Débat. Taxer les grandes entreprises de combustibles fossiles permettrait de lever 900 milliards de dollars, avec échéance 2030

Raffinerie de pétrole d’Ineos à Grangemouth, Ecosse.

Par Matthew Taylor

Selon un rapport, une nouvelle taxe sur les entreprises de combustibles fossiles basées dans les pays les plus riches du monde pourrait rapporter des centaines de milliards de dollars pour aider les pays les plus vulnérables à faire face à la montée de la crise climatique.

Le rapport de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques intitulé Climate Damages Tax, publié lundi 29 avril, calcule qu’une taxe supplémentaire sur les grandes entreprises de combustibles fossiles basées dans les pays les plus riches de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) pourrait rapporter 720 milliards de dollars d’ici la fin de la décennie.

Les auteurs affirment qu’une nouvelle taxe sur les activités d’extraction pourrait renforcer le Fonds pour les pertes et dommages destiné à aider les pays vulnérables à faire face aux pires effets de la dégradation du climat, qui a été convenu lors du sommet de la COP28 à Dubaï – une victoire durement gagnée par les pays en développement qui, espèrent-ils, signalera l’engagement des pays développées et pollueurs à fournir un soutien financier pour une partie de la destruction déjà en cours.

David Hillman, directeur de la campagne Stamp Out Poverty (du Bureau des Nations Unies pour la réduction des risques de catastrophe) et coauteur du rapport mentionné, a déclaré que celui-ci «démontre que les pays les plus riches et les plus puissants économiquement, qui portent la plus grande responsabilité historique dans le changement climatique, n’ont qu’à se tourner vers leurs industries de combustibles fossiles pour collecter des dizaines de milliards de dollars par an de revenus supplémentaires en les taxant de manière beaucoup plus rigoureuse. C’est certainement le moyen le plus équitable d’augmenter les recettes du Fonds pour les pertes et dommages afin de garantir qu’il soit suffisamment financé pour être adapté à son objectif.»

Les auteurs affirment que la taxe pourrait être facilement gérée dans le cadre des systèmes fiscaux existants. Ils calculent que si la taxe était introduite dans les pays de l’OCDE en 2024 à un taux initial de 5 dollars par tonne d’équivalent CO2, augmentant de 5 dollars par tonne chaque année, elle permettrait de collecter un total de 900 milliards de dollars d’ici 2030.

Sur cette somme, 720 milliards de dollars iraient au Fonds pour les pertes et dommages, les 180 milliards de dollars restants étant affectés à un «dividende national» destiné à aider les collectivités des pays les plus riches à opérer une transition climatique équitable.

Le rapport est soutenu par des dizaines d’organisations de défense du climat dans le monde entier, dont Greenpeace, Stamp Out Poverty, Power Shift Africa et Christian Aid.

Areeba Hamid, codirectrice de Greenpeace UK, a déclaré que les gouvernements ne pouvaient plus rester les bras croisés et laisser les citoyens ordinaires payer la facture de la crise climatique alors que «les patrons du pétrole se remplissent les poches et encaissent les prix élevés de l’énergie».

«Nous avons besoin d’un leadership mondial concerté pour forcer l’industrie des combustibles fossiles à cesser ses activités de forage d’extraction et à commencer à payer pour les dommages qu’elle cause dans le monde entier. Une taxe sur les dommages climatiques serait un outil puissant pour atteindre ces deux objectifs: débloquer des centaines de milliards de dollars de financement pour ceux qui sont au cœur de la crise climatique tout en aidant à accélérer une transition rapide et juste vers l’abandon des combustibles fossiles dans le monde entier.»

Le monde a vu les effets dévastateurs de la crise climatique, allant de la sécheresse paralysante en Afrique aux inondations meurtrières au Pakistan et en Afghanistan.

Areeba Hamid a ajouté: «Les conditions météorologiques extrêmes font des victimes et causent des dégâts catastrophiques dans le monde entier. Mais alors que les collectivités qui ont le moins contribué à la crise se retrouvent en première ligne et que les ménages européens doivent faire face à des factures d’énergie astronomiques, l’industrie des combustibles fossiles continue d’engranger des profits colossaux sans rendre compte de son impact historique et continu sur notre climat.»

La publication du rapport intervient alors que le nouveau conseil d’administration du Fonds pour les pertes et dommages se prépare à tenir sa première réunion à Abou Dhabi, mardi 30 avril, afin de discuter des modalités de financement du fonds.

Les ministres se réunissent également ce lundi 29 avril à l’occasion de la réunion du G7 sur le climat, l’énergie et l’environnement qui se tient à Turin, en Italie. Selon le rapport, si la taxe n’était introduite que dans les Etats du G7, où un nombre considérable de compagnies pétrolières et gazières internationales sont basées, elle pourrait encore lever 540 milliards de dollars pour le Fonds pour les pertes et dommages d’ici la fin de la décennie, avec un «dividende national» de 135 milliards de dollars pour l’action en faveur du climat dans l’ensemble des pays du G7. (Article publié dans The Guardian le 29 avril 2024; traduction rédaction A l’Encontre)

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