Venezuela. «Difficile à croire»

Bureau de vote, 28 juillet 2024.

Par Pablo Stefanoni

Le président chilien Gabriel Boric a résumé un sentiment largement répandu lorsque les résultats officiels des élections vénézuéliennes ont été publiés suite au décompte de 80% des votes: «difficile à croire». La manière dont le président du Conseil national électoral, Elvis Amoroso [dont les liens politiques entre autres avec Cilia Flores, épouse de Nicolás Maduro, sont publics], a présenté les résultats à minuit n’a fait qu’ajouter aux doutes déjà soulevés par la campagne électorale et la journée électorale elle-même, marquée par divers types d’incidents.

Elvis Amoroso a annoncé une «attaque contre le système de transmission» pour justifier les coupures dans le processus de décompte complet des données. Puis il a lu le «premier bulletin» du CNE qui «marque une tendance forte et irréversible» en faveur du parti au pouvoir avec «80% des bureaux de vote dépouillés et un taux de participation de 59%». Selon ces résultats, Nicolás Maduro aurait obtenu 51,20% [5’150’092 suffrages] et le candidat de l’opposition Edmundo González Urrutia, 44,2% [4’445’978 suffrages]. Ensuite, Elvis Amoroso a annoncé l’ouverture d’une enquête sur des «actes terroristes» contre le système électoral. Ancien député du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) et représentant de l’aile dure du chavisme, Amoroso n’est pas exactement quelqu’un qui donne une image de sérénité dans un conseil où, dans le cadre des accords préélectoraux, l’opposition a réussi à nommer deux des cinq conseillers (qui, à l’heure où nous écrivons ces lignes, n’ont pas fait de déclaration mais, selon Amoroso, ont signé la déclaration de Maduro l’annonçant vainqueur du processus électoral). L’opposition exige de pouvoir vérifier les procès-verbaux des bureaux de vote.

«Depuis le début de notre couverture de cette campagne, nous savions que le jour des élections présidentielles ne serait pas la conclusion, mais qu’il donnerait le ton pour le jour suivant. Eh bien, le ton est donné. Et c’est ainsi que cela commence», a écrit le journaliste Raúl Stolk dans le journal anglophone Caracas Chronicles du 29 juillet. Et le jour d’après [le lundi 29 juillet] annonce de nouvelles crises, qui pourraient faire échouer la relative réincorporation du gouvernement de Maduro dans la «communauté internationale». Il faut rappeler la reconnaissance par une cinquantaine de pays de Juan Guaidó comme «président en charge» en 2019 [autoproclamé président du 23 janvier 2019 au 5 janvier 2023]; cet épisode s’est achevé – sur fond de plusieurs affaires de corruption dans son administration parallèle – par une forte érosion de l’opposition [1]. Le repositionnement de l’opposition est venu de María Corina Machado – qui est passée d’une image trop ultra [elle se revendiquait ouvertement de l’orientation de Javier Milei] à celle d’un leader capable de «réenchanter» [ce qui s’est renforcé grâce au binôme formé avec Edmundo González] une partie importante de la population, y compris dans des zones traditionnellement pro-Chávez.

Ces élections ont été particulièrement complexes. L’opposition – attirée par la popularité de María Corina Machado – a réussi à organiser de grandes manifestations en faveur de la candidature d’Edmundo González, le diplomate choisi par consensus après la disqualification de Machado [suite à une décision du Tribunal suprême de justice concernant le déroulement des primaires de l’opposition et les déclarations faites à cette occasion]. Or, Machado avait remporté les primaires de avec 90% des voix en octobre 2023.

Contrairement au Nicaragua, où le régime de Daniel Ortega a purement et simplement arrêté tous les opposants qui tentaient de se présenter à l’élection présidentielle, puis les a expulsés du pays, au Venezuela, le gouvernement a entrepris d’affaiblir l’opposition de manière «dosée», avec l’arrestation de l’entourage de Machado, la disqualification de la candidate la plus populaire car elle avait appelé à une intervention étrangère au Venezuela. De plus, le pouvoir a tout fait pour limiter le vote à l’étranger, alors qu’il y a au moins cinq millions de Vénézuéliens résidant en dehors du pays [avant tout dans les pays d’Amérique du Sud et de la Caraïbe].

