Depuis la mort de George Floyd aux mains de la police à Minneapolis, dans le Minnesota, le 25 mai, environ 140 villes dans les 50 États des États-Unis ont connu des manifestations et des protestations en réponse à ce meurtre.
Plus de 10’000 personnes ont été arrêtées aux États-Unis pendant ces manifestations, les forces de police utilisant régulièrement du gaz poivré, des balles en caoutchouc, des gaz lacrymogènes et des matraques contre les manifestant·e·s, les journalistes et les passants. Plusieurs grandes villes américaines ont adopté des couvre-feux pour tenter de mettre fin aux manifestations et de limiter les troubles.
• Jarah Gibson a été arrêté lors d’une manifestation non violente à Atlanta, en Géorgie, le 1er juin. «La police était là dès le début et nous a littéralement escortés pendant toute la marche», a déclaré Jarah Gibson. Elle a ajouté que vers 19h30, avant le couvre-feu de 21h, la police a commencé à frapper les manifestants. Alors que les manifestant·e·s tentaient de partir, Jarah Gibson a essayé d’enregistrer sur vidéo une personne à vélo qui semblait avoir été renversée par une voiture de police et qui avait été arrêtée par la police. Elle a reçu une contravention pour «piéton sur la chaussée» et «refus d’obtempérer lorsqu’on lui a demandé de partir». «La police est à l’origine de tout et elle nous criminalise. Maintenant, on me prend en photo, on prend mes empreintes digitales et on me scanne les yeux. Maintenant, je suis une criminelle à cause d’une arrestation illégale», a ajouté Jarah Gibson. «Je veux être entendue et je veux que la police respecte la décence humaine.»
• Ruby Anderson a été arrêtée alors qu’elle manifestait de manière non violente à Philadelphie, en Pennsylvanie, le 31 mai. La police a refusé de fournir une raison pour sa détention jusqu’à ce qu’elle soit placée dans un fourgon de police, où on lui a dit que l’accusation était celle vagabondage. Un bracelet a été mis aux personnes enfermées dans le fourgon portant la mention «rassemblement illégal». Et ils ont été accusés de trouble à l’ordre public. «Pendant mon arrestation, je me tenais à côté de deux personnes blanches qui faisaient la même chose que moi, entre un groupe de policiers et un groupe d’adolescents noirs. J’étais la seule à avoir été arrêtée dans mon groupe de trois, j’étais la seule Noire», a déclaré Ruby Anderson.
• Des rapports faisant état d’un excès de force policière tout au long des manifestations ont été publiés aux États-Unis. Plus de 130 rapports de journalistes attaqués par la police ont été enregistrés depuis le 28 mai.
• Le 2 juin, six policiers d’Atlanta, en Géorgie, ont été accusés d’usage excessif de la force lors de l’arrestation de deux étudiants le 30 mai. Le week-end du 30 mai, 12’000 plaintes contre la police de Seattle (Washington) ont été déposées en réponse à la force excessive utilisée lors de manifestations. Un policier de Denver, Colorado, a été licencié pour avoir affiché sur Instagram «Let’s start a riot» (Commençons une émeute!). À New York, des vidéos ont été diffusées montrant: des agents de la police de New York pointant une arme sur des manifestants; conduisant un SUV dans une foule de manifestant·e·s; frappant un manifestant avec une portière de voiture; un agent montrant un symbole de suprématie blanche et un autre agent poussant une femme au sol qui a dû être hospitalisée.
• Plusieurs manifestants et spectateurs aux États-Unis ont été hospitalisés à la suite de blessures par balles en caoutchouc, par de petits sacs remplis de boulettes, de bombes lacrymogènes et de matraques, tandis que la police a souvent démoli des tentes médicales et détruit des bouteilles d’eau destinées aux manifestants (contre les effets des gaz).
• A Minneapolis, dans le Minnesota, Dan Rojas a été arrêté le matin du 27 mai. Bien qu’aucune manifestation n’ait eu lieu à ce moment-là, Rojas avait décidé de nettoyer des fragments de balles en caoutchouc, des grenades de gaz lacrymogènes et des bidons d’eau sur le trottoir de son quartier lorsque six policiers l’ont confronté et arrêté. «Ils m’ont passé des menottes, m’ont dépouillé, ils ont écarté un journaliste local. Ils m’ont mis dans une voiture de patrouille et m’ont arrêté pour émeute à 10h30 du matin, le lendemain d’une manifestation pacifique.» Dan Rojas n’a été libéré que 48 heures plus tard. «A la fin, aucune accusation n’a été portée, toutes ont été abandonnées et on ne m’a jamais dit quelle était la cause probable de mon arrestation.»
