés. Les appels à la négociation des grévistes furent néanmoins rejetés et, à partir de 21 heures, pratiquement tout le monde – y compris ceux qui devaient travailler au cours de la nuit – rentra à la maison.

Après avoir finalement eu vent qu’une grève gagnait l’un de leur plus important centre industriel, le comité régional du Parti envoya une commission (la commission d’Ivanovo) qui était composée, entre autres, d’El’zov, de Fomenko, de Gribova, de Kisel’nikov, de Kotsen et de Sever’ianova du secrétariat du comité régional; Koriagin et Postnovo de la commission de contrôle et Novikov et Sulimov de la police civile. Après la tombée de la nuit, la police secrète arrêta Iourkine, l’un des porte-parole les plus populaires parmi les ouvrières, et le transporta secrètement à Ivanovo pour y être interrogé. Ils étaient loin d’imaginer que l’arrestation d’Iourkine ne ferait qu’augmenter son autorité dans les ateliers et provoquerait une violente escalade du conflit.

Dimanche

A la pointe du jour, le 10 avril, des groupes de grévistes apparurent à l’entrée des usines de Vitchouga en une tentative coordonnée d’appliquer la décision de grève. Une fois de plus, ceux qui s’y opposaient furent battus durement. A partir de 7 heures, toutes les lignes de production étaient à l’arrêt. Les grévistes déplacèrent alors une fois de plus leur attention sur l’usine de construction de machines. Bien que les entrées étaient gardées par des communistes, les grévistes parvinrent à franchir les portes, à entrer dans les ateliers et à en faire sortir les travailleurs. (Afin d’éviter un «massacre», les ouvriers de l’usine avaient reçu l’ordre du secrétaire du Parti de ne pas résister.) Pourtant, la majorité des métallurgistes refusa de soutenir la grève et la production reprit aussitôt que les chaudières de l’usine, qui avaient été sabotées, furent réparées.

Un grand nombre de spectateurs avaient, entre-temps, rejoint avec enthousiasme la manifestation. «Il faut que j’y aille», expliqua l’ancien commerçant Ignat’ev à ses amis. «En tant que chômeur, je suis membre du comité, vous savez». La référence mystérieuse d’Ignat’ev au «comité» donne quelque crédit à l’affirmation de Kaganovitch que «la grève était dirigée par une organisation clandestine». «Le type de discours, les slogans des grévistes, le changement rapide de tactiques, la composition individuelle des meneurs», écrivait-il dans son rapport à Staline, «tout cela témoigne du caractère organisé de la grève.»

Pour autant qu’il ait existé, le «comité de grève» possédait un visage bien moins sinistre que ce qu’en imaginait Kaganovitch. Il s’agissait essentiellement d’un groupe ad hoc d’individus – dont la composition changeait continuellement – qui s’efforça de donner forme à l’explosion spontanée de mécontentement populaire [9]. Une autre remarque d’Ignat’ev se révèle donc plus importante, elle reflétait en fait la frustration croissante et anticipait sur les événements du jour: «s’ils nous donnent le pouvoir», affirmait-il, «nous mettrons ces fichus communistes en pièces.»

Autour de 10 heures, environ 5000 ouvrières remplirent le serment qu’elles avaient fait à Iourkine le soir d’avant et se rassemblèrent sur la place située devant le soviet de la ville pour exiger le rétablissement des niveaux antérieurs des rations alimentaires. Lorsqu’il fut évident que leur leader avait été arrêté, cependant, elles exigèrent sa libération immédiate. Bien qu’une fausse rumeur – selon laquelle un représentant du comité central du Parti prononcerait un discours – généra l’espérance prématurée d’un compromis, les grévistes ne voulurent pas laisser les fonctionnaires locaux leur parler.

Dans une tentative désespérée de rétablir l’ordre, les autorités envoyèrent finalement la police montée. Ne voulant pas se disperser, les grévistes ripostèrent en lançant des objets pris dans les rues. Submergé, le contingent de policiers recula. La foule, en colère, se dirigea vers le poste de police et, voulant trouver Iourkine, assiégea l’édifice.

