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Les travailleurs de McDo devant le siège de la firme
Les travailleurs de McDo devant le siège de la firme

Par Tina Treviño-Murphy

Les 21 et 22 mai 2014, 2000 travailleurs de McDonald’s et les partisans de la campagne Fight for 15 [1] voyagèrent depuis 36 villes pour marcher sur la «Hamburger Unversity» à Oak Brook dans l’Etat de l’Illinois. Ils se rendirent là-bas afin d’y apporter leurs revendications à la réunion annuelle des actionnaires du géant de la restauration rapide.

Le 21 mai, dans le cadre de ce que les organisateurs appelèrent la plus importante manifestation contre McDonald’s connue jusqu’ici, plus de 100 travailleurs, la plupart d’entre eux portant leurs vêtements de travail [avec le décorum de McDo], ainsi que des dizaines d’animateurs de communautés [quartiers] et des religieux, furent arrêtés par la police de l’Etat vêtue d’équipement antiémeute alors que les manifestant·e·s tentaient de marcher en direction du siège de McDonald’s. Selon le département de police d’Oak Brook, les 138 manifestant·e·s furent accusés d’entrée illégale sur une propriété privée.

Drelynne Finley, père de deux enfants, âgé de 24 ans, et travailleur de McDonald’s et de Arby [autre enseigne de fast-food], a traversé la moitié du pays, depuis Tampa [côte occidentale de la Floride], pour participer à la manifestation. «Ils nous ont donné un avertissement… de quitter la propriété», a-t-il déclaré, «et lorsqu’ils nous ont dit ça nous avons crié en retour: «on ne se laissera pas déplacer!» Je pense que c’est à ce moment que nous nous sommes assis.»  

Lorsqu’on a lui a demandé ce qui l’a motivé à risquer d’être arrêté, Finley répond: «Un emploi, ce n’était juste pas suffisant… J’ai dû chercher un deuxième travail parce que mon épouse a perdu son emploi du simple fait qu’elle était enceinte.» 

Ces actions de désobéissance civile ont été préparées et coordonnée nationalement, réunissant des comités organisant les travailleurs et travailleuses qui n’avaient jamais participé ensemble à une action par le passé. Des activistes de différentes villes de tout le pays – allant de Kansas City à Pittsburgh en passant par Houston et Detroit – se mobilisèrent pour participer à cette marche contre McDonald’s.

Roman Fletcher, un manifestant de Madison âgé de 25 ans, indique: «Au lieu de couper un bras de la Méduse, nous nous sommes dirigés vers le cœur. McDonald’s ne peut plus se dissimuler, ils ne peuvent plus masquer leur cupidité. Ils ne nous écoutent pas, nous les travailleurs, mais, avec chance, en réalisant cette action, d’autres gens la verront et s’en saisiront pour faire quelque chose.» Le jour qui a suivi les arrestations, des centaines de travailleurs se présentèrent à nouveau, manifestant contre la réunion des actionnaires prévue pour ce jour. 

***

Ces manifestations se déroulèrent moins d’une semaine après que des travailleurs à bas salaires et les personnes qui les soutiennent se sont jointes, le 15 mai, en des grèves globales lorsque les premiers protestèrent contre McDonald’s, Wendy’s, Burger King et d’autres restaurants de fast-food dans leurs villes afin d’attirer l’attention sur les bas salaires et les mauvaises conditions de travail [2].

Alors que des dirigeants du Parti démocrate ont proposé un salaire minimum horaire s’élevant à 10 dollars [3], pour lequel ils ne vont même pas se battre, les travailleurs et travailleuses actifs dans des campagnes comme celle de Fight for 15 revendiquent des salaires qui leur permettent de sortir de la pauvreté – ainsi qu’un syndicat qui leur permette de prendre la parole sur les places de travail.

Nombreux sont les slogans lancés lors de la manifestation de Oak Brook qui témoignent de la confiance que ces actions peuvent amener aux salarié·e·s et aux activistes qui y prennent part.

