Nous publions ci-dessous la lettre ouverte des Femmes Syriennes pour la Démocratie envoyée au Conseil fédéral suisse le 18 janvier 2018. Il sera intéressant de prendre connaissance de la réponse et/ou réaction du Département des affaires étrangères. (Réd. A l’Encontre)
*****
Monsieur le Conseiller fédéral,
Par un communiqué de presse du DFAE du 21.12.2017 nous avons appris à notre grande déception que la Suisse a ouvert un bureau d’aide humanitaire à Damas même. Cette démarche ne peut que réjouir Assad, le boucher de Damas, qui se voit aujourd’hui en voie de réhabilitation auprès de la communauté internationale; cependant, elle ne contribuera en rien à l’amélioration de l’efficacité de l’aide humanitaire suisse en Syrie [1].
En effet, chacun sait que depuis 2011 le CICR n’a jamais obtenu d’accès aux détenus en Syrie, sauf pour des visites toilettées à son intention. En outre, la plupart de l’aide humanitaire internationale est allée dans les poches du régime, directement ou après revente sur les marchés locaux, ceci malgré la présence sur place des organisations de l’ONU, et cet état de fait va en empirant.
Vouloir composer aujourd’hui avec le régime syrien répond à une logique à court terme sans intérêt pour l’aide humanitaire, pour la paix, pour le Moyen-Orient, pour la Suisse, pour le monde, et insultante pour la justice. Accessoirement, c’est aussi le plus sûr moyen de contribuer à la pérennisation du terrorisme. Le régime syrien est un régime mafieux, Assad est un promoteur du terrorisme, on ne peut tendre la main à ce genre de régime sans renier ses propres valeurs et devenir, en quelque sorte, complice des crimes qu’il continue à perpétrer contre sa population.
Le régime syrien est aujourd’hui un régime fantoche. Dès fin 2012, à l’agonie, il a dû faire appel à l’aide de la Russie et de l’Iran pour se maintenir en place contre une révolution populaire sans extrémisme. Il n’est aujourd’hui que le pantin sans légitimité de ses deux parrains, devenus depuis des envahisseurs. Moins de 15% du peuple syrien lui accorde encore une quelconque légitimité, en majorité par crainte ou par intérêt, moins de 10% si l’on inclut la diaspora [2].
La Russie ment en prétendant s’attaquer au terrorisme, elle ne vise qu’à étouffer la révolution populaire, en ciblant les civils [3] dans les régions de protestation, qui constituent la vraie alternative à Assad, avec des noyaux de démocratie instaurés dans ces régions dès leur indépendance du régime. Le plus grand mensonge russe concerne aujourd’hui la formation de zones de désescalade, toutes bombardées à tour de rôle. Actuellement c’est la Ghouta de Damas et Idleb qui sont sous les bombes du garant russe, provoquant de nouveaux déplacements forcés des populations.
Si la Suisse souhaite vraiment apporter son aide pour soulager la population civile, elle serait certainement plus utile en œuvrant pour une réelle solution politique qui permette aux Syriens d’avoir une vraie transition politique, sans le régime Assad, pour construire leur futur Etat démocratique basé sur le principe de la citoyenneté pour tous. Aucune autre solution ne mettra fin à la violence, aucune autre solution ne permettra au peuple syrien de vivre dignement en Syrie. Ceci ne sera possible que si les pays occidentaux, y compris la Suisse, font passer les droits humains de la population syrienne devant leurs intérêts à court terme et font pression sur la Russie et l’Iran pour obtenir le départ du régime syrien et des élections libres.
Veuillez agréer, Monsieur le Conseiller fédéral, nos salutations les meilleures.
Pour Femmes Syriennes pour la Démocratie
Co-signataires de la diaspora syrienne en Suisse:
Khuloud ABDULGHAFOUR, Amani ABDULLAH, Mervat AHMAD, Ziad AKKAD, Abed AL AHMED, Rima ALAJAJY, Razan ALBADWI, Hussein ALGHAYDA, Hsan ALHAMIE, Aiche ALHAMWI, Nader ALKHATIB, Rima ALMASRI, Kassan ALMEFLH, Racha ALOREB ALSALIM, Aeishah ALORIB ALSALIM, Lama et Denis AL-QUSAIRI – BASQUIN, Saba ALSHOIKI, Khaled ALSHWAIKI, Mhd Ali AL SHWEIKI, Kholoud AL ZAHAR, Ayah Tasnim AMAN, Nada BAGHDADI, Moustafa BITAR, Mona CHALHOUB, Rateb CHALHOUB, Roussoune CHALHOUB, Ahed CHAMAA, Nadia CHATTI, Samer CHBIB, Abdul Hamid CHIDDA, Naila DALLAL, Hady DEAAS, Myrna ELHOMSY, Almar ELHUSSEINI, Eman ESKAFI, Wadah FARRA, Mousab HADAD, Najeeb HALAWA, Kaiss HAMIDI, Moudar HAMIDI, Khaldoon HAWALEY, Khalil HOSSEIN, Ahmed JISAWI, Mouafak KABAH, Faten KASSAB, Galeah KAYALI, Najat KHADEM ALJAMIE, Assile KHUBIEH, Ayah KHUBIEH, Bara KHUBIEH, Yasser KHUBIEH, Maïssa KTIFANI, Iman KURABI, Nour KURABI, Ahmad MAJBOUR, Ebraheem MALKI, Hana MALKI, Ahmad MAROUF, Waffa MASHATEE, Mohammed Burhan MOUSSA AGHA, Amal NASR, Rana NASRI, Mayssam OJJEH, Shadi QURABI, Ayman REICHA, Mohamed RIHAWI, Mohammad Nadim SAKKAL, Basel SHALHOUB, Bassam SHALHOUB, Samar SHALHOUB, Sozana SHALHOUB, Jehan SUHKNI, Najat SULEIMAN, Hassan TAHA, Odeina TAHA, Bashar TAWAKOL, Ghena TAWAKOL, Mohamad TAWAKOL, Ruba TAWAKOL, Subhi ZANARNI, Tarik ZEIDAN, Ali ZEDAN, Ghania ZIADE, Mohammed ZIDAN.
____
[1] Voir à ce propos entre autres l’article publié sur ce site en date du 3 septembre 2016: http://alencontre.org/moyenorient/syrie/syrie-comment-le-regime-assad-controle-laide-de-lonu-destinee-aux-enfants-syriens.html (Réd. A l’Encontre)
[2] Avant la révolution, la diaspora syrienne comptait déjà au moins 18 millions de personnes alors que la population à l’intérieur de la Syrie comptait 23 millions ; ceci est un indicateur fort du dysfonctionnement du pays.
[3] En 2017 seulement, 900 institutions civiles ont été ciblées, en majorité par l’aviation russo-assadienne http://aa.com.tr/en/middle-east/syria-nearly-900-civil-facilities-targeted-in-2017/1025533
[4] Les lecteurs et lectrices du site alencontre.org peuvent consulter le site suivant qui rapporte les interventions faites le 20 janvier 2018 par diverses personnalités syriennes exprimant leur opposition à la dite conférence de paix de Sotchi:
https://myglobalsuburbia.com/2018/01/23/dans-le-monde-entier-les-syriens-ont-dit-non-a-la-fausse-conference-de-paix-de-sotchi/ (Réd. A l’Encontre)
Soyez le premier à commenter