Après avoir débordé les gardes à l’entrée, le groupe le plus actif de grévistes fit face au chef de la police, Mokhov, avec leur exigence. Frustrés par la réponse – selon laquelle Iourkine n’était pas là et qu’il ne connaissait pas l’endroit où il se trouvait – ils frappèrent tous les agents présents dans le bâtiment, saccagèrent les bureaux, fouillèrent dans les dossiers d’arrestation et cherchèrent l’entrée d’une cellule de détention. «Que recherchez-vous» demanda un passant à deux jeunes hommes qui menaient l’assaut. «Iourkine!» répondit l’un d’eux: «je vais chercher Iourkine jusqu’à ce que je le trouve!» «Iourkine doit être ici! Il a été encore vu aujourd’hui!» Les intrus s’introduisirent finalement dans la cellule de détention et libérèrent ceux qui y étaient détenus, y compris les petits délinquants. Iourkine ne se trouvait toutefois pas parmi eux. (Il était déjà enfermé à Ivanovo dans une cellule de l’OGPU.) Leur plan déjoué, les grévistes donnèrent libre cours à leur rage en détruisant les fenêtres, arrachant les portes et détruisant les armoires, battant ensuite Mokhov et son adjoint, Shantsev, jusqu’à ce qu’ils s’évanouissent [10].

A l’extérieur, toutes les tentatives que faisait la police montée pour disperser la foule échouèrent. Ne voulant pas se séparer, les ouvriers se défendirent avec des pierres et de bâtons. Une fois qu’il vit que ses hommes souffraient de «blessures sérieuses», leur commandant, Chistiakov, leur ordonna de se retirer jusqu’aux voies de chemin de fer puis de se réunir à la caserne de pompiers. Lors de leur retraite chaotique, toutefois, un officier subalterne fut arraché de son cheval et battu avec son propre fusil par un groupe de grévistes jusqu’à ce qu’il perde conscience.

Portrait géant du dirigeant de l’OGPU Felix Dzerzhinsky, paradant sur la place Rouge en 1930

Réagissant à la rumeur qu’un «meeting de masse» était en cours au comité de district, les grévistes mirent le siège aux locaux du Parti et de l’OGPU, lesquels étaient situés au centre-ville, l’un à côté de l’autre. Le conflit était désormais autant en un acte de vengeance contre les organismes haïs de l’autorité qu’une volonté de localiser Iourkine. Au siège du comité de district du Parti, les grévistes réalisèrent le cri de bataille de la foule – «frappez les Chekisty et les communistes!» – en rouant de coups le président du conseil local des syndicats, Rybakov, ainsi que le chef du Département des cadres du comité régional du Parti, El’zov. Trois autres fonctionnaires du comité régional – Kotsen, Semagin et Ivanov – s’enfuirent du bâtiment en panique juste avant que la foule n’en prenne le contrôle. Ayant été tiré de son «lit de malade», le secrétaire du comité de district, Vorkuev, observa l’assaut de loin mais ne prit aucune initiative pour défendre ses collègues. (Interrogé plus tard par ses supérieurs, Vorkuev affirma sans conviction qu’un «policier m’avait maintenu hors» du bâtiment.)

Espérant toujours trouver leur leader, les grévistes acculèrent le chef de district de l’OGPU, Itkine: «soit vous nous rendez Iourkine, soit on vous tue». Une fois que les «négociations» eurent débouché sur une impasse, la foule saccagea durant deux heures le bâtiment de l’OGPU et agressa Itkine et ses subordonnés, dont certains avaient brûlé des dossiers sensibles avant de s’enfuir. De tous les fonctionnaires cibles de la vengeance, Itkine fut celui qui faillit perdre la vie. Tiré dans la cour et frappé avec des briques, il perdit conscience des suites des nombreux coups portés à la tête. Heureusement, toutefois, un ouvrier non identifié le sortit de là avant que des agents de l’OGPU en civil puissent le faire entrer dans un taxi, et le menèrent à l’hôpital [11].

