Editorial d’Esquerda Online
Le parti Socialisme et Liberté (PSOL) tiendra son 7e congrès national les 26 et 27 septembre. Des milliers d’affilié·e·s ont déjà participé à la phase municipale et étatique de préparation de cette échéance et des milliers d’autres le feront dans les semaines à venir. On s’attend à ce qu’environ 30 000 affiliés participent au vote sur les thèses en discussion.
L’avenir du PSOL est en question à un moment crucial de l’histoire du pays, où un gouvernement génocidaire aux prétentions putschistes reste au pouvoir. Entre autres choses, les affiliés définiront si le parti se profilera comme un instrument utile pour vaincre Bolsonaro dans les luttes et les élections, en défendant la construction d’un front de gauche. Ou si, au contraire, opte pour une orientation d’isolement, en privilégiant les différences au sein du champ de la gauche, au lieu de favoriser l’unité antifasciste.
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Fondé en 2004, le PSOL a su maintenir levée la bannière et le programme de la gauche socialiste lorsque le PT a choisi de gouverner en s’alliant avec des secteurs de la bourgeoisie et de la droite, abandonnant le projet de transformations structurelles du pays. Correctement, le parti n’est pas entré dans les gouvernements de Lula [2003-2011] et de Dilma Rousseff [janvier 2011 à août 2016], préservant tout au long de cette période une posture cohérente et combative en défense des intérêts des exploité·e·s et des opprimé·e·s.
Lorsque la droite et la bourgeoisie ont décidé de renverser Dilma Rousseff, afin d’appliquer un programme de destruction des acquis sociaux et démocratiques de la classe ouvrière, le PSOL n’a pas faibli et a serré les rangs dans la lutte contre le coup d’Etat parlementaire et le processus réactionnaire déclenché depuis 2015. Le parti a fait face à ce coup d’Etat parlementaire dans la rue et au Congrès, dénonçant ses objectifs néfastes pour le peuple, ainsi que ses instruments autoritaires, tels que le Lava Jato dirigé par l’ancien juge Sergio Moro.
Face au gouvernement de Bolsonaro, sans abandonner le programme anticapitaliste et la défense des intérêts immédiats de la classe ouvrière dans toutes ses expressions – antiraciste, féministe, LGBTQIA+, indigène, syndicale, écologiste, pour le logement, pour la terre à cultiver, parmi tant d’autres –, le PSOL a crû et s’est renforcé. Dans cette bataille contre le néofascisme, le parti a perdu Marielle Franco, exécutée par des miliciens à Rio de Janeiro en 2018.
Ces dernières années, le parti, en plus d’obtenir de nouveaux postes parlementaires, a considérablement augmenté le nombre d’affiliés et de militants. Le PSOL a également connu, à cette époque, un gain politique important avec l’entrée de Guilherme Boulos, l’un des principaux leaders de la gauche brésilienne actuelle, et de nombreux autres militants du MTST (Mouvement des travailleurs sans toit), l’un des mouvements sociaux les plus effectifs et combatifs du pays.
Le PSOL a progressé en participant activement aux principales luttes sociales, comme la bataille contre la contre-réforme du système des retraites et celle du code du travail, à la campagne «Lui jamais» [en septembre 2018, contre la candidature de Bolsonaro], ou lors du second tour des élections présidentielles avec la campagne «change de vote», ou encore face au Tsunami dans l’éducation – ainsi qu’aux mobilisations antiracistes et à la campagne Fora Bolsonaro –, de même qu’en se présentant comme une alternative de gauche aux élections. Le parti, qui regroupe différents courants internes et indépendants, avec des programmes, des politiques et des stratégies qui ne coïncident pas toujours, a des limites et des problèmes qu’il faut surmonter. Mais le bilan politique général, comme on peut le constater, est positif.
La bataille décisive: le front unique de la gauche pour les luttes et les élections
Il est important de souligner que le PSOL n’est pas suffisant. Malgré sa croissance, il reste un parti minoritaire dans la gauche brésilienne et dans la classe ouvrière. Dans ce moment dangereux de l’histoire du Brésil, où un président fasciste déclare ouvertement ses projets de coup d’État, rien n’est plus important que de vaincre Bolsonaro dans les rues et lors des élections. Pour cela, il est essentiel de construire l’unité de la gauche, qui se matérialise par le front des partis (PSOL, PT, PCdoB, PCB, UP, PSTU) et des mouvements sociaux (syndicalistes, noirs, féministes, LGBTQI, sans-toit, sans terre, indigènes, écologistes, étudiants, entre autres).
