Etats-Unis. Une conseillère de Joe Biden qui en dit long sur le candidat démocrate

Par Murtaza Hussain

En campagne pour les élections de 2020, l’ancien vice-président Joe Biden est en train de mettre sur pied une équipe de politique étrangère pour son éventuelle future administration. Parmi les personnes présentées comme membres de cette équipe figure Avril Haines, ex-directrice adjointe de la CIA sous l’administration Obama. Selon une information qu’a rapportée la semaine dernière NBC News, Haines a été sélectionnée comme conseillère politique et cheffe de l’équipe de sécurité nationale et de politique étrangère.

Outre ses activités antérieures dans le domaine de la sécurité nationale et son influence considérable parmi les think tanks de Washington, Avril Haines s’était présentée comme consultante de Palantir, firme controversée d’exploitation de données. La notice biographique de Haines au Brookings Institute la décrivait comme collaboratrice scientifique non-résidente et au moins jusqu’à la semaine dernière indiquait son appartenance à Palantir, cette référence a ensuite soudainement disparu.

Mais en quoi consistait l’activité d’Avril Haines auprès de Palantir? Cela n’est pas clair. Pas plus l’équipe de campagne de Biden que Palantir et Brookings n’ont répondu aux questions qu’a posées la presse à ce sujet. Avant d’être supprimée de sa notice biographique auprès de Brookings, son appartenance à cette société d’exploitation de données était citée avec une longue liste d’autres liens, elle aussi considérablement réduite.

Cette information – et sa visible disparition – soulève de nombreuses questions à propos d’une campagne qui se présente comme l’antithèse de la gouvernance très droitière de Donald Trump. Cofondée par un milliardaire d’extrême droite familier du milieu de la high-tech et soutien de Trump, Palantir a bénéficié de nombreux contrats avec le gouvernement. L’entreprise a été accusée d’avoir aidé l’administration Trump à réaliser ses programmes de détention de migrantes et de migrants et à imposer un Etat sécuritaire aux Etats-Unis.

«Les systèmes de technologie de l’information développés par Palantir ont donné à l’administration Trump la possibilité de procéder à des expulsions massives qui ont disloqué et terrorisé nos communautés de migrants», a déclaré Yasmine Taeb, conseillère politique principale chez Demand Progress, qui rassemble les soutiens en faveur d’un large spectre de causes allant de la défense des droits humains à la lutte pour la transparence dans la vie publique.

La notice biographique de Haines sur le site de Brookings avait été enregistrée le 9 mai par la «Wayback Machine», l’archive des sites Web. Alors, la page comportait encore l’appartenance d’Avril Haines à Palantir. Une impression du cache Google de la page donnait encore cette information le 20 juin – le jour où l’équipe de campagne de Biden annonçait avoir recruté Haines comme conseillère. Mais le 25 juin, elle avait disparu de la mémoire du serveur de Google. La date exacte de la disparition du fichier n’est pas connue.

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Dans le passé de cette entreprise, les liens entre Palantir et l’administration Trump ne sont pas le seul problème. Palantir a également été accusée d’avoir intimidé des journalistes impliqués dans la diffusion de documents qu’avaient révélés WikiLeaks. Et Palantir a également fourni des services à la police – une autre activité qui semble mettre l’entreprise en porte-à-faux par rapport au contexte politique actuel. La société a également aidé l’Agence de sécurité nationale (National Security Agency, NSA) en créant les outils nécessaires pour faciliter l’espionnage à l’échelle mondiale.

Le cofondateur de la société, Peter Thiel, est un financier libertarien milliardaire, étroitement lié au Parti républicain. Parmi les personnalités de premier plan de la Silicon Valley il est l’un des rares à avoir soutenu la candidature de Trump en 2016. Cette année-là, Peter Thiel avait pris la parole à la Convention nationale républicaine. Il est devenu un généreux contributeur de diverses causes réactionnaires un peu partout aux Etats-Unis.

En 2020, le Daily Beast a toutefois rapporté que Thiel s’était plaint en privé de la gestion par Trump de la crise du coronavirus, et qu’il n’avait encore apporté aucun soutien public ou financier à la réélection du président. A ce jour, les dons politiques de Thiel se sont limités à soutenir Kris Kobach, un politicien du Kansas candidat au Sénat, allié de Trump et partisan d’une ligne dure sur l’immigration.

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Ces derniers mois, la campagne Biden semble avoir profité de l’effondrement de la popularité nationale de Trump. Dans le pays tout entier, et y compris dans les États clés pour l’affrontement à venir, des sondages témoignent de l’impressionnante progression de Biden au détriment du président en titre. A l’heure où la campagne de Biden décolle, la composition de son équipe et les affiliations de ses membres nous apprennent comment il gouvernera une fois au pouvoir. (Article publié par The Intercept en date du 27 juin 2020; traduction rédaction A l’Encontre)

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