Entre-temps, Golubev, un chef départemental de l’OGPU d’Ivanovo, «qui était arrivé le jour précédent à Vitchouga», apparut à la caserne de pompiers et donna l’ordre à la police montée de reprendre le bâtiment de l’OGPU et de libérer ses subordonnés. Arrivant sur les lieux en automobile, les dix agents – désormais sous les ordres directs de Golubev – firent face à une «résistance» féroce sous la forme d’une «pluie de pierres» qui blessa gravement plusieurs agents. Après avoir forcé leur chemin vers l’intérieur et tiré leurs armes, ils parvinrent toutefois à vider le bâtiment et à sécuriser l’accès à la cour intérieure.

Rendu furieux par l’action des agents, les grévistes «encerclèrent rapidement le bâtiment de tous les côtés», bombardant de briques et de pierres ceux qui se tenaient dans la cour intérieure et commencèrent à pousser pour franchir l’entrée. (Ils crièrent «hourrah!»). Risquant de perdre le contrôle du bâtiment, Golubev devait prendre une décision rapide: il commanda à ses hommes de tirer en l’air. Surpris, la foule recula. Profitant de l’occasion, Golubev ouvrit les portes et conduisit ses hommes à l’extérieur. Bien qu’un ouvrier gisait dans la rue, mort d’une blessure par balle, les deux côtés s’immobilisèrent. Craignant un nouvel assaut du bâtiment et évitant les projectiles, Golubev autorisa ses hommes à tirer de nouveau. Par peur, par panique ou par volonté de vengeance, plusieurs agents ciblèrent directement la foule. Il y eut de nouveaux tirs et plusieurs autres ouvriers tombèrent au sol. La foule s’enfuit pour se mettre à l’abri.

A partir de 16h30, les hommes de Golubev avaient repris possession de tous les édifices administratifs de Vitchouga. Les grévistes, entre-temps, s’étaient regroupés sur la place proche du soviet de la ville, à la gare, dans des cafétérias et dans les usines, où ils firent sortir des ateliers les ouvrières qui ne faisaient pas grève, frappèrent les communistes et les membres du Komsomol et «même des femmes non-membres du Parti» dont la loyauté avait été mise en doute parce que – fait significatif – elles portaient des foulards rouges. Avec pour objectif de diffuser la nouvelle aux travailleurs d’autres districts et afin de priver les autorités locales de toute communication avec Ivanovo, les grévistes tentèrent même d’occuper le bureau de poste. Lorsque cela échoua, ils trouvèrent cependant un moyen ingénieux de se brancher directement aux câbles du télégraphe de Vitchouga.

A la suite d’un meeting dans la forêt au cours de la soirée, les grévistes firent une nouvelle descente sur les usines, débarrassant les ateliers de ceux qui étaient restés à leurs postes, frappant les personnes loyales au Parti, pillant les réserves et – à la suite d’une action audacieuse qui impliquait de franchir plusieurs lignes de défense – sabotant les chaudières qui alimentaient en énergie les lignes de production. Plus tard, huit membres du «comité de grève», y compris Mironov, le chronométreur et ancien membre du Parti de l’usine de filature n°1 de Shagov, débattirent de la stratégie à prendre au domicile d’un collègue de Mironov, la fileuse Surova. Après avoir décidé d’un plan d’action, ils se dispersèrent à 2 heures du matin.

En quelques jours, une grève dont l’objectif était économique se transforma, pour reprendre les termes de fonctionnaires de l’OII, en «banditisme politique» ou ce qu’un témoin décrivit comme une «révolte totale» contre les garants de l’ordre à Vitchouga: le Parti, l’OGPU et la police civile. L’arrestation d’Iourkine, que les autorités qualifièrent ensuite d’«erreur tactique», exaspéra les ouvriers et offrit une prise à l’escalade de leur mécontentement. Pourtant, la majorité des protestataires étaient des ouvrières d’usine et c’est leur rage qui nourrit l’émeute qui dura quatre heures et demie.

