URSS: «Etait-ce un système socialiste? Absolument pas» (I)

Par Denis Paillard

Cet ouvrage des Editions Page deux et des Editions Syllepse rassemble huit textes de Moshe Lewin* – désormais M.L. – sous le titre Russie / URSS / Russie. Six de ces textes, rédigés au début des années 90, ont été publiés en anglais dans un recueil du même nom Russia / USSR / Russia (The New Press, 1995) [1]. En annexe de cet ouvrage, on trouvera un texte de synthèse sur la répression et les camps. Comme le titre l’indique, nous avons souhaité ne pas centrer ce recueil sur l’année 1917 et la révolution d’Octobre, mais revenir sur l’histoire des soixante-dix années où l’URSS a existé, de l’événement fondateur que fut Octobre 17 à l’implosion du système à la fin de la perestroïka. En effet, pour M. L., historien, le fait de tout focaliser sur Octobre 17 et la révolution victorieuse dirigée par le parti bolchevique, est généralement la marque d’un désintérêt pour les événements qui ont suivi, au profit de débats sans fins sur la nature du régime issu d’Octobre – cette ignorance ou ce désintérêt pour l’histoire de ces soixante-dix années se traduit par le recours généralisé, à droite mais aussi à gauche, au terme «totalitarisme» pour caractériser le régime.

Qu’est-ce que l’URSS ?

Ce qui est en jeu dans les débats sur la nature du régime soviétique est fondamentalement la question du «communisme» : l’URSS a-t-elle été (ou non) un pays communiste ?

Pour la bourgeoisie, ses idéologues et ses historiens la réponse est sans ambiguïté: URSS = communisme = stalinisme = Goulag. Cette équation prétend disqualifier une fois pour toutes l’idée d’une alternative au capitalisme, et, dans cette perspective, la disparition de l’URSS signifierait une fois pour toutes la «fin du communisme»[2]. En France, on peut citer, parmi beaucoup d’autres, François Furet, André Glucksmann et des auteurs du Livre noir du communisme. L’impact du Livre noir du communisme a été considérable. Jean Pierre Garnier, dans un article du Monde Diplomatique (janvier 2009), mentionne même l’organisation d’un débat avec S. Courtois à la Fédération anarchiste (sic).

Cette équation URSS = communisme se retrouve, mais avec une simple inversion des signes, chez ceux qui considèrent que le communisme a été réalisé en URSS, mais, généralement avec une réserve importante, uniquement du temps de Staline. Très largement défendue dans le passé dans le mouvement communiste, cette thèse a aujourd’hui encore des défenseurs : on peut citer Domenico Losurdo et son livre Staline. Histoire et critique d’une légende noire [Editions Aden – Bruxelles, 2011 ], l’ouvrage de deux membres du PC américain Roger Keeran and Thomas Kenny Socialism Betrayed. Behind the collapse of the Soviet Union (publié en français aux éditions Delga sous le titre Le socialisme trahi. Les causes de la chute de l’Union soviétique, et Ludo Martens [dirigeant du PTB belge] auteur du livre Un autre Staline, un des rares auteurs qui reprend et justifie totalement l’extermination par Staline de la vieille garde bolchevique, ce qui l’amène à citer comme dirigeants bolcheviks en 17 (outre Lénine et, bien entendu, Staline) Molotov, Jdanov, et Malenkov (!).

La question de la nature de l’URSS devient plus complexe dès lors qu’on questionne le rapport entre l’URSS et le communisme et plus largement le socialisme[3]. On peut distinguer trois grandes positions. Pour les tenants de la théorie du capitalisme d’Etat[4] l’oppression des travailleurs sous Staline signifie que le régime ne pouvait en aucun cas être associé d’une façon ou d’une autre au ‘socialisme’. La seconde position, illustrée encore récemment par le livre de Roger Martelli Que reste-t-il de l’Octobre russe ? (éditions du Croquant, 2017) considère, avec des réserves plus ou moins fortes, que l’URSS a un rapport avec le communisme. Selon Martelli l’URSS (période stalinienne comprise) symbolise la forme dominante du «communisme au XXe siècle». La troisième position prend son origine dans l’ouvrage de Léon Trotski La révolution trahie[5]. Trotski, tout en caractérisant l’URSS comme un Etat ‘ouvrier’ bureaucratiquement dégénéré, définit la société soviétique comme une société en transition entre le capitalisme et le socialisme, la question devant être tranchée dans un sens (retour au capitalisme suite à une contre-révolution bourgeoise) ou dans l’autre (construction d’une société socialiste avec l’élimination de la bureaucratie). L’implosion du système soviétique a tranché la question : la Russie est aujourd’hui un pays capitaliste mais sans que pour autant l’on puisse parler de ‘contre-révolution’[6].

