CFF Cargo. «Officine»: le premier but est atteint

Nous publions ici l’éditorial du bimensuel Solidarietà (5 juin 2008), organe du MPS-Gauche anticapitaliste. Cet éditorial effectue un jugement sur le résultat d’une longue lutte, dont la première phase s’est conclue lors des négociations qui ont eu lieu le 29 mai 2008 à Lucerne. Le communiqué de l’ATS soulignait que si les Ateliers de Bellinzone veulent devenir «une entreprise compétitive et rentable», il fallait «réduire les coûts et augmenter le volume des commandes». Pour cela, «un deuxième groupe de travail a été chargé d’élaborer des mesures concrètes en ce sens. Constitué de représentants des CFF et des employés, ainsi que de deux experts externes, le groupe doit rendre ses conclusions pour la prochaine réunion de la table ronde, le 23 juin 2008.» (réd.)

La deuxième rencontre [29 mai 2008] de la table ronde portant sur l’avenir des Ateliers CFF [de Bellinzone] s’est conclue par ce que l’on peut définir comme une victoire pour les travailleurs des Ateliers. Naturellement, les termes «victoire» et «défaite» sont des vocables devant toujours être relativisés dans le cadre de processus sociaux complexes, tel ce conflit difficile qui a démarré le mois de mars passé. Comme le rappelait justement un syndicaliste pendant la récente journée [de discussion et de réflexion sur les perspectives d’un nouveau syndicalisme suisse] qui s’est tenue le 31 mai à Bellinzone, rien n’est jamais «gagné» ou «perdu» définitivement: les forces «défaites» ou «victorieuses» continuent à agir pour chercher à récupérer ce qu’elles ont dû concéder ou pour défendre ce qu’elles ont conquis. Cette mise au point nécessaire faite, il n’y a pas de doute que les travailleurs des Ateliers ont marqué des points décisifs sur trois questions fondamentales.

En premier lieu, sur le fait que la structure de base des Ateliers restera la même qu’aujourd’hui, c’est-à-dire une structure publique dans laquelle sont entretenus les wagons et les locomotives. Dans le contexte des dynamiques de privatisation ouvertement annoncées le 7 mars dernier, il s’agit d’un point décisif, autour duquel il est possible de construire une politique concrète pour le futur.

Le deuxième point fondamental est l’annulation des lettres d’intention que les CFF avaient signées avec certaines entreprises privées (Ferriere Cattaneo et Josef Meyer en premier) pour la constitution d’une société mixte qui puisse s’occuper de la maintenance des wagons. Il s’agit de la fin de cette hypothèse d’externalisation, autour de laquelle aurait pu prendre forme une politique de privatisation du secteur des wagons.

Le troisième point est l’engagement, arraché à la table des négociations, de nouveaux investissements à hauteur de 10 millions de francs de la part des CFF pendant les prochaines années. En attendant de définir les nouveaux objectifs et les investissements ultérieurs, dans le cadre des discussions et négociations qui devront continuer. En somme, [il s’agit de donner corps à] un projet de développement d’un pôle technologique et productif autour de la centralité des Ateliers de Bellinzone.

Comme déjà dit, tout cela est naturellement très positif et représente, du point de vue des orientations de fond, un brusque coup de frein, pour quelques années, assené aux projets des CFF, à sa ligne de privatisations orientée vers le marché et vers la valorisation du capital. Ce n’est certes pas un abandon de ces projets, comme le directeur des CFF Andreas Meyer l’a confirmé encore ces derniers jours, dans une interview au Tages Anzeiger, rassuré par le fait que, mise à part [les Ateliers de] Bellinzone, «le projet de réorganisation de CFF Cargo a été appliqué à 90%».

Les programmes d’«optimisation» (ils sont qualifiés ainsi) sur lesquels les CFF continuent à insister sont essentiellement centrés sur les politiques d’économies qui passent par la péjoration des salaires et des conditions de travail du personnel des Ateliers. Les CFF chercheront à échanger le maintien des Ateliers dans leur structure actuelle contre une forte dégradation des conditions de travail. L’insistance avec laquelle, depuis quelques jours, les CFF mettent en évidence le «privilège» des travailleurs des Ateliers, payés 15 à 20% de plus que leurs collègues du secteur privé, en est un exemple significatif.

Nous avons gagné du temps et nous devons l’utiliser au mieux pour deux objectifs. D’un côté, pour poursuivre et approfondir les projets et les propositions qui puissent renforcer les Ateliers, leurs activités (avec l’acquisition de nouvelles activités et de nouveaux clients) ; de l’autre, pour répondre aux prétentions des CFF d’améliorer la «compétitivité» des Ateliers sur le dos des travailleurs. Il sera décisif, en priorité, de savoir maintenir la solide unité et la mobilisation des travailleurs, à partir desquelles tout le reste (l’implication de la population, des diverses institutions et des autorités) deviendra possible. Et garantira des succès nouveaux et nécessaires.   

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