Ainsi que Kaganovitch lui-même le concéda dans son rapport à Staline, il était «significatif» que les grévistes attaquèrent le comité de parti du district, l’OGPU et la police civile mais épargnèrent le soviet de la ville. Il semble évident que les ateliers n’entretenaient aucune illusion quant aux sièges du pouvoir. En outre, ils maintenaient un minimum de fidélité envers l’organe principal d’autorité de l’Etat – plus spécifiquement du «pouvoir soviétique» – qui avait émergé au cœur de la révolution et dont les membres restaient soumis à l’élection populaire. Deux jours plus tard, plusieurs leaders de la grève confirmèrent l’analyse de Kaganovitch: «Nous ne sommes pas contre les soviets», déclarèrent-ils. «Nous nous sommes rassemblés sur la place du soviet de la ville et nous avons envoyé un télégramme au TsIK [Tsentral’nyi ispolnitel’nyi komitet, ou Comité exécutif central des soviets]. Nous n’avons pas détruit le soviet, mais l’OGPU, la police civile et le comité de district [du Parti].» [12]

Un décompte des victimes illustre l’ampleur de la violence qui s’abattit sur Vitchouga. Sur les 30 à 60 cartouches tirées par la police sous les ordres de Golubev, trois touchèrent et blessèrent des grévistes. L’ouvrier Polunine, qui était marié et avait un enfant, mourut immédiatement; F. G. Dolgov, un travailleur non qualifié de 25 ans de l’entrepôt de l’usine Nogine et un paysan récemment émigré de la région de la Basse Volga, succomba d’une infection du sang alors qu’il était soigné à l’hôpital d’une blessure à la cuisse et une ouvrière souffrit d’une légère écorchure [13]. Parmi les forces de l’ordre, les blessures des victimes étaient moins graves bien que plus nombreuses: une trentaine d’individus, y compris une demi-douzaine de fonctionnaires, eurent des côtes brisées, le crâne fracturé ou le tympan percé. En ce qui concerne ceux qui s’opposèrent à la grève et tentèrent de faire fonctionner les lignes de production, jusqu’ici environ 72 avaient été agressés.

Ainsi que leur comportement l’illustra, les dirigeants régionaux du Parti avaient conscience de l’hostilité de la population envers les forces de l’ordre. La commission d’Ivanovo déplaça plusieurs fois sa base opérationnelle. Apprenant que les grévistes se dirigeaient vers le centre de la ville, par exemple, ils fuirent du comité de district du Parti à l’usine Krashnyi Profintern. Plus tard, informés qu’une foule s’assemblait à proximité, ils se rendirent à l’usine de construction de machines dont les ateliers étaient immunisés aux appels à la désobéissance.

Certes, le fonctionnaire du rang le plus élevé – Kotsen, le numéro 2 du comité régional du Parti – s’efforça de reprendre l’initiative. En réaction aux affrontements, il ordonna finalement au «commissaire militaire de Vitchouga» de mobiliser «un détachement de 300 communistes» et demanda à l’OGPU d’«aller à la rescousse» d’El’zov, son collègue de la commission d’Ivanovo, qui était immobilisé au comité de district. Après avoir été agressé par les manifestants, El’zov se mit de lui-même en sécurité.

Les actions décisives de Kotsen ne peuvent toutefois dissimuler le fait que l’establishment local, paralysé par la peur, était plongé dans le désarroi. Les fonctionnaires qui restèrent à leur poste ne furent pas non plus efficaces: physiquement dispersés, ils furent incapables de communiquer les uns avec les autres, ce qui contraignit Kotsen à prendre des décisions sur la base «de rumeurs “de la rue” imprécises et exagérées». Il mobilisa, par exemple, 300 communistes après qu’on lui ait dit que 5000 travailleurs se dirigeaient vers l’OGPU pour se venger du meurtre de trois grévistes. En réalité, seulement une personne était morte et personne ne s’aventura près du bâtiment une fois que les agents y ouvrirent le feu.

