Par BBC
Des groupes de travailleurs et d’étudiants en Biélorussie ont entendu l’appel à la grève nationale lancé par Svetlana Tikhanovskaïa, leader de l’opposition en exil, pour demander la démission du président.
Des travailleurs de certaines usines gérées par l’État ont lâché leurs outils et scandé des slogans devant les portes.
Des centaines d’étudiants sont également sortis de plusieurs universités de Minsk en applaudissant, en scandant et faisant des chaînes humaines.
Cependant, le gouvernement affirme que les principales entreprises continuent de fonctionner sans problème. [Les analyses de divers médias spécialisés soulignent le changement d’attitude d’un partie d’un secteur pour qui la «stabilité» assure les revenus: les retraité·e·s.]
Le président Alexandre Loukachenko a ignoré le délai de minuit fixé par l’opposition pour qu’il se retire. Les manifestations de protestation ont envahi la Biélorussie depuis qu’Alexandre Loukachenko a revendiqué la victoire lors des élections d’août [le 9 août] largement considérées comme truquées.
Le ministère de l’Intérieur affirme que la police a arrêté 523 personnes lors de manifestations anti-gouvernementales de masse dimanche 25 octobre, dont 352 sont toujours en détention.
Lundi, au moins 155 personnes ont été arrêtées pour avoir soutenu les actions de grève à Minsk, Borisov, Brest, Grodno, Mogilev et Novopolotsk, rapporte le groupe de défense des droits de l’homme Vesna.
L’ampleur des manifestations de lundi 26 octobre n’est pas encore connue, en partie à cause des restrictions imposées par les autorités aux médias. Les vidéos postées sur le site médiatique indépendant Tut.by montrent des usines vides et des étudiants sortant de leurs universités.
Une source à Minsk après les manifestations a déclaré à la BBC que la grève touchait certaines grandes entreprises d’État, notamment l’usine chimique de Grodno Azot et l’usine de tracteurs de Minsk, mais qu’elles n’avaient pas été arrêtées.
Des dizaines de magasins, cafés et restaurants sont fermés en Biélorussie, en solidarité avec la grève. De nombreuses autres petites entreprises soutiennent également la grève, selon notre source. Mais les grands supermarchés et les transports publics continuent de fonctionner normalement.
Des milliers de retraité·e·s ont traversé le centre de Minsk, pour finalement se fondre dans un cortège d’étudiant·e·s. Les retraités ont organisé des rassemblements de protestation chaque lundi. Les étudiants ont également été très actifs, malgré les menaces d’expulsion des universités.
Auparavant, on estimait à 100 000 le nombre de manifestants qui ont défilé pour le 11e dimanche consécutif de protestation. Beaucoup ont agité les drapeaux rouge et blanc de l’opposition et ont scandé des slogans de «grève» pendant leur marche.
Selon les agences de presse russes, citant leurs correspondants sur place, au moins 10 grenades assourdissantes ont été tirées. Des rapports ont également fait état de balles en caoutchouc tirées par la police antiémeute. Les forces de sécurité ont également bloqué les routes dans le centre de Minsk et des canons à eau ont été mis en place.
Svetlana Tikhanovskaïa a lancé son ultimatum le 13 octobre. Elle lançait la menace d’une grève des travailleurs si Loukachenko – qui dirige la Biélorussie depuis 26 ans – ignorait leurs demandes. Elle a déclaré que la Biélorussie en avait «assez» après deux mois de «crise politique, de violence et d’anarchie». Elle a émis trois revendications depuis un lieu en Lituanie, où elle est en exil depuis le mois d’août. Outre la démission d’Alexandre Loukachenko, elle a exigé l’arrêt immédiat des brutalités policières et la libération de tous les prisonniers politiques.
Antérieurement, les manifestations anti-Loukachenko dans les entreprises d’État, en soutien à l’opposition, n’ont pas été maintenues la plupart du temps. On rapporte que des travailleurs ont été avertis qu’ils perdraient leur emploi s’ils faisaient grève [voir sur ce site les appels à la défense des syndicalistes arrêtés].
Selon une source de la BBC à Minsk, la peur est généralisée, après que de nombreux manifestants ont été battus et torturés par la police. Il est courant que des hommes masqués munis de bâtons s’emparent des manifestants, les traînent dans des fourgons banalisés et s’en aillent. (Article publié sur le site de la BBC, le 26 octobre 2020; traduction rédaction A l’Encontre)
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