Aujourd’hui, on assiste à un recours massif à des caractérisations en termes de «socialisme existant» ou encore de «socialisme réel» [une formule développée initialement en RDA: «real existierender Sozialismus»] visant à mettre en avant ce qui serait l’ambivalence du système (sans pour autant définir en quoi parler de socialisme fait sens dans le cas de l’URSS, si ce n’est une façon de marquer qu’elle n’était pas capitaliste). Comme nous le verrons de façon plus détaillée, M.L. a une position très catégorique sur la question du rapport de l’URSS au socialisme: « Etait-ce un système socialiste ? Absolument pas. Le socialisme, c’est quand les moyens de production sont la propriété de la société et non d’une bureaucratie. Le socialisme a toujours été conçu comme un approfondissement de la démocratie politique, et non comme son refus. Persister à vouloir parler du “socialisme soviétique” est une véritable “comédie des erreurs”! On est en droit de s’étonner du fait que le débat sur le phénomène soviétique ait été et soit toujours mené en ces termes. Si quelqu’un mis en présence d’un hippopotame déclare avec insistance qu’il s’agit d’une girafe, va-t-on lui donner une chaire de zoologie?» (Le Siècle soviétique, p. 477) [7].

Ces différentes positions concernant la nature de l’URSS, aussi contradictoires soient-elles, ont en commun de considérer les 70 années durant lesquelles l’URSS a existé, comme un tout[8], où n’intervient que la question de la nature du système politique et économique mis en place à la suite de la révolution d’Octobre, sans prise en compte de la société, de son évolution sur le plan tant social, national que culturel, ni des rapports complexes qui se jouent entre cette société et le pouvoir. L’impasse sur cette dernière question apparaît clairement lorsqu’on aborde les raisons de l’implosion de l’Union soviétique sur la base de ses propres contradictions : le système s’est effondré en l’absence de toute opposition interne organisée et d’agression venue de l’extérieur. Pour M. L. l’effondrement de l’Empire soviétique s’explique fondamentalement par le divorce entre un pouvoir bureaucratique totalement sclérosé et l’émergence à partir des années 60 d’une société à dominante urbaine et éduquée (sur ce point, cf. ci-dessous).

L’autre facteur qui intervient de façon centrale dans les débats sur la nature de l’URSS est l’interférence très forte entre la question de l’URSS en tant que telle et la situation du mouvement ouvrier à l’échelle internationale: tout au long du XXe siècle l’existence de l’URSS et la référence à Moscou sont décisifs et surdéterminent les débats et les orientations du mouvement ouvrier dans les différents pays et continents[9].

L’approche développée par M. L. dans ce recueil, mais aussi dans d’autres textes (à commencer par Le Siècle soviétique), introduit une double rupture par rapport à ces débats: d’une part, l’histoire de l’URSS est tout sauf linéaire, elle est faite de continuités et de discontinuités, de phases dynamiques et de moments de crises, où se rejoue la question du régime; d’autre part, pour M.L., nous l’avons dit, l’URSS n’était pas un pays socialiste.

Continuités et discontinuités dans l’histoire de l’URSS

M.L. considère qu’il est crucial de distinguer différentes périodes ainsi que leur enchaînement pour comprendre ce que fut ce “continent disparu”. Nous les rappelons brièvement en renvoyant pour plus de précisions aux textes de M.L.

Moshe Lewin

• La révolution d’Octobre est une authentique révolution dirigée par un parti révolutionnaire, le parti Bolchevique. En même temps, concernant ce qui se joue en 1917, il est crucial de prendre en compte ce qu’écrit Trotski au début de la première partie de L’histoire de la révolution russe: «La loi du développement inégal et combiné – au sens d’une combinaison singulière d’éléments d’arriération et de facteurs totalement nouveaux – se présente à nous sous sa forme la plus achevée et par là même nous donne la clef de l’énigme principale de la révolution russe. Si la question agraire, héritage de la barbarie de l’histoire de l’ancienne Russie, avait été résolue par la bourgeoisie, si elle avait été résolue alors, le prolétariat russe en aucun cas ne serait arrivé au pouvoir en 1917. Pour que se mette en place l’Etat soviétique, il a fallu la convergence et l’interpénétration de deux facteurs d’une nature historique totalement différente : d’un côté la guerre paysanne, caractéristique des débuts de l’ère bourgeoise, de l’autre un soulèvement prolétarien, un mouvement qui marque le déclin de la société bourgeoise. C’est en cela que consiste l’année 17»[10].