L’une des forces du mouvement des salarié·e·s à bas salaires réside dans son refus de transiger sur l’idée que les travailleurs et travailleuses du secteur de la restauration rapide mérite de gagner plus que le salaire minimum pour le travail qu’ils réalisent. Ainsi que l’affirme un slogan: «7,25 dollars ce n’est simplement pas juste – nous avons commencé tout en bas et nous nous y trouvons encore.»  

Lors de la manifestation, un travailleur de Detroit crie au groupe de personnes qui l’entoure: «Voulons-nous 9,50 dollars?» «NON, Merde!» répliquèrent-ils. «Et 9,57 dollars?» dit-il. «NON, Merde!» fut la réponse. C’est alors que toute la foule chanta: «Je les veux, je les veux, je veux mes 15 dollars!»     

McDonald’s est l’un des leaders de l’industrie de la restauration rapide, ce qui en fait une excellente cible pour la campagne qui vise à élever les standards d’existence des travailleurs à bas salaires. Selon un rapport d’avril dernier, publié par Demos [Demos, an equal say and equal chance for all, son rapport peut être consulté ici: http://www.demos.org/publication/fast-food-failure-how-ceo-worker-pay-disparity-undermines-industry-and-overall-economy], la restauration rapide est «l’un des employeurs du pays qui connaît les taux de croissance les plus élevés» [4]. C’est aussi un secteur qui rencontre les écarts les plus élevés entre les «primes et bonus» des PDG et le salaire des travailleurs.

«L’indemnité» d’un PDG de la restauration rapide représentait plus de 1200 fois la moyenne des revenus d’un travailleur de fast-food en 2012. Demos souligne: «Une nouvelle analyse portant sur le ratio entre les revenus des PDG et des travailleurs dans l’ensemble des secteurs révèle que l’hôtellerie et la restauration sont les secteurs les plus inégaux de l’économie, et cette disparité extrême des salaires est conduite avant tout par l’un des secteurs qui compose cette industrie: la restauration rapide.» 

C’est la raison pour laquelle il est si important pour les travailleurs et travailleuses qui mènent cette lutte de déposer leurs revendications sur le pas-de-porte des gens qui les ont volés. Ils sont directement responsables de la dureté du travail de leurs employés – tout cela au nom de servir leurs actionnaires, qui sont devenus riches grâce aux profits massifs générés par les travailleurs et travailleuses.

Ce fait était clair pour Roman Fletcher. «Ils [les actionnaires] réalisent beaucoup de profits grâce aux travailleurs, et ils ne nous paient pas ce que nous méritons. Ils nous doivent de l’argent.» 

Des actions semblables à celle qui a été menée devant le siège de McDonald’s contribuent à bâtir la solidarité entre les travailleurs qui luttent, chez eux, pour des objectifs similaires. Ainsi que le précise Fletcher: «Cela est bonne chose, car vous savez ainsi que vous n’êtes pas seuls dans cette bataille.» 

Drelynne Finley dit: «Je fais cela pour ma famille, pas seulement pour moi. Si vous êtes un travailleur de la restauration rapide, je le fais alors pour vous aussi. Nous faisons cela pas seulement pour nous-mêmes, mais pour tous les travailleurs du fast-food du pays.» 

Cette dernière série d’actions marque une escalade bienvenue dans la stratégie nationale de cette campagne. L’énergie et les slogans apportés par les travailleurs indiquent clairement qu’ils n’accepteront rien d’autre que 15 dollars et un syndicat. (Article publié le 27 mai 2014 sur le site SocialistWorker.org. Traduction A l’Encontre.)

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[1] Littéralement: lutte pour les 15 dollars horaires. Campagne lancée par le Workers Organizing Committee of Chicago, syndicat fondé fin 2012, actif auprès des travailleurs du «fast-food». Voir le site de la campagne: http://fightfor15.org/en/homepage/

[2] http://socialistworker.org/2014/05/19/putting-their-issues-on-the-table

[3] http://socialistworker.org/2014/05/06/the-democrats-minimal-effort

[4] http://www.demos.org/publication/fast-food-failure-how-ceo-worker-pay-disparity-undermines-industry-and-overall-economy

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