Ces élections ont également été le résultat de négociations avec l’opposition et les Etats-Unis, qui ont impliqué un assouplissement des sanctions pétrolières. Le Venezuela a également remis des Américains détenus à Caracas en échange de l’homme d’affaires Alex Saab, accusé d’être un homme de paille des hauts responsables chavistes, qui est rentré au pays en héros et a été intégré dans les hautes sphères du pouvoir. L’assouplissement des sanctions a permis à Petróleos de Venezuela (PDVSA) de conclure des accords avec des sociétés transnationales [2].

Il s’agissait d’un bras de fer, dans un contexte de non-respect des accords, mais la situation n’est pas revenue à ce qu’elle était avant les négociations. Un secteur de la bourgeoisie vénézuélienne – qui mélange aujourd’hui anciennes et nouvelles élites – s’est depuis longtemps rapproché du gouvernement, en particulier de la puissante vice-présidente Delcy Rodríguez [de même ministre de l’Economie, des Finances et du Commerce extérieur depuis septembre 2020], estimant que Maduro, dans le contexte de la relative «normalisation» de l’économie, était le garant de leurs affaires.

Après 25 ans de chavisme et plus d’une décennie de Maduro au pouvoir [Hugo Chavez est président de la République de février 1999 au 5 mars 2013, il est aussi président du Parti socialiste unifié du Venezuela-PSUV de mars 2007 à mars 2013; Maduro est en fonction depuis mars 2013 et est de même président du PSUV depuis juillet 2014], ces élections s’inscrivaient en effet dans l’effort du gouvernement de montrer que la crise est terminée et que «tout est très normal» au Venezuela. Magasins et supermarchés remplis de produits importés, nouveaux restaurants chics à Caracas, vols vers l’Espagne et le Portugal… le mélange de dollarisation de fait et de libéralisation économique a provoqué un effet d’abondance au milieu de fortes inégalités sociales et avec de larges secteurs de la population dépendant des aides de l’Etat ou de diverses activités de «débrouillardise» légales ou illégales – ce qu’on appelle au Venezuela «matar tigritos» (faire un peu d’argent facile et rapidement). De nombreux journalistes pro-Maduro qui se sont rendus au Venezuela pendant les élections ont fait connaître la Caracas ostentatoire qui a vu renaître la vie sociale – grâce aussi à une diminution de l’insécurité, avec des méthodes plutôt brutales – après les pires années de pénuries, de violence urbaine et d’effondrement social, comme une réfutation des «mensonges» diffusés sur la situation vénézuélienne.

***

María Corina Machado, désormais leader incontestée de l’opposition, a été la première à sortir du bois, soulignant que le Venezuela «a un nouveau président élu en la personne d’Edmundo González Urrutia» et que les électeurs ont donné «une victoire écrasante» à l’opposition. Selon ses chiffres, González Urrutia a remporté 70% des voix contre 30% pour Maduro.

Après des années de divisions entre les partisans de la participation au jeu électoral et ceux pour le boycott, il y a eu cette fois-ci un consensus sur le fait que la bataille devait être menée dans l’arène électorale, dans un contexte de forte perte de popularité de Maduro. L’«effet Barinas» – la défaite du chavisme au «pays de Chávez» lors des élections régionales de 2022 [Sergio Garrido du MUD-Mesa de la Unidad Democrática avait obtenu 55,34% des voix, le candidat Jorge Arreaza du PSUV n’en avait récolté que 41,3%], grâce à l’unité et à la persévérance de l’opposition – a servi à convaincre les radicaux, comme Machado elle-même, de l’utilité de participer aux élections et d’abandonner les fantasmes insurrectionnels, qui visaient à briser les Forces armées et qui, en dernière instance, ont fini par profiter au gouvernement, qui accuse souvent l’opposition d’être des «putschistes» [d’autant plus que Maduro a multiplié les postes de hauts gradés avec les privilèges qui en découlent].