• La Guerre civile (1918 – 1922) consacre la victoire des Bolcheviks, mais les énormes destructions dues à cette guerre et l’isolement du nouvel Etat en l’absence de révolutions à l’Ouest signifient un changement de perspective dans la construction du nouvel Etat, avec la période de la Nouvelle Politique Economique (NEP). Comme l’écrit Pierre Rolle «La réalité du communisme de guerre c’est la guerre »[11]. Voir dans ce recueil le texte La Guerre civile. Dynamique et conséquences.

• Pour M.L. la NEP est une période relativement calme de reconstruction, évoquée dans différents textes du recueil ; elle est marquée par la prise de contrôle du parti et de l’appareil d’Etat par Staline, avec la défaite des différentes oppositions, l’Opposition de gauche et l’Opposition dite de droite avec Boukharine.

• La période stalinienne va de la fin des années 1920 à la mort de Staline en 1953. M.L. insiste sur la nécessité de ne pas faire du terme «stalinisme» un terme générique pour désigner l’URSS, mais de réserver le terme pour désigner la période où Staline est au pouvoir. De plus, il souligne la nécessaire distinction à faire entre le stalinisme dynamique des années 30 (collectivisation, industrialisation à marche forcée, terreur et grands procès), et un stalinisme en crise dans les années d’après-guerre – sur cette seconde période, on peut se reporter au chapitre 12 intitulé Fin de partie dans la deuxième partie du Siècle soviétique. Quant à la période de la guerre, elle signifie la montée en puissance de la bureaucratie d’Etat, fortement brimée et réprimée par Staline dans les années 30: c’est elle qui assure le fonctionnement du pays. Quant à Staline, bien que généralissime, il ne prendra jamais le risque d’aller au front[12].

• Les années 1950-1960 jusqu’à l’élimination de Khrouchtchev en 1964 sont marquées par le XXème congrès du PCUS, avec la dénonciation (partielle) de la période stalinienne, une période de réformes et de libéralisation relative du régime. Dans son livre (non traduit) Political Undercurrents in Soviet Economic Debates (Pluto Press, 1974) M.L. évoque longuement les débats sur les problèmes économiques (dont on trouvera des échos dans différents textes du recueil), mais aussi le nouveau visage de la société soviétique, désormais à majorité urbaine et éduquée, ainsi que son rapport à un pouvoir de plus en plus déconnecté de la réalité: «Pour des observateurs attentifs il n’est pas difficile de distinguer toute une gamme d’opinions différentes, politiques, religieuses, nationalistes, autoritaires, démocratiques, libérales et fascistes sans parler de différents courants éthiques et philosophiques. L’idéologie officielle est certes partagée par certains, mais de façon générale elle n’offre que des clichés utilisés de façon purement formelle pour des occasions solennelles, le plus souvent sans aucun rapport avec la réalité. On peut faire l’hypothèse que sous les dehors d’une homogénéité politique proclamée, il y a dans la société russe une réalité politique souterraine, formant potentiellement et même dès à présent un large spectre d’opinions. Et il ajoute: C’est un fait que le parti dans ses prises de position officielles a manifesté des sensibilités politiques peu orthodoxes et ces opinions solidement installées peuvent être illustrées par le rôle croissant du nationalisme [grand russe], parfois sous une forme virulente » (p. 262 – 263).

• La période de «stagnation» (fin des années 1960–1986) fait suite au limogeage de Khrouchtchev (1964) et voit l’arrivée au pouvoir de Léonid Brejnev. Cette période est marquée par la volonté de mettre fin aux débats sur l’urgence de réformes économiques et de maintenir à tout prix un monolithisme de façade[13]. Se référant au Plénum du Comité Central de décembre 1969, M.L. écrit: «Le Plénum supprima d’importants aspects des réformes économiques, si ce n’est son âme même, et les remplaça par des appels à la discipline. Les contrôles et l’implication du parti devaient être renforcés et les politiques de mobilisation à l’initiative du parti étaient présentés comme la seule réponse aux difficultés et aux dysfonctionnements croissants de l’économie» (p. 275). Et il ajoute: «L’obsession du parti à vouloir garder toutes les cartes dans ses mains a rendu le jeu difficile» (p. 297). En fait impossible. Le système est progressivement bloqué et finira par être totalement paralysé. Ces questions sont abordées dans le texte Rapport d’autopsie et dans la partie III du Siècle soviétique, chapitres 6 et 7.

