Royaume-Uni. Assiste-t-on à la mutation du RCN comme association professionnelle à une structure syndicale?

Par Alice Hazel

Les médecins assistants en Angleterre seront de nouveau en grève du 14 au 16 juin (jusqu’au 17 juin à 7h du matin). Le congrès du Royal College of Nursing (RCN), qui s’est tenu du 14 au 18 mai, a marqué une étape importante dans la trajectoire de l’organisation, qui est passée du statut d’«association professionnelle» à celui d’organe syndical cherchant à impliquer et à représenter ses membres en tant que travailleurs et travailleuses.

Le militantisme et le dynamisme qui se sont développés au cours des grèves se sont reflétés lors du congrès, avec un grand nombre de nouveaux délégué·e·s et une volonté de poursuivre pour la poursuite du combat [pour les conditions de travail, de salaire et de sauvetage du NHS comme service public]. La plupart des présent·e·s ont estimé que le lancement lors du congrès du nouveau scrutin indique que la direction est sérieuse dans sa volonté de faire passer le résultat au-dessus du seuil (taux de participation au-dessus de 50% et approbation majoritaire d’une nouvelle phase de mobilisation). Le scrutin doit se dérouler du 23 mai au 23 juin et concerne quelque 300 000 personnes à l’échelle de tout le pays. Il sera appuyé par une documentation utile, une formation et du soutien de l’appareil.

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Le vote de rejet de l’offre salariale du gouvernement [voir article publié sur ce site le 24 mars http://alencontre.org/europe/grande-bretagne/royaume-uni-que-vont-decider-les-salarie%c2%b7e%c2%b7s-du-nhs-face-a-loffre-du-gouvernement-apres-des-mois-de-mobilisation.html], remporté contre la recommandation de la direction, a recueilli suffisamment de voix pour atteindre le seuil, mais a eu l’avantage de se dérouler en ligne. Il sera difficile d’atteindre plus de 50% lors du nouveau scrutin (par correspondance), mais l’escalade de la mobilisation et le fait d’être «dans le coup pour gagner» sont vraiment la seule option si les infirmières et infirmiers veulent obtenir un meilleur accord salarial et repousser la désintégration du NHS par les Tories.

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Une réunion en marge du congrès organisée par NHS Workers Say No a attiré de nombreux participants, avec des orateurs du NEU (National Education Union qui est en lutte) et de la BMA (British Medical Association). Les réseaux construits au cours des grèves et de la campagne pour le rejet de l’accord resteront essentiels pour remporter le scrutin en cours. Ils peuvent également jeter les bases d’une montée en puissance du RCN en tant que syndicat capable de s’organiser de manière significative sur les lieux de travail.

Le congrès a voté pour ne plus participer à l’organe de révision des salaires PRB [Pay Review Body, organe censé indiquer la norme salariale, de fait sponsorisé par le gouvernement]. Après la décision similaire prise par le syndicat Unison [secteur services publics, entre autres] le mois dernier, il s’agit d’une nouvelle étape vers le retour de la négociation directe des salaires dans le NHS. Les grèves ont au moins permis d’atteindre cet objectif.

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Un vote sur l’affiliation du RCN au TUC (Trade Union Congress) a été perdu, malgré des arguments forts pour que le RCN reconnaisse la lutte des infirmières et infirmiers comme conjointe avec celle des autres travailleurs et travailleuses, lutte replacée dans le contexte plus large des attaques contre le NHS, les conditions de travail, les droits syndicaux et les libertés politiques. Une majorité a estimé que le RCN a été en mesure d’adopter une position forte en partie en dépit de l’existence d’autres syndicats (de la santé: GMB, Unison, Unite) et que le coût de l’affiliation au TUC n’apporterait pas suffisamment d’avantages. Toutefois, le vote a été serré, ce qui montre que le «côté syndical» du RCN est en train de se développer, une évolution certes tardive qui s’est produite au cours des dernières années.

D’autres débats congressuels ont vu le RCN prendre des positions plus marquées sur l’inclusion et la lutte contre la discrimination, notamment en s’engageant à devenir une organisation antiraciste, en adoptant une position ferme sur les droits des travailleurs humanitaires de la santé, en approuvant des mesures actives pour la campagne sur la santé des femmes et en luttant contre les crimes de harcèlement envers les LGBT. Il n’y avait aucun signe de la mobilisation anti-trans que l’on retrouve dans d’autres syndicats.

Malgré son histoire, le RCN a conduit récemment les grèves dans le NHS [après 106 ans de non-participation aux grèves]. Plusieurs milliers d’autres professionnels de la santé voulaient et ont voté pour se joindre à l’action, et les ambulanciers ont participé aux grèves historiques. Mais les dirigeants des autres principaux syndicats de la santé ont activement sapé la lutte à propos des salaires. […]

L’argument en faveur d’une lutte commune au sein du NHS doit encore être gagné par tous les syndicats du secteur. Les travailleurs et travailleuses de la santé d’Unison et du GMB (et d’Unite) doivent montrer leur solidarité avec les membres du RCN afin de renforcer les positions en faveur de cette lutte collective. (Article publié sur le site Wokers’ Liberty, le 23 mai 2023; traduction rédaction A l’Encontre)

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