La stratégie de Trump pour réaffirmer la domination américaine (I)

Par Ashley Smith

L’administration Trump a porté un coup de massue à l’ordre international et national existant. Tous les dégâts causés peuvent sembler n’être qu’une opération cynique de destruction et de pillage orchestrée par Donald Trump et ses acolytes capitalistes. C’est le cas, mais ce n’est pas tout.

Le noyau rationnel du projet de Trump est exposé par la Heritage Foundation dans ses documents Mandate for Leadership et The Prioritization Imperative: A Strategy to Defend America’s Interests in a More Dangerous World. Ces documents lui ont fourni un plan directeur pour mettre en œuvre une stratégie nationaliste autoritaire visant à réaffirmer la domination des Etats-Unis dans le capitalisme international.

Trump abandonne le projet post-guerre froide de Washington, qui consistait à superviser un ordre néolibéral de mondialisation du libre-échange. Au lieu de cela, il tente d’atteindre son objectif maintes fois répété de «rendre sa grandeur à l’Amérique» en faisant passer «l’Amérique d’abord» avant ses amis comme ses ennemis. Il déclasse ou abandonne les institutions multilatérales, impose des droits de douane à de nombreux pays et menace d’annexer le Groenland, le Panama et même le Canada.

Bien que beaucoup plus cohérente que Trump 1.0, l’administration Trump 2.0 reste déchirée par des conflits, dont le meilleur exemple est la rupture apocalyptique de la mauvaise «bromance» entre le président et Elon Musk au sujet du «Big Beautiful Bill». C’est l’une des nombreuses scissions, parmi lesquelles la bataille de Trump contre la Federalist Society [organisation conservatrice et libertarienne prônant une interprétation originaliste de la Constitution, soit comme elle semblait être comprise en 1787], qui a contribué à remplir les tribunaux de juges favorables à l’administration, pour son soutien à la décision de la Cour d’arbitrage de la Chambre de commerce internationale contre sa capacité à imposer des droits de douane. Une autre scission, plus importante, oppose Trump à sa base MAGA au sujet de la publication de la liste des clients de Jeffrey Epstein, avec lesquels il se livrait à un trafic de femmes et de jeunes filles.

Malgré tout le chaos, la confusion et les luttes factionnelles, l’administration Trump est unie derrière un même projet: l’escalade de la rivalité impériale de Washington avec la Chine.

Mandate for Leadership de la Heritage Foundation qualifie la Chine d’«ennemi totalitaire des Etats-Unis, et non de partenaire stratégique ou un concurrent loyal». L’administration tente de se désengager des guerres en Ukraine et à Gaza, d’obliger ses alliés à assumer la responsabilité de leur propre sécurité et de se libérer ainsi pour donner la priorité à sa rivalité avec Pékin.

En réponse, la Chine a clairement fait part de sa détermination à affronter les Etats-Unis dans la guerre commerciale, ainsi que face à leurs menaces géopolitiques et leur renforcement militaire en Asie. Face à une telle opposition de Pékin, Trump a renoncé à ses mesures les plus extrêmes, assouplissant par exemple les restrictions sur les exportations de puces informatiques de Nvidia et réduisant les droits de douane sans précédent qu’il avait initialement imposés [Nvidia est prêt à payer 15% au gouvernement américain de ses revenus d’exportation en Chine, un marché clé, The Guardian, 11 août] .

Mais la concurrence croissante entre les deux puissances perturbera ces mesures temporaires. Alors que leur rivalité interimpérialiste risque de s’envenimer, la gauche doit faire tout ce qui est en son pouvoir pour construire une solidarité internationale afin d’empêcher que ce conflit ne déclenche une guerre catastrophique entre puissances nucléaires.

Les racines capitalistes de la rivalité impérialiste

Soyons clairs, cette rivalité n’est pas le résultat des politiques des administrations Trump ou Biden, ni de celles du régime de Xi Jinping en Chine. Elle est le produit des lois du capitalisme, à savoir le développement inégal et combiné, les crises et la concurrence entre les Etats pour le partage et le repartage du marché mondial au profit de leurs entreprises.

