Algérie. Contre l’austérité, les atteintes aux acquis sociaux! Non à la loi de finances 2016!

Débat sur la Loi de finances 2016 dans l'Assemblée populaire nationale, en fin novembre. La loi sera adoptée en décembre par le Conseil national.
Débat sur la Loi de finances 2016 dans l’Assemblée populaire nationale, en fin novembre. La loi sera adoptée en décembre par le Conseil national.

Déclaration du Parti socialiste
des travailleurs

Depuis plus de trois ans, l’offensive libérale n’a pas cessé de rogner les mesures inconséquentes et insuffisantes, appelées pompeusement «patriotisme économique», introduites par la LFC 2009 [Loi de finances complémentaire]. Bien avant la chute du prix des hydrocarbures, les attaques quasi quotidiennes contre les subventions et les transferts sociaux, contre l’augmentation des salaires et les pensions, contre les acquis et les droits sociaux meublaient le discours d’une partie du pouvoir, de l’opposition libérale, du FMI et de la BM (Banque mondiale), ainsi que les médias. Aujourd’hui, la Loi de finances 2016, dont le passage en force au Parlement renseigne sur les «réformes démocratiques» promises, vient renforcer ce processus libéral dans le but de démanteler le secteur public, d’abolir ce qui reste du caractère social de l’Etat algérien et soumettre notre économie et nos richesses nationales au secteur privé et aux transnationales. Le futur amendement de la Constitution couronnera sans doute ce dispositif. Il s’agit d’un processus d’abandon de l’idéal du combat du peuple algérien pour l’indépendance et son caractère social et égalitaire.

Alors que le pays dispose d’une marge de manœuvre financière consistante, la promotion d’un discours alarmiste, instaurant la peur au sein de la population, vise à profiter de la chute du prix des hydrocarbures [1] pour accélérer le processus libéral et imposer l’austérité et la précarité sociale pour la majorité des travailleurs, des travailleuses et des masses populaires. Cette accélération est confortée par le nouveau rapport de forces au sein du régime en faveur du patronat et des affairistes privés, par la bienveillance des puissances impérialistes qui se frottent les mains et par la lente et difficile cristallisation politique du front social.

Ceux qui faisaient partie de la campagne ultralibérale il y a peu, dénoncent aujourd’hui le danger de la LF 2016 et son atteinte à la souveraineté nationale, ils ont compris enfin que le pouvoir ne leur concédera ni «transition démocratique» ni «consensus national». Aussi, ceux qui faisaient partie des hautes sphères de la hiérarchie politique et militaire du régime et dénoncent aujourd’hui l’épuration au sein du DRS (Département du renseignement et de la sécurité) et l’emprisonnement de hauts officiers de l’armée ont compris que le rapport de forces est en train de changer profondément et qu’ils sont exclus du centre de décision politique et économique.

Pour le PST la bataille ne se limite pas à la dénonciation de la LF 2016 au sein du parlement [le débat a été assez vif et traduit les divisions devant des mesures accentuées depuis l’arrivée à la présidence d’Abdelaziz Bouteflika] ou à la défense du droit de préemption [droit de l’Etat d’avoir une priorité d’acquisition lors d’une cession d’une entreprise: par exemple, droit invoqué lors de la vente de filiale de Michelin au groupe privé Cevital]. Il s’agit pour nous de s’opposer au projet libéral, à la privatisation du secteur public et au bradage du foncier et des terres agricoles. Il s’agit aussi de dénoncer l’austérité imposée aux masses populaires et les cadeaux fiscaux décernés aux patrons et aux riches. Il faut se positionner contre les projets de lois libérales et anti-sociales, tels que les contre-réformes du Code du travail, de la loi sanitaire et du Code d’investissements. Il faut, enfin, exiger l’annulation de l’accord injuste avec l’UE (Union européenne) et s’opposer au projet d’adhésion de notre pays à l’OMC (Organisation mondiale du commerce).

Néanmoins, le PST est disposé à mener la bataille avec tous ceux qui se mobilisent contre la LF 2016, pour son retrait et pour l’ouverture d’un débat démocratique et sans exclusive sur les choix économiques et sociaux. Avec tous ceux qui luttent pour la levée de toutes les entraves à l’exercice effectif des libertés démocratiques dans notre pays.

L’expérience des luttes a démontré que les travailleurs, comme ceux de la SNVI (Entreprise nationale des véhicules industriels), de l’ETUSA (Transport autobus) d’El Hadjar, des enseignants et bien d’autres secteurs, comme le mouvement des chômeurs, des étudiant·e·s et des jeunes, des femmes et des opprimé·e·s, constituent un rempart contre le projet libéral et peuvent transformer le rapport de forces.

Le PST appelle les militant·e·s de la classe ouvrière et les syndicalistes, les animateurs du mouvement des chômeurs et de la jeunesse, les militants des mouvements sociaux et du combat des femmes et de tous les opprimés à unir nos forces pour se solidariser avec les luttes et réaliser ensemble une convergence démocratique anti-libérale et anti-impérialiste. (Secrétariat national du PST, 17 décembre 2015)

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Le ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa
Le ministre des Finances, Abderrahmane Benkhalfa

[1] Officiellement, en 2014, des exportations algériennes d’hydrocarbures (gaz et pétrole) représentaient 93,53% du total des exportations, ce qui illustre l’échec du pouvoir et du capital d’utiliser des ressources pour avoir une politique de diversification sectorielle répondant aux exigences des besoins de la majorité de la société. Elles totalisaient la somme de 27,25 milliards de dollars.

Lors des cinq premiers mois de l’année 2015, le recul des revenus d’exportations d’hydrocarbures se situe à hauteur de 45,47%. Cette chute est liée à la dégringolade, sur 12 mois (juin à juin), du cours du pétrole qui a passé de plus 100 dollars (en juin 2014) à 60 dollars en juin 2015. Et ce cours a continué à chuter. En même temps, le volume des exportations s’est contracté étant donné la situation de faible croissance, pour ne pas dire de stagnation, des principaux importateurs: l’Espagne, l’Italie, la France et la Grande-Bretagne.

Les hydrocarbures contribuent à hauteur de 60% des recettes de l’Etat. Pour ce qui est des recettes fiscales internes, la TVA payée de manière massive par les salariés-consomnateurs représente, pour l’année 2014, 49% des recettes fiscales. Or, la hausse de la TVA sur le carburant, l’électricité et le gaz, de 7% à 17%, va avoir un effet sur les prix et frapper le pouvoir d’achat de la majorité populaire. En outre, la dévaluation du dinar va se répercuter sur les prix des produits importés en masse. Avec un langage «technocratique», Abderrahmane Benkhalfa, ministre des Finances depuis mai 2015, a déclaré «Nous avons une stratégie pour sortir, d’ici deux à trois ans, des subventions généralisées des prix pour aller vers un ciblage des subventions», lors du débat sur le projet de Loi de finances pour 2016 au Conseil de la nation (le système législatif est formellement bicaméral: Conseil de la nation et Assemblée populaire de la nation. Le ministre des Finances est docteur en «Science de gestion» de l’Université de Grenoble et était, avant son poste ministériel, Délégué général de l’ABEF, soit l’Association des banques et des établissements financiers d’Algérie. (Rédaction A l’Encontre)

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