Royaume-Uni. Se dirige-t-on vers une grève générale de facto alors que les syndicats promettent une action coordonnée?

Par Steve Robson

Le Royaume-Uni pourrait, de facto, se diriger vers une grève générale alors que les dirigeants syndicaux évoquent la possibilité d’une action coordonnée en 2023.

Pas moins de 1,5 million de travailleurs et travailleuses auraient entamé une action de grève ce mois-ci. Parmi ceux et celles qui ont débrayé pour des revendications salariales et des conditions de travail, on compte des infirmières, des ambulanciers, des postiers, des cheminots et des agents de la police des frontières.

La Fire Brigades Union (FBU) procède actuellement à un vote auprès de ses membres pour savoir s’ils doivent faire grève après avoir rejeté une offre salariale de 5%, tandis que les syndicats d’enseignants envisagent également un mouvement similaire.

Le syndicat des cheminots, le RMT, a annoncé que des milliers de nettoyeurs des trains lanceraient leur première grève nationale à partir du 30 décembre.

Le secrétaire général Matt Wrack a déclaré jeudi à Sky News que le FBU «discutera avec d’autres syndicats» de la possibilité d’une action coordonnée si un débrayage a lieu. Si les gens s’affrontent à une attaque conjointe, pourquoi ne travailleraient-ils pas ensemble?»

Les dirigeants syndicaux ont déjà fait valoir que les débrayages du personnel de plusieurs secteurs constitueraient une grève générale de facto, comme il n’y en a pas eu au Royaume-Uni depuis 1926 (voir ci-dessous).

Seul le Trade Union Congress (TUC) a le pouvoir d’appeler à une grève générale, bien que sa légalité reste incertaine après que les lois anti-syndicales ont été renforcées dans les années 1980 [Margaret Thatcher a initié la dynamique de la législation anti-syndicale suite à son accession au gouvernement en mai 1979]. L’organisation faîtière (TUC) qui représente la majorité des syndicats au Royaume-Uni compte environ 5,5 millions de membres.

Interrogé sur la perspective d’une grève générale de facto, le nouveau secrétaire général du TUC, Paul Nowak, a déclaré à la chaîne de TV Sky News: «Nos syndicats continueront à discuter au cours de la nouvelle année de la meilleure façon de soutenir et de coordonner les syndicats qui mènent des actions de grève. Bien que le gouvernement affirme que les fédérations syndicales sont indépendantes, ces dernières doivent agir dans un contexte budgétaire fixé par le gouvernement – ce qui a conduit aux offres d’adaptation salariale inférieures à l’inflation de cette année. Je pense que cela [la coordination de l’action de grève] dépendra vraiment de ce qui se passera au cours des deux prochains mois. Si les gens pensent que le gouvernement reste sur ses positions et qu’il va se présenter au prochain processus PRB [pay review body: organe de révision des salaires qui fait des recommandations au gouvernement; ce dernier se camoufle derrière ces propositions] en disant “notre enveloppe économique fixe la limite à 4%” – je pense que les gens ne l’accepteront pas du tout.»

Pendant ce temps, les agents de la circulation routière et le personnel des salles de contrôle du trafic sont parmi les derniers travailleurs à annoncer des débrayages avec une grève de deux jours les 3 et 4 janvier.

Le syndicat des services publics et commerciaux (PCS-Public and Commercial Services Union) a déclaré que l’action est susceptible d’avoir un impact sur les panneaux et les signaux mis en place pour avertir les automobilistes des blocages et des incidents, une capacité réduite à répondre et à traiter les collisions, et des retards dans la réouverture des chaussées et des autoroutes.

Cette décision intervient après que les membres du gouvernement ont laissé entendre que les travailleurs et travailleuses en grève pourraient se voir offrir une augmentation de salaire anticipée l’année prochaine afin de compenser la baisse infligée cette année.

La semaine dernière, les membres du gouvernement ont laissé entendre que pour l’année prochaine, qui commence en avril au plan budgétaire, ils accorderont une augmentation des salaires du secteur public égale ou supérieure à l’inflation, ce qui donnera aux travailleurs une augmentation de revenu sans que le gouvernement ait à revenir sur sa position de négociation actuelle.

Mais toute augmentation significative des salaires pourrait provoquer un conflit avec le Trésor [ministère des Finances], qui a refusé d’augmenter le financement des départements de Whitehall [l’ensemble des différents ministères] face à l’inflation galopante.

Le ministre de la Santé, Stephen Barclay, envisage de demander à l’organe de révision des salaires du NHS d’accélérer ses travaux afin de mettre un terme au conflit actuel avec les salarié·e·s de la santé, a déclaré une source proche de lui à i la semaine dernière. Or, jusqu’à présent, il a refusé de discuter des salaires des travailleurs et travailleuses du NHS (National Health Service) lors des discussions avec les syndicats. (Article publié dans The Independent, le 29 décembre 2022; traduction rédaction A l’Encontre)

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La grève générale au Royaume-Uni

Au Royaume-Uni, une grève générale – également connue sous le nom de grève nationale – est déclenchée lorsqu’une proportion importante de travailleurs et travailleuses de plusieurs secteurs refuse de se rendre au travail jusqu’à ce que leurs revendications en matière de salaire et de conditions de travail soient satisfaites.

La dernière grève générale remonte à mai 1926 et a été organisée pour défendre 1,2 million de mineurs après que les propriétaires de certaines des plus grandes mines britanniques ont demandé à leurs salariés de travailler plus longtemps pour moins d’argent.

1,7 million de personnes actives dans des secteurs tels que les transports, l’industrie lourde, l’imprimerie, la distribution de combustible et les dockers ont rejoint la grève en solidarité avec les mineurs.

Le Royaume-Uni a failli connaître une grève générale en 2011, lorsque des millions de travailleurs du secteur public ont débrayé en raison de modifications apportées aux retraites. Les écoles publiques ont fermé, les opérations ont été reportées et des rassemblements ont eu lieu dans tout le Royaume-Uni.

Le Trades Union Congress – le TUC – une confédération des syndicats en Angleterre et au Pays de Galles, a le pouvoir de déclencher une grève générale.

«Dans certains cas, cela peut signifier que les syndicats entreprennent une action de grève le même jour, dans d’autres cas, il s’agira d’une vague continue d’actions de grève. L’essentiel est de résoudre ces différends et de trouver un moyen d’avancer sur les salaires, et cela ne se produira que si le gouvernement s’assied et négocie», selon Paul Nowak, le secrétaire général du TUC. (S.R.)

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