Cette concurrence économique pousse les Etats vers la rivalité géopolitique et la guerre. Le résultat de ces conflits crée une hiérarchie dynamique des Etats, avec les puissances impérialistes au sommet, les puissances régionales au milieu et les nations et peuples opprimés au bas de l’échelle. Tous ces Etats capitalistes sont déchirés par des divisions sociales et de classe internes.

Aucun ordre entre les Etats n’est permanent. Les périodes d’expansion, de récession, de rivalités, de guerres et de luttes internes du système bouleversent et remanient le système des relations interétatiques, avec le déclin des puissances établies et la montée en puissance de nouvelles puissances. Nous avons assisté à une succession d’ordres impérialistes au cours du siècle dernier: la période coloniale multipolaire du XIXe siècle, les deux guerres mondiales, la guerre froide bipolaire et l’hégémonie sans rivale de Washington après l’effondrement de l’Union soviétique.

Les Etats-Unis espéraient maintenir cet ordre unipolaire en intégrant tous les Etats dans leur «ordre fondé sur des règles» de mondialisation du libre-échange. Ils ont tenté de bloquer la montée de tout concurrent potentiel, de démanteler tout «Etat voyou» comme l’Irak et de contrôler les Etats déstabilisés par les politiques néolibérales et les interventions de Washington, comme Haïti.

Le déclin relatif de l’impérialisme américain

Quatre événements ont conduit au déclin relatif des Etats-Unis et à la fin de l’ordre unipolaire. Tout d’abord, le boom néolibéral du début des années 1980 jusqu’à la grande récession de 2008 a entraîné l’émergence de nouveaux centres d’accumulation du capital, notamment la Chine, mais aussi la Russie, le Brésil, l’Arabie saoudite et bien d’autres.

Deuxièmement, la tentative de Washington de consolider son hégémonie sur le Moyen-Orient et ses réserves énergétiques par le biais de ses guerres en Afghanistan et en Irak s’est soldée par une défaite désastreuse, le contraignant à se livrer à des occupations brutales et à des opérations de contre-insurrection. Washington étant enlisé, la Chine, la Russie et diverses puissances régionales sont devenues de plus en plus affirmées dans le système interétatique.

Troisièmement, la Grande Récession a mis fin au boom néolibéral, ouvrant la voie à une période de marasme mondial marquée par une alternance de récessions et de reprises timides. La croissance atone et la baisse des taux de profit ont poussé les Etats à protéger leurs propres entreprises, ralentissant le commerce mondial et exacerbant les rivalités géopolitiques.

Enfin, la pandémie, la perturbation des chaînes d’approvisionnement internationales et la récession qui l’a accompagnée ont mis en évidence le déclin relatif de Washington, ainsi que sa dépendance vis-à-vis de la Chine. Ensemble, ces développements ont donné naissance à l’ordre multipolaire asymétrique actuel.

Les Etats-Unis restent au sommet du système avec la plus grande économie et la plus grande puissance militaire, ainsi qu’une influence géopolitique sans pareille, mais ils sont désormais confrontés à des rivaux impérialistes, notamment la Chine, mais aussi la Russie. A cela s’ajoute une multitude de puissances régionales qui se disputent entre elles et les grandes puissances le contrôle sur les pays et les peuples opprimés/exploités.

Aucune des puissances impérialistes n’étant en mesure de surmonter la crise mondiale, les élites dirigeantes de chacune d’entre elles se sont tournées vers l’austérité et la répression autoritaire de la contestation à l’intérieur de leurs frontières, ainsi que vers des politiques de protectionnisme et de dumping à l’étranger.

Dans ce nouvel ordre, la rivalité principale oppose les Etats-Unis et la Chine. Ces deux pays étaient des partenaires stratégiques dont les économies étaient de plus en plus intégrées à l’apogée de la mondialisation néolibérale sous l’administration Clinton [1993-2001]. Mais ce n’est plus le cas aujourd’hui.

Aujourd’hui, la Chine est le plus grand producteur industriel du monde. Elle exerce une influence géopolitique croissante et dispose de la capacité de faire respecter sa volonté grâce à la deuxième armée la plus importante du monde. Washington considère désormais la Chine comme un concurrent potentiel qu’il doit contenir. En conséquence, les deux puissances sont en désaccord sur tout, de l’économie à la géopolitique en passant par l’expansion militaire, en particulier dans la région Asie-Pacifique.

