Un cessez-le-feu qui confirme le statut d’occupation de fait de Gaza!

diario fotográfico ‘desde Palestina’, photographer, CC BY-SA 3.0 <https://creativecommons.org/licenses/by-sa/3.0>, via Wikimedia Commons

Par Larry Derfner

Un des aspects positifs du cessez-le-feu entre Israël et Gaza est qu’il met en évidence une vérité qu’Israël et ses porte-parole avaient réussi à dissimuler assez efficacement, à savoir que Gaza et ses 1,7 million d’habitants ne sont toujours pas libres, et que cela est dû au fait qu’Israël ne le permet pas.

Depuis le «désengagement» de la bande de Gaza en 2005, Israël a répété sans cesse «qu’il n’y avait pas d’occupation de Gaza», et que si le Hamas et d’autres groupes armés tirent des roquettes ce n’est pas parce qu’ils ont des griefs, car ils n’en ont aucun, mais parce qu’ils ont un désir satanique de tuer des juifs.

Mais mercredi soir, 21 novembre 2012, Netanyahou, Barak et Lieberman [ministre des Affaires étrangères] ont effectivement admis que cela n’a jamais été vrai. Ils ont négocié une atténuation des restrictions imposées sur la liberté de mouvement des Gazaouis, non seulement pour entrer et sortir de la Bande mais aussi à l’intérieur de ce territoire. C’est là un élément crucial du cessez-le-feu qui a été transmis et discuté sur les chaînes de télévision israéliennes et dans les médias partout dans le monde. Après cet accord très ostensible, il sera plus difficile aux propagandistes d’Israël de prétendre qu’il n’y a pas d’occupation (même si je suis certain qu’ils essaieront).

Voici comment fonctionne l’occupation de Gaza: les Gazaouis ne peuvent ni entrer ni sortir de la Bande, ni par bateau ni par avion parce qu’Israël contrôle et bloque l’accès par la mer de même que leur espace aérien. Sur le sol, Israël laisse des camions, en nombre limité, apporter des biens, franchir la frontière entre Israël et Gaza, mais ne permet pas aux gens de traverser la frontière sauf dans des cas humanitaires extrêmes, coupant ainsi les Palestiniens de Gaza de ceux de Cisjordanie.

Enfin, Israël a établi une «zone de sécurité» sur le côté gazaoui de la frontière; et les Gazaouis ne peuvent y pénétrer qu’à leurs risques et périls. Selon Israël, cette zone s’étend de 300 à 500 mètres à l’intérieur de la Bande. Selon la Croix-Rouge, cette zone s’étend sur un kilomètre entier et selon le Bureau pour la Coordination des Affaires humanitaires (OCHA), la zone s’étend sur 1,5 km à l’intérieur de la frontière, transformant 1/6e du territoire gazaoui, dont 1/3 de terres agricoles, en une zone militaire fermée. (Selon les défenseurs de cette politique, l’objectif de cette zone est d’arrêter le terrorisme – c’est ce que tous les dirigeants étrangers ont toujours prétendu après leur invasion pour justifier leur mainmise sur une nation plus faible et son territoire.)

L’occupation durable de Gaza fait que des paysans et des récupérateurs de métal palestiniens de tous âges se font tuer dans la zone de sécurité et que le terrain agricole et les bâtiments dans cette zone sont constamment détruits. Des pêcheurs palestiniens sont visés par des tirs de la marine israélienne chaque fois qu’ils franchissent (ou parfois même qu’ils approchent) la limite de trois miles nautiques qu’Israël a imposée de manière arbitraire, ce qui a paralysé l’industrie de la pêche gazaouie. Quelque 90 à 95% des réserves en eau de Gaza sont contaminées, obligeant les gens à acheter de l’eau en bouteilles parce que le blocus empêche ou retarde sévèrement l’arrivée des équipements pour les systèmes de désalinisation; la mer à Gaza est polluée par les rejets des égouts parce que le blocus empêche ou retarde sévèrement l’arrivée des équipements pour le traitement des eaux usées…

Et je pourrais continuer ainsi pendant des jours; on peut lire le rapport annuel de l’OCHA, qui donne une image détaillée de la tyrannie que continue à exercer Israël sur la population gazaouie, même après avoir retiré ses soldats et colons de l’intérieur de la Bande.

Lors des négociations en vue de l’accord de cessez-le-feu, le Hamas a d’abord demandé une levée du blocus maritime, mas Israël a refusé d’entrer en matière sur cette question (d’après le quotidien Haaretz, Barak était d’accord de négocier sur cette question, mais il a été minorisé par Netanyahou et Lieberman qui ont rejeté cette demande). Je n’ai rien vu sur une demande du Hamas pour faire cesser le blocus aérien, sans doute parce que comme il n’y a pas d’avions à Gaza actuellement une telle demande serait sans objet.

Mais d’après le quotidien Yedioth Aharonoth et d’autres médias, Israël a accepté que: «le blocus terrestre serait réduit à un minimum, que le Hamas aurait droit à un assouplissement d’une série de mesures sur le plan économique et que les restrictions seraient levées de manière substantielle aux passages des frontières avec Israël».

Israël a également accepté de négocier la zone d’interdiction à l’intérieur de la frontière de Gaza. Enfin, selon Haaretz, il s’est «engagé à ne pas lancer des attaques contre Gaza – par terre, par mer ou par air… et de ne pas envahir des zones tenues par les Palestiniens».

On pourrait penser que cela protégerait les pêcheurs des tirs de la marine et tous les Gazaouis de tirs de l’armée dans la zone d’interdiction. En fait il semble qu’il s’agisse davantage de déclarer que la zone d’interdiction est interdite d’accès pour Israël.

On ignore si tout cela sera effectivement négocié comme promis. Je tendrais à penser que les restrictions actuelles resteront en vigueur ou largement en vigueur jusqu’à ce qu’il y ait un accord de paix entre Israël et les Palestiniens, accord dont on ne sait pas s’il aura jamais lieu.

Mais alors que le monde entier observait, les dirigeants israéliens ont, sans le vouloir, admis que Gaza n’est pas libre, que ce territoire est encore sous occupation israélienne, que son image de «la plus grande prison à ciel ouvert du monde» s’applique toujours. Et cela devrait neutraliser les quelques milliards de tweets et de mms [la «guerre» de propagande sur les réseaux sociaux] des guerriers de l’information de l’opération Pilier de défense. (Traduction A l’Encontre; publié le 23 novembre sur le site israélien +972)

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