Chili: la levée de l’état d’urgence

Par Justine Fontaine

Depuis minuit heure locale (3h TU), les militaires et les tanks, que les Chiliens pouvaient encore voir dans les rues ces derniers jours, sont de retour dans les casernes. Le maintien de l’ordre est de nouveau confié à la police, notamment les carabineros chiliens, sous la direction du ministère de l’Intérieur.

La levée de l’état d’urgence est un soulagement pour de nombreux Chiliens, chez qui cette mesure a ravivé les douloureux souvenirs de la dictature du général Pinochet, qui était à la tête du pays jusqu’en 1990.

La fin de l’état d’urgence intervient aussi à quelques heures de l’arrivée au Chili d’une délégation du Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU (HCDH), pour examiner les accusations de violations des droits humains dans le pays.

En l’espace d’une dizaine de jours, plus de 3000 personnes ont été arrêtées, certaines disent avoir été torturées par la police et près de 1000 ont été blessées, notamment par des armes à feu. D’après la justice chilienne, quatre personnes au moins auraient été tuées par des militaires. Plusieurs personnes assurent avoir été torturées par la police. Des violences d’une ampleur jamais vue de la part des forces de l’ordre depuis la fin de la dictature en 1990 (lire ci-dessous).

En réaction à cela, des députés de l’opposition ont annoncé qu’ils lanceraient une procédure de destitution contre le président, mais ils ont très peu de chance d’obtenir le nombre de voix suffisant pour faire chuter Sebastian Pinera.

Tortures et balles dans le corps

Depuis le début des manifestations, l’Institut chilien des droits de l’homme, un organisme public indépendant, a recensé plus de 3000 personnes arrêtées, et présenté plus de 80 plaintes pour atteintes aux droits de l’homme, notamment des accusations de torture et de violences sexuelles.

L’un de ces cas, c’est celui de Josué Maureira, un étudiant en médecine. Il a témoigné sur la chaîne publique TVN: «En présence de dix policiers, on m’a frappé la tête et obligé à crier, en disant: “Assume!”. Ils m’ont frappé encore et encore, jusqu’à ce que je crie: “Oui, je suis pédé”. Ils m’ont obligé à crier cela. Ensuite deux policiers m’ont déshabillé et m’ont agressé sexuellement.»

Plus de 1000 personnes ont également été blessées pendant les manifestations. C’est ce qu’a constaté le principal syndicat chilien de médecins, dont Enrique Morales est l’un des dirigeants: «Les tirs sont réalisés de manière indiscriminée. On a vu des gens qui ont reçu des petites balles en métal entouré de plastique, à quatre ou cinq endroits différents de leur corps, sur le visage, dans les yeux.»

Le syndicat des médecins affirme qu’au moins pendant les premiers jours des manifestations, le gouvernement a beaucoup tardé à informer précisément sur le nombre de détenus, de blessés et concernant les personnes décédées. (RFI, 28 octobre 2019)

Soyez le premier à commenter

Laisser un commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée.


*