Le nouveau consensus de Washington

Dans cet ordre mondial multipolaire asymétrique, les administrations américaines successives ont abandonné l’ancienne stratégie de superintendance du capitalisme mondial pour adopter le nouveau consensus de Washington, qui prévoit un conflit entre grandes puissances avec la Chine. Jusqu’à la dernière décennie, les Etats-Unis avaient poursuivi une stratégie de «con-gagement» [containment et engagement] avec Pékin, combinant endiguement et collaboration. Le pivot vers l’Asie [novembre 2011] de l’administration Obama a été son dernier sursaut.

La première administration Trump [2016-2020] a résolument réorienté la grande stratégie des Etats-Unis vers une rivalité avec la Chine et la Russie. Elle visait à dévaloriser les alliances multilatérales au profit d’une affirmation unilatérale de la puissance américaine, en interdisant les exportations de haute technologie vers la Chine, en imposant des droits de douane pour réindustrialiser les Etats-Unis, en augmentant le budget militaire et en réorientant les forces armées vers l’Asie.

Mais les revirements erratiques de Trump, les profondes divisions internes de son administration et l’opposition de la bureaucratie d’Etat ont entravé la mise en œuvre de cette nouvelle approche. En fin de compte, il a accéléré le déclin relatif de Washington et, selon les termes de deux responsables de l’administration Obama [Robert Malley et Philip H. Gordon], il a réussi à «enhardir la Chine, inquiéter l’Europe et laisser tous les alliés et ennemis des Etats-Unis s’interroger sur la durabilité de nos engagements et la crédibilité de nos menaces» (New York Times, 11 novembre 2020).

L’administration Biden a maintenu l’accent mis par Trump sur la rivalité entre les grandes puissances avec la Chine et la Russie, mais a remplacé l’approche «America First» de son prédécesseur par un «multilatéralisme musclé». Elle visait à rénover le capitalisme américain en mettant en œuvre une nouvelle politique industrielle dans le domaine des hautes technologies, à maintenir le régime tarifaire de Trump avec une barrière élevée autour d’un petit périmètre de technologies stratégiques afin de bloquer les progrès de la Chine, en particulier dans le domaine des microprocesseurs avancés, et à reconstruire et élargir les alliances de Washington, en les retournant contre Pékin et Moscou.

Après le retrait chaotique des Etats-Unis d’Afghanistan en 2021, l’administration Biden a exploité l’invasion impérialiste de l’Ukraine par la Russie pour rallier ses alliés, non seulement contre Moscou, mais aussi contre Pékin. Elle a convaincu l’OTAN de déclarer que la Chine représentait un défi mondial pour la sécurité.

Mais Biden a fondamentalement sapé ses prétentions moralisatrices selon lesquelles les Etats-Unis défendaient leur soi-disant ordre international fondé sur des règles en soutenant la guerre génocidaire d’Israël contre Gaza. Cela a permis à la Chine et à la Russie de dénoncer l’hypocrisie de Washington et de rallier d’autres Etats autour d’eux sous la bannière de la «multipolarité».

Néanmoins, personne ne doit se faire d’illusions sur le fait que Pékin ou Moscou seraient des alliés d’un mouvement de libération de la Palestine. Dans le cas de la Chine, malgré son opposition rhétorique au génocide israélien, elle est le deuxième partenaire commercial d’Israël, son groupe portuaire public Shanghai International Port Group a construit et exploite le port de Haïfa, impliquant un investissement de 1,7 milliard de dollars, une autre de ses entreprises construit le réseau de tramway de Tel-Aviv, et une autre, Hikvision, vend à Israël des technologies de surveillance pour contrôler les Palestiniens en Cisjordanie.

Xi redonne sa grandeur à la Chine

Face à la nouvelle stratégie de grande puissance de Washington visant à contenir la montée en force de la Chine, Pékin n’avait d’autre choix que de riposter par des contre-mesures agressives. Xi Jinping a rompu avec la politique étrangère prudente de ses prédécesseurs, promettant de mener à bien un «renouveau national» afin de réaliser le «rêve chinois» qui consiste à retrouver le statut de grande puissance.