Ce Front unique de gauche, qui organise la campagne Fora Bolsonaro, a joué un rôle fondamental dans la tenue des quatre dernières grandes manifestations nationales contre le gouvernement génocidaire. Face à l’actuelle campagne «golpiste» de Bolsonaro, il est nécessaire de maintenir et d’avancer dans la bataille dans les rues, en ne permettant pas au bolsonarisme de reprendre sa capacité d’offensive. Le 7 septembre, il est nécessaire de retourner dans les rues avec du poids, démontrant que la majorité du peuple veut la fin de ce gouvernement de la mort et n’accepte pas les menaces de coup d’Etat.
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Cependant, l’unité de la gauche ne peut se limiter à l’organisation de la lutte pour la sortie de Bolsonaro. Il est nécessaire de construire un pouvoir alternatif, qui présente un projet de transformation sociale du pays de et pour les exploité·e·s et les opprimé·e·s. Par conséquent, nous considérons que le PSOL doit défendre l’unité de la gauche et des mouvements sociaux également lors des élections.
Lula, en raison de sa force auprès de la classe ouvrière et les pauvres, est le nom le plus approprié pour être le candidat présidentiel d’un front de gauche. L’ancien président est considéré par la majorité des travailleurs et travailleuses comme l’alternative pour battre Bolsonaro, à tel point qu’il est en tête de tous les sondages électoraux. Nous le reconnaissons et l’apprécions, mais nous ne sommes pas d’accord avec la politique d’alliances du dirigeant du PT, qui vise, une fois de plus, à passer des accords avec des secteurs du centre et de la droite traditionnelle. Nous savons que ces mêmes alliances dans les gouvernements du PT ont bloqué les changements structurels et ouvert les portes au coup d’Etat parlementaire de la droite. N’oubliez pas que Michel Temer [président du 31 août au 31 décembre 2018] était le vice-président de Dilma Rousseff.
En raison de ces facteurs, nous considérons que le PSOL doit approuver dans son Congrès une bataille pour le Front de Gauche pour les luttes et pour les élections, sans alliances avec la droite et sur la base d’un programme visant à renverser l’héritage du coup d’Etat et en défense des transformations sociales et économiques structurelles. Opter pour l’isolement, comme le souhaitent certains secteurs du parti qui défendent que le PSOL se doit de lancer sa propre candidature à la présidence, infligera très probablement un sérieux revers au PSOL. Donner la priorité à la critique du PT maintenant, au lieu de se concentrer sur la lutte unitaire contre le néo-fascisme, signifiera isoler le parti des secteurs les plus conscients de la classe ouvrière et de la jeunesse qui veulent mettre fin au gouvernement Bolsonaro.
Les critiques de la politique d’alliances de Lula et des limites de son programme, peuvent et doivent être faites, mais elles doivent être liées à la lutte sincère et active pour l’unité de la gauche afin de battre Bolsonaro.
En ce moment, le plus grand défi du PSOL est de continuer à être utile dans la lutte contre Bolsonaro dans une conjoncture d’aggravation de la crise politique et sociale. En construisant le Front de gauche, le PSOL élargira son espace de dialogue avec les travailleurs, les travailleuses et les jeunes, notamment pour présenter son programme de transformation socialiste du pays et pour avancer dans la construction du parti lui-même.
Par conséquent, Resistência, courant interne du PSOL, animateur du site Esquerda Online, invite tous les affiliés du parti à signer le manifeste du PSOL Todas as Lutas, à connaître la Thèse du PSOL Semente (https://psolsemente.org) et à échanger avec les militant·e·s de Resistência pour le vote des thèses lors du Congrès.
Rejeter la voie de l’isolement et faire du PSOL un instrument utile pour vaincre Bolsonaro, lutter pour l’unité de la gauche sans renoncer à son indépendance et à son programme, sont le plus grand défi du parti pour son 7e Congrès national. (Article publié sur le site Esquerda Online, le 18 août 2021; traduction du brésilien par la rédaction de A l’Encontre)
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