Le couvert végétal à haute altitude de l’Himalaya est en train de se densifier. C’est le résultat d’un article de recherche [Global Change Biology. «Vegetation expansion in the subnival Hibdu Kush Himlalaya» par Karen Anderson et alii, 9 janvier 2020] qui s’est penché sur une zone peu étudiée, celle située entre la ligne des arbres et les neiges éternelles. L’impact de ce couvert végétal en développement sur les ressources en eau qui abreuvent un cinquième de la population mondiale reste à éclaircir.
On sait que les glaciers reculent et que les arbres gagnent en altitude en raison du changement climatique, mais que se passe-t-il entre les deux? Pour le savoir, une équipe a recueilli les données satellitaires de 1993 à 2018 pour analyser la densité du couvert végétal entre 4150 et 6000 mètres dans toute la chaîne himalayenne. Pour résumer un peu abruptement la chose, ils ont compté le nombre de pixels verts sur vingt-cinq ans d’images satellites. Une tâche titanesque rendue possible grâce au moteur de Google Earth, si vous voulez tout savoir. La précision de cette méthode a pu être corroborée en partie grâce aux multiples photos de randonnée dans ce massif.
Résultat? «Même aux plus hautes altitudes (de 5500 à 6000), nous avons plus de preuves de la présence de végétaux aujourd’hui qu’il y a vingt-cinq ans», explique Karen Anderson, chercheuse à l’Université d’Exeter et auteure principale de l’étude. Bien évidemment, la nature du sol, la température et l’inclinaison de la pente sont autant de facteurs qui jouent aussi sur la densité du couvert végétal. Mais sur la globalité de la chaîne montagneuse, la végétation est plus présente sous les glaciers.
L’Himalaya est le château d’eau d’un cinquième de l’humanité
Ce résultat posé, il faut maintenant se demander l’impact de cette végétation sur les neiges himalayennes. «Cela va dépendre du type de plante. Certaines tendent à réchauffer le sol et donc à faire fondre la neige plus vite. D’autres au contraire vont freiner la fonte, il faut des données plus précises», poursuit-elle.
L’impact de l’espace entre la ligne des arbres et les neiges éternelles sur le cycle de l’eau n’est pas connu, mais la chercheuse pense qu’il est important. «Cette zone est cinq à quinze fois plus étendue que celle constamment sous la glace», précise-t-elle.
L’Himalaya est le château d’eau d’un cinquième de l’humanité. Tout le système hydrologique qui en dépend est l’un des plus sensibles au changement climatique, selon une étude parue dans Nature en décembre dernier.
«Je prévois de soumettre un projet afin d’obtenir les financements nécessaires à l’étude des relations entre l’expansion des plantes présentes au-dessus de la ligne des arbres et l’hydrologie en aval», confie Karen Anderson. Espérons que les taux de financement des appels à projets au Royaume-Uni sont plus élevés qu’en France. (Article paru dans le quotidien Libération en date du 7 février 2020)
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