Allemagne: après des grèves importantes, un accord

Par rédaction A l’Encontre

L’article publié ci-dessous donne un aperçu des grèves dans les services publics en Allemagne. Il a été publié dans le quotidien Junge Welt, une publication qui ne dissimule pas ses origines, en 1947, dans le camp dit «communiste». Toutefois, la dimension descriptive de cet article donne une information utile sur le mouvement de grève dans le secteur public (municipal et fédéral) en Allemagne. Nous avons déjà abordé ce mouvement sur ce site, en date du 23 mars 2012Le samedi 31 mars 2012, la Frankfurter Rundschau indique que le syndicat ver.di, les municipalités et l’Etat fédéral sont arrivés à un accord durant la nuit du 30 au 31 mars. Le nouvel accord salarial, valable pour deux ans, prévoit des augmentations de 3,5 % de manière rétroactive au 1er mars 2012. En janvier 2013 et en août 2013, suivront des augmentations pour un total de 1,4%. Donc ces augmentations nominales vont atteindre 4,9 % sur deux ans. Les syndicats exigeaient 6,5 % par an. L’écart est significatif, mais il est traditionnel dans le cadre de ce genre de  mouvement géré par un appareil comme celui de ver.di. La revendication d’une augmentation minimale de 200 euros pour tous, qui aurait surtout bénéficié aux bas salaires, n’a pas été prise en compte dans l’accord. En outre, les salarié·e·s doivent faire face à une hausse des prix qui frappe leurs dépenses contraintes: celles consacrées au chauffage (15% en 2011), pour prendre un exemple. Le taux d’inflation officiel minimise ce type d’effet de hausse sectorielle des prix  sur le revenu réel des salarié·e·s. Néanmoins, il faut noter la différence existant entre l’ampleur de l’offensive menée contre les salarié·e·s du secteur public en Espagne ou en Italie et celle que les  employeurs réussissent à mettre en œuvre, pour l’heure, en Allemagne. (Rédaction A l’Encontre)

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La semaine [débutant le 26 mars] a commencé avec de nouvelles vagues de grèves d’avertissement dans les services publics. Plus de 30’000 salarié·e·s ont suivi l’appel à la grève des syndicats dans les Länder de Bade-Wurtemberg, Schleswig-Holstein et Mecklembourg-Poméranie-Occidentale. Rien qu’à Stuttgart, 20’000 salarié-e-s ont pris part à une manifestation, à Kiel 10’500 et à Schwerin 1500. Les syndicats du Deutscher Gewerkschaftsbund [DGB – Fédération des syndicats allemands, dont ver.di fait partie] et du Deutscher Beamtenbund [Fédération allemande des fonctionnaires] revendiquent des augmentations salariales de 6,5 % par an, au moins 200 euros par mois pour tous les salarié·e·s détenteurs d’un CDI (contrat à durée indéterminée) et au moins 100 euros par mois pour les apprenti·e·s. Les communes et l’Etat fédéral ont fait une offre qui propose seulement 3,3% d’augmentation, répartie sur deux ans.

Dans les hôpitaux, les maisons de retraite, les crèches, les administrations communales, les caisses d’épargne et les régies municipales [une partie de la production et distribution de l’énergie est propriété des communes en Allemagne], l’activité était paralysée le lundi 26 mars 2012. Seuls des services d’urgence étaient disponibles. Les services de ramassage des ordures ont également fait grève dans de nombreuses localités. A Karlsruhe et à Stuttgart, les conducteurs de bus et du trafic urbain ont également participé à la mobilisation. Dans le Schleswig-Holstein, le canal qui relie la mer du Nord à la mer Baltique a été bloqué [par la grève, ce qui a une importance stratégique majeure], puisque ce canal permet le trafic journalier d’un nombre de navires supérieur à celui du canal de Panama ou de Suez.

Le mardi [27 mars 2012], les salarié·e·s ont prévu de participer aux grèves à Hambourg, en Rhénanie-Palatinat et dans le Land de la Sarre. Et, de plus, les services au sol et les pompiers de plusieurs aéroports en Allemagne se joignent à la lutte. Cela concerne également l’aéroport de Francfort, dans lequel l’entreprise d’exploitation de l’aéroport, Fraport, avait fait stopper la grève des salarié·e·s du tarmac, organisée par le syndicat GDF [répression qui avait reçu l’appui du comité d’entreprise (Betriebsrat) de ver.di]. En outre, les salarié·e·s de l’entreprise privatisée de services au sol GlobeGround participent à la grève de ver.di. Ils luttent également pour des augmentations salariales.

Le chef du syndicat ver.di, Bsirske, estime à «50%–50%» les chances d’arriver à un accord dans le troisième et dernier round de  négociations le mercredi 28 et le jeudi 29 mars 2012. Si les ministres de l’Intérieur des Länder et de l’Etat fédéral ne proposent pas une «offre raisonnable», Bsirske a menacé d’organiser une consultation de la base, suivie d’une grève illimitée, selon ses propos dans la Neue Presse du 26 mars 2012. Le ministre de l’Intérieur allemand [Etat fédéral] a signalé pendant le week-end du 24-25 mars qu’il était [prêt à un compromis]. Dans une première réaction, Bsirske a annoncé qu’il s’attendait à ce que les ministres fassent appel à une conciliation en cas d’échec des négociations.

Dans les négociations salariales de cette année, les syndicats veulent imposer des revendications salariales plus élevées que les années précédentes. Malgré une phase d’expansion économique persistante, les salaires réels n’ont connu qu’une faible augmentation. [La base des syndicats] demande, [pour cette raison], que les [hausses salariales soient aussi] fonction d’impératifs de répartition des richesses, en plus de la compensation de l’inflation et d’une participation à l’augmentation de la productivité.

Ver.di et le Syndicat de l’industrie des métaux (IG Metall) menacent, dès à présent, de faire grève de manière synchrone dans les services publics, dans la métallurgie, dans l’industrie électrotechnique et dans les télécommunications, selon les propos du chef de ver.di, Bsirske, le 26 mars à Stuttgart. L’obligation de paix du travail pour les métallurgistes se termine le 28 avril [date à partir de laquelle les métallos sont de nouveau en droit de prendre des mesures de lutte, en vertu des échéances prévues dans les contrats collectifs]. Dès le début du mois de mai, les syndicats pourraient appeler à un des plus grands conflits du travail de l’histoire récente en Allemagne. (Traduction A l’Encontre)

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