Par Kaamil Ahmed
Les communications ont été coupées à Gaza vendredi, mais les quelques voix qui ont émergé ont décrit une nuit d’intenses frappes aériennes et de panique au sein d’une population craignant que la coupure ne marque une nouvelle étape dans la violence.
Depuis le début de la guerre, certains habitants de Gaza utilisent la plateforme de médias sociaux Snapchat pour publier des images de leur vie, avec des vidéos montrant des personnes dans de longues files d’attente devant des boulangeries ou pour obtenir de l’eau, ou rassemblées en foule devant des hôpitaux et des écoles.
Depuis vendredi soir, très peu de contenus ont été téléchargés sur la plateforme; les quelques personnes qui l’utilisaient encore n’y avaient accès que par l’intermédiaire de cartes SIM d’autres pays.
Almaza Owda, une avocate postant sur Snapchat depuis le sud de Gaza, a écrit une série de messages pendant la nuit: «Il n’y a pas d’internet pour tout Gaza, pas de couverture téléphonique, pas de messages. Ils nous ont coupés de tout.»
«Gaza est dans une situation très, très, très dangereuse. C’est très dangereux. Nous mourons dans les rues.»
«Les frappes aériennes sont violentes et intenses. C’est la première fois que c’est comme ça. Nous sommes dans la rue et personne ne peut contacter les services d’urgence. Il y a des cadavres dans la rue.»
Ses messages, qui ressemblent parfois à des prières, sont accompagnés de photos granuleuses du ciel nocturne et d’un environnement à peine visible. «Oh Seigneur, où allons-nous, oh Seigneur», écrit-elle. «Tout le monde est dans la rue et ne sait pas où aller ni ce qui va se passer.»
Affichant une photo de la lune à travers les nuages, elle a écrit: «Est-il logique que la lumière de la lune soit la dernière lumière que je verrai dans ma vie? Cela a-t-il un sens que je sois sur le point de mourir et que j’aie soif?»
Dans la matinée, elle a posté des photos de personnes réfugiées dans une école de l’ONU, cuisinant sur des réchauds à gaz à même le sol dans des espaces de vie extérieurs séparés par des couvertures suspendues, en disant: «Nous sommes revenus 100 ans en arrière.»
Une internaute nommée Norma a écrit dans la nuit: «Pas d’eau, pas d’électricité, pas de lumière, pas d’appels et pas d’Internet. Malheureusement, ils ont tout coupé et aucun endroit n’est sûr.»
Dans la matinée, elle a posté un message alors qu’elle parcourait les rues désertes de la ville de Gaza, montrant les décombres des bâtiments bombardés, y compris la tour où se trouvait son bureau. Elle a sangloté en marchant dans les vestiges d’une clinique dentaire.
Certains correspondants de médias internationaux ont également pu continuer à émettre. Ali Jadallah, photographe pour l’agence Anadolu basée en Turquie, qui a perdu plusieurs membres de sa famille lors d’une frappe aérienne plus tôt dans le conflit, a posté des photos et des vidéos de fortes explosions. Il a écrit: «Nous sommes déconnectés de l’internet et des appels. Il y a un black-out complet. Les explosions ne s’arrêtent pas.»
Samedi matin, Rushdi Abualouf, de la BBC, a réussi à joindre le diffuseur et a indiqué qu’Israël avait coupé les câbles de fibre optique et mis hors ligne deux fournisseurs de services de téléphonie mobile. Il a décrit «un état de panique, de peur et de chaos».
«J’ai traversé la ville de Khan Younès ce matin. Il y a moins de monde mais plus de panique. Les gens ne savent pas quoi faire. Ils ne peuvent pas communiquer avec leurs amis, leurs familles… Les gens sont extrêmement inquiets de ce qui va se passer ensuite et si les chars israéliens vont commencer à avancer dans certaines parties de la bande de Gaza.»
Al Jazeera a déclaré que ses correspondants avaient été en mesure de fournir des mises à jour sporadiques grâce à la communication par satellite.
Hani Mahmoud, de la chaîne, qui se trouvait à Khan Younès, a déclaré: «Le personnel médical et de la protection civile a déclaré qu’il ne pouvait pas se rendre dans les zones ciblées en raison de l’absence de communication.
«L’ensemble du système de communication de la bande de Gaza a été détruit, ce qui ne permet que des spéculations sur l’ampleur des dégâts.» (Article publié par The Observer, le 28 octobre 2023; traduction rédaction A l’Encontre)
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