1.- Les décisions prises par Podemos au cours des derniers mois indiquent une orientation que nous ne partageons pas. L’entrée de cinq ministres de l’UP (Unidas Podemos) dans un gouvernement progressiste-néolibéral hégémonisé par le PSOE (Parti socialiste ouvrier espagnol), dans lequel ce parti contrôle les principaux leviers du pouvoir, loin d’affaiblir le régime politique actuel, signifie s’y intégrer et considérer sa gestion comme le seul horizon possible.
Notre proposition de conclure [en tant qu’UP] un accord portant sur l’investiture du PSOE [en assurant qu’il obtienne, sous diverses formes, une majorité pour gouverner] et de passer à l’opposition afin de continuer à lutter pour construire un projet qui articulerait une majorité constituante a été rejetée par UP existant à l’heure actuelle. De même, nous ne partageons pas la politique de pacte social et de consensus qui renonce à l’affrontement avec les grands pouvoirs économiques. En ce sens, nous constatons qu’il y a une énorme différence entre les objectifs du Podemos que nous avons contribué à constituer il y a six ans et la dérive actuelle qui implique que nous sommes passés de la contestation de la classe politique et des élites économiques à l’intégration à la première sans mettre en question les avantages de la seconde.
2.- Nous comprenons également qu’une grande partie de la population de gauche partage le soulagement occasionné par la formation du gouvernement [le 13 janvier 2020]. La peur de l’extrême droite [Vox et les secteurs du PP] et la fatigue après des années de mobilisation rendent cette position compréhensible. Nous l’entendons et la respectons. Cependant, nous pensons que les objectifs de ce gouvernement sont très peu ambitieux, même si nous nous situons dans les marges du système. Raison pour laquelle notre tâche immédiate est d’essayer de promouvoir un nouveau cycle de luttes qui empêchera que la rue soit désertée. Ainsi se profilent des objectifs: le 8 mars, pour garantir des avancées féministes; les mobilisations pour exiger l’abrogation des contre-réformes portant sur le Code du travail, pour obtenir la régulation des loyers, la fermeture des Centres d’internement des migrant·e·s, l’interdiction des licenciements dans les entreprises faisant des profits, l’arrêt des expulsions des logements et la rupture avec l’article 135 de la Constitution [contraignant à «la stabilité budgétaire» et au paiement de la dette, adopté en 2011].
Sans une pression populaire organisée, il n’y aura pas de progrès. Sans des avancées qui méritent d’être défendues, qui répartissent la richesse et le pouvoir en faveur des plus démuni·e·s, un dangereux terreau sera amassé sur lequel l’extrême droite peut étendre sa démagogie machiste, raciste et autoritaire au service des riches.
3.- Dans ce cadre, sans préalablement analyser la saignée dont Podemos a souffert en tant qu’organisation ces dernières années et sans disposer d’un processus préliminaire suffisant de délibération politique, l’Assemblée des Citoyens apparaît comme une simple ratification de sa direction [Pablo Iglesias, comme figure centrale] et de la stratégie installant une subordination face au PSOE.
4.- Pour cette raison, nous, les Anticapitalistas, avons décidé de ne pas participer à la prochaine Assemblée à l’échelle de l’Etat de Podemos (Vistalegre III – qui a été avancée à mars 2020, alors que prévue initialement en 2021) et de concentrer nos débats sur la définition de notre décision portant sur notre relation définitive avec ce projet que nous avons contribué à fonder et auquel nous avons consacré tant d’efforts. Nos discussions internes culmineront le 28 mars 2020 avec une conférence au cours de laquelle nous ferons connaître notre décision finale. Nous souhaitons, sans aucun doute, beaucoup de chance aux personnes qui décident de participer à l’Assemblée de Podemos (Vistalegre III), en étant sûrs que nous continuerons à nous rencontrer et à travailler ensemble dans de nombreux domaines. (Communiqué d’Anticapitalistas daté du 16 février 2020; traduction rédaction A l’Encontre)
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