Etat espagnol-Catalogne. Des signes clairs de recul et de désorientation

Le seul conseiller territorial dans son bureau:
Josep Rull i Andreu

Par Marti Caussa

Vendredi 27, le Parlement a proclamé la République catalane et le Sénat a activé l’article 155 de la Constitution [1] qui a suspendu l’autonomie de la Catalogne. Si le Govern (catalan) prétendait défendre la République, il devait démontrer qu’il voulait effectivement gouverner (par exemple, initier le processus constitutif) et appeler à la mobilisation populaire. Mais il n’a fait ni l’un ni l’autre. Ceux qui l’ont fait furent le gouvernement Rajoy (destituer le président, le gouvernement et convoquer des élections le 21 décembre 2017) et les partisans de l’article 155, qui ont organisé une grande manifestation à Barcelone le dimanche 29 octobre [350’000 selon la police urbaine].

Pour savoir où nous sommes, il est bon d’examiner les faits que nous connaissons déjà:

1.- Le même vendredi 27 octobre, le directeur général des Mossos [police catalane], Pere Soler, a accepté son licenciement [il avait été installé en juillet 2017]. Peu de temps après, le major (commissaire principal, le grade le plus élevé) Josep Lluís Trapero a fait de même

2.- Samedi, selon le quotidien La Vanguardia, des représentants du PDeCAT (Parti démocrate européen catalan), de l’ERC (Gauche républicaine de Catalogne), de l’ANC (Assemblée nationale catalne) et de l’Òmnium se sont rencontrés discrètement dans l’Empordà [région catalane historique comprise entre le massif des Albères et les Gavarres] mais aucune initiative n’est ressortie de la réunion.

3.- Le dimanche, il semblait que tout le monde faisait la fête.

4.- Aujourd’hui, lundi 30 octobre, était le jour clé pour connaître quelle serait orientation du Govern et du Parlement. La nouvelle est décevante: les conseillers, à l’exception de Josep Rull i Andreau, ne sont pas rendus dans leurs bureaux; le représentant de la Generalitat dans l’Union européenne [Amadeu Altafaj] a accepté son licenciement; la présidente du Parlement Carme Forcadell a accepté que le Parlement soit dissous et a suspendu la députation permanente jusqu’aux élections du 21 décembre; Carles Puigdemont et quelques conseillers sont à Bruxelles, il y a des rumeurs selon lesquelles ils vont demander l’asile politique et un tweet de Lluís Llach le prend pour acquis.
5.- Ni le Govern ni le Parlament n’ont fait appel à la mobilisation, l’arme la plus puissante qu’ils détiennent pour défendre la République et de faire front aux dispositions de l’article 155. Et tous les partis souverainistes semblent avoir comme priorité la discussion sur ce qu’il faut faire en vue des élections de décembre.

Toutes ces données semblent des signes évidents de recul et de désorientation. Mais demain, le 31 octobre, Puigdemont a annoncé une prise de parole publique et nous devons nous attendre ce qu’il va dire afin d’avoir une idée plus précise de la situation.

S’il est confirmé que nous n’avons plus de Parlament ni de Govern dans le pays, il sera très difficile de défendre la République catalane. Toutefois je pense que le mouvement sera assez fort pour repousser l’intervention et la recentralisation qu’incarne le 155, même dans ces conditions. Et au cours du combat, on verra qui mérite d’être nos représentant·e·s et qui ne le mérite pas. (Article publié par Viento Sur le 30 octobre 2017; traduction A l’Encontre)

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[1] Voir sur l’utilisation de l’article 155 par M Rajoy l’article de la juriste Maria E. Rodriguez Palop publié sur ce site en date du 28 octobre 2017 et intitulé «Dix raisons constitutionnelles pour faire face à l’article 155 à la sauce Rajoy».

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