• Plusieurs manifestants non violents arrêtés lors de manifestations ont demandé à rester anonymes par crainte de représailles policières, car ils font toujours l’objet de mises en examen et de poursuites. Les manifestant·e·s ont décrit les tactiques d’encerclement (de la «nasse») de la police, où les manifestant·e·s étaient empêchés de partir par les forces de police, souvent jusqu’à ce que les couvre-feux prennent effet ou que des arrestations soient effectuées pour obstruction de la chaussée. «Les couvre-feux sont un moyen de donner plus de pouvoir à la police, exactement le contraire de ce que veulent les manifestant·e·s. Ces couvre-feux, comme la plupart des autres tactiques de maintien de l’ordre, auront un impact disproportionné sur les mêmes communautés qui protestent contre la violence et la brutalité de l’État», a déclaré le Dr LaToya Baldwin Clark, professeur adjoint de droit à l’UCLA (Université publique à Los Angeles, Californie).
• Une manifestante de Los Angeles, en Californie, a raconté comment elle retournait à son appartement avant le couvre-feu de 18 heures, alors que la police bloquait les manifestant·e·s et les sorties. «J’ai été arrêtée à deux rues de mon appartement, il venait d’être 18h», a-t-elle déclaré. Elle a noté que lors des arrestations, les voisins protestaient depuis les balcons de leurs appartements, tandis que la police les visait avec des balles en caoutchouc, du gaz lacrymogène et du spray au poivre. «Ils nous ont tous menottés avec des menottes plastiques et nous ont laissés dans un bus de police pendant environ cinq heures… J’ai demandé une assistance médicale et ils me l’ont refusée, j’ai été menottée pendant plus de cinq heures avec une main qui saignait et qui a fini par devenir violette jusqu’à ce que je sois enfin libérée.» Elle a finalement été libérée le 2 juin à 1 heure du matin, avec poursuite judiciaire pour avoir dépassé le couvre-feu.
• «La police nous a piégés pour nous faire arrêter. Ils ont fermé les rues, nous forçant à emprunter le pont Margaret Hunt Hill. Une fois que nous étions sur le pont, la police a bloqué les deux sorties devant et derrière nous», a déclaré une manifestante de Dallas, au Texas, qui a été arrêtée le 1er juin, puis relâchée sans avoir été inculpée. Elle a ajouté: «Ils nous ont lancé des gaz lacrymogènes et ont tiré sur une manifestante avec une balle en caoutchouc qui lui a blessé la main. La police nous a tous fait nous étendre sur le sol, nous a attaché les mains avec des menottes plastiques, nous a alignés sur le côté de l’autoroute et nous a laissés là pendant des heures.»
• À Cincinnati, dans l’Ohio, un habitant d’un quartier où des manifestations avaient lieu le 31 mai a vu plusieurs manifestants risquer d’être pris à l’extérieur après le couvre-feu de la ville à 20 heures. «Cela m’a semblé être un piège. J’ai senti que si je pouvais prendre quelques personnes et les amener à leur voiture, je pourrais empêcher les gens de se faire arrêter, alors j’ai sauté dans ma voiture, j’ai descendu la rue, j’ai vu un groupe de personnes qui se cachaient, elles avaient les mains en l’air, et elles sont montées dans la voiture, et elles ont fermé les portes. Nous avons essayé de poursuivre, mais nous avons été arrêtés», a déclaré le résident. «On nous a demandé de sortir de la voiture, on nous a attachés sur le bord de la route, on nous a fait monter dans un bus et ils nous ont retenus pendant quelques heures pour faire de la paperasse.»
• Une manifestante de Houston, au Texas, a décrit la façon dont la police l’a bousculée, elle et d’autres manifestants, avant de se faire arrêter le 31 mai pour obstruction à la circulation. «Nous n’avons pas été autorisés à rentrer chez nous», a-t-elle déclaré. «Nous avons fait de notre mieux pour rentrer chez nous et on nous a dit «non, vous ne partez pas». A partir de ce moment, les flics ont dit que toute personne en dehors de son habitat irait en prison. Et qu’ils nous pousseraient plus loin du trottoir. Ils nous ont fait enfermer.» (Article publié par The Guardian, le 8 juin 2020; traduction rédaction A l’Encontre)
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