Allemagne. Le personnel hospitalier de Rhénanie-du-Nord-Westphalie est prêt à faire grève

Par Nina Scholz

Dans quelques semaines, cela fera deux ans que le premier confinement dû au covid a eu lieu. Les applaudissements de solidarité sur les balcons, l’intérêt sincère pour les conditions de travail des travailleurs et travailleuses de la santé ont largement disparu.

Pourtant, ce sont eux (certes pas seulement eux) qui portent le poids de la pandémie, et ce dans des conditions de travail indignes. Les salarié·e·s des hôpitaux de Rhénanie-du-Nord-Westphalie [NRW: Düsseldorf, Cologne…] s’opposent désormais à cette situation en lançant la campagne «Notruf NRW» [«Signal de détresse NRW»] et en adressant un ultimatum au gouvernement du Land auquel il doit répondre dans les 100 jours. La revendication centrale est la dotation obligatoire en personnel dans tous les domaines. «Il ne s’agit pas exclusivement des soins. Le travail hospitalier est un travail d’équipe», explique Katharina Wesenick. Elle dirige, en Rhénanie-du-Nord-Westphalie, dans le syndicat Verdi le département santé, affaires sociales, éducation et recherche. Elle est l’une des négociatrices dans la lutte contractuelle actuelle que les hôpitaux universitaires appartenant au Land mènent face au gouvernement du Land.

«Toutes les professions hospitalières doivent être dotées d’un personnel suffisant et bien rémunéré», affirme Katharina Wesenick. «A quoi cela sert-il si, finalement, j’ai suffisamment de soignants au lit, mais que la patiente ne peut pas bénéficier de la physiothérapie ou que l’agent d’entretien est absent?» Alors que de nombreux médias allemands mènent un faux débat sur la question de savoir si une vaccination obligatoire pourrait amortir le manque de personnel dans le domaine des soins, on passe une fois de plus sous silence le fait que cette pénurie est depuis longtemps une réalité, en raison des privatisations, de l’industrialisation du système de santé, des forfaits par cas et des mesures d’économies – et que la tendance se poursuit. Katharina Wesenick déclare: «Nous ne sommes pas confrontés à une pénurie de personnel, mais à un départ accentué des professionnels provoqué par la politique sanitaire. La politique abandonne les travailleurs et travailleuses de la santé et les personnes qui ont besoin de soins. Même le coronavirus n’a pas pu changer cela.»

Elle sait à quel point la solution serait facile: «Si le gouvernement du Land décidait de légiférer sur une dotation correcte en personnel, 200 000 soignants qui renoncent à s’engager actuellement à cause des conditions de travail pourraient revenir.» Le problème de la désertion de la profession commence déjà chez les personnes en formation: «Une sur quatre quitte la profession définitivement parce que les conditions ne sont pas acceptables.» Les travailleurs et travailleuses de la santé du mouvement hospitalier NRW prennent donc désormais les choses en main. La semaine dernière, 700 salarié·e·s ont décidé, lors de deux conférences de préparation de l’initiative, de lancer un ultimatum aux employeurs et à la politique du Land. Peu après, les employés des six hôpitaux universitaires de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, à savoir Aix-la-Chapelle, Münster, Bonn, Cologne, Düsseldorf et Essen, ont annoncé publiquement cet ultimatum.

Ils luttent désormais ensemble pour une clé de répartition obligatoire du personnel, comme celle qui a été obtenue récemment à Berlin dans les hôpitaux appartenant au Land: la Charité et Vivantes. A la fin de l’été 2021, les employés des grands hôpitaux communaux Charité et Vivantes ont fait grève pendant plusieurs semaines pour obtenir de meilleures conditions de travail [voir l’article publié sur le site alencontre en date du 14 septembre 2021]. Tout comme leurs collègues de Berlin, les salarié·e·s des hôpitaux de Rhénanie-du-Nord-Westphalie sont déterminés à se battre.

L’ultimatum en Rhénanie-du-Nord-Westphalie expire le 1er mai 2022. Après cette date, les salarié·e·s seront également prêts à faire grève. Les collègues de Rhénanie-du-Nord-Westphalie ont déjà prouvé par le passé qu’ils pouvaient engager une telle action. Le mouvement hospitalier, désormais bien organisé dans toute l’Allemagne, est l’un des mouvements de grève les plus efficaces contre l’austérité et le néolibéralisme – et il reçoit régulièrement une reconnaissance internationale [1] pour cela. (Article publié par l’hebdomadaire Der Freitag, le 28 janvier 2022; traduction rédaction A l’Encontre)

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[1] Les informations et les possibilités à ce mouvement se trouvent sur le site suivant: https://notruf-entlastungnrw.de/.

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