- En 2007, selon le Rapport annuel 2010 de la Banque centrale du Nicaragua (BCN), la population économiquement active (PEA) était de 2,27 millions de personnes, dont seulement 458,9 mille travailleurs et travailleuses étaient affiliés à l’INSS (Instituto Nicaragüense de Seguridad Social); par conséquent, 79,8% se situaient dans la dite informalité.
- En décembre 2017, selon l’Anuario de Estadísticas Macroeconómicas 2019 de la BCN, la PEA comptait près de 3,3 millions de personnes, dont seulement 913’797 travailleurs (27,81%) étaient affiliés à l’INSS; par conséquent, 72,19% de l’PEA se trouvait dans le secteur informel, c’est-à-dire sans la protection des prestations propres à la sécurité sociale (accident du travail, retraites, etc.), sans salaire fixe ou indemnité de chômage. En d’autres termes, après 11 ans du pacte «public-privé» entre Ortega et le grand capital, les deux tiers de la population actives se trouvent plongés dans des conditions de sous-emploi ou dans des emplois pour lesquels ils ne reçoivent pas de salaire mensuel.
- En décembre 2017, 913’797 personnes étaient inscrites à l’INSS; en août 2020, ce nombre est tombé à 693 476, ce qui signifie une contraction de -24,12% du nombre de membres. Ce nombre de personnes désaffiliées reflète la fermeture d’entreprises fermées, une hausse des personnes sans emploi, des familles en difficulté, une extension sur secteur inclus dans l’informalité.
- Autrement dit, entre décembre 2017 et août 2020, 220’327 personnes ont été désaffiliées de l’INSS en raison de l’aggravation de la récession économique qui a entraîné la fermeture de 54% des entreprises (selon une enquête du Conseil supérieur de l’entreprise privée – COSEP); et cela dans tous les secteurs de l’économie, principalement dans la construction, le commerce, le tourisme, les services, etc.
- Le secteur informel constitue le «moteur» de plus d’un tiers de l’économie, une hausse en pourcentage de la production totale du pays, alors qu’il absorbe 72,19% de la main-d’œuvre du pays. En d’autres termes, 72 personnes salariées sur 100 ont obtenu leur revenu dans le cadre de cette «mise au travail» qui ne comporte aucun type de prestation sociale. Le commerce de détail est le lieu où se concentre la majeure partie de l’économie informelle
- Le problème de l’informalité (du travail informel) au Nicaragua est un problème social et de travail douloureux qui existe depuis un certain temps. Toutefois cette situation a été favorisée sous le régime Ortega-Murillo. Les travailleurs et travailleuses du secteur informel survivent dans une situation précaire. Ils sont payés entre 25 et 50% de moins que ceux et celles du travail formel, où les perspectives ne sont pas exactement engageantes, car les salaires sont chaque jour inférieurs au coût du panier-type (biens et services de base) pour survivre .
- Selon la Banque mondiale (BM), les Nicaraguayens doivent disposer d’un revenu supérieur à 3,20 dollars par jour (soit 112,0 córdobas par jour) pour ne pas être considérés comme pauvres, ce qui implique un revenu de 96,00 dollars par mois par personne, ce qui équivaut, au taux de change officiel, à 3072 córdobas par mois par personne (taux de change de 35,00 córdobas par dollar).
- Compte tenu du fait que le nombre moyen de personnes par ménage est de six, cela signifie que pour ne pas être considéré comme pauvre, un ménage doit disposer d’un revenu mensuel total de 576 dollars par mois ou l’équivalent de 20’160 córdobas par mois, alors que le salaire nominal moyen dans le secteur formel était, en 2019, de 10’941,6 córdobas.
- Le document de la CEPAL, L’Amérique latine face à la crise Covid-19. Vulnérabilité socio-économique et réponse sociale 2020 établit trois catégories: l’extrême pauvreté, la pauvreté et les couches sociales inférieures non pauvres. Cette étude souligne que 77,2% de la population du Nicaragua, en 2019, se trouvait dans une situation de très grande vulnérabilité.
- C’est-à-dire que quelque 5,2 millions de Nicaraguayens et Nicaraguayennes se trouvent dans une situation de vulnérabilité, de pauvreté ou d’extrême pauvreté, en raison de la baisse du pouvoir d’achat des salaires des travailleurs à faible et moyen revenu ainsi que des revenus des des travailleurs indépendants. Les revenus des travailleurs informels et de la plupart des retraités ont accentué la réduction de la consommation et une insuffisance alimentaire (autrement dit la faim).
- Selon un rapport publié par la Conférence des Nations unies sur le commerce et le développement (CNUCED), le nombre de personnes vivant dans l’extrême pauvreté, c’est-à-dire avec un revenu inférieur à 1,90 dollar par jour, dans les pays les moins avancés (PMA), dont le Nicaragua, a augmenté durant l’année 2020, ce qui limiterait les possibilités d’atteindre les objectifs de développement durable des Nations unies d’ici 2030.