Issue de l’aile dure de l’opposition et de l’élite de Caracas, María Corina Machado s’est forgé une image combative il y a plus d’une décennie, lorsqu’elle a défié Hugo Chávez à l’occasion d’un débat au sein du Parlement [il s’est déroulé il y a 12 ans entre la députée et le président Chavez; celle-ci, après avoir décrit la difficulté pour les femmes d’obtenir du lait, a insisté sur le non-respect de la propriété privée et, dès lors, le vol commis par les autorités chavistes]. Chavez lui a répondu qu’elle devait d’abord gagner les primaires de l’opposition pour être à la hauteur d’un vrai débat [après avoir regretté qu’il soit «traité de voleur»], car «les aigles ne chassent pas les mouches». La dirigeante du parti Vente Venezuela a été l’une des leaders des manifestations de rue connues sous le nom de «La Salida» (La Sortie) en 2014. En général elle faisait partie de l’aile la plus dure de l’opposition, qui a d’ailleurs tiré avantage de la politique officielle de répression et de manipulation électorale, ce qui a discrédité les opposants modérés. Au final, Machado a remporté les primaires exigées dans sa réponse par un Chávez [malade] en 2012. Et son audience a été particulièrement massive à l’intérieur du Venezuela, loin de la nouvelle «normalité» économique de Caracas. María Corina Machado a réussi à mettre en place un bloc trans-idéologique avec des secteurs modérés, en faveur de la réinstauration d’un cadre institutionnel dans lequel peuvent être traités les différends politiques et sociaux. C’est le cas, entre autres, du courant réuni dans la Plate-forme citoyenne pour la défense de la Constitution [ce dernier appel date du 11 avril 2024, alors que diverses candidatures d’opposition à l’élection présidentielle sont écartées par le pouvoir; le titre: «L’abstention n’est pas une option. Maduro peut être battu si se concentre le vote d’opposition»]. Ce courant comprend d’anciens ministres de l’ère Hugo Chávez [3] qui ont pris leurs distances avec le «Madurismo» [4].

***

Le gouvernement a cherché, par anticipation, à légitimer le résultat électoral par des mobilisations massives de campagne qui démontreraient le soutien populaire et rappelleraient ces marées «rouge-rouge» de l’ère Chávez, lorsque le processus bolivarien compensait ses lacunes de gestion par des expressions spectaculaires et épiques. Mais les cliques bureaucratiques et parfois mafieuses ont fini par remplacer l’énergie populaire. Maduro lui-même a souligné la dimension militaro-policière du régime actuel. «Nous sommes un pouvoir militaire, parce que la Force armée nationale bolivarienne me soutient, elle est chaviste, elle est bolivarienne, elle est révolutionnaire; nous sommes un pouvoir policier. Nous sommes l’union parfaite entre civils, militaires et policiers», a-t-il déclaré quelques jours avant les élections. Il a également parlé d’un «bain de sang» si la droite arrivait au pouvoir [5].

Il est difficile de croire que Maduro cédera le commandement «normalement», étant donné que le bolivarisme est un réseau de pouvoir et d’affaires, impliquant d’anciennes et de nouvelles bourgeoisies, ainsi que la direction militaire elle-même. Dans l’affaire dite PDVSA-crypto, qui a déclenché une purge au sein du chavisme et entraîné la chute du ministre du Pétrole Tareck El Aissami, autrefois puissant, on estime que l’argent volé pourrait s’élever à 16 milliards de dollars. Plus de 65 fonctionnaires et hommes d’affaires ont été arrêtés dans le cadre de cette «perestroïka» bolivarienne.

Le discours du camp de gauche, qui considère qu’en fin de compte, entre Maduro et María Corina Machado il faut choisir le premier parce que l’opposition prétend défendre les droits sociaux et prône la cession des biens publics (à travers la privatisation de PDVSA), tend à négliger l’ampleur du pillage et la dynamique de l’«Etat prédateur» dans lequel la révolution bolivarienne a dérivé. Quand on dit que María Corina Machado est une Javier Milei, c’est pour ignorer que si ce dernier propose de «détruire l’État de l’intérieur», sur la base de son paléolibéralisme délirant, le gouvernement de Maduro l’a détruit en pratique, avec une rhétorique révolutionnaire. En effet, il a provoqué l’effondrement des services de santé et d’éducation et l’effondrement de la production pétrolière. En ce sens, le «président des travailleurs» Maduro n’est pas le contraire de Milei, mais tous deux sont le contraire d’un Etat social soutenu par des institutions démocratiques solides. Le Parti communiste vénézuélien lui-même a accusé Maduro d’être néolibéral et autoritaire, et sa direction, comme celle d’autres partis, a fait l’objet d’une intervention de l’Etat. C’est le «maduroisme» lui-même qui a discrédité la gauche au Venezuela.