Malgré la confusion qui régnait dans ses rangs, Kotsen reçut une information fiable: l’OGPU disposait du cadavre sanglant d’un ouvrier. Se rendant compte que le corps pouvait devenir une icône de la révolte, il donna l’ordre aux agents de le porter secrètement à la gare. Dans l’espoir d’éviter d’autre carnage, il ordonna à la police civile de se retirer. Une heure plus tard environ, il convoqua une réunion d’urgence des communistes mobilisés sous le sémaphore. Bien qu’il interdit un nouveau recours à la force contre les grévistes, il répondit à une information selon laquelle une foule se dirigeait vers la gare en commandant à ceux qui possédaient une arme de rester à ses côtés. Les autres furent renvoyés chez eux sans autre instruction.

Kotsen se précipita peu après vers la gare avec ses défenseurs armés et réquisitionna un train avant de veiller au retrait du camion de livraison du cadavre de Polunine, «minutieusement drapé». Le corps fut placé dans un cercueil de fortune puis dans le train. Chargé du corps, des communistes armés et de quatre membres de la commission d’Ivanovo (Kotsen, Ivanov, Semagin et Kisel’nikov), le train partit peu après 17 heures en direction de Gorkino, un village situé à 20 kilomètres à l’ouest de Vitchouga. Malgré l’émotion, l’acte macabre de Kotsen fut dissimulé avec succès.

Du point de vue de Moscou, les agissements de Kotsen auraient été acceptables s’il avait informé de ses projets ceux qui étaient restés en ville. Comme il ne l’avait pas fait, il créa l’impression démoralisante que la commission d’Ivanovo «avait battu en retraite» et laissait le district, au point culminant de la crise, «sans direction». Pire encore, la confusion causée par le départ soudain de ces responsables s’amplifia lorsque, vers 19h30, trois autres membres de la commission d’Ivanovo fuirent la ville une fois qu’ils pensèrent que leur base opérationnelle avait changé à nouveau de lieu.

A la gare de Gorkino, Kotsen détacha son wagon du train et donna l’ordre au conducteur de mener le cadavre de Polunine à Ivanovo. Après s’être rassemblé avec les autres membres de la commission d’Ivanovo, il apprit qu’un «train spécial» de renforts – environ 450 policiers et 17 agents de l’OGPU – était en route venant de Kostroma; lorsque le convoi traversa le village, il accrocha son wagon à l’arrière. Peu après 21 heures, les sept membres aux fonctions les plus élevées de la commission d’Ivanovo retournèrent à Vitchouga avec des troupes fraîches sous leur commandement. Bien que leur opération de couverture fut un succès, Kotsen et ses collègues firent montre d’une erreur de jugement pour laquelle ils seront punis: à part Fomenko, personne n’était resté en ville, dans le sillage de l’un des plus violents affrontements qui eurent jamais lieu entre les ouvriers de l’OII et l’Etat soviétique. Leur autorité toujours en cause, ils réunirent rapidement le comité de district du Parti pour une session tard dans la nuit au cours de laquelle ils définirent un «plan d’action». (A suivre)

_____

[7] Korotkov grandit dans une famille paysanne pauvre dans un village proche de Vitchouga. Il commença à travailler à 12 ans, lorsqu’il obtint un emploi de noueur – assurer la continuité du fil – à l’une des usines de Morokine (Shagov). Il quitta l’atelier lorsqu’il fut contraint de rejoindre l’armée (1909-12 puis 1914-17) puis suite à l’effondrement de l’économie en 1918. Au cours de la guerre civile, il travailla comme graisseur dans une minoterie de la région de Khrakov. En 1921, il revint avec sa famille à Vitchouga, contribua à l’organisation d’une coopérative alimentaire ouvrière et fut élu par les ouvriers pour une durée d’un an comme gérant de leur cafétéria. Pour le reste de la période de la NEP, il gagna sa vie comme fumiste [ouvrier responsable de la construction et de l’entretien des cheminées] indépendant. (Sa vue qui déclinait faisait qu’il lui était difficile de poursuivre à plein temps son travail auprès des machines à tisser). Après avoir tâté brièvement avec le commerce, Korotkov fut exilé en 1929 à la région de l’Ienisseï pour avoir acheté des biens volés. Après être revenu à Vitchouga, 18 mois plus tard, il subvenait aux besoins de sa famille en travaillant pour l’entretien des chaudières au combinat Shagov ainsi qu’en assurant le suivi des fils à l’usine Nogine. Malgré ses nombreuses années dans l’industrie, les enquêteurs de l’OGPU le cataloguèrent dans la catégorie des «anciens commerçants». L’épouse de Korotkov travaillait comme tisserande à l’usine Shagov entre 1902 et 1918 et vendit du pain après être revenue à Vitchouga en 1921. Elle acheta également une licence de commerce et ouvrit une épicerie. En 1924, on la priva toutefois de ses droits civiques lors d’une répression contre les «spéculateurs».