• La perestroïka et la fin de l’URSS (1986–1991). Comme nous l’avons indiqué ci-dessus, l’URSS s’est effondrée sous le poids de ses propres contradictions, en raison d’un divorce entre un pouvoir bureaucratique, obstiné à ne pas se réformer et une société devenue urbaine et éduquée. Dans Le Siècle soviétique M.L. écrit : « Cette capacité [à engager des réformes sur tous les plans] le pouvoir l’a perdue, ce qui a conduit à une série de paradoxes: le parti était ‘dépolitisé’, l’économie bureaucratisée était gérée et contrôlée par une bureaucratie plus attentive à conserver son pouvoir qu’à faire progresser la production, plus soucieuse de préserver de confortables routines que de développer la créativité et l’innovation technologique (…) Bref, une véritable formule magique pour que le système cesse de fonctionner» (p. 470). Ce qu’il reformule ailleurs de façon lapidaire: «Un système économique sans économie, un système politique sans politique»[14].

Concernant la période 1989 – 1991, voici ce qu’écrit Galina Rakitskaja: «En 1989 – 91 la mobilisation des forces sociales en Russie (et plus généralement en URSS) a pris la forme d’une révolution antibureaucratique et démocratique (…) La défaite en août 1991 des membres de la nomenklatura qui, au plus haut niveau, avaient tenté de s’opposer à ces changements [il s’agit de la tentative de putsch des fractions dures de la bureaucratie en août 1991. D.P.] aurait dû ouvrir la voie à des transformations démocratiques, répondant aux intérêts de la majorité de la population. En fait les politiciens libéraux radicaux, après avoir consolidé leur pouvoir, ont entrepris des réformes dirigées contre le peuple, sur le modèle de la ‘thérapie de choc’» [15]. A propos de la privatisation sauvage de la quasi-totalité de l’économie, M.L. parle du plus grand «hold-up du siècle».

• L’autre point sur lequel M.L. insiste à de très nombreuses reprises, et le titre du présent recueil le souligne, est qu’il est impossible de détacher la période soviétique de la Russie d’avant 17 et d’après 1991. Cette question est abordée dans deux textes: Russie / URSS dans le mouvement de l’histoire. Un essai d’interprétation et La Russie entre réformes et marginalisation. Cela concerne en particulier deux questions. En premier lieu, il s’agit de la question paysanne: en 1917 les paysans représentent presque 90% de la population. Pour rendre compte de ce poids de la paysannerie M.L. parle du «lien agraire» et il insiste longuement, en particulier dans Russie/URSS dans le mouvement de l’histoire. Un essai d’interprétation sur le fait que ce «lien agraire» occupe une place centrale jusqu’à la fin des années 1930. On peut également se reporter à la citation de Trotski donnée ci-dessus. L’autre question est la permanence du nationalisme grand-russe, qui traverse toute l’histoire de l’URSS, qu’il s’agisse du débat opposant Lénine à Staline au moment de la création de l’URSS, de la célébration par Staline de la Sainte Russie et des tsars autocrates (Staline lui-même se considérait comme un autocrate), mais aussi de l’existence de courants nationalistes russes très actifs au sein de l’appareil du parti-Etat à partir des années 1960. Cette question est abordée en détail dans le texte Nationalisme de notre temps. Le cas de la Russie[16].
(A suivre)

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Moshe Lewin est né en 1921 à Vilnius, alors en Pologne. Il est décédé le 14 août 2010 à Paris. Moshe Lewin est en quelque sorte l’historien de référence pour ce qui a trait à l’histoire sociale de l’URSS et, entre autres, de sa période stalinienne. Il est l’auteur de très nombreux ouvrages et articles, parmi lesquels nous citerons:

  • La Paysannerie et le pouvoir soviétique : 1928-1930, Ed. Mouton, Paris-La Haye, 1966
  • Le dernier combat de Lénine (Première édition: Editions de Minuit, 1969
  • The Political Undercurrents of Soviet Economic Debates : From Bukharin to the Modern Reformers, Princeton University Press 1974 ; une réédition a été faite en 1991 sous le titre : Stalinism and the Seeds of Soviet Reform : The Debates of the 1960’s
  • La Formation du système soviétique. Essais sur l’histoire sociale de la Russie dans l’entre-deux-guerres, Ed. Gallimard, Paris, 1987
  • La Grande Mutation soviétique, Ed. La Découverte 1989 ( titre original: The Gorbatchev Phenomenon
  • Stalinism and Nazism : Dictatorships in Comparison, Cambridge University Press, en 1997 (en collaboration avec Ian Khershaw)
  • Le Siècle soviétique, Fayard/Le Monde diplomatique, Paris, 2003, 526 p.
  • La Formation du système soviétique. Essais sur l’histoire sociale de la Russie dans l’entre-deux-guerres, Ed. Gallimard, Paris, 1987
  • La Grande Mutation soviétique, Ed. La Découverte 1989 ( titre original: The Gorbatchev Phenomenon
  • Stalinism and Nazism : Dictatorships in Comparison, Cambridge University Press, en 1997 (en collaboration avec Ian Khershaw
  • Le Siècle soviétique, Fayard/Le Monde diplomatique, Paris, 2003, 526 p.