La gauche pro-Maduro ou «Maduro-compréhensive» – qui attribue tous les problèmes aux sanctions des Etats-Unis – a également tendance à ne pas considérer que le cas vénézuélien a servi d’épouvantail dans la région, au détriment de la gauche. Seul pays à s’être déclaré socialiste après la chute du mur de Berlin, le cas vénézuélien a été un atout pour la droite latino-américaine depuis le milieu des années 2010, dans une région qui a commencé à se remplir d’immigrants vénézuéliens comme preuve de l’échec du «socialisme», synonyme de chaos économique et de violations des droits de l’homme.

Dans les prochains jours, nous assisterons à la poursuite du spectacle d’insultes entre Maduro et Milei. Maduro a accusé le dirigeant argentin d’être un «sociopathe sadique», un «nazi» et une «bestiole lâche, laide et stupide». Milei l’a dénoncé comme un «dictateur communiste», promoteur de «la misère, de la décadence et de la mort». «Dictateur, dehors», a-t-il tweeté… Cette «polémique» est gagnante pour les deux parties!

Aujourd’hui, tous les regards sont tournés vers le président brésilien Luiz Inácio Lula da Silva. Peu avant l’élection, le président a déclaré, lors d’un dialogue avec des journalistes, qu’il avait été effrayé par la déclaration de Maduro sur le «bain de sang» et que le président vénézuélien devait comprendre que «lorsqu’on perd, on s’en va». Maduro a répondu en disant à ceux qui étaient effrayés de «prendre une tisane à la camomille». Lula da Silva a envoyé Celso Amorin, son conseiller en politique étrangère, à Caracas pour le tenir informé depuis là-bas [6]. Maduro, quant à lui, avec le soutien de la Chine et de la Russie, pariera sur le fait que la situation se calmera. Et il restera le président de facto et de jure. Après l’échec de la stratégie Guaidó, la reconnaissance d’Edmundo González ne figure pas au menu de la «communauté internationale». Il faudra voir quel est le plan B de l’opposition et quel sera le schéma au lendemain de ces élections, dans un pays où le pouvoir s’est éloigné du verdict des urnes. (Opinion publiée sur le site Nueva Sociedad, juillet 2024; traduction-édition rédaction A l’Encontre)

–––––––––

[1] Voir l’article de Thomas Posado, «La “présidence» Guaidó: bilan critique d’une expérience inédite en relations diplomatiques», in Annuaire français de relations internationales, 2024. En conclusion, Thomas Posado écrit: «En effet, l’expérience Guaidó a pris fin en janvier 2023. Son autoproclamation se fondait sur sa fonction de président de l’Assemblée nationale. Le mandat législatif s’est achevé en janvier 2021. Cette majorité parlementaire, favorable à l’opposition, prolonge chaque année son mandat de manière ad hoc depuis lors. Toutefois, la stratégie d’un changement de régime rapide incarnée par la reconnaissance de Guaidó comme chef de l’Etat est désormais reconnue comme un échec jusque dans les rangs de l’opposition. Au sein de cette assemblée parallèle, trois des quatre principaux partis d’opposition (AD-Acción Democrática, PJ-Primero Justicia, UNT-Un Nuevo Tiempo), favorables à des négociations avec le gouvernement Maduro, ont remplacé, en janvier 2023, Juan Guaidó par un triumvirat, plus enclin à la conciliation, composé d’une députée de chaque parti et dirigé par Dinorah Figuera (PJ). Les représentations diplomatiques du « gouvernement par intérim » ont été dissoutes et une commission de cinq membres, désignée par la nouvelle direction pour administrer les actifs à l’étranger, telle l’entreprise Citgo [compagnie de statut états-unien détenue par PVDSA-Petróleos de Venezuela SA, raffinant et distribuant de l’essence aux Etats-Unis, mais interdite en 2019 par l’administration américaine de reverser ses revenus à la société mère]. La voie électorale est désormais privilégiée. Des Accords ont été signés à la Barbade, en octobre 2023, concernant l’organisation de l’élection présidentielle en 2024, entraînant dès le lendemain une suspension pour six mois par les Etats-Unis de plusieurs mesures coercitives unilatérales à l’égard des exportations de pétrole, de gaz et d’or vénézuéliens.» (Réd.)