[8] Le refus des métallurgistes de rejoindre la grève est à peine clarifié par les sources. Le fait que leurs rations furent coupées autant que celles des grévistes ne fait que rendre le mystère plus impénétrable. Qu’est-ce qui aurait pu provoquer leur sentiment d’isolement? Tout d’abord, le fait que l’usine de construction de machines était un petit avant-poste de l’industrie lourde dans une ville de l’industrie légère. Ensuite, les produits de l’usine – des pièces détachées d’équipement pour l’industrie textile – étaient très demandés. Enfin, tous les employés étaient des hommes. Pris ensemble, ces facteurs engendraient probablement un sens de privilège qui empêchait l’identification avec la base (principalement féminine) des ouvrières du textile.

[9] Après avoir interrogé un grand nombre de témoins, l’OGPU concéda dans son rapport de juillet 1932 destiné à Kaganovitch qu’elle n’avait pas été en mesure d’identifier une «organisation contre-révolutionnaire» à la source des «événements de Vitchouga».   

[10] Selon Pavel Finoedov, membre du Komsomol, les deux jeunes hommes qui menaient la tentative visant à trouver Iourkine étaient Nikolai Nikitine, âgé de 18 ans, un migrant de la région de Kazan qui avait brièvement suivi un apprentissage de cuisinier dans les cuisines de l’usine Nogine ainsi qu’un certain Sozine, un ouvrier qui vivait au même endroit, Gol’chikha, que Iourkine. Nikitine admit avoir assisté à l’attaque mais affirma ne pas y avoir participé. (Deux autres témoins indiquaient que Nikitine se trouvait hors du poste de police lors du soulèvement.) Les sources n’apportent pas de clarification quant au rôle précis de Nikitine. Il était toutefois une cible aisée pour la répression: jeune, orphelin, chômeur et critique du pouvoir soviétique, il pouvait facilement être qualifié comme appartenant aux «éléments hooligans et étrangers à la classe» qui, de manière prévisible, furent rendus responsables du soulèvement.

[11] Outre Itkine, neuf agents (masculins) et une dactylo se trouvaient dans le bâtiment lorsque les grévistes arrivèrent.

[12] Des distinctions aussi subtiles ne semblent pas avoir été partagées par les paysans très en colère du district. Deux d’entre eux, Reutskii (âgé de 25 ans) et Poliakov (âgé de 42 ans), menèrent une attaque, lors de la grève, contre le sel’sovet de Rep’evo en représailles contre son président haï.

[13] Répondant à la demande de Kaganovitch que l’usage d’armes contre la foule soit soigneusement examiné, l’OGPU, dans son rapport préliminaire déposé quatre jours après les affrontements, aboutit à trois conclusions. Premièrement, faisant face à une situation «extrêmement tendue», la police fit usage de ses armes qu’après l’échec «d’autres mesures visant à empêcher une dévastation complète du bâtiment ainsi que le pillage des documents». Ensuite, les trois victimes furent probablement touchées par des balles qui avaient ricoché d’un bâtiment situé de l’autre côté de la rue. Enfin, en tant que responsable présent sur place et auteur de l’ordre de tirs d’avertissement, Golubev de l’OGPU d’Ivanovo était responsable de la tragédie.   

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