Si le mercredi 24 août la grève nationale de deux jours (24 et 25 août), appelée par la Centrale unitaire des travailleurs (CUT), la principale confédération syndicale du Chili, a été qualifiée de faible par le gouvernement de droite de Sebastián Piñera, l’adhésion à celle du 25 août a été inégalable au-delà de tout espoir. Des centaines de milliers de personnes ont défilé depuis différents endroits de la capitale en direction de la principale avenue de Santiago, la Alameda. En province les manifestants se comptaients par milliers.
Avec cela, une fois de plus, il s’est affirmé clairement que les gens étaient fatigués de voir que leur revenu ne leur permettait pas d’arriver à la fin du mois, que leurs enfants devaient s’endetter pour étudier […], que la grande majorité n’est pas comprise et que le gouvernement continue d’ignorer des thèmes sensibles.
Toutefois, il faut être juste. L’appel de la CUT n’aurait pas obtenu ce succès sans l’énergie des étudiants qui, grâce à leurs revendications, ont mis en lumière toutes les plaintes des citoyens. Ce sont tous ces tracas qui se sont concrétisés sous la forme de manifestations dans la rue […].
Comme on pouvait le penser, les chiffres de la CUT se sont opposés à ceux de La Moneda [palais du gouvernement]. Selon le président de la CUT, Arturo Martinez, ce sont plus de 600’000 personnes qui se sont mobilisées dans tout le pays. Par contre, le porte-parole du gouvernement, Andrés Chadwick, a affirmé que la mobilisation avait été inférieure à la journée précédente.
Que les chiffres soient plus ou moins grands, ce qui est certain c’est que les défilés se sont passés dans le calme jusqu’à la mi-journée, c’est-à-dire jusqu’au moment ou des files interminables commençaient à se rencontrer au centre de Santiago. Des pancartes inventives contre les profits effectués dans le secteur de l’éducation ou qui critiquaient le gouvernement se mêlaient aux drapeaux des centrales syndicales et aux fanions des collèges et des universités.
Les gens applaudissaient depuis les fenêtres des bâtiments auxquelles ils avaient suspendu des drapeaux et des banderoles. La crainte que les citoyens ne soutiennent pas l’appel à la grève, à cause de l’attitude négative des dirigeants politiques, s’est dissipée au cours des heures.
«C’est la chose la plus impressionnante que j’ai vue. Nous sommes des milliers. Des ouvriers, des professeurs, des étudiants qui disent à la face de Piñera qu’il doit mettre fin au modèle imposé par Pinochet», nous dit Andres, un adolescent qui avec 20 camarades arrivaient de San Bernardo, une des municipalités à la périphérie de Santiago.
Le jeune et ses amis disparurent dans la foule au moment où s’élevait une clameur assourdissante qui rendait impossible la suite de la discussion: «Il va tomber… il va tomber… le successeur de Pinochet». Une banderole portait l’inscription: «Le peuple éduqué jamais ne sera exploité», une formule qui amplifiait le sentiment de ces milliers d’anonymes qui s’étaient donné rendez-vous dans le froid d’un matin chilien.
Le dirigeant de la CUT, Martinez, affirma: «Nous espérons que le gouvernement, après ce coup qu’il a reçu, va réfléchir et s’ouvrira à une discussion pour chercher une sortie à la situation actuelle. Cette mobilisation n’appartient à personne si ce n’est aux travailleurs, aux citoyens et aux citoyennes qui se sont mobilisés.»
La personnalité la plus visible de la mobilisation, la présidente de la Fédération des étudiants de l’Université du Chili [voir notre article en date du 9 août], Camila Vallejo, a réfuté les propos du gouvernement qui accusait la CUT de s’approprier le mouvement étudiant: «Nous avons toujours été unis. C’est une erreur d’affirmer le contraire… Nous croyons qu’il est nécessaire de changer le système politique, de changer le système économique afin que, à juste titre, la redistribution du pouvoir soit plus juste, la distribution soit plus juste, et que nous disposions de conditions dignes pour nous développer comme êtres humains.»
De son côté, le président du Parti socialiste, Osvaldo Andrade, fit un mea culpa au nom de la Concertation [alliance du PS et des démocrates-chrétiens]: «Je viens participer à cette manifestation avec beaucoup d’humilité, parce que durant les vingt ans du gouvernement de la Concertation nous avons aussi été dans de nombreuses occasions partie prenante de cette politique abusive. Je crois que c’est le moment que nous prenions en charge les problèmes de fond. Et si la seule manière pour que ce gouvernement écoute consiste à ce que les gens descendent dans la rue, il n’y a pas d’autre alternative.» […] (Traduction A l’Encontre)
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Christian Palma est correspondant à Santiago du quotidien de Buenos Aires Pagina 12. Article publié le 26 août 2011.
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Des affrontements se sont développés à la fin des manifestations. Les carabiniers sont intervenus avec brutalité contre des jeunes qui ne sont plus prêts à s’enfuir. Les agences de presse indiquent qu’un jeune de 14 ans, Manuel Gutiérrez, est mort, ayant reçu une balle en pleine poitrine, dans la municipalité de Mancul, au sud de Santiago. (Rédaction)
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