[2] Dans le Financial Times du 30 juillet, Joe Daniels et Michael Stott, depuis Caracas, ont écrit à ce propos: «La victoire contestée de Maduro aux élections pose également un dilemme à l’administration de Joe Biden, qui avait négocié avec Maduro l’organisation d’une élection ouverte et avait temporairement assoupli les sanctions contre la compagnie pétrolière publique PDVSA en octobre 2023. Les Etats-Unis ont réimposé les sanctions pétrolières en avril 2024, bien qu’ils aient accordé des exemptions, permettant à certaines entreprises, dont Chevron, Maurel & Prom [filiale du groupe public indonésien Pertamina] et Repsol [groupe espagnol], de poursuivre leurs activités au Venezuela.

De hauts responsables de l’administration états-unienne ont déclaré que Washington n’avait pas encore pris de décision quant à une éventuelle réaction. «Il n’est pas envisagé pour l’instant de modifier rétroactivement les licences [exploration et extraction] qui ont été accordées précédemment», a déclaré l’un des responsables. Eric Farnsworth, vice-président du Council of Americas, un lobby d’entreprises, a déclaré qu’il n’y avait pas beaucoup d’options valables pour les Etats-Unis, Washington étant préoccupé par ses propres élections et «peu enclin à s’attaquer à une nouvelle crise mondiale désordonnée». L’économie du pays riche en pétrole, soutenue par un assouplissement du contrôle des prix et des devises, a connu une légère reprise après s’être contractée de trois quarts entre 2013 et 2021. Pendant cette période, le pays a été confronté à l’hyperinflation, à des coupures d’électricité régulières et à des pénuries de nourriture et de médicaments. Environ 7,7 millions de Vénézuéliens, soit près d’un quart de la population, ont fui le pays.»

Cette dernière indication du FT renvoie aussi à la préoccupation de l’administration Biden de «réguler» le flux de migrants vénézuéliens vers les Etats-Unis. (Réd.)

[3] Ce courant a été lancé en octobre 2016 par une déclaration intitulée «En Defensa de la Constitución de la República Bolivariana de Venezuela y de la Democracia». Son introduction est la suivante: «Nous considérons avec une extrême inquiétude l’avancée progressive, mais soutenue et permanente, de la limitation et de l’élimination des droits constitutionnels des citoyens et des organisations du peuple vénézuélien. Qu’un édifice autoritaire est en train d’être construit, pierre par pierre, par le pouvoir et le gouvernement. Que cette élimination des droits affecte non seulement les garanties et les droits économiques et sociaux de la population la plus défavorisée et la condition souveraine du pays, mais qu’elle progresse également vers la destruction des formes républicaines et démocratiques de gouvernement, en liquidant l’équilibre institutionnel établi dans la Constitución de la República Bolivariana de VenezuelaCRBV [adoptée par référendum le 15 décembre 1999], un équilibre qui devrait préserver les garanties et les droits des citoyens et, en fin de compte, la paix. Que cette voie choisie conduit, pas à pas, à l’installation d’un gouvernement de facto, sans aucun respect de la Constitution, des normes, des règles, de la légalité ou de la légitimité. Une voie qui mène à l’illégitimité absolue. Cette affirmation se fonde sur des faits publics et vérifiables, qui ne peuvent être dissimulés par un discours mêlant l’annonce de mesures réactionnaires à de vieux symboles de l’idéologie socialiste et de la révolution bolivarienne vidés de leur contenu. Il s’agit de mesures et d’actions concrètes du gouvernement, par action ou par omission, qui changent pour le pire la vie quotidienne des citoyens ordinaires et leurs conditions d’existence déjà épouvantables, et qui blessent le corps même de la nation.»