Notes

[1] L’ouvrage en anglais est plus important et présente seize textes dont un texte sur la situation de la paysannerie durant la NEP, trois textes sur le phénomène bureaucratique, un texte sur l’industrialisation et un texte sur la planification intitulé The disappearance  of Planning in the Plan.

[2] De façon quelque peu étonnante, Enzo Traverso dans La mélancolie de gauche (La Découverte, 2016) fait apparemment sienne la thèse selon laquelle l’effondrement de l’URSS signifierait «la fin du communisme».

[3] Sur les débats concernant la nature de l’URSS, on peut également citer Marcel van der Linden, Western Marxism and the Soviet Union: A Survey of Critical Theories and Debates Since 1917, Haymarket books (2009), John Eric Marot, The October Revolution in Prospect and Retrospect. Interventions in Russian and Soviet History, Haymarket books (2013) et Thomas Twiss Trotsky and the Problem of Soviet Bureaucracy, Political Science, University of Pittsburgh (2009).

[4] On peut citer, entre autres, Tony Cliff et le SWP anglais, ainsi que Raya Dunayevskaya, cf. son livre récemment paru aux éditions Syllepse Marxisme et liberté (p. 253 – 302).

[5] La révolution trahie n’est pas le titre original du livre qui, en russe, était Qu’est-ce que l’Union soviétique et où va-t-elle ? ce qui mettait en avant l’instabilité du régime du point de vue de sa caractérisation.

[6] La thèse de la contre-révolution (version ‘complotiste’) est en revanche défendue par les admirateurs inconditionnels de Staline mentionnés ci-dessus.

[7] Comme nous le verrons ci-dessous, M.L. pour caractériser le régime soviétique utilise la notion d’étatisme introduite par le sociologue américain Eric Olin Wright dans son texte « En quête d’une boussole de l’émancipation. Vers une alternative socialiste » (publié sur le site de la revue Contretemps (2011). Olin Wright propose de distinguer trois modes alternatifs d’organisation des relations de pouvoir à travers lesquels les ressources économiques sont allouées, contrôlées et utilisées: le capitalisme, le socialisme et l’étatisme.

[8] Mais avec une focalisation sur la période stalinienne où le régime se présente ‘à l’état pur’. La période poststalinienne, qu’il s’agisse de Khrouchtchev ou encore de Brejnev et la période dite de ‘stagnation’ (zastoj) ont eu pour conséquence de compliquer sérieusement la question.

[9] Sur ce plan, les quatre tomes du Bulletin de l’Opposition de gauche (en russe) publiés de 1929 à 1941 (au total 87 numéros) sont exemplaires : la dénonciation du régime mis en place par Staline et la construction d’un mouvement à l’échelle internationale dans le reste du monde sont les deux composantes d’une seule et même démarche.

[10] Trotski insiste encore une fois sur ce point à la fin du tome 2.

[11] P. Rolle, Le travail dans les révolutions russes, Editions Page deux, (1998), p. 232.

[12] Un historien soviétique, Mikhaïl Gefter, a caractérisé la période de la guerre de « déstalinisation manquée ».

[13] M.L. cite le jugement formulé en 1973 par l’académicien V. Nemchinov sur les dysfonctionnements et les impasses du système : « Un système politique à ce point paralysé du haut jusqu’en bas ne peut que freiner le développement  technique et social, et il va s’effondrer tôt ou tard sous la pression des vrais processus de la vie économique » (p. 157) ; cette citation figure également dans Le Siècle soviétique, p.  318.

[14] Sur la bureaucratie, on peut également se reporter au Siècle soviétique, III, chapitre 6 intitulé Le labyrinthe bureaucratique, et plus particulièrement à la partie D’un système de parti unique à un système ‘sans parti’.

[15] Extrait de « L’Etat et les perspectives du mouvement ouvrier », in : V. Garros (éd.) Russie postsoviétique : la fatigue de l’histoire éditions Complex, 1995). Galina Rakitskaja et Boris Rakitski ont joué un rôle important dans la reconstruction d’un mouvement syndical de luttes en Russie.

[16] Ci-dessous nous revenons sur l’explosion du nationalisme dans la Russie poststalinienne.

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