- Selon l’Anuario de Estadísticas Macroeconómicas 2019 de la BCN, le salaire nominal moyen national de l’emploi formel a atteint, en 2019, le chiffre de 10’941,6 córdobas mensuel. Or le coût du panier-type était de 13’904,5 córdobas par mois, ce qui indique que le travailleur formel moyen est en situation de pauvreté parce qu’il n’a pas la capacité de faire face l’acquisition des biens et services du panier-type.
- Selon les indicateurs de pauvreté de la Banque mondiale – dont la pertinence effective peut être sujette à débat – plus de 50% des travailleurs et travailleuses du secteur formel et environ 80% de ceux et celles du secteur informel se trouvent actuellement sous le seuil de pauvreté. En d’autres termes, il ne suffit pas de travailler pour qu’une famille puisse acquérir des biens de base, y compris de la nourriture. Il s’agit donc de travailleurs et travailleuses qui sont plongés dans la pauvreté.
- Le 77,2% de la population nicaraguayenne souffre de pauvreté multidimensionnelle, c’est-à-dire subit de multiples privations subies en matière de santé, d’éducation et de niveau de vie. Ce qui découle d’un manque de revenu, de salaire, d’un accès limité à l’éducation (avec faible niveau d’éducation pour les adultes) et aux soins de santé, vit dans des logements inadéquats, surpeuplés, n’a pas accès à des services de base, est au chômage ou repoussé dans le secteur informel.
- En d’autres termes, les enfants et les adolescents vivant dans des conditions difficiles ont peu de chances d’avoir accès à l’éducation et à une formation professionnelle qualifiée. Par conséquent, les chances d’échapper à la pauvreté sont très faibles. Cet ensemble de facteurs se traduit par un retard de taille/croissance chez les écoliers. La pauvreté et l’extrême pauvreté privent des milliers d’enfants et d’adolescents de leur développement physique et intellectuel, avec des conséquences à long terme sur leur vie adulte. Les secteurs vivant dans la pauvreté et l’extrême pauvreté présentent diverses carences alimentaires propres à la pauvreté chronique, persistante.
- L’analyse du bilan alimentaire de la population vulnérable, mesuré en termes de consommation apparente et d’apport protéique et calorique, indique que les recommandations minimales en matière de protéines ne sont pas respectées et que la situation calorique s’est détériorée ces dernières années en raison de l’inégalité économique dans l’achat des aliments.
- En 2018, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) a constaté que les pays d’Amérique centrale où la prévalence de la faim est la plus élevée en raison de facteurs économiques et climatiques sont le Guatemala (15,2%) et le Nicaragua (17%).
- Entre 2018 et 2020, a été constatée une augmentation du nombre de personnes frappées par la sous-alimentation et la malnutrition modérée et sévère. Des millions de personnes n’ont pas accès à une alimentation saine, non pas parce qu’il n’y a pas assez de nourriture, mais parce que des milliers de familles ne peuvent pas – malgré tous leurs efforts –acheter de la nourriture et des médicaments. La destruction des emplois, la précarité propre au secteur informel le chômage constituent une configuration fatale pour quelque 5,2 millions de personnes.
- Selon le Plan national de développement humain, en 2009, le pays était confronté à un déficit de 956 981 logements. Ce manque augmente de 20’000 par an en raison de la formation de nouvelles familles et de la dévastation des logements existants. De 2007 à 2009, le gouvernement a construit 6608 logements, auxquels se sont ajoutés 4800 logements construits par le secteur privé, soit un total de 11 408 logements. Cela constitue le nombre moyen des constructions jusqu’en 2017. En 2020, le déficit de logements dépasse le million de foyers. L’existence de logements inadéquats et de ménages vivant dans des logements surpeuplés sont deux autres indicateurs de la pauvreté multidimensionnelle.
- Compte tenu du retard de développement du pays et des indices de vulnérabilité, les Nations unies, dans leur Rapport mondial de suivi, déclarent que si les tendances actuelles se poursuivent, le Nicaragua parviendra à une universalisation effective de l’enseignement primaire d’ici 2035, de l’enseignement secondaire d’ici 2060 et de l’enseignement secondaire supérieur d’ici 2100!
- À la fin de 2020, il n’y aura pas d’augmentation significative du commerce extérieur, ni de réduction du fossé technologique, ni d’augmentation de la productivité. Par conséquent, nous terminons l’année avec une augmentation des inégalités socio-économiques, de l’insuffisance alimentaire, de la prévalence des personnes souffrant de la faim, de la pauvreté, de l’extrême pauvreté et d’une augmentation de la population informelle, inactive, fortement sous-employée dans la population active.
- En cette fin d’année 2020, le régime Ortega-Murillo accentue sa répression de l’opposition à un niveau jamais vu depuis la dictature Somoza, tout en accordant des licences aux compagnies minières pour l’exploitation des ressources sur les terres publiques, en répétant sa déclaration mensongère sur le «coup d’État» – pour qualifier la rébellion pacifique des citoyens qui se sont manifestés en avril 2018 – et en menaçant d’empêcher l’opposition de présenter des candidats aux élections de novembre 2021. Au plan international, divers secteurs dits progressistes ont du mal à le croire, mais Daniel Ortega a adopté comme «guide» le dictateur Anastasio Somoza García. (Article envoyé par l’auteur le 28 décembre 2020; traduction rédaction A l’Encontre)
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