Cette plateforme est signée par des ex-ministres de Chavez: Hector Navarro, Ana Elisa Osorio, Gustavo Márquez, Oly Millán; le membre de la Constituante Freddy Gutiérrez; l’ex-major-général Cliver Alcalá Cordones; les professeurs, militants sociaux, écologistes et indigénistes: Santiago Arconada, Esteban Emilio Mosonyi, Edgardo Lander; les membres de l’organisation socialiste révolutionnaire Marea Socialista Juan García, César Romero y Gonzalo Gómez.

La déclaration datée du 11 avril 2024 est, elle, signée par Santiago Arconada, Gustavo Márquez, Héctor Navarro, Roberto López, Luis Mogollón, Ana Viloria, Edgardo Lander, Juan García et Oly Millán. (Réd.)

[4] La «coalition» formée par le Partido Socialismo y Libertad (PSL) ainsi que par le PPT/APR-Alternativa Popular Revolucionaria (d’origine chaviste opposé à l’administration de Nicolas Maduro), Marea Socialista (socialistes révolutionnaires, favorables à une indépendance du mouvement syndical face à l’Etat et au PSUV) et la Liga de Trabajadores por el Socialismo-LTS a adopté un accord «pour dénoncer le gouvernement et la fraude et pour défendre l’indépendance politique de la classe ouvrière, avec le slogan: “La classe ouvrière n’a pas de candidat”. Sur la base de ce slogan, nous avons décidé d’appeler à un vote nul, car aucun des candidats, en particulier Maduro et González Urrutia, ne reflétait pas les intérêts des travailleurs, des travailleuses, des femmes et des jeunes des secteurs populaires.» (Réd.)

[5] Le 30 juillet, Maduro s’est adressé durant plus d’une heure, depuis le palais de Miraflores, «au peuple du Venezuela». Il a insisté sur l’importance de «l’alliance civico-militaro-policière» contre les «violences de l’extrême droite fasciste». Au cours du discours, toutes les oppositions aux résultats électoraux – qui certes se sont exprimées dans des quartiers ayant des bases sociales différentes – sont assimilées à des «criminels drogués et armés», «payés 150 dollars», et obéissant aux ordres des «gringos», autrement dit des Etats-Unis. La similitude est dressée entre ce mouvement de désaveu – certes socialement et politiquement différencié – et la tentative de coup d’Etat de la droite contre Chavez datant de 2002. Outre Maduro, Diosdado Cabello, l’homme fort du régime, issu de l’armée, vice-président du PSUV depuis 2011, a donné des «détails» sur «les auteurs de violences criminels arrêtés». Discours reproduit intégralement par CNN Chile, le 30 juillet 2024.

La conjoncture post-électorale actuelle concrétise la formule (in Le Soir, 30 juillet 2024) utilisée par l’historien Thomas Posado (Université de Rouen, auteur de Venezuela, de la révolution à l’effondrement. Le syndicalisme comme prisme de la crise politique, Presses universitaires du Midi, 2023): «Et depuis le début de sa présidence, Nicolas Maduro essaye de compenser cette perte de popularité par la répression.» (Réd)

[6] Le ministère des Affaires étrangères du Brésil, le 29 juillet, dans une brève déclaration, affirme: «Dans ce contexte, il attend la publication par le Conseil National Electoral (CNE) des données ventilées par bureau de vote, étape indispensable pour la transparence, la crédibilité et la légitimité des résultats des élections.»

Selon Le Monde daté du 1er août 2024, «les dix-sept observateurs du Centre Carter ont quitté le pays [le Venezuela] deux jours plus tôt que prévu sans voir pu vérifier les résultats. Selon le communiqué publié après leur départ, l’élection présidentielle n’a pas respecté les normes internationales et “ne peut être considérée comme démocratique”.»  (Réd.)

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*