Venezuela. «Quand l’eau manque à Caracas, suite à l’intermittence de l’électricité»

(Droits: Frederico Parra/AFP)

Par Benjamin Delille

Les coupures de courant continuent un peu partout dans le pays. À tel point que Nicolas Maduro a engagé un plan de 30 jours de rationnement de l’électricité. [Le 1er avril Nicolás Maduro a déclaré: «J’ai décidé de nommer un travailleur de l’industrie électrique avec 25 ans d’expérience, un ingénieur qui a eu de nombreuses responsabilités: Igor Gavidia Leon». Maduro a annoncé sur les médias officiels qu’il limogeait tout de suite le général à la retraite Luis Motta Dominguez, en poste depuis août 2015. Ces déclarations, les travaux élémentaires entrepris (débroussaillages, contrôles, etc.), le changement de ministre dans la tradition d’écarter «le responsable» rendent les déclaration sur la «cyberguerre impérialiste» contre le système électrique et la distribution d’électricité comme relevant d’une propagande à la hauteur de la combinaison corruption et incompétence qui structure le pouvoir de Maduro et de Cabelle. Réd.]

Les Vénézuéliens vont devoir vivre un mois avec du courant par intermittence. Et sans courant, les pénuries se multiplient. En particulier les pénuries d’eau courante, les pompes n’étant plus alimentées suffisamment longtemps pour être relancées. Les réserves se vident et les Vénézuéliens cherchent à s’approvisionner par tous les moyens. À Caracas, ils prennent d’assaut la seule source d’eau potable naturelle : la montagne Avila qui surplombe la ville.

Après trois heures d’attente, José Antonio peut enfin placer son bidon sous le mince filet d’eau qui coule d’un tuyau qui sort de la montagne Avila. «Je viens deux fois par semaine avec quatre bidons de 15 litres», explique-t-il.

Il habite un quartier populaire à une dizaine de kilomètres de là où l’eau manque depuis la première grande coupure d’électricité le 7 mars dernier. «Je n’ai pas d’eau pour cuisiner, pas d’eau pour me laver, je ne peux plus rien faire, rien. Tout fout le camp.»

Derrière lui, l’autoroute qui borde l’Avila est bloquée par des milliers de voitures qui attendent leur tour. Selon Soraya, les différentes sources de la montagne sont les dernières qui fournissent de l’eau non contaminée à Caracas. «L’eau de l’Avila est la plus pure qui soit. Elle est cristalline, elle vient d’en haut, elle est potable. Bref, c’est une eau adaptée à la consommation humaine.»

Non loin d’elle, Angélique s’indigne d’en être réduite à sacrifier la journée de ses trois filles pour l’aider à porter les bidons. «Vous trouvez ça normal que ces enfants qui n’ont même pas 15 ans passent leur journée à chercher de l’eau plutôt que d’être chez eux devant la télé, en train de faire du sport ou n’importe quelle activité extrascolaire? Ce qu’on vit est injuste

Et rien ne laisse présager une amélioration [d’autant plus après la déclaration de Maduro que le rationnement d’électricité durera au moins 30 jours, avec la réduction du temps de fonctionnement des entreprises d’une durée minimale de deux heures et une suspension des cours dans les écoles]. Alors que José Antonio retire enfin son bidon, le feu de signalisation à quelques mètres s’éteint dans une énième coupure. (RFI, 2 avril 2019)

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[1] Le 31 mars 2019, Luis Makensie, ingénieur à la retraite de la société nationale d’électricité (Corpoelec) a décrit les difficultés spécifiques (chaleur, sécheresse) qui expliquent le black-out du 7 mars, qui a eu lieu et qui s’est développé suite à un manque massifs d’investissements et de respect des normes d’entretien. Puis, il a mis en lumière les raisons de «l’incapacité de rétablir le service normal qui est en grande partie attribuable à une mauvaise planification. C’est pourquoi les temps de récupération du système varient après chaque panne. “Ils ne suivent aucun protocole, chaque échec donne lieu à un nouvel essai pour voir quels seront les résultats”. Le black-out du dimanche 31 mars ne correspond pas aux caractéristiques des incidents précédents, mais Luis Makencie affirme qu’«ils sont sans doute liés». Il pense que tôt ou tard, ils publieront des photos montrant du matériel brûlé [qui n’est point lié à du «terrorisme». Mais à un manque complet de maintenance]. Enfin, il prévient qu’il faudra des années pour stabiliser complètement le système à son niveau de fonctionnement idéal. En plus de “de la remise en marche, de l’investissement d’urgence, de la nécessité d’un personnel formé, la population réagit surtout ainsi: “qu’ils sortent du pouvoir ces voleurs qui ne manifestent aucune honte”». (Source: presse locale et site Tal Cual du 31 mars 2019 – Réd. A l’Encontre)

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