Mais Xi est confronté à d’innombrables défis. L’économie chinoise a ralenti, passant d’une croissance annuelle d’environ 10% dans les années 2000 à environ 5% aujourd’hui. Elle est en proie à la surproduction [entre autres, dernièrement, dans les voitures électriques, ce qui débouchera sur une concentration], à l’éclatement de la bulle immobilière, à une dette massive, à la corruption, au vieillissement et à la diminution de la population active, ainsi qu’à un taux de chômage élevé chez les jeunes. Le régime chinois a également été confronté à des vagues de luttes sociales et de classe, depuis les grèves et les manifestations de masse des années 2000 jusqu’au soulèvement démocratique à Hong Kong, en passant par la résistance des Ouïghours au colonialisme des colons Han au Xinjiang et les actions insurrectionnelles et marches massives contre les mesures brutales de confinement imposées dans le cadre de la politique «zéro Covid».

Pour maintenir son pouvoir face à ses rivaux bureaucratiques et à la résistance venue d’en bas, Xi s’est tourné vers la répression autoritaire. Il a purgé les bureaucrates dissidents et corrompus, interdit les ONG syndicales, mené un génocide culturel et procédé à l’incarcération massive des Ouïghours au Xinjiang, écrasé le mouvement à Hong Konget intensifié l’oppression des femmes et des personnes LGBTQ dans le cadre de la politique nataliste du régime visant à augmenter le taux de natalité et à renouveler sa main-d’œuvre.

Xi a accompagné cette répression de nouveaux investissements massifs dans l’économie, avec deux objectifs: renforcer le soutien intérieur en promettant une vie meilleure et repousser les tentatives de Washington de bloquer la montée en puissance de la Chine. Le régime a mis en place un énorme plan de relance pour soutenir la croissance économique après la Grande Récession et dans un contexte de ralentissement mondial.

En 2015, Xi a inauguré «Made in China 2025», une politique industrielle financée par l’Etat visant à développer les entreprises de haute technologie, à garantir leur autosuffisance et à les positionner de manière à ce qu’elles puissent concurrencer leurs rivales transnationales. A tous égards, cette initiative a été un succès retentissant. La Chine compte désormais des entreprises de conception et de fabrication de puces de classe mondiale telles que HiSilicon et SMIC, le plus grand constructeur mondial de véhicules électriques, BYD, le premier fabricant mondial de batteries, CATL, le principal fabricant de panneaux solaires, JinkoSolar, des innovateurs pionniers dans le domaine de l’IA tels que DeepSeek, des fabricants de robots qui ont automatisé le travail en usine à un rythme plus élevé qu’en Europe et aux Etats-Unis, et un quasi-monopole sur les usines de traitement des terres rares et les fabricants d’aimants qui fournissent l’industrie high-tech mondiale.

La Chine a commencé non seulement à rattraper son retard, mais aussi, dans certains cas, à dépasser les industries de haute technologie des Etats-Unis. Comme l’affirment deux économistes influents, David Autor et Gordon Hanson dans le New York Times du 14 juillet 2025: «Selon l’Australian Strategic Policy Institute, un groupe de réflexion indépendant financé par le ministère australien de la Défense, les Etats-Unis devançaient la Chine dans 60 des 64 technologies de pointe, telles que l’IA et la cryptographie, entre 2003 et 2007, tandis que la Chine ne devançait les Etats-Unis que dans trois domaines. Dans le dernier rapport, qui couvre la période 2019-2023, le classement s’est inversé. La Chine est en tête dans 57 des 64 technologies clés, et les Etats-Unis ne sont en tête que dans sept.»

En réalité, les interdictions de Washington sur les exportations de technologies vers la Chine se sont retournées contre lui, poussant les entreprises chinoises à développer leurs propres capacités qui sont désormais comparables, voire dans certains cas supérieures, à celles de leurs rivaux du monde capitaliste avancé. Cela a conduit le PDG de Nvidia, Jensen Huang, à qualifier les interdictions technologiques de Washington à l’égard de la Chine d’«échec» qui «ne fait que renforcer les rivaux étrangers» et «affaiblit la position des Etats-Unis».

Concurrence pour les marchés

Toutes ces mesures de relance gouvernementales n’ont pas sauvé la Chine du marasme mondial du capitalisme. Elles ont au contraire provoqué une crise de surinvestissement, une concurrence acharnée entre les entreprises capitalistes publiques et privées, une baisse de la rentabilité, une déflation et une surcapacité.

