Russie. «Marina Ovsyannikova affirme qu’elle assume ses actes»: son irruption lors du JT de la TV “Pervy Kanal”

Par Pjotr Sauer

La productrice de télévision russe, actrice d’un acte anti-guerre extra-ordinaire en direct à la télévision nationale (Pervy Kanal: Première Chaîne) a déclaré avoir «peur pour ma sécurité», mais qu’elle ne «retirerait pas un seul mot» de sa déclaration critiquant les actions de la Russie en Ukraine.

«Je ne regrette pas du tout ce que j’ai fait», a déclaré Marina Ovsyannikova au Guardian dans un entretien téléphonique mercredi 16 mars. «Je ne retirerai pas un seul mot. Ce sont mes opinions.»

Marina Ovsyannikova, qui était productrice principale auprès de la chaîne publique russe Pervy Kanal a manifesté à l’antenne lundi soir 14 mars en brandissant une pancarte sur laquelle on pouvait lire: «Ne croyez pas la propagande. Ici, ils vous mentent» [voir l’article sur ce site publié le 15 mars: http://alencontre.org/europe/russie/russie-ne-croyez-pas-la-propagande-ici-ils-vous-mentent-le-vrai-courage.html].

Elle a également diffusé une vidéo préenregistrée dans laquelle elle exprime sa «honte» de travailler pour Pervy Kanal et de diffuser la «propagande du Kremlin».

Marina Ovsyannikova a déclaré au Guardian que sa colère à l’égard de la direction politique de la Russie n’a cessé de croître au cours des «dernières années».

«D’abord, ils ont annulé les élections des gouverneurs, puis ils ont commencé à interdire les médias indépendants, puis ils ont empoisonné [un dirigeant de l’opposition Alexei] Navalny. Ma colère n’a cessé de croître. Je vivais une dissonance cognitive, le pays n’allait pas dans la bonne direction. La guerre a été la dernière goutte et j’ai décidé d’agir», a-t-elle déclaré.

Dans une autre interview accordée à Reuters, elle a ajouté: «Je crois en ce que j’ai fait, mais je comprends maintenant l’ampleur des problèmes auxquels je vais devoir faire face et, bien sûr, je suis extrêmement inquiète pour ma sécurité.»

Elle a affirmé à Reuters que ses actions avaient pour but d’envoyer un message direct au public russe: «Ne soyez pas tels des zombies, n’écoutez pas cette propagande. Apprenez à analyser l’information, apprenez à trouver d’autres sources d’information, pas seulement la télévision d’Etat russe.»

Mardi 15 mars, un tribunal russe a condamné Marina Ovsyannikova à une amende de 30 000 roubles (250 euros) pour avoir enregistré une vidéo dans laquelle elle violait les lois sur les manifestations. La décision a été accueillie avec soulagement par ses amis et ses supporters qui craignaient que les autorités ne préparent de graves accusations criminelles après qu’elle a disparu après son arrestation, lors de sa garde à vue, pendant près de 24 heures. Elle n’a pas encore été poursuivie pour sa manifestation en direct sur Pervy Kanal.

Marina Ovsyannikova a déclaré qu’elle avait réussi à se reposer ce matin 16 mars et qu’elle allait rencontrer ses avocats. «Bien sûr, la situation est très tendue. Tout se déroule encore sous nos yeux. Je suis inquiète», a-t-elle dit

The Guardian avait précédemment appris que Marina Ovsyannikova avait exposé, la veille, son plan d’action à un ami, car elle était de plus en plus en colère contre l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Elle a également dit à une amie qu’elle était pleinement consciente des conséquences que ses actions auraient sur elle et sa famille.

Depuis le début de la guerre, la Russie a lancé une répression sans précédent contre les manifestant·e·s, les organes de presse indépendants et les réseaux étrangers de médias sociaux. Au début du mois, le Parlement russe a adopté une loi prévoyant une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à 15 ans pour la diffusion de «fausses» informations intentionnelles sur l’armée. Mercredi 16 mars, le comité d’enquête du pays a déclaré qu’il avait lancé trois plaintes pénales contre des personnes pour avoir diffusé sur Instagram et d’autres médias sociaux ce qu’il a appelé des «fausses nouvelles» concernant l’armée russe. (Article publié par The Guardian, le 16 mars 2022, à 13h17 GMT; traduction par la rédaction A l’Encontre)

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