Fiscalité européenne: les arroseurs arrosés

 

Bernard Arnault
Bernard Arnault

Fiscalité européenne: les arroseurs arrosés

Par Apex

Question: de quand date l’accélération de la concurrence fiscale en Europe qui aujourd’hui déchaîne les polémiques à propos du départ de Bernard Arnault (patron de LVMH) et de Gérard Depardieu, entre autres? Réponse : des années 1980 et 1990… La libre circulation des capitaux, la constitution d’une zone économique unique, l’existence d’une monnaie en partie commune, la facilité donnée à la délocalisation de holding financière… tout cela repose sur des traités et des décisions politiques validés par les parlements nationaux.

 

À commencer par :

1. L’acte unique européen de 1986 qui approfondit largement la libre circulation des capitaux et des marchandises. Il renforce la dimension «zone de libre-échange» de l’Europe.

2. Le traité de Maastricht de novembre 1993 qui finalise la définition juridique de l’Union, ses institutions et ses buts premiers. Il précise aussi les conditions de passage à la monnaie unique (critères de convergence conditionnant pour chaque pays la possibilité d’intégrer la zone euro): entre autres un taux d’inflation n’excédant pas de 1,5 point celui des trois pays ayant la plus faible inflation; un déficit budgétaire inférieur à 3% du PIB ; un endettement public inférieur à 60% du PIB.

Nous voilà donc avec une Union européenne de construction totalement libérale, sans convergence des fiscalités, notamment sur le capital et les taux de TVA. D’où la question: comment se fait-il qu’une institution aussi ambitieuse, capable de cadrer les dépenses publiques nationales et de fixer de manière aussi rigide certains indicateurs «fondamentaux» des pays membres, n’a pas pensé dès le départ à faire converger les fiscalités nationales? Un oubli? Une amnésie arithmétique sur le fait qu’un déficit public résulte de la différence entre dépenses… et recettes

Bien sûr que non.

Le propre du libre-échangisme libéral est justement de mettre en compétition les «charges variables» pesant sur la rentabilité du capital, les droits sociaux et bien sûr la fiscalité. Et c’est bien ce qui fut fait en connaissance de cause!

Et malgré le travail répété de diverses commissions fantômes sur les rapprochements fiscaux, on attend toujours! Comme on dit : «Les promesses n’engagent que ceux qui y croient». Dans le même registre, rappelons-nous des très nombreuses promesses, dès les années 1980, d’une Charte sociale tirant les droits sociaux vers le haut. Or, le droit social a largement régressé depuis!

C’était donc bien dans les années 1980 et les années 1990. L’histoire revient comme un boomerang à la tête de ceux qui l’ont faite. Et de «découvrir» que les décisions auxquelles ils ont largement contribué, contre toute critique, facilitent la fuite fiscale. Depardieu pas bien? Evidemment! Mais pourquoi s’en offusquer quand on a soi-même largement participé à cette construction politique qui depuis des années permet aux multinationales de priver les recettes publiques de centaines de milliards d’euros à l’échelle de l’Union et favorise les délocalisations? Pourquoi aujourd’hui froncent-ils les sourcils au JT de 20 heures, après avoir accepté dans les années 1980 et 1990 une Europe qui permet les holdings « boîtes aux lettres » au Luxembourg ou aux Pays-Bas? Un peu de mémoire, bon sang ! (janvier 2013)

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