Cela a conduit le capital à se diriger vers des investissements spéculatifs dans l’immobilier, créant une bulle gigantesque qui a éclaté avec l’effondrement de la plus grande société immobilière du monde, Evergrande. Cela a exacerbé la crise de la dette du pays, frappé durement le patrimoine de la classe moyenne et affaibli la demande des consommateurs.

Même après avoir partiellement stabilisé cette crise, la Chine n’a pas résolu son problème de surproduction. En fait, le régime l’a exacerbé avec un nouveau plan de relance visant à sortir son économie de la récession pandémique. En conséquence, la Chine produit plus de tout – du béton à l’acier, en passant par les panneaux solaires et les véhicules électriques – qu’elle ne peut vendre sur le marché intérieur avec des profits suffisamment élevés.

La classe dirigeante chinoise espérait que son initiative «Belt and Road Initiative» (BRI – Nouvelle route de la soie), lancée en 2013, aiderait la Chine à exporter son excédent de capacité industrielle. La BRI était un projet de développement des infrastructures d’un montant de 1000 milliards de dollars qui prévoyait la construction de routes, de réseaux ferroviaires et de ports, principalement dans les pays du Sud.

Les Etats participants ont contracté des emprunts auprès de banques chinoises pour financer la construction, faisant de la Chine le plus grand créancier au monde. Et, selon un schéma impérialiste classique, les systèmes de transport construits dans le cadre de la BRI sont le plus souvent conçus pour acheminer les matières premières des industries extractives des pays en développement vers la Chine pour son système de production.

La Chine a également augmenté ses exportations, déclenchant des réactions protectionnistes de la part des Etats capitalistes, non seulement des Etats-Unis, mais aussi de l’Union européenne et de divers Etats du Sud. Tous ont commencé à se plaindre du dumping de ses excédents sur leurs marchés et de la concurrence déloyale qu’elle fait subir à leurs entreprises moins compétitives.

Cette frénésie d’exportations a eu un impact négatif sur les alliés officiels de Pékin. Par exemple, elle a aggravé la désindustrialisation du Brésil, réduisant de plus en plus son économie à l’exportation de matières premières et de produits agricoles vers la Chine, un piège classique de la dépendance.

La diversification des marchés d’exportation de Pékin vise également à protéger son économie des droits de douane et des interdictions croissants imposés par Washington. Dans le cadre de cet effort, elle a réduit ses avoirs en bons du Trésor américain et a de plus en plus recours à sa propre monnaie pour commercer avec d’autres pays comme la Russie.

Mais la Chine ne peut en aucun cas remplacer entièrement le marché des Etats-Unis. Afin d’échapper aux droits de douane américains, elle a donc délocalisé ses usines dans des pays comme le Vietnam et le Mexique afin de les utiliser comme plateformes de transformation pour l’exportation.

Dans le même temps, le régime a pris conscience qu’il devait développer son propre marché intérieur. Pour atteindre cet objectif, il a lancé sa stratégie de double circulation, qui consiste à investir dans des entreprises publiques produisant pour le marché intérieur tout en maintenant une économie parallèle orientée vers l’exportation.

Dans le cadre de cette stratégie, Xi a promis à plusieurs reprises de stimuler la demande intérieure en augmentant les revenus des travailleurs et travailleuses, en renforçant le filet de sécurité sociale minimal de l’Etat et en stabilisant le marché immobilier. Mais ces propositions de «prospérité commune» étaient restées lettre morte par le passé.

Pourquoi? Parce que la croissance économique de la Chine repose pour l’essentiel sur l’exploitation d’une main-d’œuvre migrante bon marché. (voir The Journal of Asian Studies, mai 2021) Elle s’abstient donc ainsi d’augmenter les salaires de ces travailleurs et des dépenses sociales. C’est pourquoi Xi s’est opposé à «l’égalitarisme» et au «welfare» qui récompensent «les paresseux». En conséquence, la Chine reste dépendante de son économie d’exportation. (Article publié sur le site Tempest le 24 juillet 2025;  traduction rédaction A l’Encontre, la suite sera publiée en date du 12 août)

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